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19/06/2024 | FRANCE | N°23/05431

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jtj proxi fond, 19 juin 2024, 23/05431


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Me Philippe RIGLET


Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Jean-Jacques SALMON

Pôle civil de proximité


PCP JTJ proxi fond

N° RG 23/05431 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2TS2

N° MINUTE :
2 JTJ






JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024

DEMANDEURS
Monsieur [Z] [H], demeurant [Adresse 5] - [Localité 3]

Madame [D] [B] épouse [H], demeurant [Adresse 5] - [Localité 3]

représentés par Me Jean-Ja

cques SALMON, avocat au barreau de CAEN, [Adresse 7] - [Localité 2]

DÉFENDERESSE
S.A.S. PV HOLDING, dont le siège social est sis [Adresse 1] - [Localité 4]
représentée par M...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Me Philippe RIGLET

Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Jean-Jacques SALMON

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi fond

N° RG 23/05431 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2TS2

N° MINUTE :
2 JTJ

JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024

DEMANDEURS
Monsieur [Z] [H], demeurant [Adresse 5] - [Localité 3]

Madame [D] [B] épouse [H], demeurant [Adresse 5] - [Localité 3]

représentés par Me Jean-Jacques SALMON, avocat au barreau de CAEN, [Adresse 7] - [Localité 2]

DÉFENDERESSE
S.A.S. PV HOLDING, dont le siège social est sis [Adresse 1] - [Localité 4]
représentée par Me Philippe RIGLET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0008

S.A.S. PV EXPLOITAITON FRANCE, intervenant volontaire, dont le siège social est sis [Adresse 1] - [Localité 4]
représentée par Me Philippe RIGLET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0008

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente, statuant en juge unique
assistée de Aline CAZEAUX, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 19 mars 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 19 juin 2024 par Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente assistée de Aline CAZEAUX, Greffier
Décision du 19 juin 2024
PCP JTJ proxi fond - N° RG 23/05431 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2TS2

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous signatures privées en date du 14 octobre 2014, Monsieur [Z] [H] et Madame [D] [B] épouse [H] (ci-après les consorts [H]) ont donné à bail à la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE un studio et un parking (lot [Cadastre 6]) sis [Adresse 8] à [Localité 9], moyennant un loyer annuel de 4957 euros HT pour le studio et 585 euros HT pour le parking.

Les consorts [H] ont fait délivrer à la S.A.S. PV HOLDING un premier commandement de payer le 19 octobre 2021 pour un montant de loyers impayés en principal de 7877,03€.

Ils ont fait délivrer un deuxième commandement de payer le 02 janvier 2023 pour un montant de loyers impayés en principal de 5276,38€.

En l’absence de paiement de cette somme, les consorts [H] ont fait assigner la société PV HOLDING (anciennement dénommée PV RESIDENCES ET RESSORTS FRANCE) devant le Tribunal judiciaire de PARIS par acte de commissaire de justice en date du 28 juin 2024, aux fins de la voir condamner au paiement des sommes suivantes :
5396,38 euros avec intérêts de droits sur cette somme à compter du 19 octobre 2021 ;1500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens. 
Appelée à l’audience du 23 novembre 2023, l’affaire a été renvoyée afin de permettre aux parties de se mettre en état.

A l’audience du 19 mars 2024, les consorts [H] représentés par leur conseil ont déposé des conclusions oralement développées. Outre le maintien de leurs demandes initiales, ils sollicitent le donner acte de l’intervention volontaire de la société PV EXPLOITATION France, le débouté de l’exception d’incompétence soulevé par les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION France et le débouté de l’ensemble des demandes de ces dernières.

Au soutien de leurs prétentions, les consorts [H] rappelle avoir assigné les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE devant le Tribunal judiciaire de PARIS et non devant le Tribunal de proximité de PARIS. S’agissant de la créance de loyers impayée, ils soutiennent que la Cour de Cassation a, dans trois décisions publiées le 30 juin 2022 (21-20.127, 21-20.190 et 21-19.889), rappelé l’obligation de régler les loyers dus pendant la crise sanitaire liée à la COVID 19 et ce en dépit de l’impossibilité d’exploiter les locaux loués, l’interdiction effective d’exploitation subie, la perte partielle de la chose louée et l’exception d’inexécution. Ils soulignent, par ailleurs, que cette jurisprudence a été confirmée par deux autres décisions postérieures de la Cour de cassation (Civ 3ème 23 novembre 2022 n°21-21.867 et 22-12.753)

En défense, la société PV HOLDING soulève, in limine litis, l’incompétence de la juridiction de céans, les demandeurs ayant d’après elle saisi la juridiction de proximité en lieu et place du tribunal judiciaire. La société PV HOLDING rappelle également que seule la société PV EXPLOITATION FRANCE est preneuse à bail des locaux dont il est question en l’espèce. La société PV HOLDING et la société PV EXPLOITATION FRANCE sollicitent aussi la constatation de l’intervention volontaire de cette dernière.

La société PV HOLDING et la société PV EXPLOITATION FRANCE demandent, par ailleurs, le constat de l’interruption de l’obligation de règlement des loyers au cours de la période du 15 mars 2020 au 02 juin 2020 et du 1er novembre 2020 au 09 juin 2021. Subsidiairement, elles sollicitent des délais de paiement sur 24 mois. En tout état de cause, la société PV HOLDING et la société PV EXPLOITATION FRANCE demandent le débouté des consorts [H] de leurs demandes et leur condamnation au paiement de la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Au soutien de leurs demandes, les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE font valoir que la situation financière de la société PV HOLDING a été sévèrement affectée en 2020/2021 par les mesures de lutte contre la crise sanitaire, notamment l’interdiction d’accueillir une quelconque clientèle et les interdictions de déplacements. Elles précisent avoir initié une procédure amiable de conciliation en lien avec le tribunal de commerce de Paris avec l’ensemble de leurs partenaires financiers et économiques dont les demandeurs font partie.

Au fond, et à titre principal, les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE se prévalent de la perte partielle de la chose louée (article 1722 du Code civil) et de l’exception d’inexécution (article 1219 du Code civil). Subsidiairement, elles sollicitent des délais de paiement compte tenu de leur situation économique défavorable.

Conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties reprises oralement à l'audience de plaidoirie pour un plus ample exposé des moyens développés à l'appui de leurs prétentions

SUR CE

* Sur l’exception d’incompétence soulevée

Aux termes de l’article 81 du code de procédure civile, lorsque le juge estime que l'affaire relève de la compétence d'une juridiction répressive, administrative, arbitrale ou étrangère, il renvoie seulement les parties à mieux se pourvoir. Dans tous les autres cas, le juge qui se déclare incompétent désigne la juridiction qu'il estime compétente. Cette désignation s'impose aux parties et au juge de renvoi.

Selon l’article L211-3 du code de l’organisation judiciaire, le tribunal judiciaire connaît de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles la compétence n'est pas attribuée, en raison de la nature de la demande, à une autre juridiction.

En vertu de l’ordonnance de roulement du tribunal judiciaire de Paris, le pôle civil de proximité connaît des actions relevant des compétences mentionnées à l’annexe tableau IV-II figurant en annexe de l’article D.212-19-1 du code de l’organisation judiciaire dont notamment : - actions personnelles ou mobilières jusqu'à la valeur de 10 000 euros et demandes indéterminées qui ont pour origine l'exécution d'une obligation dont la valeur n'excède pas 10 000 euros au fond et en référé.
Aux termes de l'article L 213-4-4 du code de l'organisation judiciaire, « Le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d'immeubles à usage d'habitation ou un contrat portant sur l'occupation d'un logement est l'objet, la cause ou l'occasion ainsi que des actions relatives à l'application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement. »

En l’espèce, les consorts [H] ont assigné les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE devant le Tribunal judiciaire de PARIS. Par ailleurs, la juridiction de céans est, en application de l’ordonnance de roulement du tribunal judiciaire de Paris, compétente pour connaître des actions personnelles ou mobilières jusqu'à la valeur de 10 000 euros et demandes indéterminées qui ont pour origine l'exécution d'une obligation dont la valeur n'excède pas 10 000 euros au fond et en référé, relevant de la compétence du Tribunal judicaire.

Par suite, l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE sera rejetée.

* Sur l’intervention volontaire de la société PV EXPLOITATION France

L'article 66 du code de procédure civile dispose que « Constitue une intervention la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires. Lorsque la demande émane du tiers, l'intervention est volontaire ». En vertu de l’article 325 du code de procédure civile « L'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant. ». Aux termes des articles 329 et 330 du code de procédure civile, l'intervention est principale ou accessoire. Elle est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention. L'intervention est accessoire lorsqu'elle appuie les prétentions d'une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.

La société PV EXPLOITATION FRANCE étant la seule preneuse à bail des locaux dont il est question en l’espèce, elle a donc le droit d’agir et a également intérêt à agir.

Il sera, par conséquent, pris acte de l’intervention volontaire de la société PV EXPLOITATION FRANCE.

* Sur la demande en paiement des loyers impayés

Aux termes de l’article 1719 du Code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :
1° De délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant ;
2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;
3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
4° D'assurer également la permanence et la qualité des plantations.

L’article 1728 du même Code prévoit, de même, que le preneur est tenu de deux obligations principales :
1° D'user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ;
2° De payer le prix du bail aux termes convenus.

Il résulte, en outre, de l’article 1722 du Code civil que si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n'est détruite qu'en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l'un et l'autre cas, il n'y a lieu à aucun dédommagement.

Enfin, l’article 1219 du Code civil prévoit qu’une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Néanmoins, par application de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, l'état d'urgence sanitaire a été déclaré sur l'ensemble du territoire national.

En application de l'article 3, I, 2°, du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 et du décret n° 2020-423 du 14 avril 2020 le complétant, jusqu'au 11 mai 2020, tout déplacement de personne hors de son domicile a été interdit à l'exception des déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle et des achats de première nécessité.

Edictée pour limiter la propagation du virus par une restriction des rapports interpersonnels, l'interdiction de recevoir du public, sur la période du 17 mars au 10 mai 2020, prévue par les arrêtés des 14 et 16 mars 2020 du ministre des solidarités et de la santé, ainsi que par les décrets précités, résulte du caractère non indispensable à la vie de la Nation et à l'absence de première nécessité des biens ou des services fournis.

Par suite, cette interdiction a été décidée, selon les catégories d'établissement recevant du public, aux seules fins de garantir la santé publique.

L'effet de cette mesure générale et temporaire, sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être, d'une part, imputable aux bailleurs, de sorte qu'il ne peut leur être reproché un manquement à leur obligation de délivrance, d'autre part, assimilé à la perte de la chose, au sens de l'article 1722 du code civil.

Il en résulte que l'obligation de payer le loyer n'est pas sérieusement contestable en l’espèce.

Les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE seront, par conséquent, condamnées solidairement au paiement de la somme de 5296,38 euros avec intérêts de droit sur cette somme à compter du 19 octobre 2021.

 
*Sur les demandes accessoires

Les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION France, qui succombent, supporteront la charge des dépens.

L’équité et la situation économique justifie d’écarter l’application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

L'exécution provisoire, compatible avec la nature de l'affaire et apparaissant nécessaire compte tenu de l'ancienneté du litige, sera ordonnée en application de l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE l’intervention volontaire de la société PV EXPLOITATION FRANCE,

REJETTE l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE,

CONDAMNE solidairement les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION France au paiement de la somme de 5296,38 euros avec intérêts de droit sur cette somme à compter du 19 octobre 2021, au bénéfice de Monsieur [Z] [H] et Madame [D] [B] épouse [H].

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE solidairement les sociétés PV HOLDING et PV EXPLOITATION FRANCE aux dépens de l’instance ;

REJETTE le surplus des demandes des parties ;

ORDONNE l'exécution provisoire.

LE GREFFIER,LE JUGE,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jtj proxi fond
Numéro d'arrêt : 23/05431
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-19;23.05431 ?
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