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19/06/2024 | FRANCE | N°22/08060

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jtj proxi fond, 19 juin 2024, 22/08060


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Me Isabelle CANET


Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Dominique FONTANA

Pôle civil de proximité


PCP JTJ proxi fond

N° RG 22/08060 - N° Portalis 352J-W-B7G-CYTNI

N° MINUTE :
1 JTJ






JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024


DEMANDERESSE
Madame [Z] [H], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Isabelle CANET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0795


DÉFENDERESSE
S.A. LA

SOCIETE GENERALE, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Dominique FONTANA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0139



COMPOSITION DU TRIBUNAL
Fairou...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Me Isabelle CANET

Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Dominique FONTANA

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi fond

N° RG 22/08060 - N° Portalis 352J-W-B7G-CYTNI

N° MINUTE :
1 JTJ

JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024

DEMANDERESSE
Madame [Z] [H], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Isabelle CANET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0795

DÉFENDERESSE
S.A. LA SOCIETE GENERALE, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Dominique FONTANA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0139

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente, statuant en juge unique
assistée de Aline CAZEAUX, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 19 mars 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 19 juin 2024 par Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente assistée de Aline CAZEAUX, Greffier

Décision du 19 juin 2024
PCP JTJ proxi fond - N° RG 22/08060 - N° Portalis 352J-W-B7G-CYTNI

EXPOSE DU LITIGE

Madame [Z] [H], titulaire d'un compte n°[XXXXXXXXXX03] ouvert dans les livres de la Société Générale, a sollicité l’ouverture d’un livret de développement durable et solidaire le 16 mars 2021 via la messagerie interne.

Le 23 mars 2021, elle a effectué un virement de 7000 euros en faveur de la Banco BPI via son espace internet des particuliers (EIP) sur le site de cette établissement bancaire.

Le 03 avril 2021, Madame [Z] [H] a demandé suivant le même procédé l’ouverture d’un livret d’épargne plus.

Le 06 avril 2021, elle a constaté avoir été victime d’une escroquerie, s’agissant du virement de 7000 euros réalisé en faveur de la Banco BPI. Cette circonstance lui a été confirmée par le service des fraudes du ministère de l’intérieur. Le même jour, elle a sollicité auprès de la Société Générale la mise en œuvre de la procédure de « recall » en vue d’obtenir le remboursement de l’argent viré à la Banco BPI. Elle a, en ce sens, rempli et adressé un formulaire de contestation de virement.

Le 16 avril 2021, la Société Générale a informé Madame [Z] [H] de l’absence de fonds disponible, suite à la mise en œuvre de la procédure de « recall ».

Par acte de commissaire de justice en date du 28 novembre 2022, Madame [Z] [H] a assigné la Société Générale devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d'obtenir, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, sa condamnation à lui payer les sommes suivantes :
- 7.000 euros au titre du remboursement du virement litigieux,
- 500 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice subi consécutif à l’inexécution de ses obligations en tant qu’établissement bancaire,
- 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Appelée à l'audience du 07 mars 2023, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 29 juin 2023 puis à l'audience du 21 novembre et à celle du 19 mars 2024 afin de permettre aux parties de se mettre en état.

A l'audience du 19 mars 2024, Madame [Z] [H], représenté par son conseil, maintient ses demandes. Elle rappelle qu’en application des articles L133-18 et L561-6 du Code monétaire et financier, la banque est tenue d’une obligation de vigilance, et par suite d’alerte, en cas d’opération suspecte. Madame [Z] [H] soutient que la Société Générale a manqué à ces obligations en n’attirant pas son attention à propos du caractère frauduleux du virement qu’elle a réalisé. Elle invoque également un manquement de la banque à son obligation d’information et de conseil, cette dernière ne l’ayant pas tenu informée de l’état d’avancement de la procédure de « recall ».

La Société Générale, représentée par son conseil, conclut au débouté de Madame [Z] [H] de l'ensemble de ses demandes et sollicite sa condamnation au paiement d'une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle rappelle que les demandes formulées par Madame [Z] [H] sont relatives à une opération de paiement autorisée et, qu’en ce sens, les dispositions des articles L133-18 et L561-1 du Code monétaire et financier ne sont pas applicables.

La Société Générale soutient, par ailleurs, que sa responsabilité ne peut être engagée en l’espèce sur le fondement de l’article L561-1 du Code monétaire et financier, l’origine des fonds litigieux n’ayant jamais été suspecte. Elle relève également que sa responsabilité ne peut pas davantage être mise en cause sur le fondement de son obligation de vigilance. La Société Générale rappelle qu’en application des dispositions des articles 1937 du Code civil, L133-3, L133-6, L133-7 et L133-13 du Code monétaire et financier, ainsi qu’en sa qualité de mandataire, elle doit se conformer aux instructions reçues de ses clients et effectuer, notamment, sans retard les virements demandés. Elle évoque également son devoir de non-immixtion et par suite d’absence de pouvoir d’appréciation à propos des opérations demandées par ses clients. La Société Générale en déduit que son devoir de vigilance porte sur l’authenticité des ordres transmis et non sur leur objet. De même, elle en retire qu’elle n’est débitrice d’aucune obligation de conseil ou de mise en garde à l’égard de ses clients. En l’espèce, la Société Générale soutient que le virement opéré était régulier et que le simple caractère inhabituel d’une opération n’implique pas nécessairement qu’elle soit illicite ou frauduleuse. Elle rappelle, en outre, que Madame [Z] [H], qui ne l’a pas tenu informé de son projet de placement, ne conteste pas avoir elle-même réalisé le virement litigieux à partir de son espace informatique particulier, après avoir également elle-même entré les coordonnées du compte destinataire. La Société Générale invoque également l’imprudence de la partie demanderesse, laquelle n’a d’après elle procéder à aucune vérification avant d’effectuer le virement litigieux. S’agissant de la mise en œuvre de la procédure de « recall », la banque soutient l’avoir mis en œuvre avec diligence dés le 09 avril 2021 et avoir reçu un refus de la banque destinataire le 13 avril suivant. Elle rappelle également qu’au terme de cette procédure le retour des fonds ne peut être garanti. Enfin, en ce qui concerne la demande d’indemnisation de Madame [Z] [H], la Société Générale soutient que cette dernière ne justifie pas d’un préjudice indemnisable.

Il sera référé aux écritures des parties déposées à l’audience pour un plus ample exposé de leurs moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

La décision a été mise en délibéré au 19 juin 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande principale en remboursement du virement contesté

Madame [Z] [H] reproche à la Société Générale d’avoir manqué à son obligation de vigilance.

Le devoir de vigilance posé par l'article L.561-6 du code monétaire et financier est relatif à lutte contre le blanchiment de capitaux et ne peut être invoqué par un particulier victime d'agissements frauduleux (Com 21 septembre 2022 n°21-12.335).

La banque est également tenue, sauf anomalie apparente, de ne pas s’immiscer dans les affaires de son client et de ne pas surveiller ou s'opposer aux opérations de son client (Com 13 Avril 2010 – n° 09-13.712).

Aux termes de l'article L.133-6 du code monétaire et financier, une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution, l'article L.133-7 précisant que le consentement est donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement.

En l'espèce, il ressort des débats et des pièces produites la chronologie suivante :
- Madame [Z] [H] a été contacté le 15 mars 2021 par un tiers se faisant passer pour un conseiller, en vue de réaliser un placement sur des livrets européens de la BANCO BPI,
- le 23 mars 2021, elle a effectué un virement de 7000 euros en faveur de la Banco BPI via son espace internet des particuliers (EIP) sur le site de cette établissement bancaire,
- le 06 avril 2021, elle sollicite la mise en œuvre de la procédure de « recall » auprès de la Société Générale via le formulaire de contestation de virement, tout en reconnaissant dans ce formulaire être à l’origine du virement litigieux,
- le 09 avril 2021, la Société Générale met en oeuvre la procédure de « recall »,
- le 13 avril 2021, la Société Générale est informée de l’absence de fonds disponible du le compte destinataire du virement.

Il est donc établi, d'une part, que l’opération a été consentie par Madame [Z] [H], qu’elle a été dûment enregistrées et comptabilisées et qu'elle n'est pas été affectée par une quelconque déficience technique ou autre. D’autre part, il est également constant que Madame [Z] [H] a été imprudente en ne réalisant pas des vérifications suffisantes à propos de son projet de placement financier et en n’en informant pas au préalable sa banque.

Dès lors, aucune faute ne saurait être retenue à l'encontre de la Société Générale, tant au regard de son obligation de vigilance, que de son obligation d’information et de conseil.

Sur la demande d’indemnisation

Madame [Z] [H] ne démontre pas l’existence d’un préjudice quelconque pour lequel elle serait susceptible d’être indemnisée.

Elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

Madame [Z] [H], qui succombe, sera condamnée à supporter les entiers dépens et débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Il apparaît équitable, au vu des circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la Société Générale au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à hauteur de 1000 euros.
Conformément à l'article 514 du code de procédure civile, le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant par mise à disposition au greffe conformément aux articles 450 et 451 du code de procédure civile, par jugement contradictoire et en premier ressort,

DEBOUTE Madame [Z] [H] de l'ensemble de ses demandes ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE Madame [Z] [H] aux dépens ;

CONDAMNE Madame [Z] [H] à payer à la Société Générale la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de droit.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe du Tribunal judiciaire de PARIS à la date précitée.

LA GREFFIERE LA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jtj proxi fond
Numéro d'arrêt : 22/08060
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-19;22.08060 ?
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