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05/06/2024 | FRANCE | N°19/03767

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Ps ctx technique, 05 juin 2024, 19/03767


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées par LRAR aux parties le :
1 Expédition délivrée par LS à Maître PIERREY le :




PS ctx technique

N° RG 19/03767 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO73W

N° MINUTE :


Requête du :


21 Septembre 2018













JUGEMENT
rendu le 05 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [X] [H]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Maître Caroline PIERREY, avocat au barreau de PARIS, substituée par Maî

tre BAILLOD Nathalie



DÉFENDERESSE

MDPH DU [Localité 5] SECTION ADULTES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Non représentée


COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur BEHMOIRAS, Vice-Président
...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées par LRAR aux parties le :
1 Expédition délivrée par LS à Maître PIERREY le :

PS ctx technique

N° RG 19/03767 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO73W

N° MINUTE :

Requête du :

21 Septembre 2018

JUGEMENT
rendu le 05 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [X] [H]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Maître Caroline PIERREY, avocat au barreau de PARIS, substituée par Maître BAILLOD Nathalie

DÉFENDERESSE

MDPH DU [Localité 5] SECTION ADULTES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Non représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur BEHMOIRAS, Vice-Président
Madame BYRON, Assesseur
Monsieur CASTEX, Assesseur

assistés de Paul LUCCIARDI, Greffier

Décision du 05 Juin 2024
PS ctx technique
N° RG 19/03767 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO73W

DÉBATS

A l’audience du 20 Mars 2024
Tenus en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2024.

JUGEMENT

Remis par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire
En premier ressort

FAITS, PROCEDURE, ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par courrier reçu le 25 septembre 2018 au greffe du tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI) de Paris, Madame [X] [P], née le 1er mai 1979, a contesté la décision de la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) du [Localité 5] du 25 juillet 2018, réduisant le volume d’aide humaine attribuée (198 heures au lieu de 517,5 heures par mois) au titre de la Prestation de Compensation Handicap (PCH) suite à sa demande de renouvellement déposée le 11 octobre 2017 et pour une période de 5 ans du 1er juin 2018 au 31 mai 2023.

Le 1er janvier 2019, le dossier a été transféré au Pôle social du tribunal de grande instance de Paris en raison de la fusion du tribunal de l’incapacité avec les juridictions de droit commun.

Le 1er janvier 2020, l’instance s’est poursuivie devant le tribunal judiciaire de Paris.

Par ordonnance rendue le 8 novembre 2022, le président de la formation de jugement en sa qualité de juge de la mise en état a désigné le docteur [T] afin de pratiquer un examen médical sur pièces de Madame [X] [P], avec pour mission :

- décrire l’état de son handicap à la date de sa demande soit le 11 octobre 2017, de préciser la fourchette du taux d’incapacité (inférieur à 50%, compris entre 50 et 79%, supérieur ou égal à 80%) estimé par référence au guide-barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées,
- dire s’il existe une restriction substantielle et durable à l’accès à l’emploi,
- dire si sa capacité de travail était, compte tenu de son handicap, à la date de la demande, inférieur à 5%,
- dire si la station debout lui était reconnue pénible,
- dire si à la date de sa demande, elle présentait une difficulté absolue pour la réalisation d’au moins une activité, ou une difficulté grave pour la réalisation d’au moins deux activités telles que définies dans le référentiel de l’annexe 2-5 du code de l’action sociale et des familles (art D. 245-4) définitives ou d’une durée prévisible d’au moins un an.
 
Le Docteur [T] a rendu son rapport après examen clinique de la requérante réalisé le 22 mars 2023 et a conclu que Madame [X] [P] ayant perdu l’usage de la motricité, présente une difficulté absolue pour la réalisation d’au moins deux activités telles que définies dans le référentiel de l’annexe 2-5 du code de l’action sociale et des familles (art D. 245-4) définitives ou d’une durée prévisible d’au moins un an et qu’elle était donc éligible à la Prestation Compensation du Handicap volet aide humaine à hauteur de 17 heures par jour soit 510 heures par mois minimum.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 1er septembre 2023.

L’affaire a été mise en délibéré au 22 novembre 2023.

Par mention au dossier, le tribunal a ordonné une réouverture des débats à la suite de la note en délibéré adressée le 11 octobre 2023 par le conseil de Madame [P].

Les parties ont été convoquées à l’audience du 20 mars 2024.

Représentée par son conseil, selon ses conclusions auxquelles il est reporté pour l’exposé complet des moyens de droit et en fait conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Madame [X] [P] demande au tribunal de faire droit à son recours à compter de la date de sa demande en se fondant sur les conclusions favorables du rapport d’expertise à hauteur de 518,50 heures par mois en aide direct ou en remboursement des frais d’aidant familial selon une répartition qu’elle explicite dans ses écritures.

Elle souligne que sa perte d’autonomie est caractérisée et décrite par l’expert sans qu’elle soit véritablement contestée par la MDPH du [Localité 5] qui ne produit aucun élément contraire.

Elle sollicite l'octroi de dommages-intérêts à hauteur de la somme de 51000 euros en faisant valoir une exaspération au constat du refus par la MDPH dont l’analyse a été contredite par l’expert désigné par le tribunal.

Elle explique que son préjudice est caractérisé par le fait qu’elle a dû assumer des frais importants d’aide afin de compenser la baisse du volume d’heures attribuées.

Elle forme également une demande en paiement de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La [Adresse 3] (MDPH) du [Localité 5], régulièrement avisée, n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.

L’affaire a été mise en délibéré au 5 juin 2024.

MOTIFS

Sur la demande de PCH

Aux termes de l’article D. 245-4 du code de l’action sociale et des familles, les prestations de compensation du handicap (PCH) sont ouvertes aux personnes qui présentent une difficulté absolue pour la réalisation d'une activité ou une difficulté grave pour la réalisation d'au moins deux activités telles que définies dans le référentiel de l’annexe 2-5 de code de l’action sociale et des familles. Les difficultés dans la réalisation de cette ou de ces activités doivent être définitives, ou d'une durée prévisible d'au moins un an.

Aux termes de l’article D. 245-33 du code de l’action sociale et des familles, dans sa version applicable au litige, la PCH volet aide humaine est attribuée pour une durée déterminée, inférieure ou égale à dix ans.

La PCH s’adresse aux personnes qui souffrent d’une, voire plusieurs restrictions qui limitent de manière importante leur autonomie dans la vie de tous les jours. Le degré de gravité exigé est posé à l’article L. 245-4 du code de l’action sociale et des familles. Il s’agit soit d’une difficulté absolue pour la réalisation d’une activité, c’est-à-dire la situation d’une personne qui ne peut réaliser elle-même une activité donnée, soit d’une difficulté grave pour la réalisation d’au moins deux activités, c’est-à-dire la situation d’une personne qui effectue difficilement et de façon altérée une activité donnée.

Ces difficultés doivent être définitives ou d'une durée prévisible d'au moins un an.

Les activités visées sont répertoriées dans un référentiel à l’annexe 2-5 du code de l’action sociale et des familles et relèvent des domaines suivants :

la mobilité, notamment se mettre debout, marcher, avoir la préhension de la main dominante, non dominante, avoir des activités de motricité fine.l’entretien personnel, notamment se laver, s’habiller, assurer l’élimination, utiliser les toilettes, prendre ses repas.la communication, notamment parler, entendre, comprendre.les tâches et exigences générales et les relations avec autrui, notamment s’orienter dans le temps, l’espace, maîtriser son comportement dans ses relations avec les autres.
L’annexe 2-5 du code de l’action sociale et des familles identifie cinq niveaux de difficultés :
0.Aucune difficulté : La personne réalise l'activité sans aucun problème et sans aucune aide, c'est-à-dire spontanément, totalement, correctement et habituellement.
1. Difficulté légère (un peu, faible) : La difficulté n'a pas d'impact sur la réalisation de l'activité.
2. Difficulté modérée (moyen, plutôt) : L'activité est réalisée avec difficulté mais avec un résultat final normal. Elle peut par exemple être réalisée plus lentement ou en nécessitant des stratégies et des conditions particulières.
3. Difficulté grave (élevé, extrême) : L'activité est réalisée difficilement et de façon altérée par rapport à l'activité habituellement réalisée.
4. Difficulté absolue (totale) : L'activité ne peut pas du tout être réalisée sans aide, y compris la stimulation, par la personne elle-même. Chacune des composantes de l'activité ne peut pas du tout être réalisées.

La détermination du niveau de difficultés se fait en référence à la réalisation d’activités par une personne du même âge qui n’a pas de problème de santé.

Pour chaque activité, le niveau de difficulté s'évalue en interrogeant quatre adverbes, pour évaluer la manière dont la personne est en capacité de réaliser l'activité : spontanément (sans intervention extérieure ni stimulation), habituellement (de façon presque constante, généralement), totalement (entièrement, tout à fait), correctement (de façon correcte, exacte et convenable).

La PCH couvre 5 catégories de charges, définit à l’article L. 245-3 du code de l’action sociale et des familles :
les charges liées à un besoin d'aides humaines ; les charges liées à un besoin d'aides techniques ;les charges liées à l'aménagement du logement et du véhicule de la personne handicapée, ainsi qu'à d'éventuels surcoûts résultant de son transport ; les charges spécifiques ou exceptionnelles, comme celles relatives à l'acquisition ou l'entretien de produits liés au handicap ; les charges liées à l'attribution et à l'entretien des aides animalières.
Pour déterminer de manière personnalisée les besoins de compensation, il convient de prendre en compte les facteurs qui limitent l'activité ou la participation, les facteurs qui facilitent l'activité ou la participation et le projet de vie exprimé par la personne.

Le rapport d’expertise décrit précisément la pathologie dont souffre la requérante et son impact sur son autonomie dans la vie quotidienne.

L’expert précise qu’à la date de sa demande de compensation, la requérante ayant perdu l’usage de la motricité et présentait pour une durée prévisible de plus d’un an, au moins une difficulté absolue dans l’accomplissement des actes de la vie quotidienne.

En conséquence, compte tenu des conclusions motivées et circonstanciées de l’expert judiciaire qui doivent être retenues en ce qu’elles sont acceptées par la requérante et non véritablement contestées par la MDPH du [Localité 5], il y a lieu de constater qu’à la date de sa demande de compensation du handicap le 11 octobre 2017, Madame [X] [P] présente bien une difficulté absolue ( s’agissant de la motricité) pour la réalisation d’au moins une activité telle que définie dans le référentiel de l’annexe 2-5 du code de l’action sociale et des familles (art D 245-4), définitives, ou d’une durée prévisible d’au moins un an, en sorte qu’il convient de lui attribuer le bénéfice d’une Prestation Compensation du Handicap, volet aide humaine, à compter du 1er juin 2018 à hauteur de 518,5 heures par mois et pour une durée de cinq ans, ce volume horaire étant compatible avec les conclusions de l'expert.

Le tribunal fait observer qu’il n’est saisi dans le cadre de cette instance que de la contestation contre la décision de la CDAPH du [Localité 5] du 25 juillet 2018 suite à un recours gracieux contre la décision du 14 mars 2018 suite à sa demande du 11 octobre 2017 et donc sur la période du 1er juin 2018 au 31 mai 2023.

Par ailleurs, les pièces produites par la requérante, et en particulier sa pièce numéro 10, convention logement contre services, ne permettent pas au tribunal de statuer plus précisément sur sa demande de répartition du volume horaire au titre de l’aidant familial qui sera rejetée, étant rappelé par ailleurs que le tribunal ne peut tenir compte que de justificatifs antérieurs à la demande

Il y a donc lieu de :

-Annuler la décision de la MDPH du [Localité 5] du 25 juillet 2018 refusant sa demande de Prestation de Compensation du Handicap (PCH),

-Déclarer qu’à la date de sa demande, elle présentait pour une durée prévisible de plus d’un an, une difficulté absoluedans l’accomplissement des actes de la vie quotidienne : la motricité.

-et de constater qu’elle pouvait donc prétendre à ce titre, à la Prestation de Compensation du Handicap (PCH) volet aide humaine pour une période de 5 ans la période du 1er juin 2018 au 31 mai 2023 à hauteur de 518,50 heures par mois.

Sur les autres demandes
Madame [X] [P] sollicite l'octroi de dommages-intérêts faisant valoir une exaspération au constat du refus par la CDAPH du [Localité 5] mais ne démontre toutefois pas la spécificité des actes d'obstruction opposés par la MDPH à son encontre.
Aussi, la divergence d'interprétation opposant la MDPH à l'intéressée, qui s’explique par une divergence entre l’analyse de l’équipe pluridisciplinaire de la MDPH sur la base des pièces produites lors de la demande et celle de l’expert désigné par le tribunal, ne saurait constituer une faute engageant la responsabilité de cet organisme en application de l'article 1240 du Code civil, alors qu'elle porte sur une situation qui pouvait donner lieu à contestation.
Dès lors, la résistance de la MDPH du [Localité 5] ne peut être qualifiée d'abusive.
La demande de dommages et intérêts sera donc rejetée

Par ailleurs, il n’est pas inéquitable de condamner la MDPH du [Localité 5] au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Et de mettre les dépens éventuels à la charge de la MDPH sauf les frais d’expertise qui resteront à la charge de la CPAM de [Localité 4].

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire, susceptible d’appel, par mise à disposition au greffe,

-Annule la décision de la MDPH du [Localité 5] du 25 juillet 2018,

- Constate qu’à la date de sa demande, sa situation de handicap justifiait un taux d’incapacité supérieur à 80% au regard du guide barème en vigueur (annexe 2-4 du Code de l’action sociale et des familles) et qu’elle pouvait donc prétendre à ce titre à la Prestation de Compensation du Handicap (PCH) volet aide humaine, en application des articles L 245-1, L. 245-3 et D. 245-5 du code de l'action sociale et des familles et sous réserve de la réunion des conditions administratives, pour une période de 5 ans la période du 1er juin 2018 au 31 mai 2023 à hauteur de 518,50 heures par mois.

-Rejette toutes autres demandes,
-Condamne la MDPH du [Localité 5] au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
-Met les dépens à la charge de la MDPH du [Localité 5], sauf les frais d’expertise qui resteront à la charge de la CPAM de [Localité 4].

Fait et jugé à Paris le 05 Juin 2024

Le GreffierLe Président

N° RG 19/03767 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO73W

EXPÉDITION exécutoire dans l’affaire :

Demandeur : Mme [X] [H]

Défendeur : MDPH DU [Localité 5] SECTION ADULTES

EN CONSÉQUENCE, LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE mande et ordonne :

A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite décision à exécution,
Aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaire d`y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu`ils en seront légalement requis.

En foi de quoi la présente a été signée et délivrée par nous, Directeur de greffe soussigné au greffe du Tribunal judiciaire de Paris.

P/Le Directeur de Greffe

8ème page et dernière


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Ps ctx technique
Numéro d'arrêt : 19/03767
Date de la décision : 05/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-05;19.03767 ?
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