TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:
■
9ème chambre
2ème section
N° RG 22/09086 -
N° Portalis 352J-W-B7G-CXAOS
N° MINUTE : 5
Assignation du :
13 Juin 2022
JUGEMENT
rendu le 31 Mai 2024
DEMANDERESSE
S.A.R.L. LARGIER GIRAUD IMMOBILIER, représentée par son gérant en exercice, M. [K] [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Antoine FERRANDINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2121
DÉFENDEUR
M. DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D’ILE DE FRANCE ET DE [Localité 5]
Pôle contrôle fiscal et affaires juridiques - Pôle juridictionnel judiciaire
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par son Inspecteur
Décision du 31 Mai 2024
9ème chambre 2ème section
N° RG 22/09086 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXAOS
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Gilles MALFRE, Premier Vice-Président adjoint
Augustin BOUJEKA, Vice-Président
Alexandre PARASTATIDIS, Juge
assistés de Alise CONDAMINE-DUCREUX, Greffière
DÉBATS
À l’audience du 08 Mars 2024 tenue en audience publique devant Monsieur BOUJEKA, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux conseils des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
___________________
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte authentique du 28 janvier 2005, la SARL Largier Giraud Immobilier (ci-après « la société Largier ») a acquis un local commercial situé à [Localité 6] pour un montant de 135 000 euros.
Cette acquisition a été effectuée sous le régime des marchands de biens au sens de l'article 257-6 du code général des impôts, ce qui a donné lieu, au profit de la société Largier, à une exonération de droits d'enregistrement en application de l'article 1115 du code général des impôts.
Suivant proposition de rectification du 23 décembre 2014, l'administration fiscale a indiqué à la société Largier vouloir remettre en cause cette exonération dans la mesure où la revente du bien immobilier n’était pas intervenue dans les 4 ans suivant son acquisition.
Par observations du contribuable transmises par courrier le 5 mars 2015, la société Largier a exprimé son désaccord sur la teneur de cette proposition de rectification tant sur la forme que sur le fond, l’administration maintenant partiellement sa position par réponse du 27 avril 2015.
Les droits rappelés ont été mis en recouvrement par avis du 18 janvier 2016, pour un montant total de 8 655 euros, soit des droits au montant de 5 772 euros et des pénalités de retard de 2 883 euros.
La réclamation contentieuse formée par la SARL Largier le 23 décembre 2020 ayant fait l’objet d’une décision implicite de rejet de l’administration, celle-ci a fait l’objet d’une assignation par acte signifié le 13 juin 2022 par la société Largier qui, aux termes de ses dernières écritures signifiées le 3 avril 2023, demande à ce tribunal de :
- prononcer la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge par l’avis de mise en recouvrement du 18 janvier 2016 ;
- condamner l'administration au paiement de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner l'administration aux dépens.
Par dernières écritures signifiées le 1er juin 2023, l’administration demande à ce tribunal de :
- débouter la SARL Largier Giraud Immobilier de toutes ses demandes ;
- confirmer les rappels qu’elle a effectués ;
- confirmer la régularité de la procédure de contrôle qu’elle a suivie ;
- dire qu'il n'y a pas lieu au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dire qu'en toute hypothèse les frais de constitution d'avocat resteront à la charge de la requérante ;
- la condamner en outre à tous les dépens de l'instance.
La clôture a été prononcée le 22 décembre 2023, l’affaire étant appelée à l’audience du 8 mars 2024 et mise en délibéré au 31 mai 2024.
Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur les demandes principales
La SARL Largier soutient tout d’abord que la motivation de la proposition de rectification est insuffisante au sens de l’article L.57 du livre des procédures fiscales. Elle expose qu’au cas particulier, il est constant et d’ailleurs non contesté par l’administration que cette proposition de rectification vise les droits d’enregistrement et non la taxe de publicité foncière, les seules impositions mentionnées au titre des conséquences financières étant des droits d’enregistrement, devant être observé que le service vérificateur a entretenu la confusion quant à la désignation de l’impôt rectifié au stade de la réponse aux observations du contribuable en date du 27 avril 2015 en évoquant de nouveau des droits d’enregistrement, cette confusion rendant la motivation insuffisante, de telle sorte que la décharge de l’imposition doit être prononcée.
La SARL Largier conteste ensuite le bien-fondé de l’imposition, en indiquant que les droits d’enregistrement étant des droits d’acte et les énonciations de l’enregistrement faisant généralement foi jusqu’à preuve contraire dans les rapports du redevable avec l’administration et l’acte ayant été revêtu, lors de son enregistrement, d’une mention apposée par les services de l’enregistrement, qui valait quittance du paiement des droits de mutation pour 18.129 euros, il convient que la décharge des impositions soit prononcée.
En réplique, l’administration fait valoir, à propos de l’insuffisance de motivation dont se prévaut la société requérante, que l’article R.256 du livre des procédures fiscales prévoit que l’avis de mise en recouvrement indique, pour chaque impôt ou taxe, le montant global des droits, des pénalités ou intérêts de retard faisant l’objet de l’avis, exigence au respect de laquelle veille la jurisprudence. Elle rappelle qu’une lecture combinée des articles 635 du code général des impôts et 28 du décret n°55-22 du 4 janvier 1955 modifié, révèle que sont obligatoirement soumis à la formalité fusionnée les actes portant mutation de droits réels immobiliers, ces actes donnant lieu au paiement de la taxe de publicité foncière. Elle précise que l’acte à l’origine de l’imposition litigieuse porte sur une vente immobilière éligible à ce dispositif, donnant dès lors lieu au paiement de la taxe de publicité foncière, laquelle est visée par l’avis de mise en recouvrement, ainsi que le reconnaît la société requérante elle-même, de telle sorte que l’insuffisance de motivation alléguée n’est pas fondée. Elle ajoute que dans les conséquences financières de la proposition de rectification contestée, il est fait état de droits d’enregistrement, avec détail des impositions rappelées, incluant la taxe départementale, aucune confusion n’étant alors possible. De même, selon l’administration, la société contribuable vise dans sa réponse à la proposition de rectification, expressément la taxe de publicité foncière, démontrant par là même qu’elle avait connaissance de l’imposition sur laquelle portait le redressement.
Quant au bien-fondé de l’imposition, l’administration estime que l’argumentation adverse ne peut davantage prospérer. À cet effet, elle souligne que l’acte authentique de vente précise que la société Largier acquiert le bien en qualité de marchand de biens et s’engage à le revendre dans un délai de 4 ans à compter de la date de l’acte, cette stipulation étant suivie d’un tableau exposant les droits réglés, d’un montant total de 830 euros. Elle souligne que sur la foi de l’acte authentique prévu à l’article 1371 du code civil, les droits réglés au titre de la vente en cause ont trait aux droits de publicité foncière au taux réduit ainsi que des droits de recouvrement, de telle sorte que la contribuable a supporté, non pas des droits de mutation de 18.129 euros comme elle le prétend, mais des droits au montant de 830 euros. La requérante doit dès lors être déboutée de sa demande.
Sur ce,
S’agissant de la motivation de la proposition de rectification du 23 décembre 2014, il sera relevé qu’en page 2 de cette proposition figure l’intitulé « Droits d’enregistrement » précédant trois points portant respectivement sur « Les faits », les « Motifs de droits » et les « Conséquences ».
Dans ce dernier point, le service expose, en page 3 de la même proposition et à titre liminaire, que la société Largier n’a pas respecté l’obligation de revente dans le délai de 4 ans suivant la date de l’acquisition du bien immobilier en cause, ce qui justifie le rappel des « droits, taxes et impôts dont la perception a été différée ».
Dans la foulée, le service a détaillé le montant des rappels des droits litigieux dans un tableau faisant état de la taxe départementale due pour un montant de 5.130 euros, un droit de recouvrement de 122 euros et une taxe communale de 1.620 euros, auxquels s’ajoutent des pénalités de retard de 3.433 euros, soit un total de droits rappelés de 10.305 euros.
En outre, ainsi que l’affirme l’administration, il ressort des observations du contribuable formulées par la société Largier le 5 mars 2015 que celle-ci a parfaitement compris la teneur des droits rappelés, en particulier ceux afférents à la taxe de publicité foncière puisque cette société nomme explicitement cette taxe dans l’argumentation qu’elle articule à l’appui de la contestation des droits rappelés.
Il résulte de l’ensemble des éléments qui précèdent qu’aucune ambiguïté ne pouvait être décelée dans la teneur des taxes et impositions soumises à rappel dans la proposition de rectification du 23 décembre 2022, le grief de l’insuffisance de motivation, infondé, devant être dès lors rejeté.
Concernant le bien-fondé du rappel des droits, il sera relevé qu’en page 10 de l’acte authentique d’acquisition du bien immobilier en cause, en date du 28 janvier 2005, il est précisé que la société Largier acquiert l’immeuble en qualité de marchand de biens, sous conditions de revente dans les 4 années qui suivent, en contrepartie de quoi elle n’acquitte que des droits de mutation à titre onéreux réduits à 830 euros, soit 810 euros de droit d’enregistrement et 20 de droit de recouvrement.
La société Largier ne conteste pas ce point, pas davantage qu’elle ne démontre avoir acquitté des droits de mutation d’un montant supérieur.
Par suite, n’apportant pas la preuve qu’elle a revendu dans les 4 années suivant son acquisition le bien immobilier acheté en qualité de marchand de biens le 28 janvier 2005, la société Largier est éligible au rappel des droits dont elle échoue à quereller le bien-fondé, de telle sorte que sa demande doit être rejetée.
2. Sur les demandes annexes
Succombant, la SARL Largier Giraud Immobilier sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
DÉBOUTE la SARL Largier Giraud Immobilier de l’ensemble de ses demandes et la condamne aux dépens.
Fait et jugé à Paris le 31 Mai 2024
La Greffière Le Président