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31/05/2024 | FRANCE | N°20/11692

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 3ème chambre 2ème section, 31 mai 2024, 20/11692


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS



3ème chambre
2ème section


N° RG 20/11692
N° Portalis 352J-W-B7E-CTIB2

N° MINUTE :


Assignation du :
19 Octobre 2020





JUGEMENT
rendu le 31 Mai 2024
DEMANDEURS

S.A.R.L. ONCE UPON A TEAM
[Adresse 2]
[Localité 4]

Monsieur [G] [K]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentés par Maître Xavier BACQUET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1529


DÉFENDEURS

Monsieur [Z] [T]
Chez [G] [Y],
[Adresse 1]
[Localité 5] >
Monsieur [B] [F]
[Adresse 3]
[Localité 6]

S.A.S. BIRDY PROD
[Adresse 3]
[Localité 6]

représentés par Maître Roland LIENHARDT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0974


Copies délivré...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre
2ème section


N° RG 20/11692
N° Portalis 352J-W-B7E-CTIB2

N° MINUTE :

Assignation du :
19 Octobre 2020

JUGEMENT
rendu le 31 Mai 2024
DEMANDEURS

S.A.R.L. ONCE UPON A TEAM
[Adresse 2]
[Localité 4]

Monsieur [G] [K]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentés par Maître Xavier BACQUET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1529

DÉFENDEURS

Monsieur [Z] [T]
Chez [G] [Y],
[Adresse 1]
[Localité 5]

Monsieur [B] [F]
[Adresse 3]
[Localité 6]

S.A.S. BIRDY PROD
[Adresse 3]
[Localité 6]

représentés par Maître Roland LIENHARDT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0974

Copies délivrées le :
- Maître BACQUET #E1529
- Maître LIENHARDT #E974

Décision du 31 Mai 2024
3ème chambre 2ème section
N° RG 20/11692 - N° Portalis 352J-W-B7E-CTIB2

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Irène BENAC, Vice-présidente
Madame Véra ZEDERMAN, Vice-présidente,
Monsieu Arthur COURILLON-HAVY, Juge

assisté de Monsieur Quentin CURABET, Greffier

DEBATS

A l’audience du 22 Mars 2024 tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à dispposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [G] [O] est associé unique et gérant de l’EURL Once upon a team qui est une société de production.
M. [Z] [T] est auteur, metteur en scène et artiste interprète de la pièce intitulée “Denise Jardinière vous invite chez elle”, créée en 2012. M. [B] [F] est régisseur et chargé de production.
La société Once upon a team, M. [O], M. [T] et M. [F] ont collaboré pour la représentation de la pièce Denise Jardinière vous invite chez elle de juillet 2017 à septembre 2019 sans formaliser leurs relations. A l’issue du festival d’[Localité 7] de l’été 2019, un différend s’est déclaré entre les personnes physiques et la collaboration a cessé.
Le 12 mars 2020, la société Once upon a team a déposé la marque française Denise jardinière à l’INPI (n° 20 4 632 390) pour de nombreux services de la classe 41.
Le 15 juillet 2020 MM. [T] et [F] ont créé la SAS Birdy prod pour la production de spectacles.
Le 28 juillet 2020, M. [T] a fait assigner la société Once upon a team et M. [K] devant le conseil de prud’hommes de Paris en reconnaissance de sa qualité de salarié au sens des articles L. 7121-3 et 4 du code du travail durant la période de collaboration et paiement de diverses indemnités. M. [F] a également saisi le conseil de prud’hommes aux mêmes fins le 2 septembre 2020.

Par acte du 19 octobre 2020, la société Once upon a team et M. [K] ont fait assigner M. [T], M. [B] [F] et la société Birdy prod devant le présent tribunal en paiement de dépenses de coproduction pour la période de 2013 à septembre 2019 et part des bénéfices sur recettes de la pièce Denise Jardinière vous invite chez elle.
Le juge de la mise en état est intervenu à trois reprises : le 26 novembre 2021, il a rejeté une demande d’interdiction d’utiliser la marque Denise Jardinière et de provision sur préjudice formée par les défendeurs et une demande d’interdiction d’utiliser leurs productions formée par les demandeurs ; le 15 avril 2022, il a fait injonction aux parties de rencontrer un médiateur pour information sur l’objet et le déroulement d’une médiation ; le 30 août 2022, il a rejeté des exceptions de litispendance et d’incompétence au profit du conseil des prud’hommes et la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes antérieures au 19 octobre 2015 soulevées par les défendeurs.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 11 janvier 2023, M. [O] et l’EURL Once upon a team demandent au tribunal de :- condamner in solidum les défendeurs à leur payer la somme de 11.933, 49 euros au titre des dépenses de coproduction pour la période 2013 à septembre 2019 et 50 % des bénéfices sur recettes de la pièce Denise Jardinière vous invite chez elle ;
- condamner M. [T] à payer à la société Once upon a team la somme de 50.736 euros TTC au titre de la captation de son spectacle au théâtre Bobino,
- condamner les défendeurs aux dépens et à leur payer à chacun la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ils soutiennent que :- ils ont financé la production de la pièce Denise Jardinière vous invite chez elle à hauteur de 23.866,98 euros de 2017 à 2019 et ont réalisé des teasers et des captations de la pièce ;
- la rupture brutale de la relation par les défendeurs leur a causé un préjudice en les privant du retour sur ces investissements, préjudice qu’ils estiment à la moitié des dépenses engagées outre un préjudice moral qu’ils n’évaluent pas ;
- en tant que coproducteur de la pièce, M. [O] a un droit de suite le légitimant à demander 50 % des “bénéfices sur recettes” de la pièce ;
- la captation de la pièce au théâtre Bobino a été faite avec le consentement de M. [T] qui l’utilise à des fins personnelles.
A l’appui de leurs demandes, les demandeurs ne citent aucun texte légal, ni stipulation contractuelle et le dispositif de leurs conclusions vise les articles 1103 et suivants, 1366 et 2224 du code civil et 789 du code de procédure civile. Ils ne concluent pas sur les demandes reconventionnelles.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 19 avril 2023, M. [T], M. [B] [F] et la société Birdy prod demandent au tribunal de :- débouter les demandeurs de leurs demandes,
- ordonner le transfert à M. [T] de la propriété de la marque Denise Jardinière et condamner solidairement les demandeurs à lui payer la somme de 40.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du dépôt frauduleux de cette marque,
- interdire aux demandeurs d’exploiter les œuvres audiovisuelles et graphiques dérivées de la pièce Denise Jardinière vous invite chez elle sous astreinte,
- condamner solidairement les demandeurs à payer à M. [T] la somme de 100.000 euros au titre de la réalisation et de l’exploitation non autorisée d’œuvres audiovisuelles et d’œuvres graphiques dérivées du spectacle Denise Jardinière vous invite chez elle,
- condamner la société Once upon a team à payer à M. [T] la somme de 5.000 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice causé par sa tentative d’escroquerie à la fausse facture,
- condamner solidairement les demandeurs à leur payer à chacun une somme de 3.000 euros au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile,
- ordonner la publication du jugement,
- condamner solidairement les demandeurs aux dépens, incluant les taxes de l’Inpi pour le transfert de la marque et son inscription sur les registres de l’Inpi, et à leur payer à chacun la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il font valoir que :- la société Birdy prod n’ayant été créée que le 15 juillet 2020, elle ne peut pas être redevable du remboursement de frais engagés pour la période de 2013 à 2019 qui, en outre, comprend des salaires versés ce qui est interdit par le code du travail ;
- il n’y a jamais eu de coproduction entre les parties, la société Once upon a team ayant perçu l’intégralité des recettes et sa relation avec MM. [T] et [F] étant un contrat de travail comme l’a définitivement jugé le conseil de prud’hommes pour M. [T] ;
- les demandeurs n’ont aucun titre pour bénéficier d’un quelconque droit de suite ni n’explicitent la notion de “bénéfices sur recettes” qu’ils revendiquent ;
- le montant de 50.736 euros demandé correspond à une facture émise le 9 janvier 2023 par la société Once upon a team pour une captation réalisée en juin 2017, de sorte que la demande est prescrite application des dispositions de l’article L.218-2 du code de la consommation ou L. 110-4 du code de commerce et, en toute hypothèse, il n’existe aucune créance possible à ce titre aucun droit d’auteur ni d’artiste interprète n’ayant été cédé ;
- cette facturation abusive suivie d’une demande en justice constitue une tentative d’escroquerie à l’origine d’un préjudice dont M. [T] demande réparation ;
- M. [T] a créé le personnage de Denise Jardinière en 2012, ce que savait le déposant de la marque lorsqu’il a déposé ce nom à titre de marque, le dépôt ayant été effectué après la rupture des relations de travail, dans le seul but d’empêcher M. [T] d’utiliser le titre, et la Cour de cassation a jugé un tel dépôt frauduleux dans un cas similaire (Com., 11 janvier 2017, pourvoi n° 15-15.750, publié) ;
- ce dépôt frauduleux a empêché M. [T] de continuer à exploiter son spectacle et son personnage depuis mars 2020, ce qui lui cause un préjudice dont il demande réparation ;
- la captation de la pièce au théâtre Bobino constitue une contrefaçon des droits d’auteur et d’artiste interprète de M. [T] qui n’a jamais autorisé M. [K] et sa société Once upon a team à procéder à la fixation de son œuvre et de ses interprétations, M. [F] ne les a pas plus autorisés à utiliser son image sur des documents publicitaires, de sorte qu’ils sont contrefacteurs et n’ont aucun droit sur les œuvres contrefaites ;
- les demandeurs ne leur ont jamais versé la moindre rémunération au titre des captations, fixations, adaptations, reproductions et communications au public, notamment dans un cadre publicitaire, alors qu’ils indiquent eux-mêmes en avoir réalisé une centaine ;
- l’action est abusive comme exercée en rétorsion de l’action intentée par eux devant le conseil de prud’hommes sur des fondements fantaisistes et à l’aide de pièces constituées pour les besoins de la cause, le tout de mauvaise foi.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 2 juin 2023.

MOTIVATION

I . Sur les demandes principales

1. Sur la demande de remboursement des dépenses de production exposées de 2017 à 2019

Les demandeurs ne précisent pas le fondement de leur demande mais qualifient les frais dont ils réclament le remboursement aux défendeurs et qu’ils qualifient de “dépenses de coproduction”.
Le conseil des prud’hommes saisi par M. [T] a rejeté les moyens des demandeurs sur l’existence d’une coproduction entre eux et M. [T].Les demandeurs ne développent pas cet argument à l’appui de leur demande ; ils n’invoquent pas de disposition contractuelle qui n’aurait pas été respectée mais seulement la faute consistant dans la rupture des relations contractuelles avant le retour sur investissement à leur profit des frais exposés.

M. [T] et les demandeurs n’avaient pas formalisé leur collaboration par un écrit mais il n’est pas contesté (et il a été jugé définitivement par le conseil de prud’hommes) que la société Once upon a team a perçu l’intégralité des recettes des 120 représentations qui ont eu lieu de juillet 2017 à septembre 2019 sans partage de bénéfice ni contribution d’un tiers aux dépenses et elle se qualifie elle-même de productrice du spectacle.
En toute hypothèse, les demandeurs ne développent pas la faute qu’ils invoquent. Il n’est pas démontré, ni même allégué, que la collaboration des parties devait avoir une durée minimale pour permettre le retour sur investissement prétendument manqué, de sorte que le grief de la rupture brutale des relations n’est pas établi. Au contraire, le conseil de prud’hommes a jugé que la rupture était justifiée par des manquements graves de l’employeur, celui-ci n’ayant servi aucune rémunération à M. [T] pendant deux ans.
La demande de remboursement est donc rejetée comme mal fondée.
2. Sur la demande de paiement des recettes sur la pièce Denise Jardinière vous invite chez elle

Le droit de suite - de participation au produit de toute vente d’une œuvre après la première cession opérée par l’auteur ou par ses ayants droit - prévu à l’article L.122-8 du code de la propriété intellectuelle est une spécificité des arts graphiques et plastiques et ne bénéficie pas au producteur ou à l’entrepreneur de spectacle.
Il n’est donc pas susceptible d’application au cas présent et la société Once upon a team ne fait valoir aucun fondement à son droit. Or, le fait d’avoir produit le spectacle pendant deux ans ne lui ouvre droit à aucun droit sur les recettes ultérieures de cette exploitation.
Il y a donc lieu de rejeter la demande à ce titre.
3. Sur la demande d’indemnisation de l’usage de la captation du spectacle au théâtre Bobino

L’article L.131-2 du code de la propriété intellectuelle prévoit que “Les contrats de représentation, d’édition et de production audiovisuelle définis au présent titre doivent être constatés par écrit.”et l’article L.212-3 du même code que “Sont soumises à l’autorisation écrite de l’artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l’image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l’image”.
Une captation du spectacle Denise Jardinière vous invite chez elle a eu lieu en juillet et août 2017 et le film a été achevé en octobre 2017 d’après les pièces n°32 à 35 des demandeurs.
La société Once upon a team en a facturé à M. [T], le 6 janvier 2023, les coûts de réalisation et la cession des droits de représentation de celle-ci à des fins non commerciales et par extraits de 3 minutes maximum pendant cinq ans.
Il résulte des pièces versées aux débats que M. [T], auteur et interprète de la pièce, a expressément consenti à la captation du spectacle au théâtre Bobino à des fins de promotion du spectacle mais aucun contrat n’est venu préciser les modalités de cession des droits de reproduction.
Il n’est ni établi, ni même allégué, que M. [T] serait le commanditaire de l’œuvre résultant de cette captation ni qu’il en détiendrait le support de sorte qu’aucune obligation de paiement n’est démontrée. En toute hypothèse, à supposer que cette œuvre résulte d’une commande de M. [T], la demande en paiement des coûts de réalisation de ce film, incluse dans ses conclusions du 11 janvier 2023, plus de cinq ans après ladite réalisation, serait prescrite.
Il n’est enfin pas démontré que M. [T] utiliserait ou représenterait ce film de sorte que la facturation de la cession très partielle des droits de reproduction ne correspond à aucune obligation.
Les demandes sont donc mal fondées et rejetées.
II . Sur les demandes reconventionnelles

1. Sur la demande de transfert de la marque n° 20 4 632 390

L’article L. 712-6, alinéa 1, du code de la propriété intellectuelle prévoit que si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut en revendiquer sa propriété en justice.
Un dépôt de marque est entaché de fraude au sens de l’article L.712-6 du code de la propriété intellectuelle lorsqu’il est effectué dans l’intention de priver autrui d’un signe nécessaire à son activité (Com., 25 avril 2006, n° 04-15.641).
Cette notion doit également s’interpréter à la lumière de celle de mauvaise foi prévue (au titre des causes de nullité) par la directive 2015/2436, et qui est caractérisée lorsqu’il ressort d’indices pertinents et concordants que le titulaire d’une marque a introduit la demande d’enregistrement de cette marque non pas dans le but de participer de manière loyale au jeu de la concurrence, mais avec l’intention de porter atteinte, d’une manière non conforme aux usages honnêtes, aux intérêts de tiers, ou avec l’intention d’obtenir, sans même viser un tiers en particulier, un droit exclusif à des fins autres que celles relevant des fonctions d’une marque, notamment de la fonction essentielle d’indication d’origine (CJUE, 29 janvier 2020, C-371/18, Sky).L’intention du déposant au moment du dépôt des demandes d’enregistrement est un élément subjectif qui doit être déterminé par référence à l’ensemble des facteurs pertinents propres au cas d’espèce, lesquels peuvent être postérieurs au dépôt (Com., 3 février 2015, pourvoi n°13-18.025).

La société Once upon a team a déposé la marque Denise jardinière à l’INPI pour de nombreux services de la classe 41 le 12 mars 2020, six mois après le départ de son salarié, M. [T], dont elle savait qu’il avait créé le personnage de Denise Jardinière, pour avoir produit le spectacle précité pendant deux ans, et qu’il avait l’intention de poursuivre l’exploitation de son spectacle hors de la relation nouée entre eux de 2017 à 2019.
La société Once upon a team ne s’explique pas sur ses intentions en déposant cette marque mais, par plusieurs courriers antérieurs à M. [T], son gérant et unique associé revendiquait des droits sur l’exploitation future de la pièce. Il s’évince de ces faits et cette chronologie qu’elle s’est approprié le nom du personnage principal du spectacle créé par son ancien salarié dans un contexte de rupture contractuelle afin de le priver de l’usage de ce nom, ce qui caractérise la mauvaise foi et la fraude.
Par conséquent, la marque française verbale numéro 20 4 632 390 doit être transférée à M. [T].
2. Sur les demandes à titre de dommages et intérêts

Le dépôt frauduleux de la marque Denise jardinière, qu’ils ont découvert à l’occasion de la présente procédure, était de nature à faire craindre à M. [T] et la société Birdy prod de ne pouvoir licitement poursuivre l’exploitation du spectacle comportant ces noms.Il n’est cependant démontré par aucun élément que le spectacle n’a effectivement plus été exploité par eux. De plus, si M. [O] a adressé des mises en garde à quatre salles de spectacle pour les dissuader de programmer la pièce en septembre 2020 en arguant de ses droits, il n’a pas mentionné l’existence d’une marque dans ses courriers et il n’y a pas de trace d’une annulation pour ce motif.
Dès lors, le préjudice consécutif à ce dépôt frauduleux se limite à un préjudice moral que le tribunal fixe à la somme de 3.000 euros.

Comme retenu au point 26 supra, les œuvres audiovisuelles et graphiques dérivées du spectacle Denise Jardinière vous invite chez elle réalisées par M. [O] ou la société Once upon a team ont été consenties par M. [T] pour la durée de la collaboration à des fins de promotion du spectacle. Elles sont donc dorénavant interdites sans le consentement de leur auteur, d’une part, et de l’auteur et l’interprète de la pièce filmée, d’autre part.
Aucune pièce du dossier ne montre une quelconque exploitation de ces œuvres postérieure à la rupture de la collaboration des parties ou à une autre fin que la promotion du spectacle, de sorte que les contrefaçons alléguées ne sont pas démontrées.
Il n’y a donc lieu ni d’interdire l’exploitation ultérieure de ces œuvres qui peut être convenue entre les parties, ni de faire droit à la demande à titre de dommages et intérêts de ce chef.

Enfin, si l’émission d’une facture en cours de procédure pour apporter une preuve à une demande qui n’est justifiée par aucune pièce constitue une faute, M. [T] ne démontre aucun préjudice spécifique résultant de celle-ci, puisqu’il devait en toute hypothèse se défendre en justice sur la créance alléguée.
Le préjudice étant réparé par les dommages et intérêts et vu l’ancienneté du litige, il n’y a pas lieu d’ordonner la publication du présent jugement
III . Sur l’abus de procédure

En application de l’article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
Le droit d’agir en justice dégénère en abus lorsqu’il est exercé en connaissance de l’absence totale de mérite de l’action engagée, ou par une légèreté inexcusable, obligeant l’autre partie à se défendre contre une action ou un moyen que rien ne justifie sinon la volonté d’obtenir ce que l’on sait indu, une intention de nuire, ou l’indifférence aux conséquences de sa légèreté.
Au cas présent, la société Once upon a team et M. [O] ont assigné les défendeurs (parmi lesquels une société créée postérieurement aux faits à l’origine du litige) sur des fondements imprécis et fantaisistes, pour obtenir des montants calculés sur des bases plus que hasardeuses dans un but manifeste de riposte à la rupture de la collaboration et les actions intentées devant le conseil des prud’hommes, ce qui caractérise tant l’intention de nuire que l’indifférence aux conséquences de sa légèreté.

Il y a donc lieu de condamner les demandeurs à payer aux défendeurs la somme de 2.400 euros à titre de dommages et intérêts.
IV . Dispositions finales

Les demandeurs, qui succombent, sont condamnés aux dépens de l’instance (n’incluant pas les taxes de l’Inpi qui n’entrent pas dans la liste limitative de l’article 695 du code de procédure civile) et à payer chacun des défendeurs, qui ont fait défense commune, la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Déboute M. [G] [O] et l’EURL Once upon a team de l’ensemble de leurs demandes ;

Transfère à M. [Z] [T] la propriété de la marque française Denise Jardinière numéro 20 4 632 390 pour tous les produits et services visés à son enregistrement ;

Ordonne la transmission à l’INPI du présent jugement, une fois passé en force de chose jugée, à l’initiative de la partie la plus diligente aux fins d’inscription au registre des marques ;

Condamne M. [G] [O] et l’EURL Once upon a team à payer à M. [Z] [T], la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Rejette les demandes fondées sur la réalisation et de l’exploitation non autorisée d’œuvres audiovisuelles et d’œuvres graphiques dérivées du spectacle Denise Jardinière vous invite chez elle ;

Condamne M. [G] [O] et l’EURL Once upon a team à payer à M. [Z] [T], M. [B] [F] et la société Birdy prod la somme de 2.400 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne M. [G] [O] et l’EURL Once upon a team aux dépens de l’instance

Condamne M. [G] [O] et l’EURL Once upon a team à payer à M. [Z] [T] la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l’EURL Once upon a team à payer à M. [B] [F] la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [G] [O] et l’EURL Once upon a team à payer à la société Birdy prod la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 31 Mai 2024

Le GreffierLa Présidente
Quentin CURABET Irène BENAC


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 3ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 20/11692
Date de la décision : 31/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-31;20.11692 ?
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