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24/05/2024 | FRANCE | N°17/00852

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 6ème chambre 2ème section, 24 mai 2024, 17/00852


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :




6ème chambre 2ème section


N° RG 17/00852 - N° Portalis 352J-W-B7B-CJTT4

N° MINUTE :

Contradictoire

Assignation du :
09 Janvier 2017















JUGEMENT
rendu le 24 mai 2024
DEMANDEUR

S.A.R.L. MATERIEL LOCATION SERVICES
[Adresse 8]
[Localité 5]


représenté par Maître Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS

,, vestiaire #P0435



DÉFENDEURS

Société EURO TOITURE (INTERVENANT VOLONTAIRE)
[Adresse 2]
[Localité 4]


Monsieur [S] [O]
[Adresse 6]
[Localité 4]





Décision du 24 Mai 2024
6ème chambre 2ème sec...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

6ème chambre 2ème section


N° RG 17/00852 - N° Portalis 352J-W-B7B-CJTT4

N° MINUTE :

Contradictoire

Assignation du :
09 Janvier 2017

JUGEMENT
rendu le 24 mai 2024
DEMANDEUR

S.A.R.L. MATERIEL LOCATION SERVICES
[Adresse 8]
[Localité 5]

représenté par Maître Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS,, vestiaire #P0435

DÉFENDEURS

Société EURO TOITURE (INTERVENANT VOLONTAIRE)
[Adresse 2]
[Localité 4]

Monsieur [S] [O]
[Adresse 6]
[Localité 4]

Décision du 24 Mai 2024
6ème chambre 2ème section
N° RG 17/00852 - N° Portalis 352J-W-B7B-CJTT4

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentés par Maître Philippe BALON de la SELEURL CABINET BALON, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #D0263

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Nadja GRENARD, Vice-présidente
Madame Marion BORDEAU, Juge
Madame Stéphanie VIAUD, Juge

assistée de Madame Audrey BABA, Greffier

DEBATS

A l’audience du 29 février 2024
tenue en audience publique

DEBATS

A l’audience du 29 février 2024 tenue en audience publique devant, Madame Marion BORDEAU, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

- Contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
- Signé par Madame Nadja Grenard , Présidente de formation et par Madame Audrey BABA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

______________________________________

EXPOSÉ DU LITIGE

En 2011, le Département de la Haute Savoie, en qualité de maître d'ouvrage, a décidé de faire réaliser la réfection de la toiture d'une ancienne abbaye classée monument historique située à [Localité 7].

Sont notamment intervenus à cette opération de construction :

- la S.A.R.L. M’ARCHITECTE, assurée auprès de la MAF, dotée d'une mission de maîtrise d'œuvre;

- la société MATERIEL LOCATION SERVICES (ci-après la société MLS), au titre du lot "échafaudage" ;

- Monsieur [S] [O], exerçant sous l’enseigne EURO TOITURE, assuré auprès de la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, au titre du lot "couverture, charpente et maçonnerie".

Dans le cadre de ces travaux, la société MATERIEL LOCATION SERVICES a procédé à l'installation d'un échafaudage tubulaire sur la périphérie de l'abbaye, destiné à supporter un parapluie auto stable en tôle métallique, afin de permettre au titulaire du lot couverture de réaliser ses travaux à l'abri des intempéries.

Le 7 décembre 2011, alors que la société EURO TOITURE travaillait sur la couverture, la sapine d'échafaudage située à l'angle sud-est de l'abbaye, et reposant sur la toiture du bâtiment annexe, a glissé et provoqué le pliage et la torsion des tubes qui soutenaient le parapluie.

Le Département de la Haute Savoie, a obtenu suivant une ordonnance du 26 janvier 2012 du Tribunal Administratif de Grenoble la désignation de Monsieur [V] en qualité d'expert.

L'expert a déposé son rapport le 10 juillet 2014.

Par requête et mémoire enregistrés les 27 juin 2016 et 24 janvier 2017, le maître d’ouvrage a sollicité la condamnation de la société EUROTOITURE et du maître d’œuvre à lui verser une provision.

Par ordonnance en date du 17 mars 2017, la société EURO TOITURE a été condamnée à payer au maître d’ouvrage une provision de 112.730, 64 €.

L’appel en garantie diligenté par la société EURO TOITURE à l’encontre de la société MLS a été rejeté.

Le Département de la HAUTE-SAVOIE a saisi au fond le Tribunal administratif de GRENOBLE, par requête enregistrée le 18 aout 2016.

Par jugement en date du 11 décembre 2018, le Tribunal Administratif de GRENOBLE a rejeté la requête du Département de la HAUTE-SAVOIE.

La Cour Administrative d’Appel de LYON par un arrêt du 29 avril 2021 a annulé le jugement du Tribunal Administratif de GRENOBLE du 11 décembre 2018 et a déclaré la société EURO TOITURE seule responsable du sinistre et l'a condamnée à verser au Département de la HAUTE-SAVOIE la somme de 29 547,56 € HT après déduction de la provision.

Par acte d'huissier en date des 9 et 10 janvier 2017, la S.A.R.L. MLS a assigné devant le tribunal judiciaire de Paris :

- S.A.R.L. M’ARCHITECTE et son assureur la MAF ;

- Monsieur [S] [O] exerçant sous l'enseigne EUROTOITURE et son assureur la société MMA IARD ;

aux fins de les voir déclarer conjointement responsables de la survenance du sinistre et des préjudices en résultant et de les voir condamner in solidum à lui payer la somme en principal de 142 715.97€ HT, soit 171 259.16 € TTC en réparation des préjudices qu’elle estime avoir subis à la suite de l’évènement dommageable survenu le 7 décembre 2011.

Par ordonnance du 8 juin 2018, le juge de la mise en état a ordonné le sursis à statuer sur les demandes des parties dans l'attente de la décision du juge administratif.

Par ordonnance du 14 janvier 2022, le juge de la mise en état a constaté le désistement d'instance de la S.A.R.L. MLS à l'égard de la S.A.R.L. M’ARCHITECTE et de la MAF.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 19 avril 2023, la S.A.R.L. MLS sollicite du tribunal de :

“DECLARER recevable les demandes indemnitaires de la société MLS à l’égard de la société EURO TOITURE venant aux droits de Monsieur [S] [O] et des compagnies MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES.

CONDAMNER in solidum la société EURO TOITURE venant aux droits et obligations de Monsieur [S] [O], ainsi que son assureur les MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à payer à la société MATERIEL LOCATION SERVICES « MLS » la somme en principal de 162 688,91 € HT soit 195 226,69 € TTC.

DIRE que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter de l’assignation introductive d’instance du 10 janvier 2017.

DIRE que les intérêts échus depuis plus d’un an seront capitalisés dans les termes de l’article 1343-2 du Code Civil,

ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir,

Subsidiairement,

ORDONNER avant dire droit sur le préjudice, une mesure de consultation sur les éléments comptables et justificatifs de préjudice produits par MLS

CONDAMNER in solidum EURO TOITURE les MMA IARD et les MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à payer à la société MLS une indemnité de 15.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’en tous les dépens, lesquels pourront être recouvrés par Maître Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET-ZANATI Avocats, dans les conditions de l’article 699 du Code de Procédure Civile”.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 28 février 2023, Monsieur [S] [O] exerçant sous l’enseigne EURO TOITURE et son assureur les MMA IARD et MMA ASSURANCES MUTUELLES sollicitent du tribunal de :

“A titre liminaire,

DONNER acte à la société EUROTOITURE et à la société MMA IARD SA de leur intervention volontaire à l’instance.

A titre principal,

DECLARER irrecevable l’action exercée par la société MLS à l’encontre de la société EUROTOITURE, de Monsieur [S] [O] et de la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES,

A titre subsidiaire,

La DEBOUTER de l’intégralité de ses demandes fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société EUROTOITURE, de Monsieur [S] [O] et de la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES.

DEBOUTER la société MLS de sa demande de mesure de consultation.

CONDAMNER la société MLS à payer à Monsieur [S] [O], la société EUROTOITURE et aux Compagnies MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 5 000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER la société MLS en outre aux entiers dépens distraits au profit de la SCP BALON Avocats conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile”.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er juin 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 29 février 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

I.Sur la recevabilité de l'action de la société MLS

Les défendeurs soulèvent l'irrecevabilité de l'action de la société MLS en application des dispositions de l’article 2224 du Code Civil à défaut pour elle d’avoir engagé son action dans le délai de 5 ans à compter du fait dommageable survenu le 7 décembre 2011.

Ils font notamment valoir que la société MLS n’exerce pas une action en garantie mais une action en responsabilité et indemnisation d’un préjudice qui lui est personnel en lien avec le sinistre et que dès lors le 7 décembre 2011 constitue le point de départ du délai de prescription de son action quasi délictuelle à l’égard de la société EUROTOITURE avec laquelle elle n’avait aucun lien de droit.

Par ailleurs, ils précisent que la requête en référé expertise déposée par le DEPARTEMENT DE LA HAUTE SAVOIE devant le Président du Tribunal Administratif de GRENOBLE enregistrée le 10 janvier 2012 n’a eu aucun effet interruptif s’agissant de l’action de la société MLS à l’égard de la société EUROTOITURE.

Enfin, les défendeurs soutiennent que l'action de la société MLS n'étant en rien récursoire, elle ne saurait se prévaloir de la jurisprudence de la Cour de cassation établie par l'arrêt du 14 décembre 2022.

La société MLS pour contester la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action soutient qu’à la date du sinistre survenu le 7 décembre 2011 elle ne pouvait en rien connaitre les causes et l’identité des responsables et encore moins les préjudices induits et que seul le rapport d'expertise déposé le 10 juillet 2014 a pu déterminer les imputabilités.

Elle précise qu'en application de la nouvelle jurisprudence de la cour de cassation du 14 décembre 2022 c’est bien la date de la requête au fond du Département de HAUTE SAVOIE tendant à obtenir une indemnisation, soit le 18 août 2016, qu’il convient de prendre en compte comme point de départ du délai de prescription.

Selon l’article 122 du code de procédure civile constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En l'espèce, la société MLS a assigné par acte d'huissier en date des 9 et 10 janvier 2017, notamment Monsieur [S] [O] exerçant sous l'enseigne EUROTOITURE et son assureur la société MMA IARD aux fins de les voir condamner in solidum à lui payer la somme en principal de 142 715.97 € HT, soit 171 259.16 € T.T.C en indemnisation des préjudices subis par elle en raison du sinistre survenu le 11 décembre 2011.

Dans le contenu de l'assignation, il est précisé que le préjudice allégué est décomposé comme suit:

- matériels mis au rebus à la suite du sinistre : 30.244,80 €

- prestations liées aux mesures conservatoires en relation avec le sinistre : 83.933,71€ HT

- frais généraux : 16.786,74 euros H.T.

- perte d'exploitation : 11.750,72 euros H.T.

Ainsi, il ressort de l'examen de ces demandes, que l'action diligentée par la société MLS n'est pas une action récursoire ni une action en garantie mais une action en indemnisation des préjudices financiers qu'elle estime avoir subi du fait du sinistre survenu.

La responsabilité de Monsieur [S] [O] exerçant sous l'enseigne EUROTOITURE à l'égard de la société MLS ne peut être recherchée que sur un fondement extra contractuel.

Ainsi, la société MLS exerce son action au visa des dispositions de l’article 1240 du Code Civil à l’égard de Monsieur [O] et de la société EUROTOITURE et L 124-3 du Code des Assurances à l’égard de la Compagnie MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES.

L’article 2224 du Code Civil dispose que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

Aussi, le point de départ du délai de prescription n'est pas fixé au jour où le titulaire d'un droit a connaissance d'une évaluation précise de son préjudice, la prescription commence à courir à compter de la réalisation du dommage ou à la date à laquelle il s'est révélé.

En l'espèce, la société MLS sollicite la réparation de ses préjudices du fait du sinistre. Ainsi, le dommage résulte des conséquences pécuniaires pour la société MLS de la survenue du sinistre peu important la date de l'évaluation définitive du préjudice.

Il convient d'indiquer, sans rentrer dans l'examen du fond du litige, que ces préjudices n’ont pas été exposés dans le cadre des opérations d’expertise de monsieur [V] et que la requête du département ainsi que le rapport d'expertise sont sans lien avec les préjudices invoqués par la société MLS.

Dès lors, il y a lieu de fixer le point de départ du délai de prescription quinquennale au 7 décembre 2011 et de juger qu'il appartenait à la société MLS d'assigner avant le 7 décembre 2016 Monsieur [O], la société EUROTOITURE et son assureur.

Or, la société MLS ayant formé pour la première fois ses demandes à l'encontre des défendeurs en janvier 2017 doit voir son action déclarée irrecevable car prescrite.

II.Sur les demandes accessoires

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la société MLS succombant, les dépens seront mis à sa charge.

Il sera jugé que chaque partie supportera ses propres frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ancienneté du litige commande le prononcé de l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Statuant par jugement contradictoire rendu par voie de mise à disposition au greffe et en premier ressort :

DÉCLARE irrecevable car prescrite l'action de la société MATERIEL LOCATION SERVICES;

CONDAMNE la société MATERIEL LOCATION SERVICES aux entiers dépens ;

DIT que chaque partie supportera ses propres frais irrépétibles ;

ORDONNE l'exécution provisoire du jugement ;

Fait et jugé à Paris le 24 Mai 2024

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 6ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 17/00852
Date de la décision : 24/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-24;17.00852 ?
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