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17/05/2024 | FRANCE | N°22/06726

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 3ème section, 17 mai 2024, 22/06726


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le:
à Me DUTHEIL
Copies certifiées
conformes délivrées le:
à Me VANNEAU




8ème chambre
3ème section

N° RG 22/06726
N° Portalis 352J-W-B7G-CW3WP

N° MINUTE :

Assignation du :
25 mai 2022






JUGEMENT

rendu le 17 mai 2024
DEMANDERESSE

S.C.I. FAMILIALE DU 73
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Camille VANNEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1815


FENDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], représenté par son syndic le cabinet Loiselet & Daigremont, Services Immobiliers
[Adresse 1]
[Localité 4]

représenté par Maître Maxime DU...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le:
à Me DUTHEIL
Copies certifiées
conformes délivrées le:
à Me VANNEAU

8ème chambre
3ème section

N° RG 22/06726
N° Portalis 352J-W-B7G-CW3WP

N° MINUTE :

Assignation du :
25 mai 2022

JUGEMENT

rendu le 17 mai 2024
DEMANDERESSE

S.C.I. FAMILIALE DU 73
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Camille VANNEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1815

DÉFENDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], représenté par son syndic le cabinet Loiselet & Daigremont, Services Immobiliers
[Adresse 1]
[Localité 4]

représenté par Maître Maxime DUTHEIL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #J0010

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Frédérique MAREC, première vice-présidente adjointe
Madame Lucile VERMEILLE, vice-présidente
Madame Céline CHAMPAGNE, juge

assistées de Léa GALLIEN, greffier,

Décision du 17 mai 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 22/06726 - N° Portalis 352J-W-B7G-CW3WP

DÉBATS

A l’audience du 08 mars 2024 tenue en audience publique devant Madame Céline CHAMPAGNE, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
Premier ressort

FAITS ET PRÉTENTIONS

L'immeuble du [Adresse 2], soumis au statut de la copropriété, est divisé en 24 lots, numérotés de 1 à 24, détenus par sept copropriétaires dont la SCI Familiale du 73.

L'immeuble se compose de trois bâtiments, ainsi décrits au règlement de copropriété :
-le bâtiment A, en façade sur le boulevard Malesherbes, et à droite dans la cour commune élevé sur caves, comprenant un rez-de-chaussée, cinq étages carrés et un sixième étage lambrissé,
-le bâtiment B, à gauche dans la cour commune, mitoyen au bâtiment A, élevé sur terre plein d'un rez-de-chaussée et d'un étage carré,
-le bâtiment C, situé au fond de la cour commune, mitoyen au bâtiment A, élevé sur terre plein d'un rez-de-chaussée et d'un étage carré.

Lors de l'assemblée générale du 16 février 2022, les copropriétaires ont adopté une résolution numéro 14 visant à autoriser plusieurs copropriétaires du bâtiment B à réaliser des travaux de surélévation d'une construction sur cour en R+ 2, R+ 3, R+ 4 et R+5.

Par acte délivré le 25 mai 2022, la SCI Familiale du 73 a attaqué cette assemblée générale, afin d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, l'annulation de la résolution numéro 14.

Aux termes de ses conclusions n°3, transmises par voie électronique le 23 janvier 2023, la SCI Familiale du 73 demande au tribunal, au visa des articles 9, 10 et 26 de la loi du 10 juillet 1965, 1134 et 1382 du code civil, de :
« PRONONCER la nullité de la résolution n°14 de l'assemblée générale du 16 février 2022 pour abus de majorité
CONDAMNER le syndicat des copropriétaires au paiement de la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNER le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens,
ORDONNER :
* L'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
* L'application de l'intérêt au taux légal sur l'intégralité de ces sommes à compter du prononcé du jugement ;
* La capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil ».

Dans ses conclusions n°2, transmises par voie électronique le 24 janvier 2023, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal de :
« Débouter la SCI Familiale du 73 de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la SCI Familiale du 73 à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] 6 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
En tout état de cause :
- Condamner la SCI Familiale du 73 à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens. »

Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits, de la cause et des prétentions des parties.

La clôture de la procédure a été prononcée le 18 avril 2023 et fixée pour plaidoiries à l'audience du 08 mars 2024, date à laquelle elle a été mise en délibéré au 17 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'annulation de la résolution n°14

La SCI Familiale du 73 explique que le projet de surélévation voté concerne le « bâtiment 4 » et consiste en la création de quatre niveaux supplémentaires, par voie d'alignement sur héberges des immeubles contigus, et d'une terrasse végétalisée au dernier étage.
Elle indique que les plans relatifs à ces travaux ont été annexés à l'ordre du jour mais qu'ils étaient toutefois insuffisants.
Elle indique à cet égard que l'étude de faisabilité jointe ne détaillait pas les travaux en leurs aspects techniques et sécuritaires, ni les propositions faites pour assurer la continuité de la vie des copropriétaires durant les travaux, s'agissant notamment des places de parking.
Elle relève également que le projet comportait de nombreuses lacunes, en ce qu'il ne précisait pas la nouvelle répartition des tantièmes, et des informations erronées puisque les plans produits mentionnaient comme parties communes des parties en réalités privatives.

Elle considère que l'adoption de la résolution contestée résulte ainsi d'un abus de majorité puisqu'il ressort de la feuille de présence que la majorité des voix est concentrée entre les quatre parties intéressées au projet, représentant 4 copropriétaires sur les 7 que compte la copropriété et détenant ensemble 689 tantièmes sur 1000.
Elle considère que cet abus ressort également du vil prix proposé pour la réalisation du projet, à savoir 50 000 euros pour une construction de 80 mètres carrés, soit un prix bien inférieur au prix du marché, causant un préjudice important aux copropriétaires minoritaires puisque le prix aurait dû être de 962 400 euros.
Enfin, elle indique que le projet ne fait nullement mention du droit de surélévation et de ses modalités de cession alors que le droit de surélever est réputé être un droit accessoire aux parties communes, qu'il doit respecter le formalisme fixé par le décret du 17 mars 1967, que la décision d'aliéner doit être prise à la majorité de l'article 26 et qu'elle doit faire l'objet de résolutions précises dans le procès-verbal.
Décision du 17 mai 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 22/06726 - N° Portalis 352J-W-B7G-CW3WP

Elle considère que la résolution doit, pour cette raison également, être annulée.

Elle soutient enfin que la résolution a été adoptée dans l'intérêt exclusif des copropriétaires concernés, peu important la faisabilité du projet et l'absence d'informations indispensables à son vote, et qu'il y a donc un abus de majorité destiné à permettre la réalisation de ces travaux au détriment des copropriétaires minoritaires et de la faisabilité, en toute sécurité, du projet.

Le syndicat des copropriétaires soutient pour sa part que la SCI Familiale du 73 ne rapporte pas la preuve de l'abus de majorité invoqué alors qu'il lui incombe pourtant, de démontrer l'existence d'une décision contraire à l'intérêt commun de la copropriété.
Or, il considère que le projet contesté bénéficie au plus grand nombre de copropriétaires et à la copropriété dans son ensemble sans préjudicier pour autant les intérêts de la demanderesse, relevant par ailleurs que même dans cette hypothèse, la résolution ne pourrait être annulée de ce seul fait.
Enfin, il indique qu'il n'est nullement démontré que le projet comporte un risque pour la sécurité de l'immeuble, l'étude de faisabilité réalisée par le cabinet d'architecte Ateliers Benoît Leleu n'en faisant pas état tout comme M. [N], qui avait dans un premier temps conclu à la viabilité du projet en août 2020, avant de le fustiger après avoir été écarté de sa réalisation.

S'agissant ainsi de la note établie par M. [N] et du courrier du cabinet d'architecte, dont se prévaut la demanderesse, il considère qu'ils lui sont inopposables, le juge ne pouvant fonder sa décision sur une expertise non judiciaire, et a fortiori sur un simple courrier, réalisée à la demande d'une partie, en l'absence de tout élément complémentaire.
Il fait valoir, s'agissant de la critique tenant à l'absence d'un rapport d'ingénieur, qu'il est usuel et légitime que les acquéreurs, avant de solliciter les avis techniques, obtiennent une simple décision de principe sur la possibilité de mener à bien le projet et que les avis techniques seront sollicités ultérieurement.
Il indique qu'il en va de même s'agissant de la nouvelle répartition des tantièmes, qui sera approuvée lors d'une prochaine assemblée générale, ainsi que prévue par la résolution numéro 13, expliquant qu'il ne ferait aucun sens d'établir une répartition avant même qu'un accord de principe sur le projet ne soit obtenu.
Enfin, il soutient que le grief tenant à la perte de luminosité, non fondé, et à l'absence d'indication des modalités de financement, en réalité bien précisées, sont sans lien avec le prétendu abus de majorité invoqué et que le rapport établi par le cabinet Ateliers Benoît Leleu n'est entaché d'aucune erreur, la loge de la gardienne étant bien une partie commune aux termes du règlement de copropriété.
Il indique ainsi qu'il appartient à la demanderesse, si elle l'estime nécessaire, de contester les autorisations administratives qui seront éventuellement accordées pour la réalisation du projet mais que la décision de principe de l'assemblée ne peut en revanche être annulée sous couvert d'un prétendu abus de majorité.
Concernant le prix fixé, il fait valoir que le prix de parties privatives d'ores et déjà habitables ne peut être comparé avec celui de parties communes nécessitant de lourds travaux pour le devenir, de telle sorte qu'en l'espèce le prix ne peut être qualifié de vil et qu'en tout état de cause sa fixation est libre et qu'il n'appartient pas au tribunal de se prononcer sur la valeur des parties communes.
Décision du 17 mai 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 22/06726 - N° Portalis 352J-W-B7G-CW3WP

Enfin, s'agissant du droit de surélévation, il fait valoir que la communication des documents dont se prévaut la demanderesse fait justement l'objet de la résolution numéro 13, laquelle visait bien la cession du droit à construire et à surélever, qu'elle actait un simple accord de principe et non la vente elle-même, précisément pour recueillir en temps voulu les documents nécessaires à cette vente, et qu'en tout état de cause ce grief est sans rapport avec un prétendu abus de majorité.

La résolution attaquée est ainsi rédigée :
« autorisation à donner à Monsieur et Madame [X], propriétaires du lot 7, à [R] Groupe, propriétaire du lot 6, à Monsieur [R] [U], propriétaire du lot 5, à l'indivision [R]/[L], propriétaire du lot 4, afin de faire réaliser des travaux de surélévation d'une construction sur cour bâtiment B
(article 25 de la loi du 10 juillet 1965)

Pièce jointe : projet de surélévation du cabinet Ateliers Benoît Leleu architecte.

L'assemblée générale, en application de l'article 25 (b) de la loi du 10 juillet 1965, après avoir pris connaissance du dossier technique (descriptifs et plans) joint à la convocation de la présente assemblée et après avoir constaté que la destination de l'immeuble était respectée, autorise Monsieur et Madame [X], propriétaires du lot 7, Monsieur [R] [U], propriétaire du lot 5 et l'indivision [R]/[L], propriétaire du lot 4 et [R] Groupe, propriétaire du lot n°6 afin de réaliser des travaux de surélévation d'une construction sur cour bâtiment B en R+ 2, R+3 et R+4 et R+5.

Cette autorisation est donnée sous réserve :
-de la réalisation d'un état des lieux contradictoire avant et après les travaux,
-que la réalisation des travaux soit conforme aux règles de l'art,
-que les autorisations administratives nécessaires à la réalisation de ces travaux aient été obtenues par Monsieur et Madame [X], Monsieur [R] [U] et l'indivision [R]/[L], à leur demande. Une copie de ces autorisations sera remise au syndic.
-que les travaux soient effectués sous la surveillance de l'architecte de l'immeuble ou, à défaut, de ...architecte, aux frais de Monsieur et Madame [X], Monsieur [R] [U], [R] Groupe et l'indivision [R]/[L] qui devra en justifier
-qu'une assurance « dommages-ouvrage » dans le cas où celle-ci serait obligatoire, soit souscrite par Monsieur et Madame [X], Monsieur [R] [U] et l'indivision [R]/[L], qui devra en justifier, avec extension de garantie « aux existants ». Une copie de l'attestation d'assurance sera remise au syndic.
Les copropriétaires seront responsables vis-à-vis du syndicat des copropriétaires et des tiers de toutes les conséquences dommageables résultant de ces travaux.
Ils auront également l'obligation de supporter à leurs frais et sous leur responsabilité l'entretien de l'équipement installé. »

Cette résolution a été adoptée à la majorité des voix de tous les copropriétaires, soit 689 sur 1000, seule la SCI Familiale du 73, totalisant 140 tantièmes, ayant voté contre.

Décision du 17 mai 2024
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N° RG 22/06726 - N° Portalis 352J-W-B7G-CW3WP

En l'espèce, il ressort des mentions portées sur le procès-verbal d'assemblée générale que la copropriété se compose de 7 copropriétaires et qu'ont assisté à l'assemblée générale du 16 février 2022, tenue par visio-conférence, la SCI Familiale du 73 et les quatre copropriétaires bénéficiaires de l'autorisation accordée ([R] Groupe, [R] [U], l'indivision [R]/[L] et M ou Mme [X]), les deux autres copropriétaires (SCI Ruhmkorff et la SCI du 73/4) étant absents.

Au vu de l'opposition de la SCI Familiale du 73 et de l'absence de la SCI Ruhmkorff et de la SCI du 73/4, la résolution contestée a donc été adoptée grâce aux votes des quatre copropriétaires directement concernés par l'autorisation sollicitée et qui totalisent 689 voix sur 1000.

Pour autant, le seul fait qu'ils soient bénéficiaires de la décision ainsi prise et majoritaires ne suffit pas à caractériser un abus de majorité.

Il appartient en effet à la demanderesse de rapporter la preuve que les copropriétaires ont utilisé la majorité dans un intérêt autre que l'intérêt collectif ou dans un intérêt qui lui est contraire, soit, le plus souvent, dans un intérêt personnel, soit dans leur intérêt exclusif au détriment du groupe minoritaire, soit en rompant l'équilibre entre les copropriétaires, soit avec l'intention de nuire.

En l'espèce, pour caractériser l'abus de majorité invoqué, la demanderesse s'appuie sur une simple note rédigée le 13 février 2022, par M. [N], architecte, faisant état de la nécessité d'obtenir un rapport d'ingénieur avec validation par un bureau de contrôle afin de garantir la faisabilité de l'opération, de présenter une nouvelle répartition des tantièmes, et mentionnant les erreurs qu'il a relevées sur les plans annexés au procès-verbal d'assemblée ainsi que les incohérences et lacunes mises en évidence s'agissant notamment d'une perte de jouissance d'une place de parking durant les travaux et d'une perte de luminosité du local R+1 de la société CETI.

Il convient toutefois de relever que ce même architecte, consulté en août 2020 précisément pour la faisabilité du projet, avait, après étude du projet, de la configuration des lieux et des plans de situation, annexés à sa note, donné son aval sur cette faisabilité et n'avait élevé aucune des objections émises par la suite, alors même qu'il s'agit du même projet dont il devait analyser la faisabilité et au sujet de laquelle il avait, au contraire, donné son aval sans réserve, indiquant au conseil syndicat et au syndic :
« si vous confirmez ces grandes lignes, je commencerais alors une esquisse architecturale ainsi qu'une étude en structure. »

S'agissant ainsi de la question de la luminosité, il avait ainsi indiqué que « compte tenu de sa situation derrière un mur d'héberge qui monte à plus de R+6, nous concluons que cela n'entraînera pas de perte de lumière pour les copropriétaires d'en face », précisant, photographies des lieux à l'appui, que « l'impact sur la copropriété mitoyenne sera aussi sans objet car l'extension viendrait en prolongement de la façade existante » et concluant ainsi que « le projet ne porte donc pas atteinte aux conditions d'éclairement de l'immeuble voisin comme de l'immeuble de la copropriété. »

Aucun élément n'explique donc qu'il considère désormais, en février 2022, que « à bien regarder les fenêtres du local d'activité du R+1 de CETI nous constatons une grande perte de ciel et donc de lumière naturelle due à l'extension » alors qu'il s'agit du même projet.
Décision du 17 mai 2024
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De la même façon, M. [H] estime désormais dans sa note du 16 février 2022 que « un rapport d'ingénieur avec validation par un bureau de contrôle doit impérativement garantir la faisabilité de l'opération avant d'émettre un quelconque jugement », qu'une « étude géotechnique aboutie doit confirmer à l'ensemble de la copropriété qu'il n'y aura aucune perturbation dans les descentes de charges et aucune répercussion sur les caves ou sur les fondations existantes de l'immeuble principal » et que « tous les éléments doivent être apportés aux copropriétaires afin de garantir la sécurité du bâtiment » alors que tant l'étude de faisabilité établie par ses soins en août 2020 que celle réalisée par le cabinet Ateliers Benoît Leleu ne font état de risque pour la sécurité de l'immeuble.

Il ressort ainsi des griefs formulés par la demanderesse, qui s'appuie également sur le rapport établi par la société d'architecture BES.SOUNIGO ARCHI, arguant des failles techniques et architecturales du projet, au vu du manque de pièces techniques et contractuelles du projet et de l'absence d'étude de faisabilité structurelle, qu'elle se plaint en réalité d'un défaut d'information lors de l'assemblée générale, la demanderesse indiquant ainsi dans ses conclusions que « les documents annexés à l'ordre du jour, permettant d'éclairer les copropriétaires sur le projet de surélévation sont loin d'être suffisants dès lors qu'aucune étude technique assurant la faisabilité des travaux et la sécurité du bâtiment n'a été effectuée. » et que « le projet tel que présenté aux copropriétaires comporte de nombreuses lacunes en ce qu'il ne précise pas la répartition des tantièmes. »

Or, un défaut d'information, à le supposer établi, n'est pas de nature à caractériser un abus de majorité et s'agissant de la question de la répartition des tantièmes, il convient de relever que cette question a précisément été abordée dans la résolution numéro 13 qui mentionne ainsi qu' « il est demandé à Monsieur et Madame [X], Monsieur [R] [U] et l'indivision [R]/[L], [R] Groupe de présenter au syndic et au conseil syndical un projet modificatif de l'état descriptif de division et des plans établis par un géomètre pour la création du nouveau lot (ou nouveaux lots), l'affectation des tantièmes et le changement de destination si besoin.
Dans le cas où le projet modificatif de l'état descriptif de division serait approuvé lors d'une prochaine assemblée générale, un projet modificatif du règlement de copropriété sera établi par un notaire, puis publié au bureau des hypothèques. »

Enfin, alors que la demanderesse soutient que « l'assemblée des copropriétaires a voté les résolutions tendant à un projet de surélévation sans se prononcer sur la cession du droit de surélévation et les modalités de même de cette cession », il ressort en réalité du contenu de cette même résolution que les copropriétaires ont également décidé de vendre le toit du bâtiment B aux copropriétaires concernés par les travaux de surélévation, à un prix de 50 000 euros, indiquant que « le prix proposé aux copropriétaires pour la vente future du toit comprend le droit à construire et à surélever ».

S'agissant du prix retenu de 50 000 euros, que la SCI Familiale du 73 qualifie de vil prix, il n'appartient pas à la juridiction, dans le cadre du contrôle d'un éventuel abus de majorité, de se prononcer sur la valeur des parties communes cédées pas plus que de se livrer à un contrôle d'opportunité des décisions prises par l'assemblée, la SCI Familiale du 73 indiquant en effet que « l'assemblée générale n'a pas subordonné son accord à la production préalable d'une étude sur la faisabilité technique des travaux de surélévation tandis que l'étude jointe au projet de résolution ne permet pas de lever cette réserve ».
Décision du 17 mai 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 22/06726 - N° Portalis 352J-W-B7G-CW3WP

Il ressort ainsi de l'ensemble des éléments analysés qu'aucun des moyens et arguments présentés par la SCI Familiale du 73 n'est révélateur d'un abus de majorité, de telle sorte que la demande d'annulation est intégralement rejetée.

Sur la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires

L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés. »

Le syndicat des copropriétaires soutient que la présente procédure a été initiée par la SCI Familiale du 73 dans le seul but de faire obstacle et retarder un projet lui déplaisant, à des fins purement dilatoires.
Il sollicite donc, au visa de l'article précité, sa condamnation à lui régler la somme de 6000 euros pour procédure abusive.

Toutefois, l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits ne constitue pas en soi un abus de droit de telle sorte qu'il convient de débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes

La SCI Familiale du 73, partie perdante, est condamnée aux dépens.

Tenue aux dépens, elle est également condamnée à régler au syndicat des copropriétaires, la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et est déboutée de sa demande formulée à ce titre.

Conformément aux dispositions de l'article 514 du code de procédure civile, l'exécution provisoire est de droit et il n'y a pas lieu de l'écarter.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

DÉBOUTE la SCI Familiale du 73 de sa demande d'annulation de la résolutions n°14 adoptée lors de l'assemblée générale du 16 février 2022 ;

DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] de sa demande de dommages et intérêts ;

CONDAMNE la SCI Familiale du 73 aux dépens ;

CONDAMNE la SCI Familiale du 73 à régler au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles ;

DÉBOUTE la SCI Familiale du 73 de sa demande formulée au titre des frais irrépétibles ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit.

Fait et jugé à Paris le 17 mai 2024

Le greffierLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 3ème section
Numéro d'arrêt : 22/06726
Date de la décision : 17/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-17;22.06726 ?
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