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07/05/2024 | FRANCE | N°21/03185

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 6ème chambre 1ère section, 07 mai 2024, 21/03185


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




6ème chambre 1ère section

N° RG 21/03185 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CT45B

N° MINUTE :




Assignation du :
19 février 2021




JUGEMENT
rendu le 07 mai 2024
DEMANDERESSE

S.A.S. SATO ET ASSOCIES
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Lola CHUNET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0510




DÉFENDERESSE

REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIR

E prise en son Consulat d’Algérie de [Localité 4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Lydia BOUDRICHE, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire #555





Décisio...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

6ème chambre 1ère section

N° RG 21/03185 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CT45B

N° MINUTE :

Assignation du :
19 février 2021

JUGEMENT
rendu le 07 mai 2024
DEMANDERESSE

S.A.S. SATO ET ASSOCIES
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Lola CHUNET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0510

DÉFENDERESSE

REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE prise en son Consulat d’Algérie de [Localité 4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Lydia BOUDRICHE, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire #555

Décision du 07 mai 2024
6ème chambre 1ère section
N° RG 21/03185 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CT45B

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Céline MECHIN, vice-président
Marie PAPART, vice-président
Clément DELSOL, juge

assisté de Catherine DEHIER, greffier,

DÉBATS

A l’audience du 06 mars 2024 tenue en audience publique devant Clément DELSOL, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Décision publique
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Céline MECHIN, président et par Catherine DEHIER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******************
En qualité de maître d’ouvrage, le consulat d’Algérie à [Localité 5] a émis un appel à candidature pour la sélection d’un cabinet d’architectes en vue de la conception des aménagements intérieurs et extérieurs de son nouveau siège à [Localité 4].

Un groupement constitué des sociétés New Office Architecture, B2L et Sato et Associés a répondu à l’appel d’offre.

Par acte d’huissier de justice délivré le 19 février 2021, la société Sato et Associés a fait citer la République Algérienne Démocratique et Populaire devant le tribunal judiciaire de Paris afin qu’il la condamne à lui payer 29 229,60 € ttc au titre du travail exécuté et portant intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2016, 4 274,16 € ttc au titre de l’indemnité de résiliation et portant intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2016 et 3 000,00 € au titre des frais irrépétibles.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 1er décembre 2022, la société Sato et Associés forme les prétentions suivantes :
« Vu les articles 1134, 1135 anciens du Code civil
Vu les pièces annexées,
Il est demandé au Tribunal de :
CONDAMNER le Consulat d’Algérie à verser à la société SATO & ASSOCIES la somme de 29.229,60 euros TTC au titre du travail exécuté au jour de la résiliation, outre les intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2016;
Subsidiairement,
CONDAMNER le Consulat d’Algérie à verser à la société SATO & ASSOCIES la somme de 12.777,60 € TTC au titre du travail exécuté au jour de la résiliation, outre les intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2016
CONDAMNER le Consulat d’Algérie à verser à la société SATO & ASSOCIES la somme de 4.161 euros TTC au titre l’indemnité de la résiliation, outre les intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2016 ;
Subsidiairement,
CONDAMNER le Consulat d’Algérie à verser à la société SATO & ASSOCIES la somme de 1987,26 € TTC au l’indemnité de la résiliation, outre les intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2016
CONDAMNER le Consulat d’Algérie à verser à la société SATO & ASSOCIES la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. »

Par conclusions n°2 notifiées par voie électronique le 13 mars 2023, la République Algérienne Démocratique et Populaire forme les prétentions suivantes :
« Vu les articles du Code Civil,
Vu la jurisprudence
Vu les pièces versées au débat
Il est demandé au Tribunal judiciaire de Paris de :
A titre principal :
CONSTATER l’absence de toute relation contractuelle entre les parties ;
En conséquence :
DEBOUTER la société SATO & ASSOCIES de toutes ses demandes ;
A titre subsidiaire :
CONSTATER le paiement de la République Démocratique Algérienne de la somme de 9430 euros au titre du dépôt des autorisations administratives ;
CONSTATER l’absence de toute approbation de la République démocratique d’Algérie sur la mission de l’avant-Projet ;
DEBOUTER la société SATO & ASSOCIES de sa demande de paiement de 19 246 euros au titre de l’avant-projet ;
DEBOUTER la société SATO & ASSOCIES de sa demande de paiement de 12.777,60 euros TTC ;
CONSTATER que les délais d’exécution de la société SATO & ASSOCIES n’ont pas été respectés ;
CONSTATER que l’application de l’article 12 au titre de l’indemnité de résiliation ne pourra s’appliquer dès lors que la République Démocratique Algérienne n’a pas régularisé ledit contrat :
DEBOUTER la société SATO & ASSOCIES de sa demande d’indemnité de résiliation ;
A titre infiniment subsidiaire :
CONSTATER que les sommes dues au titre des travaux exécutés sont de 5431,68 euros.
CONSTATER l’indemnité de résiliation à la somme de 1357,92 euros ;
En tout état de cause :
CONDAMNER la société SATO & ASSOCIES au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du CPC et aux entiers dépens. »

Pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à la lecture de leurs écritures en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture date du 18 septembre 2023.

MOTIFS
I. La réalité du contrat

L’article 1101 ancien du code civil dispose que le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations.

En l’espèce, il résulte des éléments produits aux débats que le 11 septembre 2014, le consulat d’Algérie à [Localité 5] a émis un appel à candidature pour la sélection d’un cabinet d’architectes en vue de la conception des aménagements intérieurs et extérieurs de son nouveau siège à [Localité 4], le terme de l’appel d’offre étant fixé au 18 septembre 2014.

Dans ce cadre, les sociétés New Office Architecture, B2L et Sato et Associés ont conclu une convention de groupement de maîtrise d’oeuvre en cotraitance le 08 janvier 2016 pour participer ensemble à la procédure de mise en concurrence puis réaliser la mission après attribution de la maîtrise d’œuvre, l’exemplaire produit aux débats n’étant pas signé.

La République Algérienne Démocratique et Populaire produit aux débats en pièce n°1 un courriel de son ministère des affaires étrangères du 13 mars 2015 qui mentionne en page 3 sous le titre III :

« Le contrat de maîtrise d’œuvre entre le consulat d’Alégrie à [Localité 5] et le groupement ayant comme mandataire New office Architecture Sarl a été signé le 07 janvier 2015, avec la même estimation financière déjà établie dans l’offre initiale, sauf que le taux de rémunération est passé de 12,74 % à 11,50 %, soit pour un montant prévisionnel estimé des travaux à 820 000,00 €ht et une rémunération fixée provisoirement à 94 300,00 € ht ; soit 113 160,00 € ttc.

Corollairement, la société Sato et Associés produit en pièce n°5 un contrat de maîtrise d’œuvre signé le 07 janvier 2015 ayant pour objet le projet susvisé et stipulant à l’article 5 Rémunération des honoraires de 11,50 %, soit pour un montant prévisionnel estimé des travaux à 820 000,00 €ht et une rémunération fixée provisoirement à 94 300,00 € ht ; soit 113 160,00 € ttc.

Enfin, la République Algérienne Démocratique et Populaire produit en pièce n°4 un justificatif de versement de 9 430,00 € au titre de la phase n°1 correspondant au dépôt du dossier d’autorisations administratives.

Il résulte de ces éléments que la République Algérienne Démocratique et Populaire est mal fondée à nier l’existence d’un contrat de maîtrise d’œuvre conclu avec la société Sato et Associés alors que celle-ci est partie au groupement de maîtrise d’œuvre avec lequel elle a contracté, ceci d’autant plus qu’aucune stipulation de la convention de groupement ne s’oppose à ce que l’un de ses membres agisse dans ses intérêts sur la base du contrat de maîtrise d’œuvre.

II. La demande indemnitaire

L’article 1134 alinéa 1er ancien du code civil dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

a. La qualification de la résiliation

En l’espèce, il est produit aux débats en pièce n°16 une missive adressée par la République Algérienne Démocratique et Populaire le 23 février 2016 ayant pour objet la résiliation unilatérale du contrat de maîtrise d’œuvre. En page 1, le maître d’ouvrage indique expressément qu’ « un contrat de maîtrise d’œuvre a été signé », ceci de telle sorte que cette pièce caractérise une résiliation unilatérale et non une rupture des pourparlers comme l’allègue ce dernier.

A ce titre, le maître d’ouvrage motive la résiliation du contrat sur une modification unilatérale du contrat par le groupement qui aurait unilatéralement accru le montant estimatif des travaux servant d’assiette à sa rémunération à 1 920 000,00 € ht.

Ce montant est corroboré par les écritures de la société Sato et Associés qui fonde au principal ses prétentions sur une assiette de 1 920 000,00 € ht alors que ce montant ne résulte d’aucune pièce contractuelle et qu’il n’a jamais été accepté par le maître d’ouvrage.
Ainsi que le soutient le maître d’ouvrage en page 12 de ses dernières écritures, l’augmentation de 134 % du montant estimatif des travaux ne résultant d’aucun élément technique postérieur à la conclusion du contrat ni d’une commande de travaux supplémentaires constitue un manquement du groupement de maîtrise d’œuvre à son obligation de conseil et d’information justifiant ainsi la résiliation aux torts du maître d’œuvre.

b. Le régime de la résiliation

En l’espèce, le contrat conclu le 07 janvier 2015 stipule dans l’article 12. Résiliation, dans l’hypothèse d’une résiliation en cas d’inexécution d’une obligation par l’une des parties, que « le montant des honoraires correspond aux missions effectuées à la date de la cession sera fixe compte-tenu de l’état d’avancement de la phase en cours ».

Ainsi, les seules sommes dues au maître d’œuvre correspondent aux prestations effectivement exécutées par celui-ci.

Il résulte des éléments produits aux débats et notamment de l’arrêté de la mairie de [Localité 4] du 24 novembre 2014 que les phases DP+AUT ont été exécutées et correspondent à la facturation de 10 % :

94 300,00 / 100 x 10 = 9 430

S’agissant de la mission AVP, aucun élément ne permet de démontrer l’approbation du maître d’ouvrage qui permettrait une facturation de 20 %, le compte-rendu de réunion du 11 décembre 2015 démontrant que des modifications étaient nécessaires, ce projet ne répondant pas, compte-tenu de l’augmentation budgétaire qu’il implique et à l’origine de la résiliation, aux attentes initiales du maître d’ouvrage.

Ainsi, les prestations exécutées par le groupement au jour de la résiliation correspondent à une facturation de 9 430,00 € ht au titre des missions DP et AUT ce montant étant soumis à une TVA de 20 %.

9 430 x 1,2 = 11 316

Il convient de déduire de 11 316,00 € ttc le premier versement de 9 430,00 € effectué par le maître d’ouvrage.

11 316 – 9430,00 = 1 886

Ainsi, les sommes effectivement dues au groupement à la résiliation du contrat sont de 1 886 € pour les missions DP et AUT.
Il résulte d’un document produit en pièce n°18 par la société Sato et Associés et signé par celle-ci et la société New Office Architecture le 05 janvier 2016 que les honoraires dus à la société Sato et Associés au titre de la répartition des montants entre les membres du groupement sont de 32,00 % pour les missions DP at AUT :

1 886 / 100 x 32 = 603,52

Ainsi, le total des sommes dues à la seule société Sato et Associés au titre des prestations effectivement réalisées au jour de la résiliation est de 603,52 € ttc.
Par ailleurs, aucune somme n’est due au titre de la résiliation, celle-ci résultant de la faute du maître d’œuvre.

En conséquence, il convient de condamner la République Algérienne Démocratique à payer 603,52 € ttc au titre des sommes dues au jour de la résiliation du contrat, portant intérêts au taux légal à compter du 19 février 2021, date de l’assignation, la preuve de l’envoi de la mise en demeure du 18 mars 2016 n’étant pas établie.

III. Les décisions de fin de jugement

a. Les dépens

L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

La République Algérienne Démocratique et Populaire succombe et est condamnée aux dépens.

b. Les frais irrépétibles

L’article 700 1° du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

La République Algérienne Démocratique et Populaire succombe et est condamnée aux dépens. L’équité commande donc de la condamner à payer 2 000,00 € à la société Sato et Associés au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

c. L’exécution provisoire

En application des dispositions de l’article 514 du code de procédure civile. l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire statuant après débat en audience publique par jugement contradictoire en premier ressort et mis à disposition au greffe,

CONDAMNE la République Algérienne Démocratique et Populaire à payer à la société Sato et Associés 603,52 € ttc portant intérêts au taux légal à compter du 19 février 2021, au titre des prestations exécutées au jour de la résiliation du contrat ;

DEBOUTE la société Sato et Associés du surplus de ses prétentions ;

CONDAMNE la République Algérienne Démocratique et Populaire aux dépens ;

CONDAMNE la République Algérienne Démocratique et Populaire à payer 2 000,00 € à la société Sato et Associés au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit ;

Fait et jugé à Paris le 07 mai 2024

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 6ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/03185
Date de la décision : 07/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-07;21.03185 ?
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