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03/05/2024 | FRANCE | N°24/80125

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Jex cab 2, 03 mai 2024, 24/80125


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS





N° RG 24/80125 - N° Portalis 352J-W-B7I-C343P

N° MINUTE :

Notification :
CCC parties LRAR
CE avocat demandeur toque
CCC avocat défendeur toque
le :



SERVICE DU JUGE DE L’EXÉCUTION
JUGEMENT RENDU LE 03 MAI 2024
DEMANDERESSE

Madame [K] [S]
née le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Florent LOYSEAU DE GRANDMAISON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E2146

DÉFENDERESSE

S.A. CREDIT INDUS

TRIEL ET COMMERCIAL
RCS PARIS 542 016 381
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me Isabelle SIMONNEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0578

JUGE ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 24/80125 - N° Portalis 352J-W-B7I-C343P

N° MINUTE :

Notification :
CCC parties LRAR
CE avocat demandeur toque
CCC avocat défendeur toque
le :

SERVICE DU JUGE DE L’EXÉCUTION
JUGEMENT RENDU LE 03 MAI 2024
DEMANDERESSE

Madame [K] [S]
née le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Florent LOYSEAU DE GRANDMAISON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E2146

DÉFENDERESSE

S.A. CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL
RCS PARIS 542 016 381
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me Isabelle SIMONNEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0578

JUGE : Madame Sophie CHODRON DE COURCEL, Juge

Juge de l’Exécution par délégation du Président du Tribunal judiciaire de PARIS.

GREFFIER : Madame Vanessa PAVLOVSKI

DÉBATS : à l’audience du 28 Mars 2024 tenue publiquement,

JUGEMENT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe
contradictoire
susceptible d’appel

* * *
* *
*
EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 17 octobre 2023, le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (ci-après CIC) a pratiqué une saisie conservatoire sur les comptes de Mme [S]. Cette saisie avait été autorisée par ordonnance rendue par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris le 2 octobre 2023. Cette saisie a été dénoncée à Mme [S] le 23 octobre 2023.

Par acte du 11 janvier 2024, Mme [S] a assigné le CIC devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris.

Mme [S] sollicite le rejet des conclusions adverses, la mainlevée de la saisie conservatoire, la condamnation du CIC à lui verser la somme de 10.000 euros de dommages-intérêts pour saisie abusive et la somme de 220 euros au titre des frais de saisie. Subsidiairement, elle sollicite le débouté de la demande de substitution de la saisie conservatoire en inscription d’hypothèque judiciaire provisoire. Enfin, elle sollicite la condamnation du CIC à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Le CIC sollicite le débouté des demandes adverses, subsidiairement, la substitution de la saisie conservatoire de créance opérée selon procès-verbal du 17 octobre 2023 par une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire sur le bien immobilier de Mme [S] sis [Adresse 2] cadastré AC [Cadastre 5] sur les lots 13, 21, 24, 28 et 33 pour un montant de 95.925,48 euros. Enfin, le CIC demande la condamnation de Mme [S] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est fait référence aux conclusions respectives visées et déposées à l’audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le respect du contradictoire

L’article 15 du code de procédure civile prévoit que « Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense. »

L’article 16 du même code prévoit que « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. »

En l’espèce, Mme [S] demande à ce que les conclusions adverses soient écartées car communiquées le matin de l’audience prévue à 14 heures. Le CIC souligne que le calendrier de procédure a été respecté et que des échanges de conclusions postérieurs consistant en une réplique du demandeur le 26 mars en fin de journée ont nécessité une ultime réplique de sa part le 28 mars au matin. Il convient d’ajouter que la procédure étant orale devant le juge de l’exécution et chacune des parties ayant longuement plaidé lors de l’audience du 28 mars 2024, les parties ont été à même de débattre contradictoirement sur l’ensemble des prétentions et moyens développés.

Mme [S] sera déboutée de sa demande tendant à ce que les conclusions adverses soient écartées.

Sur la demande de mainlevée de la saisie conservatoire

L’article L. 511-1 du code des procédures civiles d’exécution dispose que : « Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge de l’exécution l’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement. »

Le risque pesant sur le recouvrement de la créance est souverainement apprécié par les juges du fond, de sorte que la Cour de cassation a dégagé à ce sujet peu de règles de droit, il est admis en doctrine et en jurisprudence que ce risque est évalué à partir d'un faisceau d'indices au premier rang desquels le comportement du débiteur, l’étendue et la nature de son patrimoine, les sûretés grevant déjà ses biens.

L'article L.512-1 prévoit que le juge peut donner mainlevée de la mesure conservatoire s'il apparaît que les conditions prescrites par l'article L. 511-1 ne sont pas réunies.
 
Selon l'article R. 512-1 du même code, en cas de contestation d'une mesure conservatoire, il incombe au créancier de prouver que les conditions requises pour sa validité sont réunies.

En l’espèce, le CIC soutient qu’il détient à l’encontre de Mme [S] une créance d’un montant de 95.925,48 euros en vertu d’un engagement de caution du 24 avril 2018.

Or, il ressort de la réponse apportée le 17 octobre 2023 du CIC, en sa qualité de tiers saisi, qu’était disponible sur les comptes de Mme [S] un montant total saisissable de 292.674,61 euros, soit trois fois le montant de la créance alléguée.

Mme [S] est également propriétaire d’un bien immobilier situé [Adresse 2] représentant plus de 1.100.000 euros, grevé de deux hypothèques représentant un montant total de l’ordre de 770.000 euros. Elle a également des droits en nue-propriété sur un bien situé [Adresse 4] pour un montant de 525.350 euros.

Enfin, elle perçoit des revenus annuels nets de l’ordre de 50.680 euros en 2023, en plus d’un montant mensuel de 8.000 euros au titre de son activité d’autoentrepreneur. Il convient de préciser que la liquidation de la société BAILLY SANTE n’a pas entraîné le licenciement de Mme [S], il ressort des bulletins de paie versés que son contrat a été repris par la société GRANDE PHARMACIE BAILLY.

Au surplus, le refus de règlement de la créance alléguée à réception de la lettre de mise en demeure ne constitue pas une circonstance susceptible de menacer le recouvrement de la créance alléguée, celle-ci étant contestée à plusieurs titres ainsi qu’il ressort de l’argumentation développée dans les conclusions de Mme [S]. La vente de deux biens sur quatre depuis 2020 ne permet pas de caractériser une menace sur le recouvrement, aucune organisation de l’insolvabilité n’étant démontrée.

Il est en outre intéressant de relever que le CIC soutient, dans le cadre de son argumentation tendant à démontrer l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe, l’absence de disproportion de l’engagement de caution lors de l’appel en paiement. Le CIC reconnaît ainsi que Mme [S] dispose de moyens financiers suffisants pour faire face à la créance alléguée.

Les deux conditions étant cumulatives, il n’y a pas lieu de s’attarder sur les moyens respectifs au soutien de l’existence ou non d’une créance paraissant fondée en son principe.
 
Ainsi, tant les événements postérieurs à la saisie conservatoire que le rétablissement du contradictoire ont permis d’établir l’absence de menace sur le recouvrement.
 
En conséquence, il y a lieu d’ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire opérée le 17 octobre 2023 sur les comptes de Mme [S] par le CIC.

Par ailleurs, l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire nécessitant la réunion des mêmes conditions que la saisie conservatoire de créance et la menace sur le recouvrement faisant défaut, outre que la substitution doit être demandée par le débiteur en application de l’article L. 512-1 du code des procédures civiles d’exécution, il convient de débouter le CIC de sa demande subsidiaire de substitution de la saisie conservatoire de créance par une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire.

Sur la demande de dommages-intérêts

L'article L512-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que « Les frais occasionnés par une mesure conservatoire sont à la charge du débiteur, sauf décision contraire du juge.
Lorsque la mainlevée a été ordonnée par le juge, le créancier peut être condamné à réparer le préjudice causé par la mesure conservatoire. »

Il résulte d'une jurisprudence constante que la condamnation du créancier sur le fondement de l'alinéa 2 de cet article ne nécessite pas la constatation d'une faute (cf Ccass. 2e civ, 7 juin 2006, n°04-15.597 ; 3e civ., 21 octobre 2009, n°08-12.687, com., 25 septembre 2012, n°11-22.337).

En l’espèce, sans qu’il soit nécessaire de caractériser une faute, notamment un abus, de la part du CIC, la saisie conservatoire a entraîné une immobilisation de trésorerie d’un montant de 96.352,26 euros entre le 17 octobre 2023 et le 3 mai 2024. Ce préjudice sera réparé par l’allocation d’un montant forfaitaire de 4.000 euros.

Il convient également d’ajouter le montant de 110 euros correspondant aux frais bancaires ainsi qu’il ressort du recueil des tarifs. Une seule saisie conservatoire étant rapportée, il n’y a pas lieu de doubler ce montant.

Finalement, le CIC sera condamné à verser à Mme [S] la somme de 4.110 euros à titre de dommages-intérêts.

Sur les dispositions de fin de jugement

Le CIC sera condamné aux dépens.

Il convient d’allouer à Mme [S] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution,

Déboute Mme [S] de sa demande tendant à ce que les conclusions adverses soient écartées,

Ordonne la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée le 17 octobre 2023 par le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL sur les comptes de Mme [S],

Condamne le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL à verser à Mme [S] la somme de 4.110 euros à titre de dommages-intérêts,

Déboute le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL de sa demande de substitution de la saisie conservatoire en hypothèque judiciaire provisoire,

Condamne le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL à verser à Mme [S] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL aux dépens.

Fait à Paris, le 03 mai 2024

LE GREFFIERLE JUGE DE L’EXÉCUTION


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Jex cab 2
Numéro d'arrêt : 24/80125
Date de la décision : 03/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-03;24.80125 ?
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