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02/05/2024 | FRANCE | N°24/02189

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/1 nationalité a, 02 mai 2024, 24/02189


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/1 nationalité A

N° RG 24/02189
N° Portalis 352J-W-B7I-C4DC4

N° PARQUET : 21/118

N° MINUTE :

Assignation du :
01 Février 2021

M.M.


[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :








JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024










DEMANDERESSE

Madame [U] [E]
[Adresse 4]
MAURITANIE

représentée par Me Eléonore TAVARES DE PINHO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vesti

aire #PB202


DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 5]
[Localité 1]

Madame Sophie BOURLA-OHNONA, Vice-Procureure
Décision du 2 mai 2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Se...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/1 nationalité A

N° RG 24/02189
N° Portalis 352J-W-B7I-C4DC4

N° PARQUET : 21/118

N° MINUTE :

Assignation du :
01 Février 2021

M.M.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024

DEMANDERESSE

Madame [U] [E]
[Adresse 4]
MAURITANIE

représentée par Me Eléonore TAVARES DE PINHO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #PB202

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 5]
[Localité 1]

Madame Sophie BOURLA-OHNONA, Vice-Procureure
Décision du 2 mai 2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section A
RG n° 24/02189

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Maryam Mehrabi, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Victoria Bouzon, Juge
Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Christine Kermorvant, Greffière

DEBATS

A l’audience du 07 Mars 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Maryam Mehrabi, vice-présidente et par Madame Christine Kermorvant, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 1er février 2021 par M. [P] [E] et Mme [J] [X], en qualité de représentants légaux de l'enfant [U] [E], au procureur de la République,

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 29 août 2022,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 6 avril 2023 ayant fixé l'affaire à l'audience du 25 mai 2023,

Vu le jugement rendu le 25 mai 2023 ayant ordonné la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture du 6 avril 2023 et invité Mme [U] [E] à régulariser la procédure,

Vu les conclusions en intervention volontaire de Mme [U] [E] notifiées par la voie électronique le 28 juin 2023,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 19 octobre 2023 ayant fixé l'affaire à l'audience du 9 novembre 2023,

Vu le jugement du 9 novembre 2023 ayant ordonné la radiation de la procédure,

Vu les conclusions de rétablissement de Mme [U] [E] notifiées par la voie électronique le 2 janvier 2024,

Vu le rétablissement de l'affaire à l'audience de plaidoiries du 7 mars 2024,

MOTIFS

Sur la procédure

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, applicable à la date de l'assignation, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 26 avril 2021. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur l’intervention volontaire

Par application des dispositions des articles 66 et 325 du code de procédure civile, il y a lieu de recevoir Mme [U] [E] en son intervention volontaire.

Sur les conclusions et pièces de Mme [U] [E]

Aux termes de ses conclusions aux fins de rétablissement après radiation, notifiées par la voie électronique le 2 janvier 2024, Mme [U] [E] a sollicité la remise de l'affaire au rôle et a également formulé des demandes au fond.

Etant rappelé que l'ordonnance de clôture, rendue le 19 octobre 2023, n'a fait l'objet d'aucune révocation, une telle révocation n'ayant d'ailleurs pas même été sollicitée par les parties, les demandes au fond formulées par Mme [U] [E] aux termes des conclusions notifiées par la voie électronique le 2 janvier 2024 seront jugées irrecevables en application des dispositions des articles 16 et 802 du code de procédure civile.

Le tribunal examinera ainsi les demandes formulées par Mme [U] [E] aux termes de ses conclusions notifiées par la voie électronique le 28 juin 2023, qui constituent ses dernières écritures.

Par ailleurs, le bordereau de communication de pièces communiqué par Mme [U] [E] vise des pièces numérotées 1 à 20. Ces pièces figurent au dossier de plaidoirie déposé devant le tribunal sous les numéros 1 à 22. S'agissant des pièces figurant au dossier de plaidoirie, la demanderesse a omis d'apposer les numéros 14 et 21. Au regard du bordereau de communication de pièces, la numérotation des pièces s'établit comme suit :
- pièce n° 14 du bordereau de communication de pièces : pièce n°15 du dossier de plaidoirie
- pièce n° 15 du bordereau de communication de pièces : pièce n°16 du dossier de plaidoirie
- pièce n° 16 du bordereau de communication de pièces : pièce n°17 du dossier de plaidoirie
- pièce n° 17 du bordereau de communication de pièces : pièce n°18 du dossier de plaidoirie
- pièce n° 18 du bordereau de communication de pièces : pièce n°19 du dossier de plaidoirie
- pièce n° 19 du bordereau de communication de pièces : pièce n°20 du dossier de plaidoirie
- pièce n° 20 du bordereau de communication de pièces : pièce n°22 du dossier de plaidoirie.

Dans le présent jugement, le tribunal suivra la numérotation des pièces telle qu'indiquée au bordereau de communication de pièces.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

Mme [U] [E], se disant née le 11 mars 2004 à [Localité 2] (Maroc), revendique la nationalité française par filiation paternelle, sur le fondement de l'article 18 du code civil. Elle fait valoir que son père, M. [P] [E], né le 22 avril 1964 à [Localité 3] (Mauritanie), a souscrit une déclaration de nationalité française le 15 octobre 1966 sur le fondement de l'article 21-2 du code civil.

Son action fait suite à la décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française qui lui a été opposée le 11 décembre 2017 par le directeur des services de greffe judiciaires du service de la nationalité des Français nés et établis hors de France au motif qu'elle n'avait pas produit les pièces qui lui avaient été demandées (pièce n°1 de la demanderesse).

Sur le fond

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

Conformément à l'article 17-1 du code civil, compte tenu de la date de naissance revendiquée par la demanderesse, l'action relève des dispositions de l’article 18 du code civil aux termes duquel est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français.

Il appartient ainsi à Mme [U] [E], qui n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française, de démontrer, d'une part, la nationalité française du parent duquel elle la tiendrait et, d’autre part, un lien de filiation légalement établi a l’égard de celui-ci, au moyen d’actes d’état civil probants au sens de l’article 47 du code civil, étant précisé qu’afin de satisfaire aux exigences de l’article 20-1 du code civil, cet établissement doit être intervenu pendant sa minorité pour avoir des effets sur la nationalité.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et le Maroc, les actes d'état civil sont dispensés de légalisation par l'article 3 du protocole additionnel franco-marocain du 10 août 1981, publié au journal officiel le 19 décembre 1981, entré en vigueur le 10 août 1981; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer et certifiés conformes à l'original par ladite autorité.

Il en va de même dans les rapports entre la France et la Mauritanie, les actes d'état civil étant dispensés de légalisation par l'article 21 de la convention franco-mauritanienne en matière de justice signée 19 juin 1961 et publiée par décret du 24 janvier 1962.

Par ailleurs, nul ne peut se voir attribuer la nationalité française à quelque titre que ce soit s’il ne justifie pas de façon certaine de son état civil et de celui des ascendants qu’il revendique, par la production de copies intégrales d'actes d’état civil en original, étant précisé que le premier bulletin de la procédure rappelle la nécessité de produire de tels actes.

En l'espèce, Mme [U] [E] verse aux débats une copie de son acte de naissance transcrit sur les registres du service central d'état civil laquelle est produite en simple photocopie. Or, une photocopie étant exempte de toute garantie d'authenticité, cette pièce est dépourvue de toute force probante (pièce n°3 de la demanderesse). Il en va de même de la copie de son acte de naissance marocain produite en simple photocopie en pièce numéro 13.

La demanderesse produit également une copie, délivrée le 23 novembre 2021, de son acte de naissance marocain mentionnant qu'elle est née le 11 mars 2004 à [Localité 2] (Maroc), de [P] [E] et de [J] [L] [D], l'acte ayant été dressé le 14 mai 2009 suivant jugement n°2708/2009 (pièce n°2 de la demanderesse).

Il est également produit l'ordonnance d'inscription d'un nouveau né au registre d'état civil rendue le 6 mai 2009 par le tribunal de première instance de Casablanca sous le numéro 2708 (pièce n°5 de la demanderesse).

S'agissant de son lien de filiation à l'égard de M. [P] [E], Mme [U] [E] soutient que ses parents se sont mariés le 31 octobre 2001 et que si ce mariage a été annulé le 24 février 2011 par le tribunal de grande instance de Nantes, il n'en demeure pas moins qu'il produit effet à son égard en vertu de l'article 202 du code civil.

Elle produit un acte de mariage célébré le 31 octobre 2001 entre M. [P] fils de [E] et Mme [J] fille de [G] [X] (pièce n°8 de la demanderesse). Elle verse également aux débats une copie de l'acte de mariage célébré le 31 octobre 2001 entre M. [P] [E] et Mme [J] [Z] [B] [D] (pièce n°19 de la demanderesse).

Il est d'abord relevé que l'acte de mariage produit en pièce numéro 8 ne mentionne pas le nom de famille des époux mais uniquement leur prénom et le prénom de leurs pères respectifs.

En outre, dans l'acte produit en pièce numéro 19 l'identité de l'épouse est « Mme [J] [Z] [B] [D] » tandis que dans l'acte de naissance de la demanderesse, l'identité de sa mère est indiquée comme « [J] [L] [V] ».

Au regard des incohérences entre les deux actes de mariage et entre l'identité de l'épouse dans l'acte de mariage et celle de la mère dans l'acte de naissance de la demanderesse, la preuve du mariage de ses parents revendiqués n'est pas rapportée.

Par ailleurs, Mme [U] [E] verse aux débats l'acte de mariage de M. [P] [E] et de Mme [J] [D] transcrit sur les registres du service central d'état civil (pièce n°9 de la demanderesse). Toutefois, ce mariage célébré le 17 juin 2012, postérieurement à la naissance de Mme [U] [E], n'établit pas la filiation de celle-ci à l'égard de ses parents revendiqués.

Enfin, Mme [U] [E] fait valoir que sa naissance n'ayant pas été déclarée dans les délais légaux, son père a obtenu une ordonnance d’inscription de de nouveau-né au registre national de l'état civil.

Toutefois, il est relevé que ladite ordonnance indique qu'elle a été rendue à la requête de « Monsieur (sic) [J] [L] [D] ». Ainsi, contrairement aux allégations de Mme [U] [E] ladite ordonnance n'a pas été rendue sur requête présentée par M. [P] [E] agissant en qualité de père de sorte qu'elle ne saurait davantage établir le lien de filiation paternelle de la demanderesse.

Ne justifiant pas d'un lien de filiation légalement établi à l'égard de M. [P] [E], Mme [U] [E] échoue à démontrer qu'elle est de nationalité française par filiation paternelle sur le fondement de l'article 18 du code civil, précité.

En conséquence, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés par le ministère public, Mme [U] [E] sera déboutée de sa demande tendant à se voir reconnaître la nationalité française par filiation paternelle. En outre, dès lors qu'elle ne revendique la nationalité française à aucun autre titre, il sera jugé, conformément à la demande reconventionnelle du ministère public, qu'elle n'est pas de nationalité française.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, Mme [U] [E], qui succombe, sera condamnée aux dépens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Mme [U] [E] ayant été condamnée aux dépens, sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile ;

Reçoit Mme [U] [E] en son intervention volontaire;

Dit irrecevables les demandes au fond formulées par Mme [U] [E] aux termes des conclusions notifiées par la voie électronique le 2 janvier 2024 ;

Déboute Mme [U] [E] de sa demande tendant à voir juger qu'elle est de nationalité française ;

Juge que Mme [U] [E], née le 11 mars 2004 à [Localité 2] (Maroc), n'est pas de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Rejette la demande de Mme [U] [E] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [U] [E] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 02 Mai 2024

La GreffièreLa Présidente
Christine KermorvantMaryam Mehrabi


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/1 nationalité a
Numéro d'arrêt : 24/02189
Date de la décision : 02/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-02;24.02189 ?
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