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02/05/2024 | FRANCE | N°21/12862

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 2ème chambre 2ème section, 02 mai 2024, 21/12862


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions exécutoires délivrées le :
Copies certifiées conformes délivrées le :




2ème chambre



N° RG 21/12862
N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

N° MINUTE :


Assignation du :
12 Octobre 2021








JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024



DEMANDEUR

Monsieur [A] [S] [K] [G]
[Adresse 4]
[Localité 7]

Représenté par Maître Rémy DORANGE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C2202



FENDERESSE

Madame [V]-[P] [I] [M] [Y] veuve [G]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Représentée par Maître Marie-Pierre LEMAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C0166







Décision du 02...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions exécutoires délivrées le :
Copies certifiées conformes délivrées le :

2ème chambre


N° RG 21/12862
N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

N° MINUTE :

Assignation du :
12 Octobre 2021

JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024

DEMANDEUR

Monsieur [A] [S] [K] [G]
[Adresse 4]
[Localité 7]

Représenté par Maître Rémy DORANGE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C2202

DÉFENDERESSE

Madame [V]-[P] [I] [M] [Y] veuve [G]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Représentée par Maître Marie-Pierre LEMAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C0166

Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

* * *

COMPOSITION DU TRIBUNAL

M. Jerôme HAYEM, Vice-Président
Madame Claire ISRAEL, Vice-Présidente
Madame Caroline ROSIO, Vice-Présidente

assistés de Sylvie CAVALIE, greffière lors de l’audience et de Adélie LERESTIF, greffière lors de la mise à disposition.

DEBATS

A l’audience collégiale du 01 Février 2024, présidée par Jérôme HAYEM et tenue publiquement, rapport a été fait par Claire ISRAEL, en application de l’article 804 du code de procédure civile.

Après clôture des débats, avis a été donné aux conseils des parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2024. Ultérieurement, ils ont été informés que la décision serait prorogée, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire et en premier ressort

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCEDURE

Mme [V]-[P] [Y] et [E] [G] se sont mariés le [Date mariage 2] 1966, sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts, à défaut de contrat préalable.

Aucun enfant n’est issu de leur union. [E] [G] a eu un enfant, hors mariage, M. [S], [K], [A] [G] dit [A] [G], qu’il a reconnu le 15 mars 1993.

Par testament olographe en date du 10 mars 1984, [E] [G] a institué son épouse, légataire universelle de sa succession.

Le 28 août 2002, les époux ont adopté le régime de la communauté universelle aux termes d’un acte reçu par Maître [C], notaire à [Localité 10], homologué par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 septembre 2003.

Le contrat de mariage prévoit, en cas de dissolution du mariage par le décès de l’un des époux, l’attribution de tous les biens qui composent la communauté en pleine propriété à l’époux survivant, qu’il existe ou non des enfants du mariage.

Par un second testament olographe en date du 8 septembre 2006, [E] [G] a légué la totalité de ses biens en usufruit à son épouse.

Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

[E] [G] est décédé le [Date décès 3] 2020 laissant pour lui succéder ab intestat :
Son épouse, Mme [V]-[P] [Y] veuve [G], Son fils, M. [A] [G]. Par exploits d’huissier en date du 12 octobre 2021, M. [A] [G] a fait assigner Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d’exercice de l’action en retranchement et de voir fixer l’indemnité de réduction à hauteur 983 456,15 euros à titre principal et subsidiairement aux fins de voir ordonner le partage judiciaire de la succession d’[E] [G].

Par ordonnance du 24 octobre 2022, le juge de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir relative à l’action en retranchement et déclaré la demande de M. [A] [G] tendant à « fixer le montant de l’indemnité de réduction à la somme de 983 465,15 euros » recevable. Il a en revanche déclaré irrecevable la demande de partage judiciaire de la succession d’[E] [G].

Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 2 mars 2023, M. [A] [G] demande au tribunal de :
Juger Monsieur [G] recevable et bien fondé en son action en retranchement, Juger le montant de l’indemnité de réduction a la somme de 983 456,15 euros, Débouter Mme [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions, Juger qu’en application de l’article 752 du code de procédure civile, le demandeur est d’accord pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire, CONDAMNER à la somme de 5 000 euros Mme [V] [P] [Y] au titre de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers depens au profit de Me DORANGE, Avocat, aux offres de droit, conforme ment a l’article 699 du CPC. Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 2 mai 2023, Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] demande au tribunal de :

Statuer ce que de droit sur le principe de la demande en retranchement formulée par Monsieur [A] [G], Débouter Monsieur [A] [G] de sa demande tendant à voir fixer le montant de l’indemnité de réduction à la somme de 983 456.16 euros, En ce qui concerne les demandes reconventionnelles de Mme [Y] veuve [G]:
Accueillir les demandes reconventionnelles de Mme [G], la déclarer recevable et bien fondée en son action en partage, Ordonner l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de biens existants entre M. [G] et Mme [Y] tant sur la liquidation du régime matrimonial existant entre les époux que sur la succession ouverte par le prédécès de M. [E] [G], Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

Désigner un notaire pour procéder audites opérations, Dire que le notaire devra procéder à ces opérations et établir un état liquidatif établissant les comptes entre les parties, la masse partageable, les droits des parties et : Dresser un inventaire des biens de la communauté ayant existé entre M. [E] [G] et Mme [Y]Calculer le montant de la quotité disponible dont peut bénéficier Madame [G] en application de l’article 1094-1 du code civil, Dire si cet avantage excède les limites de ce dont M. [E] [G] pouvait disposer à titre gratuit en faveur du conjoint, Dans l’affirmative, calculer le montant de l’indemnité de l’action en retranchement dans le cas où M. [A] [G] accepterait la succession, Établir les récompenses dues à la communauté en raison de contrats d’assurance-vie souscrits par M. [E] [G] ayant pour bénéficiaire en partie ou totalement des tiers, Autoriser le notaire à s’adresser à tout service compétent (organismes financiers, bancaires et assureurs notamment pour les assurances-vie) et notamment [8] et [9] (pour les numéros de comptes visés dans les présentes conclusions) qui sera tenue de communiquer l’ensemble des informations nécessaires à sa mission, et notamment : les contrats d’assurance-vie, les clauses de bénéficiaires, les clauses de changement de bénéficiaires, les avenants modificatifs, le détail des versements des primes d’assurance (montant, date, périodicité), le montant du capital versé, l’identité des bénéficiaires, la date de délivrance du capital, Ordonner aux organismes concernés de communiquer les éléments susvisés, Commettre le juge de la mise en état en qualité de juge commissaire aux fins de surveiller lesdites opérations, Dire que les dépens seront employés en frais généraux de partage, A titre infiniment subsidiaire,

Dans l’hypothèse extraordinaire où il serait fait droit uniquement à la demande de Monsieur
[G],
DIRE et JUGER que Monsieur [G] est redevable envers la communauté ayant existé entre Monsieur [E] [G] et Madame [V] [G], d’une récompense correspondant au montant des primes versées sur les contrats d’assurances-vie de 468 932.25 euros, conformément aux tableaux établis par Maître [U], Notaire, ayant servi au calcul de l’indemnité de retranchement sollicitée par Monsieur [A] [G], Condamner Monsieur [A] [G] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers dépens au profit de Maître Marie-Pierre LEMAS, conformément à l’article 699 du CPC. L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 mai 2023 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 1er février 2024.
Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

A l’audience du 1er février 2024, le tribunal a invité les parties à lui communiquer l’acte de changement de régime matrimonial et le jugement d’homologation.
Par message du 13 février 2024, le conseil du demandeur a adressé ces pièces au tribunal.
Par ailleurs, par messages adressés par le RPVA en date des 1er et 13 février 2024, les conseils de parties ont adressé au tribunal des notes en délibéré portant sur le fond du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les notes en délibéré

Aux termes de l’article 445 du code de procédure civile, après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444.

En l’espèce, le tribunal a uniquement invité les parties à lui communiquer dans le temps du délibéré l’acte de changement de régime matrimonial et le jugement d’homologation mais n’a nullement autorisé le dépôt de notes en délibéré portant sur le fond du litige.

Les notes en délibéré adressées au tribunal par messages des 1er et 13 février 2024 sont donc irrecevables et il n’y sera pas répondu.

Sur la demande de partage
Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] demande au tribunal d’ordonner le partage du régime matrimonial des époux [Y] et [G] et de la succession d’[E] [G] et d’ordonner que le notaire commis désigné pour procéder à ces opérations dresse un inventaire des biens de la communauté, calcule le montant de l’indemnité de réduction et « établisse les récompenses dues en raison des contrats d’assurance-vie ».
Elle fait valoir que la succession comporte un passif correspondant aux récompenses dues à la communauté à raison de la souscription des contrats d’assurance-vie au bénéfice de M. [A] [G] qui ont été alimentés par des deniers communs, de sorte que la succession est redevable d’une récompense en application de l’article 1437 du code civil, sans qu’il y ait lieu de démontrer que les primes étaient manifestement exagérées et qu’en application des dispositions de l’article 1469 du code civil, la récompense correspond au montant de la dépense faite, c’est-à-dire des primes versées par la communauté.
Elle indique qu’il est indispensable qu’un notaire soit désigné au regard des divergences sur la méthode de calcul et sur les droits des parties, avec pour mission de solliciter les contrats d’assurance-vie pour déterminer les récompenses. Il conviendra d’autoriser le notaire à demander l’ensemble des informations nécessaires aux compagnies d’assurance et d’ordonner à ces dernières de communiquer les éléments susvisés.
Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

M. [A] [G] s’oppose à ces demandes. Il souligne que la défenderesse a d’ailleurs soulevé l’irrecevabilité de ces mêmes demandes qu’il formait à titre subsidiaire sur le fondement de l’article 1360 du code de procédure civile, et que le juge de la mise en état a fait droit à cette fin de non-recevoir. Il expose sur le fond que la défenderesse n’a jamais contesté ses droits mais au contraire l’a enjoint de signer rapidement l’acte établi par le notaire mais tente uniquement de diminuer la valeur de l’indemnité de réduction en arguant d’une récompense due à la communauté au motif de contrats d’assurance vie qu’elle ne communique pas.
Sur ce
Aux termes de l’article 815 du code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention.
Encore faut-il que la partie qui demande que soit ordonné le partage judiciaire d’une indivision, en démontre l’existence.
Or en l’espèce, il n’existe pas d’indivision post-communautaire, dès lors que par convention du 28 août 2002 homologuée par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 septembre 2003, les époux ont adopté le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale de la communauté au profit du conjoint survivant.
La demande tendant à ordonner l’ouverture des opérations de partage judiciaire du régime matrimonial sera dès lors rejetée, étant rappelé que les dispositions de l’article 1364 du code de procédure civile qui permettent la désignation d’un notaire s’inscrivent exclusivement dans le cadre d’opérations de partage complexe d’une indivision.
Par ailleurs, si par sa demande en partage, Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] manifeste son intention d’accepter la succession d’[E] [G] et si une indivision est ainsi susceptible d’exister entre elle et M. [A] [G], le tribunal n’ayant pas connaissance d’un acte par lequel Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] a accepté le legs universel consenti à son profit, il lui appartient néanmoins de rapporter la preuve qu’il existe des biens à partager, dépendant de la succession.
Or, il résulte de ses écritures et ce n’est pas contesté par M. [A] [G], que la succession ne comporte aucun actif, aucune clause d’exclusion n’ayant été stipulée dans le contrat de communauté universelle des époux.
Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] indique en effet que la succession ne comporte qu’un passif correspondant aux récompenses dues à la communauté au titre des contrats d’assurance-vie.
Dès lors, en l’absence de masse à partager dépendant de la succession, il n’existe pas d’indivision successorale, de sorte que la demande de partage judiciaire de la succession sera également rejetée, de même que toutes les demandes subséquentes de désignation d’un notaire commis et d’un juge commis.

Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

Sur l’action en retranchement

M. [A] [G] se fonde sur les dispositions des articles 921, 922 et 1527 du code civil pour soutenir que Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] est débitrice à son égard d’une indemnité de réduction au titre du retranchement de l’avantage matrimonial qu’elle retire du contrat de mariage qui lui attribue l’intégralité des biens de la communauté au décès d’[E] [G] et qui excède la quotité disponible spéciale entre époux.

Il fait valoir s’agissant du calcul de l’indemnité due que :
Sa réserve est de la moitié, Le montant de l’indemnité a déjà été calculé par le notaire de la défenderesse et fixé à 983 456,15 euros, sans contestation de sa part.
Par ailleurs, sur le fondement des articles L. 132-13 et L. 132-16 du code des assurances, il soutient qu’il n’y a pas lieu de déduire de cette indemnité, le montant d’une prétendue récompense due par la succession d’[E] [G] à la communauté au titre des primes versées au moyen de deniers communs sur des contrats d’assurance-vie souscrits par [E] [G] au bénéfice de tiers, dès lors qu’il n’est justifié ni de la date de souscription, ni de l’origine des fonds, ni de la date ou du montant des primes versées ni des bénéficiaires de ces contrats.

Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] ne conteste pas le principe de la créance de M. [A] [G] à son encontre au titre de l’action en retranchement. Elle conteste en revanche le montant de l’indemnité de réduction sollicitée par M. [A] [G], sans justificatifs et alors que le notaire a été dans l’impossibilité d’obtenir des compagnies d’assurance-vie les informations nécessaires.
Elle ajoute qu’en sollicitant une indemnité de réduction d’un montant de 983 456,15 euros, M. [A] [G] reconnaît implicitement le montant des récompenses dues par la succession dès lors que ces récompenses ont été prises en compte dans la liquidation de la communauté par le notaire pour le calcul de l’avantage matrimonial.

Sur ce

Aux termes de l’article 1527 du code civil, les avantages que l'un ou l'autre des époux peut retirer des clauses d'une communauté conventionnelle, ainsi que ceux qui peuvent résulter de la confusion du mobilier ou des dettes, ne sont point regardés comme des donations.
Néanmoins, au cas où il y aurait des enfants qui ne seraient pas issus des deux époux, toute convention qui aurait pour conséquence de donner à l'un des époux au-delà de la portion réglée par l'article 1094-1, au titre " Des donations entre vifs et des testaments ", sera sans effet pour tout l'excédent ; mais les simples bénéfices résultant des travaux communs et des économies faites sur les revenus respectifs quoique inégaux, des deux époux, ne sont pas considérés comme un avantage fait au préjudice des enfants d'un autre lit.

Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

En l’espèce, il ressort de l’acte du 28 aout 2002, homologué par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 septembre 2003, que les époux [G] et [Y] ont adopté le régime de la communauté universelle, avec clause d’attribution intégrale au dernier époux survivant, de sorte qu’au décès d’[E] [G], la totalité des biens composant la communauté est devenue la propriété de Mme [V]-[P] [Y] veuve [G].

Il est par ailleurs constant selon les écritures des parties que Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] a opté au décès d’[E] [G] pour la quotité ordinaire, soit la moitié en pleine propriété en application des articles 1094-1 et 913 du code civil.

[E] [G] laissant à son décès un enfant qui n’est pas issu de son union avec Mme [V]-[P] [Y] veuve [G], M. [A] [G] est bien fondé à demander la réduction de la convention matrimoniale qui a pour conséquence de donner Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] au-delà de cette quotité, soit au-delà de la moitié des biens du défunt.

Ainsi que l’a indiqué le notaire, Maître [O] [R]-[U], qui a établi un projet liquidatif sur lequel se fondent les parties, il convient de déterminer dans un premier temps l’avantage résultant de la convention matrimoniale en procédant à une double liquidation : d’une part à une liquidation fictive comme si le régime matrimonial était la communauté légale, en tenant compte s’il y a lieu des reprises et récompenses, et d’autre part à la détermination de la part qui revient au conjoint survivant en application des dispositions du contrat de mariage adopté par les époux. Il convient ensuite de déterminer le taux de réduction de cet avantage matrimonial compte tenu de l’excédent par rapport à la quotité disponible spéciale entre époux pour laquelle le conjoint survivant a opté.

Les parties ne contestent pas les valeurs retenues par Maître [R]-[U] s’agissant de l’actif et du passif de la communauté légale ou de la communauté universelle, notamment s’agissant de la valeur estimative du bien immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 6].

La récompense due par la communauté en raison de l’encaissement par elle du montant revenant à [E] [G] dans la succession de [B] [W], décédée le [Date décès 5] 2010, retenue par le notaire dans le cadre de la liquidation fictive de la communauté légale, d’un montant de 91 297,08 euros ne fait pas non plus l’objet de contestations.

Aux termes des conclusions, les parties sont uniquement en désaccord sur les récompenses dues à la communauté, invoquées par Mme [V]-[P] [Y] veuve [G], au titre des contrats d’assurance-vie souscrites par le défunt au profit d’un tiers bénéficiaire, dont elle soutient qu’ils ont été alimentés par des deniers communs.

Le notaire a en effet retenu dans son projet de liquidation fictive de la communauté légale et dans le cadre de la liquidation de la communauté universelle, un montant total de 468 932,25 euros au titre des récompenses dues à la communauté en raison de la souscription de six contrats d’assurance-vie auprès d’[8] et du [9], alimentés à l’aide de deniers communs au profit d’un tiers bénéficiaire, le montant de la récompense correspondant pour chaque contrat au montant des primes versées.
Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

En application de l’article 1437 du code civil, la communauté qui a alimenté un contrat d’assurance-vie d’un des époux, souscrit au profit d’un tiers bénéficiaire, a en effet droit à récompense à ce titre.
Toutefois, il incombe à l’époux qui invoque cette récompense de rapporter la preuve que ce sont des deniers communs qui ont alimenté le contrat d’assurance-vie et que le bénéficiaire est bien un tiers, dès lors qu’au contraire, en application des dispositions des articles L.132-13 et L. 132-16 du code des assurances, aucune récompense n’est en principe due à la communauté en raison des primes payées par elle pour alimenter un contrat d’assurance-vie souscrit en faveur du conjoint, à moins que les primes versées n'aient été manifestement exagérées eu égard aux facultés du conjoint contractant.
En l’espèce, aucune des pièces versées aux débats ne permet d’identifier les bénéficiaires des six contrats d’assurance-vie litigieux, ni de justifier du montant des primes effectivement versées ni de leur date de versement.
Par courriel du 10 mars 2021, le notaire a adressé aux parties les tableaux liquidatifs, qui sont ceux communiqués au tribunal, et a joint les éléments reçus du [9] mais qui ne portent que sur les contrats souscrits par Mme [V]-[P] [Y] veuve [G]. Elle indique s’agissant des récompenses au titre des contrats d’assurance-vie souscrit par [E] [G], que les montants indiqués sont ceux qui lui ont été communiqués par Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] et invite les parties à faire une demande auprès d’un « juge » pour obtenir les pièces justificatives des compagnies d’assurance.
Pourtant, la défenderesse se contente de produire aux débats un courrier manuscrit de [E] [G] en date du 23 juillet 2018 et un document annoté par elle-même en date du 4 mai 2021, sur lesquels figurent des noms de bénéficiaires, des valeurs de rachat et des sommes reçues, ces deux pièces étant insuffisantes à rapporter la preuve du montant des primes versées par la communauté sur les contrats d’assurance-vie litigieux et du bénéficiaire de ces contrats, en l’absence de toute pièce émanant des compagnies d’assurance, étant observé que le juge de la mise en état n’a été saisi d’aucune demande de communication de pièces dirigées contre ces dernières.
Dès lors, il convient d’écarter les récompenses dues à la communauté, retenues par le notaire tant dans la liquidation fictive de la communauté légale que dans la liquidation de la communauté universelle.

Il en résulte que dans le cadre de la liquidation fictive de la communauté légale :
le montant de l’actif brut doit être fixé à 3 315 143,52 euros (3 692 778,69 – 377 635,17), le montant du passif de communauté doit être à 135 845,35 euros (44 548,27 + 91 297,08).
En conséquence, l’actif net est d’un montant de 3 179 298,17 euros, dont la moitié pour le conjoint survivant, soit 1 589 649,085 euros.
Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

S’agissant de la part revenant au conjoint en application du contrat de mariage, soit de la liquidation du régime de communauté universelle, il convient de nouveau de retrancher du montant de l’actif de communauté, le montant des récompenses dues par la succession soit la somme de 468 932,25 euros, de sorte que l’actif brut s’élève à la somme de 3 315 143,52 euros (3 784 075,77 – 468 932,25), soit un actif net de 3 270 595,25 euros (3 315 143,52 -44 548,27), revenant en totalité au conjoint survivant, en application de la clause d’attribution intégrale.
L’avantage matrimonial se calcule donc comme suit :
Somme revenant au conjoint survivant en application de la clause d’attribution intégrale 
3 270 595,25
Somme revenant au conjoint survivant à défaut de convention matrimoniale
-1589649
Avantage dont bénéficie le conjoint survivant
1680946
Il convient ensuite de calculer la quotité disponible de la succession d’[E] [G], en application de l’article 922 du code civil.
A défaut de biens existants, et dès lors qu’il n’est pas allégué que le défunt a consenti d’autres libéralités devant être fictivement réunies à la masse, la masse de calcul se compose uniquement de l’avantage matrimonial, soit 1 680 946,165 euros.
La quotité disponible spéciale entre époux en application de l’article 1094-1 du code civil, compte tenu de l’option du conjoint survivant est donc de la moitié, soit 840 473,0825 euros et l’avantage matrimonial excède donc de 50% cette quotité dont pouvait disposer le défunt, de sorte que le taux de réduction doit être fixé à 50%.
Il n’est enfin pas allégué que depuis le décès, la valeur des biens composant l’avantage matrimonial a varié, de sorte que ce taux de réduction de 50% doit être appliqué à la valeur de l’avantage matrimonial pour calculer le montant de l’indemnité de réduction, soit un montant de 840 473,10 euros arrondi.
Il n’y a enfin pas lieu de déduire de cette indemnité, comme l’a fait le notaire, le montant des récompenses à la charge de la succession que le tribunal a écartées ci-dessus, étant au surplus et en tout état de cause observé que Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] a accepté la succession par sa demande de partage de l’indivision successorale, de sorte qu’elle serait également tenue en tant qu’indivisaire d’un éventuel passif de la succession.
Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] sera donc condamnée à verser à M. [A] [G] la somme de 840 473,10 euros au titre de l’indemnité de réduction.
Enfin, en conséquence des motifs qui précèdent, la demande subsidiaire de Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] tendant à dire que M. [A] [G] est redevable envers la communauté ayant existé entre elle et [E] [G] d’une récompense de 468 932,25 euros au titre des primes versées sur les contrats d’assurance-vie sera également rejetée.
Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 21/12862 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVJGR

Sur les demandes accessoires

Mme [V]-[P] [Y] VEUVE [G], partie succombant à l’instance, sera condamnée aux dépens, avec distraction.

Le caractère familial du litige commande en revanche de rejeter les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il y a enfin lieu de rappeler que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort
DÉCLARE irrecevables les notes en délibéré adressées au tribunal par messages électroniques en date des 1er et 13 février 2024,

REJETTE les demandes de Mme [V]-[P] [Y] VEUVE [G] tendant à :
Ordonner l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de biens existants entre M. [G] et Mme [Y] tant sur la liquidation du régime matrimonial existant entre les époux que sur la succession ouverte par le prédécès de M. [E] [G], Désigner un notaire pour procéder audites opérations, Dire que le notaire devra procéder à ces opérations et établir un état liquidatif établissant les comptes entre les parties, la masse partageable, les droits des parties et : Dresser un inventaire des biens de la communauté ayant existé entre M. [E] [G] et Mme [Y]Calculer le montant de la quotité disponible dont peut bénéficier Madame [G] en application de l’article 1094-1 du code civil, Dire si cet avantage excède les limites de ce dont M. [E] [G] pouvait disposer à titre gratuit en faveur du conjoint, Dans l’affirmative, calculer le montant de l’indemnité de l’action en retranchement dans le cas où M. [A] [G] accepterait la succession, Établir les récompenses dues à la communauté en raison de contrats d’assurance-vie souscrits par M. [E] [G] ayant pour bénéficiaire en partie ou totalement des tiers, Autoriser le notaire à s’adresser à tout service compétent (organismes financiers, bancaires et assureurs notamment pour les assurances-vie) et notamment [8] et [9] (pour les numéros de comptes visés dans les présentes conclusions) qui sera tenue de communiquer l’ensemble des informations nécessaires à sa mission, et notamment : les contrats d’assurance-vie, les clauses de bénéficiaires, les clauses de changement de bénéficiaires, les avenants modificatifs, le détail des versements des primes d’assurance (montant, date, périodicité), le montant du capital versé, l’identité des bénéficiaires, la date de délivrance du capital, Ordonner aux organismes concernés de communiquer les éléments susvisés, Commettre le juge de la mise en état en qualité de juge commissaire aux fins de surveiller lesdites opérations,
CONDAMNE Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] à verser à M. [A] [G] la somme de 840 473,10 euros au titre de l’indemnité de réduction,

REJETTE la demande subsidiaire de Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] tendant à dire que M. [A] [G] est redevable envers la communauté ayant existé entre elle et [E] [G] d’une récompense de 468 932,25 euros au titre des primes versées sur les contrats d’assurance-vie,

CONDAMNE Mme [V]-[P] [Y] veuve [G] aux dépens,

DIT que les dépens pourront être recouvrés par Maître Rémi DORANGE, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

REJETTE l’ensemble des demande formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 02 Mai 2024

La GreffièreLe Président
Adélie LERESTIF Jerôme HAYEM


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 2ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 21/12862
Date de la décision : 02/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-02;21.12862 ?
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