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30/04/2024 | FRANCE | N°22/05418

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 6ème chambre 1ère section, 30 avril 2024, 22/05418


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




6ème chambre 1ère section

N° RG 22/05418 -
N° Portalis 352J-W-B7G-CW2YZ

N° MINUTE :




Assignation du :
02 mai 2022




JUGEMENT
rendu le 30 avril 2024
DEMANDERESSE

Société Adoma
[Adresse 7]
[Localité 10]

représentée par Maître Nicolas DHUIN de la SELEURL NHDA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0213

















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DÉFENDEURS

S.A.R.L. Schneider + Matthys Architectes
[Adresse 8]
[Localité 9]

Monsieur [Y] [T]
[Adresse 16]
[Localité 2]

Société Mutuelle des Architectes Français (MAF)
[Adresse 5]
[Localité 12]

représentés par :
Maître Sop...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

6ème chambre 1ère section

N° RG 22/05418 -
N° Portalis 352J-W-B7G-CW2YZ

N° MINUTE :

Assignation du :
02 mai 2022

JUGEMENT
rendu le 30 avril 2024
DEMANDERESSE

Société Adoma
[Adresse 7]
[Localité 10]

représentée par Maître Nicolas DHUIN de la SELEURL NHDA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0213

DÉFENDEURS

S.A.R.L. Schneider + Matthys Architectes
[Adresse 8]
[Localité 9]

Monsieur [Y] [T]
[Adresse 16]
[Localité 2]

Société Mutuelle des Architectes Français (MAF)
[Adresse 5]
[Localité 12]

représentés par :
Maître Sophie TESSIER de la SELARL PARINI-TESSIER, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #G0706,
Maître Laurent CINELLI, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant

S.A. MONACO INGENIERIE PARTNERS
[Adresse 4]
[Localité 15]

représentée par Maître Nicolas DUVAL de la SELEURL NOUAL DUVAL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0493

S.A.S. FAYAT BATIMENT
[Adresse 19]
[Localité 1]

représentée par Maître Patrice D’HERBOMEZ de l’AARPI D’HERBOMEZ LAGRENADE & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C0517

S.A. SMA SA
[Adresse 13],
[Localité 11]

représentée par Maître Claire FEREY de la SCP SCP FEREY AVOCAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C0541

Compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD En sa qualité d’assureur de la Société MIP
[Adresse 6]
[Localité 14]

représentée par Maître Stella BEN ZENOU de la SELARL CABINET BEN ZENOU, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #G0207

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Céline MECHIN, vice-président
Marie PAPART, vice-président
Clément DELSOL, juge

assisté de Catherine DEHIER, greffier,

Décision du 30 avril 2024
6ème chambre 1ère section
N° RG 22/05418 -
N° Portalis 352J-W-B7G-CW2YZ

DÉBATS

A l’audience du 27 février 2024 tenue en audience publique devant Marie PAPART, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Décision publique
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Céline MECHIN, président et par Catherine DEHIER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******************
EXPOSE DU LITIGE :

La société ADOMA est propriétaire d’un terrain situé [Adresse 3] à [Localité 17], sur lequel a été érigée une résidence « [Adresse 18] ». Elle a entrepris des travaux de réhabilitation et de restructuration de la résidence, comprenant la création de niveaux supplémentaires (R-7 et R-8) pour réaliser douze studios.

L’opération de construction a été conduite par un groupement solidaire de maîtrise d’œuvre constitué par :
-la SARL SCHNEIDER + MATTHYS ARCHITECTES (mandataire) assuré auprès de la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF) ;
-Monsieur [Y] [T] ;
-la SA Monaco Ingénierie Partners (ci-après « la SA MIP »).

L’opération a été réalisée en corps d’états séparés et le macro-lot n°1 (VRD - Espaces verts - Désamiantage - Démolitions - Fondations - Gros œuvre - Maçonnerie - Etanchéité - Cloisons - Carrelage - Faïences) a été attribué à la société FAYAT BATIMENT, assurée auprès de la SMA SA.

Le 11 décembre 2017, à l’occasion d’intempéries, des eaux se sont infiltrées au R-8, endommageant l’étage nouvellement construit, y compris l’ascenseur, alors que les appartements étaient achevés ou en cours de finition.

La société ADOMA a procédé à une déclaration de sinistre auprès de l’assureur Tous Risques Chantier la société ALLIANZ, lequel a diligenté une expertise amiable et pris en charge les travaux de réparation des ouvrages endommagés par les infiltrations pour un montant de 148 606,24 euros.

Les travaux d’étanchéité ont été confiés à la société ETANDEX, laquelle a découvert en cours de chantier que les murs en sortie d’ascenseur en R-8 seraient en bloc à bancher creux alors que le dossier des ouvrages exécutés (DOE) mentionnait des voiles en béton.

A l’occasion du constat pour non-conformité des supports, le bureau d’études, BEIE, a signalé des anomalies sur le ferraillage du béton.

La société ADOMA a déclaré le dommage à la société ALLIANZ, également assureur dommages-ouvrage.

Une expertise amiable a été diligentée, et un procès-verbal de constat d’huissier dressé à la demande de la société ADOMA.

Par actes d'huissier de justice signifiés les 2 et 3 mai 2022, la société ADOMA a assigné M. [T], la SARL SCHNEIDER + MATTHYS ARCHITECTES, la SA MIP et son assureur la société AXA France IARD, la MAF, la SAS FAYAT BATIMENT, et la SA SMA SA devant la présente juridiction aux fins de :

« Vu l’article 1231-1 du code civil,
Vu l’article L124-3 du code des assurances,

- Déclarer la société Schneider + Matthys Architectes, M. [Y] [T], la société Monaco Ingénierie Partners et la société Fayat Bâtiment solidairement responsables des préjudices subis par la société Adoma ;

- Condamner solidairement les société Schneider + Matthys Architectes, M. [Y] [T], la société Monaco Ingénierie Partners, Fayat Bâtiment, la Mutuelle des Architectes Français, Axa Iard France et la société SMA SA à verser à la société Adoma la somme de 221.970,22 € de dommages et intérêts au titre du préjudice financier liés aux travaux ;

- Les condamner solidairement à verser à la société Adoma la somme de 59.052 € de dommages et intérêts au titre du préjudice immatériel subi par Adoma ;

- Les condamner solidairement au paiement de la somme de 7.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

- Les condamner solidairement aux dépens. »

A l’appui de ses prétentions, la demanderesse expose que :

-la maîtrise d’œuvre a commis une faute dans la mesure où elle ne s’est pas assurée que l’entrepreneur, la SAS FAYAT BATIMENT, avait pris en compte toutes les sujétions imposées, et où elle a omis de contrôler les travaux réalisés par la SAS FAYAT BATIMENT au titre de l’étanchéité ; or celle-ci a reconnu n’avoir pas chiffré ni réalisé l’étanchéité des parois enterrées ni les joints de dilatation des voiles enterrés comme prévu au CCTP du lot n°1 (pièce n°9 p.78 et 81, pièce n°11 ; Civ 3e, 24 février 2009, n°08-11335) ;

-la SAS FAYAT BATIMENT a manqué à son obligation de résultat en ne procédant pas à la réalisation de l’ouvrage prévu, en l’espèce :
*en ne procédant pas aux prestations décrites ci-dessus et en refusant de les réaliser à l’issue de l’expertise amiable ayant mis en évidence cette non-conformité ;
*en mettant en place au droit des murs en sortie d’ascenseur en R-8 un ferraillage ne correspondant pas aux plans de ferraillage fournis par le maître d’ouvrage (voiles réalisés non pas en béton armé mais de type blocs 20 cm à bancher, non remplis ou partiellement remplis de béton voire de déchets – pièces n°12,13 et 18)

-au titre de ses préjudices :
*la demanderesse a dû faire reprendre les travaux non réalisés par la SAS FAYAT BATIMENT pour un montant total de 370 576,46 euros HT (316 466,46 euros au titre du marché attribué à la société ETANDEX et 54 110 euros pour permettre à la société ETANDEX d’intervenir sur un support adéquat), dont doit être déduite l’indemnité de 148 606,24 euros versée par l’assureur TRC, soit un montant total de 221 970,22 euros HT ;
*la demanderesse a subi une perte d’exploitation pour cinq studios situés au niveau R-8 d’un loyer mensuel de 421,80 euros à compter du 1er août 2018, soit un préjudice immatériel d’un montant total de 59 052 euros comprenant :
-50 616 euros arrêté au 1er septembre 2020,
-outre quatre mois de perte d’exploitation correspondant à la durée des investigations relatives aux anomalies de ferraillage et à la durée des travaux réalisés soit 8 436 euros (5 studios x 421,80 euros de loyer x 4 mois) ;

-conformément à l’article L124-3 du code des assurances, la concluante est bien fondée à exercer l’action directe à l’encontre de la MAF, assureur des maîtres d’œuvre, de AXA France IARD assureur de la SA MIP, et de la SMA SA, assureur de la SAS FAYAT BATIMENT.

*

Par conclusions notifiées par voie électronique le 30 mai 2023, la société AXA France IARD sollicite de voir :

" Vu les articles 1231-1, 1240 et 1792 du code civil

A titre principal :

Juger que les garanties facultatives souscrites par MIP auprès d’AXA FRANCE n’ont pas vocation à s’appliquer au regard des dates de réclamation des trois griefs allégués par ADOMA,

Juger que les griefs allégués par ADOMA ne sont pas de nature décennale et ne peuvent être garantis par AXA France

Débouter ADOMA et toute autre partie des demandes dirigées contre d’AXA FRANCE, assureur de MIP,

A titre subsidiaire :

Juger que les demandes d’ADOMA sont injustifiées et irrecevables,

Débouter ADOMA de l’ensemble de ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire :

Condamner solidairement SCHNEIDER + MATTHYS ARCHITECTES, [Y] [T], leur assureur la MAF, FAYAT BATIMENT et son assureur la SMA SA, MIP à relever et garantir AXA FRANCE de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre,

Autoriser AXA FRANCE à appliquer les limites contractuelles de sa police, y compris la franchise actualisée.

En tout état de cause :

Condamner la partie succombante à verser AXA FRANCE, assureur de MIP, 4.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens."

Au soutien de sa défense, la société AXA France IARD fait valoir que:

-la police d’assurance au titre de la responsabilité décennale souscrite par la SA MIP auprès de la concluante a pris effet le 1er janvier 2012 mais a été résiliée à compter du 1er janvier 2017 ; la concluante n’était donc pas l’assureur de la SA MIP à la date des réclamations (premier grief allégué en décembre 2017), ni à la date de survenance des désordres (les deux autres désordres ont été découverts en 2020), de sorte que les garanties facultatives de la police souscrite par la SA MIP ne sont pas mobilisables ;
-seul le volet responsabilité civile décennale serait de nature à être mobilisable au regard de la date de la déclaration d’ouverture de chantier, cependant, la garantie décennale ne peut être mobilisée que pour les vices cachés survenus après la réception qui rendent l’ouvrage impropre à sa destination ou affectent la solidité des éléments constitutifs ; or aucun des griefs allégués par la demanderesse n’est de nature décennale et cette dernière recherche d’ailleurs la responsabilité contractuelle des constructeurs ;

-à titre subsidiaire, les travaux réalisés par la société ETANDEX étaient prévus au CCTP ; la dépense subséquente n’est pas la conséquence des désordres mais relève de la réalisation de l’ouvrage tel que prévu à l’origine ; au surplus, la nécessité de réaliser une contre cloison et de procéder au grattage d’un enduit en raison de la non-conformité des murs en sortie d’ascenseur n’est pas démontrée, pas plus que son lien avec la non-conformité des murs de sortie d’ascenseurs ;

-à titre infiniment subsidiaire, si la concluante était condamnée, elle serait bien fondée à appeler en garantie les responsables des griefs allégués par la demanderesse ainsi que leurs assureurs respectifs en tant qu’assureur de la SA MIP.

*

Par bulletin daté du 30 janvier 2023, le juge de la mise en état a entre autres invité les défendeurs à conclure.

Par bulletin daté du 05 juin 2023, le juge de la mise en état a fait injonction de conclure à l’ensemble des défendeurs (hormis à la SA AXA France IARD ayant conclu) pour l’audience de mise en état du 11 septembre 2023.

Une ordonnance de clôture partielle à leur encontre a été rendue le 11 septembre 2023.

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique les 12, 19 et 22 octobre 2023, la SA MIP, la SAS FAYAT BATIMENT, et la SA SMA SA ont sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture partielle.

M. [T], la SARL SCHNEIDER+MATTHYS ARCHITECTES et la MAF, la SAS FAYAT BATIMENT, et la SA SMA SA ont notifié par voie électronique leurs conclusions au fond respectivement les 21 septembre, 19 et 23 octobre 2023.

Par ordonnance datée du 23 octobre 2023, leurs demandes de révocation de clôture partielle ont été rejetées, leurs conclusions au fond déclarées irrecevables et l’instance clôturée.

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique les 21 et 22 février 2024, M. [T], la SARL SCHNEIDER+MATTHYS ARCHITECTES et la MAF d’une part, la SAS FAYAT BATIMENT et la SMA SA d’autre part, ont sollicité la révocation de l’ordonnance de clôture.

Par conclusions en réponse d’incident notifiées par voie électronique le 26 février 2024, la demanderesse sollicite le rejet des demandes de révocation de clôture.

M. [T], la SARL SCHNEIDER+MATTHYS ARCHITECTES et la MAF, la SAS FAYAT BATIMENT, et la SA SMA SA ont notifié par voie électronique leurs conclusions récapitulatives au fond respectivement les 21 et 22 février 2024.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 27 février 2024, et l'affaire mise en délibéré au 30 avril 2024, date du présent jugement.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus.

MOTIVATION :

Préalables :

A titre liminaire, il convient de préciser que les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas nécessairement des prétentions au sens des dispositions des articles 4 et 30 du code de procédure civile dès lors qu'elles ne confèrent pas de droit spécifique à la partie qui en fait la demande. Elles ne feront alors pas l'objet d'une mention au dispositif.

I - Sur les demandes de révocation de l’ordonnance de clôture :

Aux termes de l'article 802 du code de procédure civile : " Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.
Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption. "

Aux termes de l'article 803 du même code : " L'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation.
Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l'instruction, l'ordonnance de clôture n'est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout.
L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision du tribunal.
L'ordonnance de clôture peut également être révoquée, après recueil de l'avis des parties, afin de permettre au juge de la mise en état, conformément à l'article 785, de décider de la convocation des parties à une audience de règlement amiable selon les modalités prévues aux articles 774-1 à 774-4. "

Il résulte de ces dispositions que si les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture sont recevables postérieurement à la clôture, celle-ci ne peut être révoquée qu'en cas de cause grave s'étant révélée postérieurement à la clôture, la cause grave relevant de l'appréciation souveraine du juge.

En l'espèce, si les demandes de révocation de clôture de M. [T], la SARL SCHNEIDER+MATTHYS ARCHITECTES et la MAF d’une part, la SAS FAYAT BATIMENT et la SMA SA d’autre part sont recevables, ceux-ci ne justifient nullement de l'existence d'une cause grave survenue postérieurement à la clôture des débats, condition sine qua non posée par la loi et confirmée par la jurisprudence.

Les défendeurs concernés reprennent les mêmes arguments présentés lors de leurs demandes de révocation de clôture partielle, lesquels ont déjà été rejetés dans l’ordonnance de clôture.

Il sera rappelé que l'ordonnance de clôture partielle sanctionne le non accomplissement d'actes de procédure dans le délai imparti par l'avocat concerné ; qu'en l'espèce, les avocats des parties concernées n'ont pas conclu avant la date du 11 septembre 2023 malgré injonction qui leur en a été faite par bulletin datée du 05 juin 2023 ; qu’ils n’ont d’ailleurs même pas pris la peine d’en informer le juge de la mise en état, ni d’envoyer un quelconque message en vue de l’audience de mise en état du 11 septembre 2023 ; qu'ils ne pouvaient pas prétendre ignorer qu'en ne respectant pas une injonction ils s'exposaient à voir ordonner la clôture à leur encontre.

Par conséquent, la demande de révocation de la clôture sera rejetée, et les conclusions récapitulatives notifiées par les parties concernées postérieurement à l’ordonnance de clôture seront déclarées irrecevables.

II – Sur la demande d’indemnisation de la société ADOMA :

Aux termes de l'article 1217 du code civil : « La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »

Aux termes de l'article 1231-1 du même code : « Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. »

De jurisprudence constante, l’entrepreneur est responsable dès lors que les objectifs prévus ne sont pas atteints, que les délais d'exécution convenus avec le maître de l'ouvrage sont dépassés, sauf événement réunissant les caractères de la force majeure, fait d'un tiers ou du maître de l'ouvrage. Au contraire, le maître d’œuvre n’est tenu que d’une obligation de moyens.

II.A – Sur la matérialité des désordres :

II.A.1 – Sur les infiltrations :

Il résulte des rapports d’expertise amiable des cabinets SARETEC et BEIE mandatés par la SA ALLIANZ assureur TRC du demandeur en date du 25 novembre 2019 versés aux débats que le désordre consiste en un écoulement des eaux ruisselant le long de la falaise et inondant le niveau R-8 du bâtiment y compris la cage d’ascenseur, survenu le 11 décembre 2017.

La matérialité du dommage est donc établie.

II.A.2 – Sur les anomalies des murs en sortie d’ascenseur au niveau R-8 :

Il résulte de l’acte d’engagement daté du 05 mai 2014 et signé de la SAS FAYAT BATIMENT que celle-ci a été chargée du lot n°1 de l’opération d’extension et de restructuration de la résidence comprenant entre autres les travaux relatifs aux fondations, au gros-œuvre et à la maçonnerie tels que définis au CCTP.

Il ressort de l’analyse des articles 4.5.2.10 et 4.5.3.1 du CCTP relatifs à l’infrastructure et à la superstructure du bâtiment que l’ensemble des voiles bétons intérieurs et extérieurs ainsi que les élévations intérieures et extérieures à tous les niveaux pour la construction des bâtiments (y compris les voiles bétons et élévations des gaines techniques), entre autres, suivant les plans de principes de structure et d’architecte, doivent être réalisés en béton armé. Il en découle que les murs concernés devaient donc être réalisés en béton armé.

Or, le rapport visuel du cabinet BEIE daté du 2 septembre 2020 effectué à l’occasion des travaux de reprise du désordre d’infiltrations signale que les murs en sortie d’ascenseur du niveau R-8 sont en bloc à bancher creux, et que le ferraillage n’est pas liaisonné à la dalle béton du plancher haut.

Le rapport de reconnaissance de ferraillage effectué par la société GINGER CEBTP par inspections au radar/ferroscan et sondages destructifs le 08 octobre 2020 corrobore ce constat visuel en précisant que le ferraillage mis en place au droit des voiles menant à l’ascenseur ne correspond pas aux plans fournis par le maître d’ouvrage, les voiles étant constitués en blocs à bancher dont une grande partie ne sont pas remplis, d’autres étant partiellement remplis de béton voire de déchets, au lieu de béton armé prévu sur les plans de ferraillages.

Ce constat est également étayé par le procès-verbal de constat d’huissier réalisé le 20 mai 2021 sur le couloir en sortie d’ascenseur, comportant les mêmes observations sur l’absence de voiles de béton, le couloir étant constitué de deux parois en blocs d’aggloméré banchés, sur l’absence d’enrobage des fers et sur un manque de coulage de béton dans les blocs d’aggloméré banchés.

Il résulte du rapport préliminaire de l’expert amiable (cabinet SARETEC) daté du 02 février 2021 qu’une modification du projet initial a été effectuée et était nécessairement connue des acteurs de la construction, que la nature du sol rocheux, lequel se serait révélé plus compact et moins friable que prévu, pourrait expliquer que des murs de remplissage aient finalement été réalisés dans cette partie du bâtiment ne participant pas au contreventement général, qu’aucun dommage structurel n’est observé et que le représentant du bureau de contrôle QUALICONSULT a indiqué qu’aucune exigence de dimensionnement parasismique n’était exigée pour cette partie en extension du bâtiment existant.

Partant, même si aucun dommage n’est caractérisé, la non-conformité de l’ouvrage aux prescriptions contractuelles (blocs à bancher au lieu de béton armé) et les malfaçons (blocs à bancher non- ou partiellement remplis) sont établies.

II.B – Sur les responsabilités des intervenants et la garantie des assureurs :

II.B.1 – Sur les responsabilités des intervenants :

II.B.1.a - Au titre des infiltrations :

Il est affirmé dans le cadre des rapports d’expertise amiable des cabinets SARETEC et BEIE en date du 25 novembre 2019 qu’au regard des déclarations des intervenants et du maître d’œuvre chargé du suivi des travaux selon lesquelles aucun traitement étanche n’a été réalisé au droit du joint de dilatation ni contre le mur réalisé contre terre, les causes des infiltrations sont à rechercher exclusivement dans l’absence de traitement étanche de la paroi contre terre et des joints de dilatation des voiles enterrés, l’hypothèse d’infiltrations par un défaut de condamnation d’anciens réseaux ayant été écartée eu égard aux investigations menées.

Il sera néanmoins fait observer que le rapport d’intervention diagnostique du réseau en eaux pluviales du bâtiment effectué par la société AX’EAU en date du 11 juillet 2019 annexé au rapport du cabinet BEIE souligne le fait que la majorité des eaux pluviales ne sont pas canalisées, et que les eaux de pluie et les eaux souterraines en provenance de la colline sont acheminées au pied des murs de soubassement du bâtiment côté nord-ouest, sur l’une des parties mitoyennes à la zone la plus touchée par les inondations.

Le rapport d’intervention diagnostique du réseau d’évacuation des eaux pluviales en toiture terrasse effectué par le cabinet BEIE le 03 septembre 2019 souligne également l’absence de dispositions de type canalisation de drainage en pied de bâtiment.

Surtout, il sera rappelé que n’a été versé aux débats aucun élément sur les investigations permettant de démontrer d’une part l’absence de mise en œuvre d’étanchéité, d’autre part le fait que cette absence serait la cause exclusive des infiltrations ; aucune indication quant à l’identité des intervenants qui auraient confirmé cette absence de mise en œuvre d’étanchéité n’a été donnée, aucune précision quant au cadre dans lequel ils se seraient exprimés n’a été fournie, ni aucune preuve de ce qu’ils auraient été conviés aux opérations d’expertise amiable dans le cadre desquelles leurs propos sont rapportés.

Dans ces conditions, l’origine du dommage n’est pas démontrée, et la responsabilité ne saurait en être attribuée à l’un quelconque des intervenants.

II.B.1.a - Au titre des anomalies des murs en sortie d’ascenseur au niveau R-8 :

Il ressort de ce qui précède (cf II.A.2) qu’il était prévu au CCTP du contrat conclu entre le demandeur et la SAS FAYAT BATIMENT que les murs en question soient réalisés en béton armé et que tel n’a pas été le cas.

Il résulte également de ce qui précède que la SAS FAYAT BATIMENT a été chargée de la réalisation des murs en question.

En l’absence de tout avenant au contrat écartant ou modifiant les prescriptions concernées stipulées aux articles 4.5.2.10 et 4.5.3.1 du CCTP, il y a donc lieu de retenir la responsabilité de la SAS FAYAT BATIMENT pour n’avoir pas respecté ces prescriptions et, au surplus, avoir mal rempli les blocs à bancher.

II.B.2 – Sur la garantie des assureurs :

Aux termes de l'article L.124-3 du code des assurances : « Le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré. »

II.B.2.a – Sur la garantie de la MAF :

La responsabilité de la société SCHNEIDER+MATTHYS ARCHITECTES n’ayant pas été retenue, la garantie de la MAF, son assureur, n’est pas mobilisable.

II.B.2.b – Sur la garantie de AXA France IARD :

La responsabilité de la société MONACO INGENIERIE PARTNERS n’ayant pas été retenue, la garantie de AXA France IARD, son assureur, n’est pas mobilisable.

II.B.2.c – Sur la garantie de la SMA SA :

Aux termes de l'article 1315 du code civil : « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. »

En l’espèce, le demandeur sollicite la condamnation de la SMA SA en tant qu’assureur de la SAS FAYAT BATIMENT, mais ne verse aucune pièce aux débats démontrant que la SMA SA était bien l’assureur de la SAS FAYAT BATIMENT pour les travaux litigieux.

Partant, la garantie de la SMA SA n’est pas mobilisable.

II.C – Sur l’indemnisation des préjudices :

II.C.1 – Sur le préjudice matériel :

L’ensemble des travaux de reprise dont l’indemnisation est sollicitée ne concerne que les désordres liés aux infiltrations ; aucune responsabilité des intervenants visés n’ayant été retenue au titre de ces désordres, il ne sera pas fait droit aux prétentions du demandeur.

II.C.2 – Sur les préjudices immatériels :

La perte d’exploitation des studios sis au niveau R-8 du bâtiment dont l’indemnisation est sollicitée ne concerne que les désordres liés aux infiltrations ; aucune responsabilité des intervenants visés n’ayant été retenue au titre de ces désordres, il ne sera pas fait droit aux prétentions du demandeur.

III – Sur les demandes accessoires :

Aux termes de l'article 696 alinéa 1 du code de procédure civile: « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. »

Aux termes de l'article 700 alinéas 1 et 2 du même code : « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer:
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. »

En l'espèce, le demandeur succombe en ses prétentions essentielles, aussi, il sera condamné aux dépens.

En équité, il convient de condamner le demandeur à payer à AXA France IARD la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort ;

Rejette les demandes de révocation de l’ordonnance de clôture formulées par Monsieur [Y] [T], la SARL SCHNEIDER+MATTHYS ARCHITECTES, la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS, la SAS FAYAT BATIMENT et la SMA SA ;

Déclare irrecevables les conclusions au fond notifiées par Monsieur [Y] [T], la SARL SCHNEIDER+MATTHYS ARCHITECTES, la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS, la SAS FAYAT BATIMENT et la SMA SA postérieurement à l’ordonnance de clôture ;

Déboute la société ADOMA de l’intégralité de ses demandes ;

Condamne la société ADOMA aux dépens de l'instance ;

Condamne la société ADOMA à verser à la société AXA France IARD la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Rappelle que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire conformément aux dispositions de l'article 514 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes.

Fait et jugé à Paris le 30 avril 2024

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 6ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 22/05418
Date de la décision : 30/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-30;22.05418 ?
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