La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/04/2024 | FRANCE | N°24/02231

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 26 avril 2024, 24/02231


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Philippe YLLOUZ


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Geneviève AUGENDRE

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 24/02231 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4EO7

N° MINUTE :







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 26 avril 2024

DEMANDERESSE

Madame [I] [E],
[Adresse 1]

comparante en personne assistée de Maître Geneviève AUGENDRE de la SELEURL AUGENDRE AVOCATS, avoca

ts au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [G] [O],
[Adresse 2]

représenté par Me Philippe YLLOUZ, avocat au barreau de PARIS,

Madame [W] [B],
[Adresse 2]

représentée par Me P...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Philippe YLLOUZ

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Geneviève AUGENDRE

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 24/02231 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4EO7

N° MINUTE :

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 26 avril 2024

DEMANDERESSE

Madame [I] [E],
[Adresse 1]

comparante en personne assistée de Maître Geneviève AUGENDRE de la SELEURL AUGENDRE AVOCATS, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [G] [O],
[Adresse 2]

représenté par Me Philippe YLLOUZ, avocat au barreau de PARIS,

Madame [W] [B],
[Adresse 2]

représentée par Me Philippe YLLOUZ, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Joséphine DEMIGNE, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 06 mars 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 26 avril 2024 par Joséphine DEMIGNE, Juge, assistée de Aurélia DENIS, Greffier
Décision du 26 avril 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 24/02231 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4EO7

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 2 septembre 2021, Mme [I] [E] a consenti un bail d’habitation à M. [G] [O] et Mme [W] [B] sur des locaux situés au [Adresse 2], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 1410 euros et d’une provision pour charges de 150 euros.

Par actes de commissaire de justice du 1er février 2023, la bailleresse a fait délivrer aux locataires un commandement de payer la somme principale de 1560 euros au titre de l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [G] [O] et Mme [W] [B] le 2 février 2023.

Par assignations du 26 décembre 2023, Mme [I] [E] a ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris en référé pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisée à faire procéder à l’expulsion de M. [G] [O] et Mme [W] [B] et obtenir leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :

- une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,
- 4680 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif arrêté au 30 juin 2023, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer,
- 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 28 décembre 2023, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.

Prétentions et moyens des parties

À l'audience du 6 mars 2024, Mme [I] [E] maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 6 mars 2024, s'élève désormais à 10920 euros. Mme [I] [E] maintient sa demande d’acquisition de la clause résolutoire et s’oppose à d’éventuels délais de paiement.

M. [G] [O] et Mme [W] [B] indique qu’ils ont repris le paiement du loyer courant puisqu’ils ont établi un chèque de 1560 euros à l’ordre de Mme [I] [E] mais que celle-ci refuse de l’encaisser.

M. [G] [O] et Mme [W] [B] sollicitent la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais de paiement.

En application de l'article 24 V de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les parties ont été invitées à produire tous éléments relatifs à l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

M. [G] [O] et Mme [W] [B] ont indiqué ne pas faire l’objet d’une telle procédure.

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIVATION

1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail
1.1. Sur la recevabilité de la demande

Mme [I] [E] justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

1.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de location a été signifié aux locataires le 1er février 2023. Or, d’après l'historique des versements, la somme de 1560 euros n’a pas été réglée par ces derniers dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

La bailleresse est donc bien fondée à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 2 avril 2023.

Cependant, selon l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges. Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l’espèce, force est de constater que M. [G] [O] et Mme [W] [B] ont effectué un chèque à Madame [I] [E] de l’ordre de 1560 euros, montant égal au loyer mensuel. Par conséquent, et en dépit du refus de Madame [I] [E] d’encaisser ce chèque, il convient de considérer que, conformément à l'article 4 du code de procédure civile, la condition de reprise du paiement intégral du loyer courant avant la date de l'audience est réputée satisfaite.

Par ailleurs, il ressort des éléments du dossier, et notamment de l’audience, que les revenus du foyer de M. [G] [O] et Mme [W] [B] leur permettent raisonnablement d’assumer le paiement d’une somme de 390 euros par mois en plus du loyer courant afin de régler leur dette.

Dans ces conditions, il convient de leur accorder des délais de paiement pour s’acquitter des sommes dues, selon les modalités prévues ci-après, et de faire droit à la demande de M. [G] [O] et Mme [W] [B] de suspension les effets de la clause résolutoire durant le cours de ces délais.

En cas de respect de ces modalités de paiement, la clause résolutoire sera donc réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre.

L’attention des locataires est toutefois attirée sur le fait qu’à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle décision de justice ne soit nécessaire : dans ce cas, et pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse pourra faire procéder à leur expulsion, et à celle de tout occupant de leur chef.

2. Sur la dette locative

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, Mme [I] [E] verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 6 mars 2024, M. [G] [O] et Mme [W] [B] lui devaient la somme de 10920 euros, soustraction faite des frais de procédure.

M. [G] [O] et Mme [W] [B] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, ils seront solidairement condamnés à payer cette somme à la bailleresse, à titre de provision.

Toutefois, eu égard aux délais de paiement évoqués ci-avant, il convient de différer l'exigibilité de cette somme en autorisant M. [G] [O] et Mme [W] [B] à se libérer de cette dette selon les modalités détaillées ci-après.

3. Sur l’indemnité d’occupation

En cas de maintien dans les lieux des locataires ou de toute personne de leur chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due. Au regard du montant actuel du loyer et des charges, son montant sera provisoirement fixé à la somme mensuelle de 1560 euros.

L’indemnité d’occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, à partir du 2 avril 2023, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à Mme [I] [E] ou à son mandataire.

4. Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

M. [G] [O] et Mme [W] [B], qui succombent à la cause, seront solidairement condamnés aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité commande par ailleurs de faire droit à hauteur de 300 euros à la demande de Mme [I] [E] concernant les frais non compris dans les dépens, en application des dispositions précitées.

Selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement. Selon le dernier alinéa de l’article 514-1 du même code, le juge ne peut toutefois pas écarter l'exécution provisoire de droit lorsqu'il statue en référé. La présente ordonnance sera donc assortie de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 1er février 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu le 2 septembre 2021 entre Mme [I] [E], d’une part, et M. [G] [O] et Mme [W] [B], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] est résilié depuis le 2 avril 2023,
CONDAMNE solidairement M. [G] [O] et Mme [W] [B] à payer à Mme [I] [E] la somme de 10920 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif arrêté au 06 mars 2024 ,

AUTORISE M. [G] [O] et Mme [W] [B] à se libérer de leur dette en réglant chaque mois pendant 24 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 390 euros (trois cent quatre-vingt-dix euros), la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à M. [G] [O] et Mme [W] [B],

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise,

DIT qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée quinze jours après l’envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception,

le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 2 avril 2023,
le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de M. [G] [O] et Mme [W] [B] et à celle de tous occupants de leur chef, au besoin avec l’assistance de la force publique,
le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
M. [G] [O] et Mme [W] [B] seront solidairement condamnés à verser à Mme [I] [E] une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux,
RAPPELLE que la présente ordonnance est exécutoire de droit à titre provisoire,

CONDAMNE solidairement M. [G] [O] et Mme [W] [B] à payer à Mme [I] [E] la somme de 300 euros (trois cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE solidairement M. [G] [O] et Mme [W] [B] aux dépens comprenant notamment le coût des commandements de payer du 1er février 2023 et celui des assignations du 26 décembre 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 26 avril 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 24/02231
Date de la décision : 26/04/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-26;24.02231 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award