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26/04/2024 | FRANCE | N°23/09437

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 26 avril 2024, 23/09437


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Madame [J] [E]


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Fabrice POMMIER

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/09437 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3PDU

N° MINUTE :







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 26 avril 2024


DEMANDERESSE

ETABLISSEMENT PUBLIC [Localité 3] HABITAT OPH,
[Adresse 2]

représentée par Maître Fabrice POMMIER de l’ASSOCIATION AMIGUES, AUB

ERTY, JOUARY & POMMIER, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [J] [E],
[Adresse 1]

comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Joséphine DEMIGNE, Juge, juge des contenti...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Madame [J] [E]

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Fabrice POMMIER

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/09437 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3PDU

N° MINUTE :

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 26 avril 2024

DEMANDERESSE

ETABLISSEMENT PUBLIC [Localité 3] HABITAT OPH,
[Adresse 2]

représentée par Maître Fabrice POMMIER de l’ASSOCIATION AMIGUES, AUBERTY, JOUARY & POMMIER, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [J] [E],
[Adresse 1]

comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Joséphine DEMIGNE, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 06 mars 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 26 avril 2024 par Joséphine DEMIGNE, Juge, assistée de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 26 avril 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/09437 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3PDU

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 31 janvier 2022, [Localité 3] HABITAT OPH a consenti un bail d’habitation à Mme [J] [E] sur des locaux situés au [Adresse 1] à [Localité 4].

Par acte de commissaire de justice du 21 novembre 2022, le bailleur a fait délivrer à la locataire un commandement de payer visant la somme principale de 1957,05 euros au titre de l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de Mme [J] [E] le 29 novembre 2022.

Par assignation du 2 novembre 2023, [Localité 3] HABITAT OPH a ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris en référé pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisé à faire procéder à l’expulsion de Mme [J] [E] et obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :

une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,3993,13 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif arrêté au 10 octobre 2023, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer,500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 3 novembre 2023, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.

Prétentions et moyens des parties

Initialement prévue le 16 janvier 2024, l’affaire a été renvoyée au 6 mars 2024. Madame [E] fait état de problèmes de santé lesquels justifient selon elle son refus des propositions de relogement du FSL.

À l'audience du 6 mars 2024, [Localité 3] HABITAT OPH maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 27 février 2024, s'élève désormais à la somme de 4684,87 euros. [Localité 3] HABITAT OPH considère enfin qu'il y a bien eu une reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989. [Localité 3] HABITAT OPH s’oppose à la demande de suspension des effets de la clause résolutoire.

Mme [J] [E] souhaite se maintenir dans les lieux. Elle indique qu’elle perçoit désormais les APL et produit au soutien de cet élément deux attestations de paiement de la CAF pour les mois d’octobre 2023 à décembre 2023. Elle indique avoir repris le versement du loyer grâce à l’aide de son nouveau compagnon. Elle propose de payer la somme mensuelle de 100 euros en plus du loyer courant pendant 36 mois.

Mme [J] [E] sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais de paiement.

En application de l'article 24 V de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les parties ont été invitées à produire tous éléments relatifs à l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

Mme [J] [E] a indiqué ne pas faire l’objet d’une telle procédure.

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIVATION

1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail

1.1. Sur la recevabilité de la demande

[Localité 3] HABITAT OPH justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Il justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

1.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de location a été signifié à la locataire le 21 novembre 2022. Or, d’après l'historique des versements, la somme de 1957,05 euros n’a pas été réglée par cette dernière dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

Le bailleur est donc bien fondé à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 22 janvier 2023.

Cependant, selon l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges. Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l’espèce, eu égard à l'accord des parties sur ce point et conformément à l'article 4 du code de procédure civile, la condition de reprise du paiement intégral du loyer courant avant la date de l'audience est réputée satisfaite.

Par ailleurs, il ressort des éléments du dossier, et notamment de l’audience, que les revenus du foyer de Mme [J] [E] lui permettent raisonnablement d’assumer le paiement d’une somme de 36 euros par mois en plus du loyer courant afin de régler sa dette. En effet, Madame [E] perçoit désormais les APL et celle-ci indique lors de l’audience que son nouveau compagnon participe au règlement du loyer. Il n’est d’ailleurs pas contesté que celle-ci parvient désormais à s’acquitter du loyer courant.

Dans ces conditions, il convient de lui accorder des délais de paiement pour s’acquitter des sommes dues, selon les modalités prévues ci-après, et de faire droit à la demande de Mme [J] [E] de suspension les effets de la clause résolutoire durant le cours de ces délais.

En cas de respect de ces modalités de paiement, la clause résolutoire sera donc réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre.

L’attention de la locataire est toutefois attirée sur le fait qu’à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle décision de justice ne soit nécessaire : dans ce cas, et pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, le bailleur pourra faire procéder à son expulsion, et à celle de tout occupant de son chef.

2. Sur la dette locative

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, [Localité 3] HABITAT OPH verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 27 février 2024, Mme [J] [E] lui devait la somme de 4684,87 euros, soustraction faite des frais de procédure.

Mme [J] [E] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, elle sera condamnée à payer cette somme au bailleur, à titre de provision, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Toutefois, eu égard aux délais de paiement évoqués ci-avant, il convient de différer l'exigibilité de cette somme en autorisant Mme [J] [E] à se libérer de cette dette selon les modalités détaillées ci-après.

3. Sur l’indemnité d’occupation

En cas de maintien dans les lieux de la locataire ou de toute personne de son chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due. Celle-ci sera égale au montant du loyer mensuel charges comprises.

L’indemnité d’occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, à partir du 22 janvier 2023, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à [Localité 3] HABITAT OPH ou à son mandataire.

4. Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

Mme [J] [E], qui succombe à la cause, sera condamnée aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

En revanche, compte tenu de sa situation économique, il n'y a pas lieu de la condamner à une quelconque indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement. Selon le dernier alinéa de l’article 514-1 du même code, le juge ne peut toutefois pas écarter l'exécution provisoire de droit lorsqu'il statue en référé. La présente ordonnance sera donc assortie de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATONS que la dette locative visée dans le commandement de payer du 21 novembre 2022 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATONS, en conséquence, que le contrat conclu le 31 janvier 2022 entre [Localité 3] HABITAT OPH, d’une part, et Mme [J] [E], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 1] à [Localité 4] est résilié depuis le 22 janvier 2023,

CONDAMNONS Mme [J] [E] à payer à [Localité 3] HABITAT OPH la somme de 4684,87 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif et les indemnités d’occupation arrêtés au 27 février 2024, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

AUTORISONS Mme [J] [E] à se libérer de sa dette en réglant chaque mois pendant 36 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 100 euros, la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DISONS que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

SUSPENDONS les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à Mme [J] [E],

DISONS que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise,

DISONS qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée quinze jours après l’envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception,

le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 22 janvier 2023,
le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
le bailleur pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de Mme [J] [E] et à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique,
le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
Mme [J] [E] sera condamnée à verser à [Localité 3] HABITAT OPH une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux,
RAPPELLONS que la présente ordonnance est exécutoire de droit à titre provisoire,

DÉBOUTONS [Localité 3] HABITAT OPH de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS Mme [J] [E] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer du 21 novembre 2022 et celui de l'assignation du 2 novembre 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 26 avril 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/09437
Date de la décision : 26/04/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-26;23.09437 ?
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