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26/04/2024 | FRANCE | N°18/13525

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 3ème section, 26 avril 2024, 18/13525


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le:
à Me FISHER, Me DEL RIO et Me DID MOULAI
Copies certifiées
conformes délivrées le:
à Me LARGER-LANNELONGUE




8ème chambre
3ème section

N° RG 18/13525
N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

N° MINUTE :

Assignation du :
12 novembre 2018








JUGEMENT

rendu le 26 avril 2024
DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], représenté par son syndic la S.A.S. ORALIA MEILLANT ET BOURDELEAU


[Adresse 3]
[Adresse 3]

représenté par Maître Franck FISCHER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0750


DÉFENDERESSES

Société dénommée SCCV PARIS 10, Société Civile de...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le:
à Me FISHER, Me DEL RIO et Me DID MOULAI
Copies certifiées
conformes délivrées le:
à Me LARGER-LANNELONGUE

8ème chambre
3ème section

N° RG 18/13525
N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

N° MINUTE :

Assignation du :
12 novembre 2018

JUGEMENT

rendu le 26 avril 2024
DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], représenté par son syndic la S.A.S. ORALIA MEILLANT ET BOURDELEAU
[Adresse 3]
[Adresse 3]

représenté par Maître Franck FISCHER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0750

DÉFENDERESSES

Société dénommée SCCV PARIS 10, Société Civile de Construction Vente
[Adresse 1]
[Adresse 1]

représentée par Maître Sylvie LARGER-LANNELONGUE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1251

S.A. ENTREPRISE GENERALE LEON GROSSE
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représentée par Maître Carmen DEL RIO de la SELARL SELARL RODAS DEL RIO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0126

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

S.A. AXA FRANCE IARD, en sa qualité d’assureur de la S.A. ENTREPRISE GENERALE LEON GROSSE
[Adresse 4]
[Adresse 4]

représentée par Maître Samia DIDI MOULAI de la SELAS CHETIVAUX-SIMON Société d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0675

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Frédérique MAREC, première vice-présidente adjointe
Madame Lucile VERMEILLE, vice-présidente
Monsieur Cyril JEANNINGROS, juge

assistés de Madame Léa GALLIEN, greffier

DÉBATS

A l’audience du 01 février 2024 présidée par Madame Frédérique MAREC
tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 26 avril 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
Premier ressort

FAITS ET PRÉTENTIONS

La copropriété du [Adresse 5] est composée de plusieurs bâtiments dont deux donnant sur la rue, séparés par un porche qui donne accès d’une part aux bâtiments intérieurs, d’autre part à une parcelle enclavée bénéficiant d’une servitude de passage.

En vue de la réalisation d’une opération de promotion immobilière dénommée « Les Terrasses d’Opale » confiée à la société COFFIM, consistant en la construction de 57 logements libres, 14 logements sociaux et 40 places de parkings, la SCCV Paris 10 a acquis, par acte du 22 décembre 2014, divers bâtiments situés [Adresse 5] ainsi que les lots n°302, 303 et 304 dans l’immeuble voisin sis [Adresse 5].

Un permis de construire délivré le 26 mars 2014 à la société COFFIM a été transféré à la SCCV PARIS 10 par un arrêté du 24 juin 2014.

La SA Entreprise générale Léon Grosse, assurée auprès de la SA Axa France IARD, est intervenue à l’opération de construction en qualité d’entreprise générale.

Par exploits signifiés les 21, 24, 25 et 26 novembre 2014, la SCCV Paris 10 a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris afin d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire avec une mission de type « référé préventif », au contradictoire notamment du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5].

M. [S] [T] a été désigné ès qualités par une ordonnance du 04 décembre 2014.

La parcelle située [Adresse 5] étant en partie enclavée, une assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], réunie le 2 mars 2015, a autorisé la société SCCV Paris 10 à réaliser divers travaux et mis à la charge de cette dernière une indemnité d’un montant de 153.000 euros TTC qui a été réglée.

Lors d’une seconde assemblée spéciale en date du 5 novembre 2015, le syndicat des copropriétaires a été autorisé à racheter à la SCCV Paris 10, moyennant une somme de 100 euros, les lots n°102, 103, 301, 302, 303 et 304.

Se plaignant de la mauvaise exécution par cette dernière des résolutions de l’assemblée générale du 2 mars 2015, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] a, par courrier du 23 juin 2017, rappelé ses obligations au promoteur et sollicité la mise en place d’une discussion amiable pour fixer l’indemnisation des préjudices subis.

Par courrier en réponse du 30 juin 2017, la SCCV Paris a contesté les griefs soulevés et refusé toute nouvelle indemnisation.

Les travaux ont été réceptionnés le 26 juin 2017 avec réserves et le rapport de M. [T] a été déposé le 25 juillet 2017.

***

Par acte introductif d’instance du 12 novembre 2018, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] a fait citer la SCCV Paris 10 devant le tribunal de grande instance de Paris.

Cette dernière a fait assigner en intervention forcée la SA Entreprise générale Léon Grosse par exploit en date du 08 avril 2021 et la jonction des deux affaires a été ordonnée le 23 juin 2021.

Par exploit en date du 21 février 2022, la SCCV Paris 10 a également appelé en garantie la compagnie Axa France IARD, prise comme assureur de la SA Entreprise générale Léon Grosse et la jonction avec la présente affaire a été ordonnée le 30 novembre 2022.

***

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 avril 2022, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] demande au tribunal, au visa de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 544, 1240 et suivants du code civil de (sic) :
Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

« • DEBOUTER la défenderesse de ses demandes, fins et conclusions

• CONSTATER DIRE ET JUGER que la société SCCV PARIS 10 n’a pas respecté d’une part ses obligations suite aux autorisations de travaux qui lui ont été accordés lors de l’assemblée du 2 mars 2015

• CONSTATER DIRE ET JUGER que les travaux réalisés ne sont pas en tous points conformes au projet approuvé par l’AG du 2 mars 2015

• ORDONNER en conséquence à la société SCCV PARIS 10 – sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la signification de jugement à intervenir, et jusqu’à la réalisation effective des travaux et jusqu’au contrôle par l’Architecte de l’immeuble desdits travaux – de réaliser – selon les règles de l’art -les travaux suivants :

- la suppression aux frais de la défenderesse des piliers de soutènement posés sans autorisation dans le sous-sol situé sous le passage cocher en prenant toutes dispositions utiles pour que la voute soit soutenue dans des conditions de sécurité optimale.

- Le rétablissement à l’initial des canalisations dévoyées par la société SCCV PARIS 10 afin qu’elles ne gênent plus la reconstitution en vue de leur cloisonnement des caves.

- La remise en état de l’enrobé du passage réalisé sous la maîtrise d’ouvrage du syndicat des copropriétaires et la maîtrise d’œuvre de monsieur [U] et immédiatement dégradé par le passage d’engins en provenance du chantier

- La remise en état de la façade de l’immeuble salie par l’incendie de deux bennes, et la remise en état de l’arête du linteau du porche endommagé par le passage des engins de construction du chantier effectué par la société SCCV Paris 10.

• DIRE que les contrôles qui seront effectués tant par le Syndic que par l’Architecte de l’immeuble, seront effectués aux frais exclusifs de la société SCCV PARIS 10.

• ORDONNER sous la même astreinte à la société SCCV PARIS 10 de remettre au syndic et à l’architecte de l’immeuble, les documents suivants :
- assurance dommage-ouvrage souscrite par la société SCCV PARIS 10
- attestations d’assurance et qualifications des intervenants qui vont réaliser les travaux
- Rapport d’un bureau de contrôle sur la conformité aux règles de l’art relatives au retrait des piliers situés dans la cave sous le porche

• CONDAMNER la société SCCV PARIS 10 au paiement au Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5], pris en la personne de son Syndic, le Cabinet ORALIA MEILLANT ET BOURDELEAU, d’une somme de 7.117,00 euros correspondant aux travaux de reprise de l’entourage en pierre de la baie d’accès à la zone du sous-sol située sous le porche, conformément au devis établi par la société EUROBARRERE en date du 28 mars 2018 et à la commande de travaux effectuée par le Syndic en date du 4 septembre 2018

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

• CONDAMNER la défenderesse en tous dépens dont distraction au profit de maître Franck FISCHER conformément à l’article 699 du CPC.

• LA CONDAMNER au paiement au Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5], pris en la personne de son syndic, le Cabinet ORALIA MEILLANT BOURDELEAU, d’une somme de 5.000 euros au titre del’article 700 du CPC

• ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir. »

***

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 mai 2023, la SCCV Paris 10 demande au tribunal, au visa des articles 9 et 31 du code de procédure civile, de la loi du 10 juillet 1965, de l’article 1240 du code civil et subsidiairement des articles 1231-1 et 1103 du code civil, de l’article L. 124-3 du code des assurances, de :

« - DIRE irrecevables les demandes du Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5] relatives à la suppression des piliers de soutènement et remise en état des canalisations,

- DIRE irrecevables et en toute hypothèse mal fondées les demandes du Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5] dirigées contre la SCCV PARIS 10 concernant des préjudices liés à l’intervention de la ou des entreprise(s),

- DEBOUTER le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre reconventionnel,

- CONDAMNER le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5] à payer à la SCCV PARIS 10 la somme de 5 000 € pour procédure abusive,

Subsidiairement, vu les articles 1231-1 du Code Civil (ancien article 1147) et 1103 du Code Civil, si par impossible il était fait droit aux demandes du Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5] à l’encontre de la SCCV PARIS 10 :

- DIRE que les griefs formulés à l’encontre de la SCCV PARIS 10 sont liés à l’exécution des travaux,

- DIRE que la société Léon GROSSE est responsable des non-conformités, non-finitions et désordres,

En conséquence,

- DEBOUTER la société Léon GROSSE et son assureur AXA FRANCE IARD de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- CONDAMNER la société Léon GROSSE à réaliser, sous astreinte de 200 € par jour de retard, les travaux sollicités par le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5],

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

- CONDAMNER in solidum la société Léon GROSSE et son assureur AXA FRANCE IARD à relever et garantir indemne la SCCV PARIS 10 de toutes les conséquences et condamnations pécuniaires qui pourraient être prononcées à son encontre au titre des désordres et préjudices allégués par Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5],

- CONDAMNER le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5] et la société Léon GROSSE aux entiers dépens et à payer chacun 5 000 € à la SCCV PARIS 10 au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile. »

***

Aux termes de conclusions notifiées par voie électronique le 12 mai 2023, la SA Entreprise générale Léon Grosse demande au tribunal, au visa de l’article 1231-1 du code civil, de :

« Juger irrecevable et particulièrement mal fondées toutes demandes de garanties dirigées à l’encontre de la Société Léon GROSSE en l’absence de constat contradictoire des désordres,

Juger irrecevable la SCCV PARIS 10 en sa demande de condamnation à défaut de justifier de réserves concernant les griefs lors de la réception de l’ouvrage et de la régularisation du DGD de la Société Léon GROSSE,

Juger mal fondée la SCCV PARIS 10 en sa demande de condamnation à défaut de justifier d’une faute contractuelle de la Société Léon GROSSE à l’origine des griefs allégués,

En conséquence,

Renvoyer hors de cause la Société Léon GROSSE

Condamner la SCCV PARIS 10 à payer la somme de 5.000 € par application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamner la SCCV PARIS 10 aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître DELRIO conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile. »

***

Par conclusions notifiées par voie électronique le 07 avril 2023, la SA Axa France IARD demande au tribunal de :

« JUGER que le contrat « Responsabilité Civile » n°4644731004 n’est pas mobilisable en l’espèce dans la mesure où il n’a pas vocation à garantir :
- les réclamations formulées par le syndicat des copropriétaires consistant en des obligations de réparation en nature de l’ouvrage ;
- les réclamations formulées par le syndicat des copropriétaires correspondant à des condamnations pécuniaires en ce que leur montant total est en deçà du montant de la franchise contractuelle fixée à 30.000 € par sinistre.

DEBOUTER par conséquent la SCCV PARIS 10 de l’ensemble de ses demandes dirigées à l’encontre de la compagnie AXA FRANCE IARD.
Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

DEBOUTER toute autre partie qui venait à diriger des demandes à son encontre.

Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER tout succombant à régler à la compagnie AXA FRANCE IARD la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles outre le montant des entiers dépens lesquels pourront être recouvrés par Maître Samia DIDI-MOULAI, Avocat au Barreau de PARIS. »

***

Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits, de la cause et des prétentions des parties.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 31 mai 2023.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 04 septembre 2023, la SA Entreprise Générale Léon Grosse a demandé la révocation de l’ordonnance de clôture afin de permettre la prise en compte de sa nouvelle pièce n°5, constituée des annexes du procès-verbal de réception. Elle a sollicité, subsidiairement, le rejet des conclusions signifiées par la SCCV Paris 10 le 30 mai 2023, soit la veille de la clôture.

Les parties ont été invitées à transmettre leur avis sur la demande de la SA Entreprise Générale Léon Grosse par message RPVA du 12 septembre 2023. Aucune d’elles n’a présenté d’observation.

L’affaire a été plaidée à l’audience collégiale du 1er février 2024, date à laquelle elle a été mise en délibéré au 26 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- Sur la révocation de l’ordonnance de clôture

En l’absence de toute opposition de la part des parties, il convient de révoquer l’ordonnance de clôture du 31 mai 2023 afin de permettre la communication, par la SA Entreprise Générale Léon Grosse, des annexes du procès-verbal de réception des travaux, et de déclarer l’instruction close à la date du 1er février 2024.

2- Sur les fins de non-recevoir

A - Sur la recevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires relatives à la suppression des piliers de soutènement et la remise en état des canalisations

Au visa des articles 9 alinéa 1er, 14 alinéa 4 et 15 de la loi du 10 juillet 1965 et 31 du code de procédure civile, la SCCV Paris 10 soutient que le syndicat des copropriétaires est irrecevable en ses demandes relatives à la suppression des piliers de soutènement et la remise en état des canalisations, en ce que seuls les propriétaires des lots n°133, 130, 129, 135 et 131 ont intérêt à demander la suppression ou le dévoiement des ouvrages qui empiéteraient sur leurs parties privatives.
Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

Elle ajoute que l’assemblée générale du 28 mars 2018 a d’ailleurs autorisé le syndicat à agir tout en réservant la possibilité à chaque propriétaire d’ajouter ses réclamations privatives ; qu’aucun des copropriétaires concernés ne s’est joint à la présente procédure ; que rien n’établit à ce jour qu’ils auraient l’intention de reconstituer leurs lots et que le syndicat des copropriétaires ne démontre pas l’existence d’un intérêt collectif distinct.

Ce dernier répond que son action est recevable puisque l’assemblée du 28 mars 2018 a autorisé le syndic à engager une procédure contre la société SCCV Paris 10, conformément aux dispositions de l’article 55 du décret du 17 mars 1967, et qu’il ressort du règlement de copropriété que tant les canalisations que le « gros œuvre des planchers » sont des parties communes, ce qui implique nécessairement le mode de soutènement du plancher haut des caves et la voûte de celles-ci.

Sur ce,

Selon l’article 31 du code de procédure civile : « L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »

Selon l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires « a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires. »

Selon l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 : « Le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble. Tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d'en informer le syndic. »

Le syndicat des copropriétaires demande en l’espèce la condamnation sous astreinte du promoteur à réaliser les travaux de suppression des piliers de soutènement posés sans autorisation dans le sous-sol situé sous le passage cocher, en prenant toutes dispositions utiles pour que la voûte soit soutenue dans des conditions de sécurité optimale, ainsi que le rétablissement à l'initial des canalisations dévoyées afin qu'elles ne gênent plus la reconstitution en vue de leur cloisonnement des caves.

Si celles-ci sont incontestablement des parties privatives, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] , en ce qu’il est tenu de faire respecter les décisions de l’assemblée générale et de sauvegarder les droits afférents à l’immeuble, justifie toutefois d’un intérêt à demander la remise en état des canalisations et du gros-oeuvre des planchers, réputées parties communes par le règlement de copropriété, afin de rétablir l’ensemble des caves dans leur état initial.

La fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir du syndicat des copropriétaires sera donc écartée.

B - Sur la recevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires « concernant des préjudices liés à l’intervention de la ou des entreprise(s) »

Cette fin de non-recevoir soulevée par la SCCV Paris 10 n’est pas développée dans le corps de ses conclusions et n’apparaît dès lors pas fondée.

C - Sur la recevabilité de l’appel en garantie de la SCCV Paris 10

La SA Entreprise générale Léon Grosse demande au tribunal, en premier lieu, de déclarer irrecevable « toutes demandes de garanties dirigées à l’encontre de la Société Léon GROSSE en l’absence de constat contradictoire des désordres » au motif que lesdits désordres n’ont à aucun moment été évoqués lors de l’expertise confiée à M. [T] et que l’absence de constat contradictoire doit conduire le juge à rejeter les demandes à son encontre.

Elle soutient, en second lieu, que la demande de condamnation de la SCCV Paris 10 doit être déclarée irrecevable « à défaut de justifier de réserves concernant les griefs lors de la réception de l’ouvrage et de la régularisation du DGD de la Société Léon GROSSE ».

La SA Entreprise générale Léon Grosse fait notamment valoir que sa responsabilité est recherchée par la SCCV Paris 10 sur le seul fondement contractuel ; que l’ouvrage qui lui a été confié est achevé et réceptionné depuis près de cinq ans ; que les travaux concernant les caves de la copropriété voisine ont été réalisés en 2016 ; qu’aucune réclamation n’a été formulée, tant dans le cadre du procès-verbal de réception que dans le cadre de son DGD, ce qui se traduit par la purge des vices apparents et par conséquent l’irrecevabilité de la demande dirigée à son encontre.

La SCCV Paris 10 répond que le constructeur ne peut pas se prévaloir de l’absence de réserves lors de la réception pour s’exonérer de sa responsabilité alors qu’elle ne produit que le procès-verbal partiel de réception sans le détail de l’état des lieux ni l’examen des travaux exécutés ; que de même, le projet de décompte n’établit pas qu’elle aurait accepté, sans réserve, de payer l’intégralité des travaux réalisés au sein de l’ensemble immobilier de la copropriété voisine.

Sur ce,

L'irrecevabilité est une fin de non-recevoir qui sanctionne, sans examen au fond, un défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée (article 122 du code de procédure civile).

L'irrecevabilité doit ainsi être distinguée du débouté d'une partie qui, par le rejet de la demande présentée, sanctionne le caractère mal ou non-fondé de celle-ci.

Ni l’absence de constat contradictoire des désordres ni l’absence de réserves à la réception ne suppriment en l’espèce le droit d’agir de la SCCV Paris 10, qui sera par conséquent déclarée recevable en ses demandes dirigées contre la SA Entreprise Générale Léon Grosse.

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

3 - Sur les travaux de remise en état

A- Sur la demande de suppression des piliers de soutènement

Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] sollicite la condamnation sous astreinte de la SCCV Paris 10 à supprimer les « piliers de soutènement posés sans autorisation dans le sous-sol situé sous le passage cocher en prenant toutes dispositions utiles pour que la voute soit soutenue dans des conditions de sécurité optimale. »

Il expose notamment que les étais devaient soutenir la voûte située sous le porche pour permettre le passage d’engins de chantier particulièrement lourds ; qu’il s’agissait donc d’une situation provisoire et en aucun cas pour la société SCCV Paris 10 de modifier totalement ces caves, réunies en un seul et grand espace le temps des travaux et destinées à être recloisonnées une fois ces travaux terminés ; qu’il apparaît que des piliers de soutènement définitifs ont été posés dans cette grande cave sans aucune autorisation de l’assemblée des copropriétaires, piliers qui empêchent aujourd’hui la reconstitution des caves n°133,130,129,135 et 131.

Le demandeur ajoute que la méthodologie de l’entreprise Léon Grosse, portée à la connaissance de l’assemblée générale lors du vote de l’autorisation, ne prévoit pas le maintien des poutres de soutènement mises en place ; que la SCCV Paris 10 ne démontre pas avoir obtenu l’accord des copropriétaires concernés par la démolition de la voûte dans leur cave ; qu’elle n’a en effet produit que trois autorisations prévoyant uniquement le passage en plafond de « réseaux gaz électricité et fibre optique », ce qui n’a strictement rien à voir avec la construction des piliers ; qu’elle ne reproche enfin pas au promoteur une mauvaise exécution des travaux mais la réalisation de travaux non autorisés sur des parties communes.

La SCCV Paris 10 oppose qu’aucune disposition ne prévoit que les piliers de soutènement litigieux étaient provisoires et destinés à être supprimés après l’achèvement des travaux ; que la méthodologie de l’entreprise Léon Grosse portée à la connaissance de l’assemblée générale ne prévoit à aucun moment la suppression des poutres de soutènement mises en place ; que ceci est confirmé par la méthodologie mise à jour le 2 juin 2015 indiquant expressément que les poteaux et dalle nouvellement créés étaient conservés, sans que cela ait suscité la moindre observation de la part de l’architecte de l’immeuble.

Elle ajoute qu’il résulte clairement de la résolution n°6 de l’assemblée générale du 02 mars 2015 que l’autorisation provisoire donnée pour la durée des travaux ne concernait que l’autorisation d’accès aux caves ; que la résolution n°7 portant sur la démolition de la voûte ne prévoit aucunement que l’autorisation est donnée pour la durée des travaux ; que l’architecte de l’immeuble a été tenu informé étape par étape de la réalisation des ouvrages et ne s’est jamais opposé ni n’a fait la moindre critique sur la méthodologie ; qu’enfin, et contrairement à ce qui est allégué, elle a obtenu l’accord des copropriétaires concernés par la démolition de la voûte dans leur cave ; qu’en sollicitant la démolition des piliers, le syndicat des copropriétaires ajoute donc une condition à l’autorisation donnée.

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

Sur ce,

Le copropriétaire doit se conformer à l’autorisation donnée par l’assemblée générale, à défaut de quoi la remise en état des lieux peut être ordonnée.

Aux termes de sa résolution n°6, l’assemblée générale du 02 mars 2015 a autorisé la SCCV Paris 10 « à condamner, sous réserve de l’accord exprès et préalable des copropriétaires concernés, et sous le contrôle de l’architecte de l’immeuble dont les honoraires seront à la charge de la SCCV Paris 10, l’accès aux caves de la copropriété situées sous le porche savoir : les lots numéros 133-130-129-135-131 durant la durée des travaux estimée prévisionnellement à 26 mois à compter du démarrage des travaux par la SCCV Paris 10. »

La résolution n°7 a par ailleurs autorisé « sous le contrôle de l’architecte de l’immeuble dont les honoraires seront à la charge de la SCCV Paris 10 et sous réserve de l’accord exprès et préalable des copropriétaires concernés, la démolition de la voûte des caves des lots numéros 133-130-129-135-131, selon la méthodologie travaux présentée par l’entreprise Léon GROSSE, si cette démolition d’avérait nécessaire sur un ou plusieurs desdits lots, et son remplacement par une dalle béton sur les lots ayant subi démolition. »

La méthodologie de la SA Léon Grosse, jointe à la convocation à l’assemblée générale, explique que la voirie existante repose sur un complexe remblai supporté par une voûte en pierre ; que les travaux consistent en la réalisation d’une dalle en béton après avoir décaissé le terrain naturel et modifié structurellement la voûte existante.

S’agissant de la description des travaux, elle prévoit la dépose du revêtement et la réalisation d’une trémie d’accès à la cave (phase 1), la création des fondations des murs en parpaings, la réalisation de murs en parpaings et le soutènement de la voûte en phase provisoire avant la réalisation de la dalle (phase 2), la démolition de la voûte et la création d’une poutre venant soutenir la voûte et la future dalle définitive (phase 3), la création de la dalle béton en 3 phases et le transfert du passage piéton sur cette dalle nouvellement réalisée (phase 4), la réalisation de la 2ème poutre de soutènement de la voûte et la réalisation de la dalle béton (phase 5), la recréation d’une dalle, la fermeture définitive de la cave et la réalisation d’une dalle de propreté au sol (phase 6), le nettoyage complet de la cave, le nivellement du sol de celle-ci, la dépose des profilés métalliques outre « la conservation possible des murs en parpaings pour permettre un aménagement de la cave » (phase 8).

La SCCV Paris 10 ne conteste pas l’existence des « 8 gros poteaux en béton armé encombrant le sous-sol sous le porche » dont M. [Z] [U], architecte de l’immeuble, a demandé la dépose selon un courrier du 20 juin 2017, accompagné de photographies.

Elle verse l’accord de M. [F] (propriétaire du lot n°130), de Mme [L] [M] (propriétaire du lot n°135) et de la SCI Ismael Mosa (propriétaire des lots 129 et 131) pour décaisser le passage sis au-dessus de leurs caves en contrepartie de la création d’une « dalle béton au sol et au plafond, si nécessaire, en lieu et place d’un sol en terre battue et de la voûte existante qui sera reconstruite » et du traitement des « problèmes d’humidité liés à des écoulements d’eaux pluviales ». L’accord du propriétaire du lot n°133 n’est en revanche pas produit.
Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

Si l’examen du procès-verbal d’assemblée générale démontre que seule la condamnation des caves a été autorisée provisoirement, l’autorisation de démolir la voûte et de la remplacer par une dalle béton ne comportant aucune limitation de durée, la SCCV Paris 10 n’a toutefois nullement été autorisée à installer définitivement huit poteaux en béton armé en caves, la méthodologie établie par la SA Léon Grosse prévoyant uniquement la création d’une poutre de soutien en phase 3 et la réalisation d’une deuxième poutre de soutènement en phase 5 avant la réalisation de la dalle béton, outre la possibilité en phase 8 de conserver les murs en parpaings réalisés en phase 2 pour permettre un aménagement de la cave.

Le fait qu’une méthodologie mise à jour le 2 juin 2015, prévoyant la conservation des poteaux et dalles nouvellement créés, n’ait donné lieu à aucune contestation de la part de l’architecte de l’immeuble n’est pas de nature à modifier l’assiette de l’autorisation de travaux donnée par l’assemblée générale des copropriétaires.

Les travaux réalisés ne correspondant dès lors pas à l’autorisation donnée, le syndicat des copropriétaires apparaît fondé à obtenir la condamnation de la SCCV Paris 10 à supprimer, à ses frais, les piliers de soutènement posés sans autorisation dans le sous-sol situé sous le passage cocher, dans les règles de l’art et sous le contrôle de l’architecte de la copropriété, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé un délai de trois mois suivant la signification de la présente décision et ce, pendant une durée de deux mois.

La SCCV Paris 10 devra à cette occasion, et sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette condamnation d’une astreinte, communiquer au syndicat des copropriétaires l’assurance dommages-ouvrage souscrite pour ces travaux, les attestations d’assurance et qualifications des intervenants ainsi qu’un rapport d’un bureau de contrôle portant sur la conformité aux règles de l’art de la méthodologie employée.

B- Sur la demande de rétablissement à l’initial des canalisations

Le syndicat des copropriétaires soutient que des canalisations, parties communes, ont été dévoyées sans autorisation par la SCCV Paris 10 et qu’elles gênent également le recloisonnement des caves.

Il souligne que les désordres invoqués ne concernent pas les travaux de construction du bâtiment « Les terrasses d’Opale » mais des travaux internes au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] dont M. [T] n’était pas saisi dans le cadre du référé préventif ; que contrairement aux affirmations de la défenderesse, les rapports de M. [Z] [U] en date des 20 juin 2017, 27 novembre 2017 et 10 avril 2018 sont parfaitement probants.

La SCCV Paris 10 s’oppose à la demande en faisant valoir que les copropriétaires concernés par le prétendu dévoiement des canalisations qui gêneraient la reconstitution de leurs caves privatives n’ont jamais fait aucune réclamation ; que ce prétendu dévoiement n’a pas été constaté contradictoirement par l’expert judiciaire et qu’aucune preuve sérieuse n’est apportée à l’appui de la demande qui ne pourra qu’être rejetée.

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

Sur ce,

Le syndicat des copropriétaires verse un courrier de M. [U], architecte, en date du 20 juin 2017, mentionnant la présence de canalisations cheminant en partie haute centrale du sous-sol sous le porche traversant une cave privative, accompagné d’une photographie montrant des tuyaux passant dans des caves.

Ces seuls éléments ne suffisent pas à démontrer la réalisation, par le promoteur, de travaux non autorisés par l’assemblée générale sur des canalisations communes.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] sera par conséquent débouté de ce chef de demande.

C- Sur la demande de remise en état de l’enrobé du passage

Le demandeur expose que l’assemblée générale du 02 mars 2015, en sa résolution n°5, a autorisé la SCCV Paris 10 à décaisser le passage sous le porche sous condition d’une remise en état dudit passage réalisée à ses frais moyennant le paiement d’une indemnité forfaitaire de remise en état fixée à 30.000 euros TTC ; que si un enrobage a bien été réalisé lorsque la fin de chantier a été annoncée par le constructeur, il a été immédiatement dégradé par le passage d’engins vers et en provenance du chantier qui n’était pas terminé.

La SCCV Paris 10 oppose que le caractère forfaitaire de l’indemnité versée interdit toute demande supplémentaire ; que les désordres dont il est demandé réparation ne sont pas liés aux engagements pris lors de l’assemblée générale dont il n’est pas contesté qu’ils ont été respectés ; que le syndicat des copropriétaires n’a jamais saisi l’expert judiciaire de ces désordres alors qu’il n’avait pas encore déposé son rapport à la date de cette réclamation ; qu’il n’est versé aucune preuve contradictoire ni de l’existence de ces prétendus désordres ni de leur origine, étant précisé que d’autres engins circulaient pour la réalisation de travaux sur une parcelle voisine et que les désordres peuvent aussi provenir de la mauvaise qualité des travaux de réalisation de l’enrobage dont le syndicat des copropriétaires est entièrement responsable.

Sur ce,

La résolution n°5 de l’assemblée générale du 02 mars 2015 a :

- autorisé « la SCCV Paris 10 à procéder à ses frais exclusifs à des travaux de décaissement provisoire sur le passage sous porche selon la méthodologie travaux présentée par l’entreprise Léon GROSSE, et sous le contrôle de l’architecte de l’immeuble dont les honoraires seront à la charge de SCCV Paris 10. »
- pris acte et accepté « que les travaux subséquents de remise en état du passage sous porche seront réalisés ensuite par le syndicat des copropriétaires aux frais de la SCCV Paris 10 et moyennant le paiement par la SCCV Paris 10 d’une indemnité forfaitaire de remise en état au profit du syndicat de copropriété forfaitairement fixée à 30.000 € TTC, payable au plus tard après la production par le syndic d’une attestation de non recours délivrée selon l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée et justifiant du caractère définitif de la présente assemblée générale et après le dépôt de la Déclaration d’Ouverture de Chantier au nom de la SCCV Paris 10. »
Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

- s’est engagée « à avoir effectué les travaux de réfection sous le porche et dans la cour de manière concomitante à la fin de chantier des travaux de la SCCV PARIS 10, cette dernière s’engageant à prévenir le syndic de la date de réception prévisionnelle de son chantier au moins trois mois avant celle-ci afin de permettre au syndicat des copropriétaires- et à ses mandataires-de s’organiser en conséquence. »

Il n’est pas contesté par les parties que l’indemnité fixée a été réglée par le promoteur au syndicat des copropriétaires qui a fait réaliser les travaux de reprise du passage.

Les termes de l’autorisation accordée par l’assemblée générale des copropriétaires ont donc bien été respectés.

Le syndicat des copropriétaires fonde subsidiairement ses demandes sur les dispositions de l’article 1240 du code civil et sur la théorie des troubles anormaux du voisinage au visa de l’article 544 dudit code.

La mise en cause de la responsabilité délictuelle de la SCCV Paris 10 suppose la démonstration, par le syndicat des copropriétaires, de l’existence d’une faute et d’un préjudice en découlant.

De même, si la théorie des troubles du voisinage édicte un principe de responsabilité sans faute de l’auteur de nuisances vis-à-vis du voisin victime, l’existence d’une relation de causalité directe entre les troubles subis par ce dernier et l'intervention de l’auteur doit être établie pour que la responsabilité de ce dernier puisse être engagée.

A l’appui de sa demande, le syndicat des copropriétaires verse un courrier de M. [U], architecte de l’immeuble, en date du 20 juin 2017, relevant des « désordres affectant l’enrobé récemment réalisé par l’entreprise EUROBARRERE pour le compte du syndicat du 83 ». Est jointe une photo montrant des traces de chenillette sur le passage.

Ainsi que l’indique à juste titre la SCCV Paris 10, ce seul document ne démontre pas l’imputabilité de la dégradation de l’enrobé au chantier réalisé sous sa maîtrise d’ouvrage, alors que le désordre n’a pas été soumis à l’expert judiciaire, pourtant chargé de constater les désordres rattachables aux travaux.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] sera par conséquent débouté de ce chef de demande.

D- Sur la demande de remise en état de la façade de l’immeuble

Le syndicat des copropriétaires expose que sa façade sur rue a été salie par l’incendie de deux bennes appartenant aux entreprises missionnées par la SCCV Paris 10 et que l’arête du linteau du porche a été endommagée par le passage des engins.

La SCCV Paris 10 oppose que le demandeur ne démontre pas en quoi ces prétendus désordres seraient liés au non-respect des engagements pris en assemblée générale ; qu’ils n’ont pas été constatés par l’expert judiciaire et que le syndicat des copropriétaires est dans l’incapacité d’en prouver la matérialité, l’origine, l’imputabilité et le coût des éventuelles réparations.

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

Sur ce,

Ces désordres repris dans les seuls courriers de l’architecte de l’immeuble n’ont fait l’objet d’aucune constatation contradictoire et leur imputabilité à la SCCV Paris 10 n’est pas établie.

Le syndicat des copropriétaires sera par conséquent également débouté de ce chef de demande.

E- Sur la demande relative à l’entourage en pierre de la baie d’accès à la zone du sous-sol

Le demandeur expose que M. [Z] [U] a établi un rapport en date du 10 avril 2018 constatant le mauvais état de l’entourage en pierre de la baie d’accès à la zone du sous-sol située sous le porche, ayant entraîné la confortation du terrain d’assise et la reprise du blocage des éléments en pierre des pieds droits et de la voûte de la baie, selon devis établi par la société Eurobarrère en date du 28 mars 2018 et la commande de travaux effectuée par le syndic en date du 4 septembre 2018 ; qu’il a dû engager des frais à hauteur d’une somme de 7.117,00 euros alors que la société SCCV Paris 10 s’était engagée à conforter cette voûte dans le cadre des travaux qu’elle devait effectuer.

La SCCV Paris 10 oppose que le syndicat des copropriétaires demande le remboursement de travaux à hauteur de 7.117 euros qu’il a fait exécuter sans qu’aucun constat contradictoire n’ait été réalisé en sa présence et sur la seule affirmation unilatérale de son architecte qui aurait signalé ce désordre le 10 avril 2018, sans avoir même pris la précaution de les faire constater par un huissier ; que les travaux étant réalisés, il n’est plus possible de vérifier ni les désordres, ni leur origine ni d’évaluer les travaux ; que le tribunal ne pourra donc qu’écarter cette demande infondée.

Sur ce,

Aux termes d’un rapport établi le 10 avril 2018 sur « l’état des pieds droits de la baie d’accès à la zone du sous-sol située sous le proche », M. [U] explique avoir constaté, lors d’une visite du 15 mars 2018, que l’entourage en pierre de la baie « avait continué à se disloquer malgré la présence de l’étaiement provisoire mis en place l’année dernière » et que « la confortation du terrain d’assise et la reprise du blocage des éléments pierre des pieds droits et de la voûte de la baie doivent être envisagés à bref délai et ont fait l’objet d’un devis établi par l’entreprise EUROBARRERE qui est joint au présent rapport. Dans l’attente de ces travaux et à l’occasion de ces prochains travaux, l’entreprise EUROBARRERE complètera l’étaiement pour mise en sécurité. »

Le syndicat des copropriétaires produit par ailleurs le devis établi par cette dernière le 28 mars 2018 pour un montant TTC de 5.467 euros, outre une facture d’acompte de 30% établie le 17 septembre 2018 pour un montant de 2.135,10 euros TTC.

En l’absence de toute analyse technique contradictoire, ces seuls documents n’établissent toutefois ni l’inexécution par la SCCV Paris 10 d’un engagement pris à l’égard du syndicat des copropriétaires, ni un défaut d’exécution ou une intervention génératrice de nuisances susceptible d’engager sa responsabilité sur le fondement de l’article 1240 du code civil ou de la théorie des troubles anormaux du voisinage.
Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

Le syndicat des copropriétaires sera par conséquent également débouté de sa demande indemnitaire.

4 - Sur les appels en garantie

La SCCV Paris 10, tenue de supprimer les piliers de soutènement posés dans le sous-sol situé sous le passage cocher, demande la condamnation de la SA Léon Grosse « à réaliser, sous astreinte de 200 € par jour de retard, les travaux sollicités par le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5] » et à la relever et garantir, avec son assureur, « de toutes les conséquences et condamnations pécuniaires qui pourraient être prononcées à son encontre au titre des désordres et préjudices allégués par Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 5]. »

Elle expose que la responsabilité des éventuelles non-finitions ou non-conformités des ouvrages décrits dans la méthodologie « accès chantier » incombe entièrement à la société Léon Grosse qui est intervenue en qualité d’entreprise générale et répond des éventuelles fautes de ses sous-traitants ; que la SA Axa France IARD, ès qualités d’assureur de la société Léon Grosse, doit également sa garantie.

La SA Entreprise Générale Léon Grosse soutient pour sa part qu’aucun manquement contractuel n’est évoqué par la SCCV Paris 10 à l’appui de sa demande de garantie ; que celle-ci ne peut se prévaloir d’aucune présomption de responsabilité dès lors qu’elle n’a plus la garde du chantier depuis la réception ; que les désordres invoqués sont manifestement sans lien avec son intervention ; que dès lors qu’elle a exécuté les termes de la mission qui lui a été confiée, il ne saurait sérieusement lui être reproché, en l’absence de surcroît de tout constat contradictoire, d’une part la survenance de désordres, d’autre part l’absence de réalisation de certains travaux non prévus dans la méthodologie produite.

La SA Axa France IARD oppose que la société Léon Grosse est titulaire d’une police « Responsabilité Civile » n°4644731004 à effet du 1er janvier 2020 et que le contrat a pour objet « de garantir l’Assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant lui incomber dans le cadre de son activité en raison de tous dommages causés à des tiers, sous réserve des exclusions figurant aux présentes conventions spéciales ».

Elle ajoute que cette police ne peut s’appliquer ni à des condamnations de faire, ni à des condamnations pécuniaires dont le montant est en-deçà de la franchise contractuelle.

Sur ce,

La non-conformité des travaux réalisés avec la méthodologie établie a été dénoncée à la SCCV Paris 10 par le syndic de l’immeuble, suivant courrier du 23 juin 2017 indiquant :
« Aux termes des résolutions n°6 et 7 de l’assemblée spéciale du 2 mars 2015, votre société avait été autorisée à condamner l’accès aux caves, sous condition de :
- l’accord exprès et préalable des copropriétaires concernés.
- le contrôle de l’Architecte de l’immeuble.
Or, nous avons constaté que la démolition de cette voûte avait eu lieu, par la dépose de la voute en pierre, que 8 poteaux en béton armés ont été posés qui encombrent lesdites caves, que de nombreuses canalisations passent par des caves privatives, que des bouteilles de javel et autres déchets jonchent le sol, et que le sol est excavé par endroit.
Tout cela sans que l’une ou l’autre des conditions n’aient été respectées. »

Il est par ailleurs établi que ces travaux réalisés par la SA Entreprise Générale Léon Grosse ont été réceptionnés sans réserves par la SCCV Paris 10, assistée de son maître d’oeuvre, suivant procès-verbal du 26 juin 2017, et que le projet de décompte général définitif de l’entreprise établi le 06 septembre 2018, après déduction de postes n’ayant pas de lien avec les désordres objets de la présente procédure, a été visé par le promoteur le 12 septembre 2018.

Tenu d'édifier un ouvrage conforme aux spécifications contractuelles, l'entrepreneur est débiteur, envers le maître de l'ouvrage, d'une obligation de résultat.

La réception mettant toutefois fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et le constructeur, elle interdit en l’espèce à la SCCV Paris 10 d’exercer une action en garantie à l'encontre de la SA Entreprise Générale Léon Grosse à raison de condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires pour des non-conformités apparentes et connues de lui à la date de la réception.

Le promoteur sera par conséquent débouté de ses appels en garantie dirigés contre la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur, la SA Axa France IARD.

5- Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La SCCV Paris 10 demande la condamnation du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] au paiement de la somme de 5.000 euros pour procédure abusive.

Elle expose que les demandes de ce dernier sont particulièrement hasardeuses dès lors qu’aucun élément sérieux et probant ne vient étayer ses allégations et que le syndicat des copropriétaires s’est contenté d’adresser un courrier le 23 juin 2017 pour faire part de ses réclamations, et n’a mené aucune démarche pour tenter de résoudre amiablement ce litige.

Le syndicat des copropriétaires ne répond pas à cette demande.

Sur ce,

L'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à indemnisation qu'en cas de faute susceptible d'engager la responsabilité civile de son auteur.

Le syndicat des copropriétaires ayant partiellement été jugé bien fondé en ses prétentions, il n'a pas agi de manière dilatoire ou abusive à l’encontre de la SCCV Paris, qui sera par conséquent déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Décision du 26 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 18/13525 - N° Portalis 352J-W-B7C-COH7K

6 - Sur le surplus des demandes

Partie succombante, la SCCV Paris 10 sera condamnée aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au bénéfice de Maître Franck Fischer, de Maître Carmen Del Rio et de Maître Samia Didi-Moulai, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Tenue aux dépens, elle sera condamnée à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et à la SA Entreprise Générale Léon Grosse, chacun, la somme équitable de 5 000 euros en indemnisation des frais engagés pour faire valoir leurs droits et non compris dans les dépens, et sera déboutée de sa demande à ce titre.

Le sens du présent jugement conduit en revanche à rejeter la demande, par application de l'article 700 du code de procédure civile, formulée par la SA Axa France IARD.

Compatible avec la nature et la solution du litige, l' exécution provisoire du jugement, nécessaire, sera ordonnée en toutes ses dispositions conformément à l'article 515 du code de procédure civile dans sa version applicable au présent litige.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

ORDONNE la révocation de l’ordonnance de clôture du 31 mai 2023 et déclare l’instruction close à la date du 1er février 2024 ;

DÉCLARE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] recevable en ses demandes dirigées contre la SCCV Paris 10 ;

DÉCLARE la SCCV Paris 10 recevable en son appel en garantie dirigé contre la SA Entreprise Générale Léon Grosse ;

CONDAMNE la SCCV Paris 10 à supprimer, à ses frais, les piliers de soutènement posés sans autorisation dans le sous-sol situé sous le passage cocher, dans les règles de l’art et sous le contrôle de l’architecte de la copropriété, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé un délai de trois mois suivant la signification de la présente décision et ce, pendant une durée de deux mois ;

CONDAMNE la SCCV Paris 10 à communiquer au syndicat des copropriétaires, avant le démarrage des travaux, l’assurance dommage-ouvrage souscrite, les attestations d’assurance et qualifications des intervenants ainsi qu’un rapport d’un bureau de contrôle portant sur la conformité aux règles de l’art de la méthodologie employée ;

DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de ses demandes de rétablissement à l’initial des canalisations ainsi que de remise en état de l’enrobé du passage et de la façade de l’immeuble ;

DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de sa demande en paiement des travaux de reprise de l’entourage en pierre de la baie d’accés à la zone du sous-sol ;

DÉBOUTE la SCCV Paris 10 de ses appels en garantie dirigés contre la SA Entreprise Générale Léon Grosse et la SA Axa France IARD ;

DÉBOUTE la SCCV Paris 10 de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la SCCV Paris 10 aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au bénéfice de Maître Franck Fischer, de Maître Carmen Del Rio et de Maître Samia Didi-Moulai, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCCV Paris 10 à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCCV Paris 10 à payer à la SA Entreprise Générale Léon Grosse la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la SA Axa France IARD de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE l' exécution provisoire du jugement ;

REJETTE toutes les autres demandes plus amples ou contraires des parties.

Fait et jugé à Paris le 26 avril 2024

Le greffierLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 3ème section
Numéro d'arrêt : 18/13525
Date de la décision : 26/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-26;18.13525 ?
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