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25/04/2024 | FRANCE | N°23/05910

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 2ème section, 25 avril 2024, 23/05910


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le :
à Maître CASSEL et à
Maître DE BAZELAIRE
DE LESSEUX

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître GUEGAN-GELINET





8ème chambre
2ème section


N° RG 23/05910
N° Portalis 352J-W-B7H-CZPKL


N° MINUTE :


Assignation du :
07 Avril 2023








ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 25 Avril 2024

DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] re

présenté par son syndic, la société MEB GESTION
[Adresse 7]
[Localité 6]

représenté par Maître Laurence GUEGAN-GELINET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0886


DÉFENDERESSES

Société ENEDIS
[...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le :
à Maître CASSEL et à
Maître DE BAZELAIRE
DE LESSEUX

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître GUEGAN-GELINET

8ème chambre
2ème section

N° RG 23/05910
N° Portalis 352J-W-B7H-CZPKL

N° MINUTE :

Assignation du :
07 Avril 2023

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 25 Avril 2024

DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par son syndic, la société MEB GESTION
[Adresse 7]
[Localité 6]

représenté par Maître Laurence GUEGAN-GELINET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0886

DÉFENDERESSES

Société ENEDIS
[Adresse 2]
[Localité 8]

représentée par Maître Hervé CASSEL de la SELAFA CABINET CASSEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0049

Société [B] ET [F] ARCHITECTES
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentée par Maître Jean DE BAZELAIRE DE LESSEUX de l’AARPI COSTER BAZELAIRE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0244

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Madame Anita ANTON, Vice-présidente

assistée de Madame Nathalie NGAMI-LIKIBI, Greffière lors de l’audience, et de Madame Lucie RAGOT, Greffière lors du prononcé,

DÉBATS

A l’audience du 19 Mars 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 25 Avril 2024.

ORDONNANCE

Prononcée par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] a fait procéder à la rénovation de cet immeuble, comprenant la réfection des parties intérieures de la cage d'escalier du bâtiment B.
Au cours des études préparatoires, il s'est avéré que la colonne électrique était en mauvais état et nécessitait des travaux.
Un devis a été présenté au syndicat qui l'a validé, et fait approuver par vote de l'assemblée générale des copropriétaires.

Sont notamment intervenus à l'acte de construction :

- M. [F], en tant que maitre d'œuvre ;
- La société Gomel, titulaire du lot électricité ;

Les travaux ont débuté en 2011. La réception est intervenue le 26 mars 2012 sans réserve.

En septembre 2018, le syndicat de copropriétaires du [Adresse 4] a appris auprès de la société Enedis que la colonne électrique ne lui appartenait pas, mais était une concession de la Ville de [Localité 9].

Par la suite, le syndicat de copropriétaires du [Adresse 4] a mis en demeure à plusieurs reprises la société Enedis de procéder au remboursement du prix de ces travaux.

Par exploits d'huissier délivrés le 7 avril 2023, le syndicat des copropriétaires a assigné la société Enedis et la société [B] et [F] Architectes, afin d'obtenir sur le fondement des articles 1240 et 1302-1 du code civil, leur condamnation in solidum à lui verser la somme de 16.200 euros au titre de la répétition du l'indu du fait des travaux avancés par le syndicat des copropriétaires, la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions d'incident notifiées par voie électronique le 20 octobre 2023, la société [B] et [F] Architectes demande au juge de la mise en état de :

"Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile ;
Vu l'article 2244 du code civil,

DECLARER le syndicat de copropriétaires du [Adresse 4] irrecevable en sa demande formée contre la société [B] & [F] Architectes ;

CONDAMNER le syndicat de copropriétaires du [Adresse 4] à payer la somme de 6.000 Euros à la société [B] & [F] Architectes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER le syndicat de copropriétaires du [Adresse 4] au paiement des entiers dépens".

Par conclusions d'incident n°3 notifiées par voie électronique le 18 mars 2024, la société Enedis demande au juge de la mise en état de :

"Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,
Vu les articles 789 et 790 du code de procédure civile,
Vu l'article 2224 du code civil,

DECLARER le syndicat de copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4]) irrecevable en son action contre la société Enedis pour cause de prescription,

CONDAMNER le syndicat de copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4]), ou toute partie succombant, à payer à la société Enedis la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER le syndicat de copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4]), ou toute partie succombant, aux dépens."

Par conclusions d'incident n°2 notifiées par voie électronique le 18 mars 2024, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] demande au juge de la mise en état de :

"Vu l'article 2224 du code civil,
Vu les articles L.526-27 et suivants du code de commerce,
Vu les pièces versées aux débats.

DECLARER le syndicat des copropriétaires [Adresse 4] recevable et bien fondé en toutes ses demandes, fins et prétentions ;

DEBOUTER les sociétés [B] et [F] Architectes et Enedis de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions.

CONDAMNER in solidum la société Enedis et société [B] et [F] Architectes à payer au syndicat des copropriétaires, la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER in solidum la société la société Enedis et la société [B] et [F] Architectes aux entiers dépens".

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

L'incident a été évoqué à l'audience de mise en état du 19 mars 2024 et la décision a été mise en délibéré au 24 avril 2024.

MOTIFS

Sur la prescription

La société [B] et [F] Architectes soutient que :

- la concession d'Enedis existait bien avant le début des travaux de rénovation litigieux et le syndicat de copropriétaires devait nécessairement en avoir connaissance,

- le fait que le syndicat de copropriétaires ne s'en soit pas souvenu au moment des travaux ou que les documents relatifs à cette concession aient été perdus n'a aucune incidence sur l'existence de cet élément factuel lors du démarrage des travaux,

- les travaux ont commencé en 2011 et se sont achevés le 26 mars 2012, sans qu'aucune observation à ce sujet ne soit faite par le syndicat de copropriétaires,

- sans remonter jusqu'au début de la concession dont la date est incertaine, il est raisonnable de considérer que le début des travaux ou la réception de ces derniers marque un point de départ pour le début de la prescription de l'action du syndicat de copropriétaires,

- dès lors, le syndicat de copropriétaires aurait dû connaitre l'existence de cette concession d'Enedis, dans la mesure où celle-ci est ancienne et que le syndic, représentant légal du syndicat a accès à l'ensemble des documents légaux et contractuels la régissant,

- l'action du demandeur est prescrite au plus tard 5 ans après la fin des travaux, soit le 27 mars 2017, que l'assignation du syndicat de copropriétaires datant du 7 avril 2023, son action est prescrite.

La société Enedis soutient que :

- l'ensemble des études préparatoires à la réalisation de cette colonne montante ont été réalisés par les professionnels mandatés par la copropriété, et la société Enedis n'est intervenue que pour valider le projet de colonne montante qui lui a été soumis par ces professionnels le 16 juin 2011,

- la société Enedis n'avait pas à s'immiscer dans les travaux de rénovation de colonne montante présentés par le syndicat des copropriétaires, sauf à ce que la copropriété justifie, en amont même de toute décision concernant la réalisation de ces travaux, avoir abandonné la propriété de sa colonne à la société Enedis et lui demande d'en assurer la rénovation, ce qu'elle n'a pas fait,

- la réalisation et le financement des travaux par le syndicat des copropriétaires ne faisait aucun doute pour la copropriété au moment où la société Enedis a validé le projet de colonne montante, le 23 juin 2011,

- le 4 novembre 2011, "au moment de la réalisation des travaux, une fiche" d'information immeuble neuf, rénové ou réhabilité "avait été adressée à la copropriété qui indique en face de la case " Propriété CM" la mention suivante : "???", ce qui signifie que la société Enedis ne disposait pas d'information quant à la propriété de la colonne montante,

- cette mention ne correspond pas à une omission de données mais à une information de ce que la société Enedis ignorait si la colonne montante était, ou non, sous concession faute d'élément fourni par la copropriété lorsqu'elle lui a soumis son projet de rénovation,

- une omission de données aurait donné lieu à une simple cellule de tableau vide,

- à la date de transmission de cette fiche par la société Enedis à la copropriété, le 4 novembre 2011 (tel qu'indiqué sur cette fiche), il existait un doute sérieux quant à la propriété de la colonne montante du bâtiment B, et donc quant à la prise en charge des frais afférents à sa rénovation par la copropriété,

- la copropriété dument représentée par son Syndic, le Cabinet Michel Hectus, aurait dû lever ce doute en initiant des démarches amiables puis, le cas échéant, une action judiciaire contre la société Enedis, afin de déterminer judiciairement si, oui ou non, la colonne est sous concession (nonobstant les travaux de rénovation en cours),

- le syndic étant un professionnel de l'immobilier, il n'est pas sans savoir que les colonnes montantes peuvent être, ou non, sous concession, ce qui a une incidence sur la prise en charge des travaux de rénovation,

- si la copropriété entendait faire supporter à la société Enedis le financement de ses travaux de rénovation de colonne montante, elle avait la possibilité d'agir sur la base de l'information qui lui avait été donnée le 4 novembre 2011 et dont elle fait notamment état, aujourd'hui, au soutien de son action en répétition de l'indu,

- à compter de cette date le syndicat des copropriétaires a connu, ou aurait dû connaître, son droit d'agir contre la société Enedis aux fins de prise en charge des frais de rénovation de sa colonne montante,

- le délai de prescription de 5 ans a, ainsi, commencé à courir à compter du 4 novembre 2011 pour se terminer le 4 novembre 2016, sans être interrompu par une citation en justice,

- le syndicat des copropriétaires n'a assigné la société Enedis que par exploit en date du 28 avril 2023 et que la prescription était, alors, acquise depuis 6 ans et 5 mois,

- le syndicat des copropriétaires a attendu 7 ans après avoir reçu la fiche d'information de l'immeuble pour initier les premières démarches amiables vis-à-vis de la société Enedis sur la base de cette même fiche,

- ce n'est que le 3 décembre 2018 que le nouveau syndic de copropriété, la société Meb Gestion, a demandé, pour la première fois, à la société Enedis de procéder au remboursement des frais de rénovation exposés par la copropriété au motif qu'il s'agirait d'une colonne sous concession,

- le syndicat des copropriétaires a attendu le 13 décembre 2021, soit 2 ans, pour demander à la société Enedis "un document relatant l'historique de la colonne électrique avec la date de mise en concession auprès d'Enedis", reconnaissant par là-même sa propre négligence dans la conservation et l'archivage des actes régissant la copropriété,

- puis encore le 23 mai 2022 pour mettre en demeure la société Enedis par l'intermédiaire de son avocat ; mise en demeure qui sera renouvelée deux fois en 6 mois,

- l'ensemble de ces démarches amiables, initiées tardivement par la copropriété en 2018, ne sont pas interruptives de la prescription, qui était en tout état de cause déjà acquise depuis 2 ans,

- la société Enedis n'a jamais reconnu que la colonne montante du bâtiment B serait sous concession, que ce soit depuis 1933, 2005 ou 1986,

- en ce qui concerne une prétendue mise sous concession le 1er juillet 2005, la société Enedis n'a fait que transmettre, sans commentaire, une capture d'écran de son outil Geco dont il ressort que la colonne montante est "en exploitation" depuis cette date et non "sous concession", ce qui signifie seulement que la colonne montante était en service, autrement dit sous tension, contrairement à une colonne montante abandonnée et mise hors exploitation (c'est-à-dire non raccordée au réseau public de distribution d'électricité),

- en ce qui concerne une prétendue mise sous concession en octobre 1986, selon l'email d'une conseillère clientèle du service ingénierie ouvrages collectif d'Enedis, l'emploi du conditionnel suffit à exclure toute reconnaissance de transfert de propriété certain à la ville de [Localité 9],

- qu'en tout état de cause, aux dates auxquelles ces informations ont ou auraient été données, en 2018 et en 2021, la prescription était déjà acquise depuis plusieurs années,

- si par extraordinaire le juge de la mise en état devait ne pas retenir le 4 novembre 2011 comme point de départ du délai de la prescription quinquennale, celui-ci devra être fixé au plus tard à la date à laquelle le syndicat des copropriétaires a réceptionné les travaux de la société Etablissements Gomel.

- le syndic Meb Gestion a indiqué, par email du 30 septembre 2019, que la société Etablissements Gomel a établi sa facture le 24 février 2012, ce dont il résulte que, sauf preuve du contraire, les travaux de rénovation de colonne montante étaient achevés à cette date, puisqu'il s'agit de la facturation du solde du marché payable "à la réception des travaux" selon l'ordre de service du 4 avril 2011,

- le syndicat des copropriétaires a donc exposé à cette date la totalité des frais qu'il estime que la société Enedis devrait lui "rembourser",

- il avait, dès lors la possibilité d'agir au moins à compter du 24 février 2012, sur le fondement du Décret n° 46-2503 du 8 novembre 1946 relatif aux colonnes montantes d'électricité et du Décret n° 55-326 du 29 mars 1955 relatif aux frais de renforcement des colonnes montantes d'électricité dans les immeubles d'habitation collective qu'il vise dans son assignation,

- l'action du syndicat des copropriétaires contre la société Enedis en remboursement des frais de réfection de la colonne montante du bâtiment B est donc prescrite, au plus tard, depuis le 24 février 2017,

- le point de départ du délai de prescription quinquennal doit être fixé au 4 novembre 2011,

- le syndicat des copropriétaires avait la possibilité d'agir contre la société Enedis dès cette date, ou tout du moins dès la réception et le règlement complet des travaux de rénovation de sa colonne montante le 24 février 2012 selon la facture de son électricien,

- la copropriété explique que "c'est au moment de la réalisation de travaux similaires au sein du bâtiment A que la question de l'imputation de travaux réalisés sur la colonne montante s'est une nouvelle fois posée", ce qui constitue un aveu judiciaire de ce que la copropriété connaissait l'existence d'un doute quant à la propriété de la colonne montante du bâtiment B bien avant 2018.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] s'y oppose en faisant valoir que :

- Enedis confond la question de la propriété de la colonne et celle de son exploitation en concession,

- le fait déclencheur de la prise en charge par Enedis, des travaux afférents, est l'exploitation en concession de la colonne, et non le nom du propriétaire,

- le syndicat des copropriétaires n'a jamais su, avant décembre 2018, que la colonne montante d'électricité pouvait être sous concession,

- postérieurement à la réalisation des travaux en septembre 2011, une fiche "d'information immeuble, neuf, rénové ou réhabilité" établie par ERDF avait été adressée à la copropriété indiquant que la propriété de la colonne montante était inconnue,

- l'examen du document permet de constater que beaucoup d'autres données semblent manquantes sur le fichier, et qu'une fiche incomplète a été adressée au syndicat des copropriétaires,

- l'information déterminante, à savoir l'existence ou non d'une concession sur cette colonne montante, n'apparaît ni sur cette fiche immeuble, ni sur aucun autre document,

- dans le cadre d'un échange d'emails du 13 décembre 2021, il lui a été adressé une capture d'écran indiquant une "date de mise en exploitation" à la date du 1er juillet 2005, puis un autre email du 16 décembre 2021, venait contredire le précédent, non pas sur la propriété de la colonne, mais sur la date de mise sous concession,

- alors que la colonne montante est déjà sous concession antérieurement aux travaux de 2011, cette information ne figure nulle part, la fiche immeuble du 4 novembre 2011 ne précise pas cette information capitale,

- le syndicat des copropriétaires n'avait aucune raison ni aucun élément lui permettant de penser qu'il existait une concession, ni aucune raison ni aucun élément pouvant lui laisser croire que ERDF pourrait ignorer une telle existence,

- ERDF a en réalité fourni un document incomplet comme le démontre les autres mentions vides de la fiche immeuble,

- si le concessionnaire lui-même n'est pas en mesure de confirmer qu'il est bien l'exploitant d'une colonne montante d'électricité, comment un syndicat des copropriétaires, parfaitement profane en la matière, pourrait être en mesure de l'établir,

- la date à laquelle le syndicat des copropriétaires a été informé de manière certaine de la mise sous concession des colonnes montantes, correspond au premier email d'Enedis, soit le 13 décembre 2021 (et avec une première information en décembre 2018), le syndicat des copropriétaires avait jusqu'au 13 décembre 2026 pour agir sur le fondement de la responsabilité contractuelle à l'encontre du Cabinet [B] et [F] et en remboursement des travaux engagés pour la réfection des colonnes montantes à l'encontre de la société Enedis,

- l'assignation ayant été délivrée le 7 avril 2023, soit dans les délais légaux, l'action du syndicat des copropriétaires n'est pas prescrite.

***

En droit, aux termes de l'article 1302-2 du code civil : "Celui qui par erreur ou sous la contrainte a acquitté la dette d'autrui peut agir en restitution contre le créancier. Néanmoins ce droit cesse dans le cas où le créancier, par suite du paiement, a détruit son titre ou abandonné les sûretés qui garantissaient sa créance.
La restitution peut aussi être demandée à celui dont la dette a été acquittée par erreur".

La charge de la preuve du paiement indu incombe au demandeur en restitution (ex. : 1ère Civ., 16 novembre 2004, n° 01-17.182).

L'origine de la créance est en principe le paiement, événement faisant naître l'indu, que connaît normalement le titulaire de l'action, et à compter duquel court donc le délai de prescription.

L'action en répétition de l'indu ne peut être utilement engagée qu'à compter de la date où le paiement est devenu indu (3ème Civ., 31 mai 2007, n° 06-13.224 ; Bull. civ. III, n° 95).

L'action en répétition de l'indu est soumise à la prescription de l'article 2224 du code civil qui dispose que "Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer".

En l'espèce, il ressort des éléments versés aux débats que la société Enedis n'a jamais reconnu que la colonne montante du bâtiment B serait sous concession.

S'agissant de la transmission par la société Enedis le 13 décembre 2021 d'une capture d'écran de son outil Geco dont il ressort que la colonne montante est " en exploitation " depuis le 1er juillet 2005, ce document ne permet de tirer aucune conclusion quant à une mise sous concession en l'absence de toute référence expresse à cette mise sous concession (pièce n°6 du syndicat des copropriétaires).

S'agissant par ailleurs de l'email du 16 décembre 2021 d'une conseillère clientèle du service ingénierie ouvrages collectif d'Enedis rédigé en ces termes :

"La colonne de l'immeuble sis, [Adresse 3], serait propriété de la ville de [Localité 9] et sous concession d'Enedis depuis octobre 1986",
l'emploi du conditionnel ne permet pas de prouver une mise sous concession en octobre 1986 (pièce n°7 du syndicat des copropriétaires).

Le syndicat des copropriétaires ne rapporte donc pas la preuve d'une mise sous concession de la colonne montante du bâtiment B.

Le 4 novembre 2011, une fiche "d'information immeuble, neuf, rénové ou réhabilité" établie par ERDF a été adressée à la copropriété indiquant face de la case "Propriété CM" la mention suivante : "???" (pièce n°12 du syndicat des copropriétaires).

Il en résulte qu'à cette date le syndicat des copropriétaires pouvait avoir un doute quant à la propriété de la colonne montante du bâtiment B et sur sa qualité de débiteur des travaux.

Il ressort de l'email du syndic du 30 septembre 2019, que les travaux afférents ont été payés à la société Gomel au terme de sa facture du 24 février 2012 (pièce n°3 du syndicat des copropriétaires).

Dans ces conditions, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] disposait d'un délai pour agir en répétition de l'indu jusqu'au 24 février 2017. Or l'assignation introductive d'instance a été délivrée le 7 avril 2023.

En conséquence, l'action en restitution de l'indu du syndicat des copropriétaires est irrecevable comme prescrite.

Sur les demandes accessoires

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] voyant son action déclarée irrecevable, il sera condamné au paiement des entiers dépens de l'instance ainsi qu'à verser à la société Enedis et à la société [B] et [F] Architectes, la somme de 1.000 euros à chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties seront déboutées de toutes leurs demandes autres, plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge de la mise en état, statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe et susceptible d'appel dans les conditions de l'article 795 du code de procédure civile :

DECLARONS le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] irrecevable en sa demande de restitution de l'indu,

CONDAMNONS le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] à verser à la société Enedis et à la société [B] et [F] Architectes la somme de 1.000 euros à chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] aux dépens de l'instance,

DEBOUTONS les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;

RAPPELONS que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Faite et rendue à Paris le 25 Avril 2024.

La GreffièreLa Juge de la mise en état


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 23/05910
Date de la décision : 25/04/2024
Sens de l'arrêt : Déclare la demande ou le recours irrecevable

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-25;23.05910 ?
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