La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2024 | FRANCE | N°22/01438

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/1 nationalité a, 25 avril 2024, 22/01438


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/1 nationalité A

N° RG 22/01438
N° Portalis 352J-W-B7F-CVK7D

N° PARQUET : 21/1027

N° MINUTE :

Assignation du :
18 Octobre 2021

C.B.


[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :








JUGEMENT
rendu le 25 Avril 2024









DEMANDEUR

Monsieur [T] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Me Marie WADE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C0278
>
DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 5]
[Localité 2]

Madame Laureen SIMOES, Substitute

Décision du 25 avril 2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section A
RG n° 22/01438...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/1 nationalité A

N° RG 22/01438
N° Portalis 352J-W-B7F-CVK7D

N° PARQUET : 21/1027

N° MINUTE :

Assignation du :
18 Octobre 2021

C.B.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 25 Avril 2024

DEMANDEUR

Monsieur [T] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Me Marie WADE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C0278

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 5]
[Localité 2]

Madame Laureen SIMOES, Substitute

Décision du 25 avril 2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section A
RG n° 22/01438

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Maryam Mehrabi, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Victoria Bouzon, Juge
Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Christine Kermorvant, Greffière

DEBATS

A l’audience du 29 Février 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Maryam Mehrabi, vice-présidente et par Madame Christine Kermorvant, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 18 octobre 2021 par M. [T] [Y] au procureur de la République,

Vu les dernières conclusions de M. [T] [Y] notifiées par la voie électronique le 25 juillet 2023,

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 14 mars 2023,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 1er février 2024, ayant fixé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 29 février 2024,

Vu la note d'audience du 29 février 2024,

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les pièces de M. [T] [Y]

M. [T] [Y] a produit dans son dossier de plaidoirie une pièce n°12 intitulée « accusé de réception de l'assignation » dans son bordereau de communication de pièces.

Décision du 25 avril 2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section A
RG n° 22/01438

Cette pièce n'a pas été communiquée au ministère public.

A l'audience, le ministère public ne s'est pas opposé à la révocation de clôture rendue le 1er février 2024, à la production de la pièce n°12, et à la clôture de l'instruction de l'affaire.

Dès lors, il convient de révoquer l’ordonnance de clôture rendue le 1er février 2024, de recevoir la pièce n°12 de M. [T] [Y], et d'ordonner la clôture de l'instruction.

M. [T] [Y] a également produit dans son dossier de plaidoirie une pièce n°13 intitulée « attestation de l'officier d’état civil » dans son bordereau de communication de pièces.

A l'audience, le ministère public s'est opposé à la recevabilité de la pièce n°13 faute d'avoir été contradictoirement produite avant l’ordonnance de clôture.

La pièce n°13 sera donc déclarée irrecevable en application des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile.

Sur la procédure

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, applicable à la date de l'assignation, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

Le ministère public demande au tribunal de juger la procédure irrégulière au sens de l'article 1043 du code de procédure civile en faisant valoir que les formalités prévues par ces dispositions n'ont pas été accomplies.

M. [T] [Y] demande au tribunal de constater qu'il a satisfait aux prescritions de l'article 1043 du code de procédure civile. Il verse aux débats l'avis de réception d'un courrier de demande de récépissé conformément aux dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile, visé par le ministère de la justice le 14 juin 2023 (pièce n°12 du demandeur).

Il est ainsi démontré que le ministère de la justice a bien été destinataire de l'assignation. Les formalités de l'articles 1043 du code de procédure civile apparaissent ainsi avoir été accomplies par le demandeur.

Par conséquent, la demande du ministère public relative à la caducité de l'assignation sera rejetée et la procédure sera jugée régulière au regard de ces dispositions.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

M. [T] [Y], se disant né le 9 septembre 1997 à [Localité 6] (Sénégal), revendique la nationalité française par filiation paternelle, sur le fondement de l'article 18 du code civil. Il fait valoir que son père, M. [E] [Y], né le 4 décembre 1972 à [Localité 4], est français par double droit du sol sur le fondement de l'article 23 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, pour être né en France d'un parent étranger né sur un territoire qui avait au moment de sa naissance le statut de territoire d'outre-mer ou de colonie de la république française.

Son action fait suite à la décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française qui lui a été opposée le 11 septembre 2020 par le directeur des services de greffe judiciaires du service de la nationalité française du tribunal judiciaire de Paris au motif que son acte de naissance sénégalais ne portait pas mention d'une déclaration tardive conformément à l'article 51 du code de la famille sénégalais, et que la transcription de son acte de naissance sur les registres du service central d'état civil ne purgeait pas l'acte de naissance sénégalais de ses vices (pièce n°A du demandeur).

Sur la demande de « constat »

M. [T] [Y] demande au tribunal de « constater » qu'il est français. Cette demande de « constat » s'analyse en une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile tendant à voir « juger » qu'il est de nationalité française.

Le tribunal statuera donc sur cette demande ainsi requalifiée.

Sur le fond

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

Conformément à l'article 17-1 du code civil, compte tenu de la date de naissance revendiquée par le demandeur, l'action relève des dispositions de l’article 18 du code civil aux termes duquel est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français.

Il appartient ainsi à M. [T] [Y], qui n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française, de démontrer, d'une part, la nationalité française du parent duquel il la tiendrait et, d’autre part, un lien de filiation légalement établi a l’égard de celui-ci, au moyen d’actes d’état civil probants au sens de l’article 47 du code civil, étant précisé qu’afin de satisfaire aux exigences de l’article 20-1 du code civil, cet établissement doit être intervenu pendant sa minorité pour avoir des effets sur la nationalité.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et le Sénégal, les actes d'état civil sont dispensés de légalisation par les articles 34 et 35 de la convention de coopération en matière judiciaire signée le 29 mars 1974 et publiée par décret numéro 76-1072 du 17 novembre 1976 ; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer et certifiés conformes à l'original par ladite autorité.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s’il ne dispose d’un état civil fiable et certain.

En l'espèce, pour justifier de son état civil, M. [T] [Y] verse aux débats une copie délivrée le 7 décembre 2020 de son acte de naissance sénégalais, une copie délivrée le 6 juin 2011 de son acte de naissance transcrit par le service central d'état civil et une photocopie certifiée conforme de la souche de son acte de naissance (pièces n°6, 8 et 10 du demandeur).

Le tribunal relève que ces pièces sont produites en simple photocopies. Or, une photocopie étant exempte de toute garantie d'authenticité et d'intégrité, ces pièces sont dépourvues de toute force probante, étant rappelé qu'il est indiqué dès le premier bulletin de procédure que l’avocat en demande doit s'assurer qu'il détient bien une copie intégrale en original de l'acte de naissance de son client, qui devra figurer dans le dossier de plaidoirie, exigence rappelée dans le bulletin notifiant la clôture s'agissant de tous les actes de l’état civil du dossier de plaidoirie, qui doivent être produits en original.

Ne justifiant pas d'un état civil fiable et certain, M. [T] [Y] ne peut revendiquer la nationalité française à quelque titre que ce soit.

Par ailleurs, même à supposer les originaux de ces pièces produits, comme le soulève à juste titre le ministère public, M. [T] [Y] ne verse pas aux débats les actes de naissance de ses grands-parents paternels revendiqués. Il ne justifie donc pas du lieu de naissance des parents de M. [E] [Y] de sorte qu'il ne démontre pas que celui-ci serait de nationalite française en application des dispositions de l'article 23 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973.

Pour justifier de la nationalité française de son père revendiqué, M. [T] [Y] se borne ainsi à produire le certificat de nationalité française délivré à M. [E] [Y] (pièce n°2 du demandeur).

Or le tribunal rappelle avec le ministère public qu'un certificat de nationalité française ne vaut présomption de nationalité française que pour son titulaire, et en l’espèce pour M. [E] [Y], dans les instances le concernant, et il ne peut dispenser les tiers, fussent-ils ses propres enfants, de rapporter la preuve de leur nationalité française dans les instances les concernant.

Le demandeur ne peut donc se prévaloir, dans l'instance le concernant, du certificat de nationalité française délivré à M. [E] [Y].

Échouant à justifier de la nationalité française de son père revendiqué, M. [T] [Y] ne démontre pas être de nationalité française sur le fondement de l'article 18 du code civil, précité.

En conséquence, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés par le ministère public, M. [T] [Y] sera débouté de sa demande tendant à se voir reconnaître la nationalité française par filiation paternelle. En outre, dès lors qu'il ne peut revendiquer la nationalité française à aucun titre, il sera jugé, conformément à la demande reconventionnelle du ministère public, qu'il n'est pas de nationalité française.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, M. [T] [Y], qui succombe, sera condamné aux dépens.

Sur l'article 700 du code procédure civile

M. [T] [Y] ayant été condamné aux dépens, sa demande au titre de l'article 700 du code procédure civile ne peut qu'être rejetée.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Révoque l'ordonnance de clôture rendue le 1er février 2024 ;

Déclare recevable la pièce n°12 de M. [T] [Y] intitulée « accusé de réception de l'assignation » ;

Ordonne la clôture de l'instruction ;

Déclare irrecevable la pièce n°13 de M. [T] [Y] intitulée «attestation de l'officier d’état civil » ;

Déboute le ministère public de sa demande de caducité de l'assignation;

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile ;

Déboute M. [T] de sa demande tendant à voir juger qu'il est de nationalité française ;

Juge que M. [T] [Y], se disant né le le 9 septembre 1997 à [Localité 6] (Sénégal), n'est pas de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Déboute M. [T] [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [T] [Y] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 25 Avril 2024

La GreffièreLa Présidente
Christine KermorvantMaryam Mehrabi


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/1 nationalité a
Numéro d'arrêt : 22/01438
Date de la décision : 25/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-25;22.01438 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award