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24/04/2024 | FRANCE | N°23/15955

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 3ème chambre 3ème section, 24 avril 2024, 23/15955


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le :
Copie exécutoire délivrée à :
- Maître Lienhardt, vestiaire E974




3ème chambre
3ème section


N° RG 23/15955 -
N° Portalis 352J-W-B7H-C3LRC

N° MINUTE :


Assignation du :
07 décembre 2023
















JUGEMENT
rendu le 24 avril 2024
DEMANDERESSE

S.A.S. INVEST
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]

représentée par Maître Roland LIENHARDT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire

#E0974



DÉFENDERESSE

S.A.R.L. JANNI JANNI
[Adresse 1]
[Localité 2]

défaillante







Décision du 24 avril 2024
3ème chambre 3ème section
N° RG 23/15955 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3LRC


COMPOSITION DU TRI...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le :
Copie exécutoire délivrée à :
- Maître Lienhardt, vestiaire E974

3ème chambre
3ème section


N° RG 23/15955 -
N° Portalis 352J-W-B7H-C3LRC

N° MINUTE :

Assignation du :
07 décembre 2023

JUGEMENT
rendu le 24 avril 2024
DEMANDERESSE

S.A.S. INVEST
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]

représentée par Maître Roland LIENHARDT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0974

DÉFENDERESSE

S.A.R.L. JANNI JANNI
[Adresse 1]
[Localité 2]

défaillante

Décision du 24 avril 2024
3ème chambre 3ème section
N° RG 23/15955 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3LRC

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jean-Christophe GAYET, premier vice-président adjoint
Anne BOUTRON, vice-présidente
Véra ZEDERMAN, vice-présidente

assisté de Lorine MILLE, greffière

DEBATS

À l'audience d'orientation du 1er février 2024, en accord avec le conseil de la demanderesse, il a été procédé sans audience conformément aux dispositions de l'article 778 dernier alinéa du code de procédure civile.
Avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 24 Avril 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société par actions simplifiée Invest (ci-après la SAS Invest) a pour activité le commerce de gros de chaussures, vêtements et accessoires et la vente à distance.
Elle est titulaire des modèles communautaires n° 009203585-0001 et n° 009203585-0002 protégeant des semelles en plastique blanc.
La société à responsabilité limitée Janni Janni (ci-après SARL Janni Janni) exerce, notamment, l’achat et la vente en gros et demi-gros de prêt-à-porter hommes, femmes et enfants, dont les chaussures.
Estimant que la SARL Janni Janni commercialise des espadrilles dont elle estime qu’elles constituent des copies serviles de ses modèles, la SAS Invest l’a mise en demeure d’en cesser la commercialisation par courrier du 25 mai 2023 réitéré le 21 juin 2023.
Par acte de commissaire de justice du 7 décembre 2023, la SAS Invest a fait assigner la SARL Janni Janni à l’audience d’orientation du 1er février 2024 de ce tribunal en contrefaçon de droit d’auteur, de modèle communautaire et concurrence déloyale et parasitaire.
Bien que régulièrement citée par dépôt de l'acte à l'étude de commissaire de justice, les vérifications confirmant le domicile de la défenderesse : présence du nom et de l’enseigne sur la boîte aux lettres et confirmation par le voisinage et l’agent de sécurité du centre commercial, confirmation de l’adresse par la consultation du site Infogreffe, la SARL Janni Janni n'a pas constitué avocat et n’a pas comparu.

À l'audience d'orientation du 1er février 2024, en accord avec le conseil de la demanderesse, il a été procédé conformément aux dispositions de l'article 778 dernier alinéa du code de procédure civile ; l’instruction a été close et la demanderesse, ayant déposé son dossier, a été informée que la décision serait rendue le 24 avril 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de son assignation, la SAS Invest demande au tribunal de:- à titre principal, juger que la SARL Janni Janni a commis des actes de contrefaçon des modèles n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002 à son préjudice
- condamner la SARL Janni Janni à lui payer 80 000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation des actes de contrefaçons des modèles communautaires
- ordonner la communication forcée des éléments comptables relatifs à l’origine du produit contrefaisant, au nombre de produits importés et commercialisés, au nombre prospectus distribués laissant apparaître le produit contrefaisant les modèles n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir
- condamner la SARL Janni Janni à lui payer 25 000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels au titre du gain manqué
- condamner la SARL Janni Janni à lui payer 10 000 euros au titre de l’atteinte à son droit moral d’auteur
- à titre subsidiaire, condamner la SARL Janni Janni à lui payer 25 000 euros en réparation des faits de concurrence déloyale et parasitaire
- en tout état de cause, interdire toute diffusion, commercialisation et offre qu’elle soit directe ou indirecte des produits contrefaisants les modèles n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002 sous astreinte de 1000 euros par infraction constatée, chaque exemplaire distribué constituant une infraction
- ordonner la publication du jugement à intervenir dans trois revues ou journaux au choix de la demanderesse pour un montant n'excédant pas 5000 euros par publication
- ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir sur la page d'accueil du site Internet de la SARL Janni Janni pendant une durée d’un mois, au-dessus de la ligne de flottaison à compter de la signification du jugement en caractère times 12, à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard, le tribunal restant juge de la liquidation de l’astreinte
- condamner la défenderesse à lui payer 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l'instance comprenant notamment les frais de constat, dont distraction au profit de Me Roland Lienhardt, avocat aux ordres de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, la SAS Invest fait valoir que :- ses deux modèles de semelles constituent ses produits phares sur lesquels elle détient des droits d’auteur compte tenu de leur originalité, caractérisée, s’agissant du modèle n° 009203581-0001, par l’apposition d’une bande en jute comportant une couture très fine et discrète pour maintenir le chausson, ce qui donne à l’espadrille un aspect visuel très sobre, classique et très reconnaissable et, s’agissant du modèle n° 009203581-0001, par l’apposition d’une piqûre apparente en cordage régulier et séquencé formant des petits carrés continus donnant ainsi une impression visuelle très spécifique que l’on peut apparenter à un maillage cordé, ce qui est inhabituel pour ce type de chaussures et lui confère ainsi un aspect visuel très original

- la commercialisation par la défenderesse de ses modèles intitulés “Kadiman ballerine homme” comportant les semelles litigieuses constituent des actes de contrefaçon des droits d’auteur qu’elle détient sur les modèles invoqués compte tenu de l’impression visuelle d’ensemble identique ou similaire produite
- le fait, par la défenderesse, de commercialiser simultanément plusieurs modèles de ballerines, toutes étant des copies serviles de ses modèles originaux, génère un effet de gamme opérant un rattachement indu à ses produits de nature à créer un risque de confusion dans l’esprit du public, constitutif d’une concurrence déloyale
- cette commercialisation n’a été opérée par la défenderesse qu’après qu’elle a acquis la certitude du succès commercial des modèles qu’elle a copiés, caractérisant ainsi sa volonté de profiter de ses investissements, en particulier de communication, et de la réputation de qualité de ses produits sans bourse délier afin de détourner sa clientèle
- son préjudice consiste, d’une part, dans les actes de contrefaçon commis par la défenderesse, d’autre part, dans le manque à gagner résultant de ses ventes manquées en France et, enfin, dans la banalisation et l’avilissement de son motif original.

MOTIVATION

À titre liminaire, il sera rappelé que conformément à l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
I - Sur la demande principale au titre de la contrefaçon de droits d’auteur

Conformément à l'article L.111-1 alinéas 1 et 2 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial.
Selon l'article L.112-1 du même code, ce droit appartient aux auteurs sur toutes les œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination.
En application de l'article L.122-1 du code de la propriété intellectuelle, le droit d'exploitation appartenant à l'auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction.
Aux termes de l'article L.122-4 du même code, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.
Il est, enfin, établi que l'appréciation de la contrefaçon d'une œuvre s'effectue en fonction des ressemblances et non des différences (notamment en ce sens Cour de cassation, 1ère chambre civile, 9 avril 2015, pourvoi n°23-28.768).
S’agissant de la contrefaçon, la SAS Invest revendique comme originale pour le modèle n° 009203581-0001, la combinaison des caractéristiques suivantes : - “l’apposition d’une bande en jute
- comportant une couture très fine et discrète pour maintenir le chausson,
- ce qui donne à l’espadrille un aspect visuel très sobre, classique et très reconnaissable”.

Elle revendique comme originale pour le modèle n° 009203581-0002 la combinaison des caractéristiques suivantes :- “l’apposition d’une piqûre apparente en cordage régulier et séquencé
- formant des petits carrés continus donnant ainsi une impression visuelle très spécifique
- que l’on peut apparenter à un maillage cordé
- ce qui est inhabituel pour ce type de chaussures et lui confère ainsi un aspect visuel très original”.

Elle produit aux débats deux constats de commissaire de justice des 10 et 19 avril 2023 réalisés sur internet, sur les sites parisfashionshops.com/fr$gt; et efashion-paris.com$gt; (ses pièces n°5 et 6).
Toutefois, les photographies intégrées à ces constats ne permettent pas d’établir que les produits proposés à la vente, pour le modèle n° 009203581-0001, reproduisent “l’apposition d’une bande en jute”, la matière de leur composition n’étant pas précisée, non plus que la présence d’une “couture très fine et discrète pour maintenir le chausson”, invisible sur les pièces produites ; pour le modèle n° 009203581-0002, l’existence d’une “piqûre apparente en cordage”, la matière de leur composition n’étant pas plus précisée, non plus que la “formation de petits carrés continus”, les modèles reproduits présentants une bordure parsemée d’arceaux successifs.
Il en résulte que la contrefaçon de droit d’auteur alléguée n’est pas démontrée et les demandes de la SAS Invest fondées sur la contrefaçon de droit d’auteur seront rejetées.
II - Sur la demande principale en contrefaçon de modèles communautaires

L'article 10 du Règlement (CE) n°6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires dispose que 1. La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale différente.2. Pour apprécier l'étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle.

Aux termes de l'article 19, 1° du même règlement, le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l'utiliser et d'interdire à tout tiers de l'utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de la présente disposition, on entend en particulier la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation ou l'utilisation d'un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins.

Selon l'article L.515-1 du code de la propriété intellectuelle, toute atteinte aux droits définis par l'article 19 du Règlement (CE) n°6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur.
La reproduction des caractéristiques essentielles d'un modèle enregistré, engendrant la même impression visuelle globale, en constitue la contrefaçon (en ce sens, Cour de cassation, chambre commerciale, 26 mars 2008, n°06-22.013).
En l’occurrence, la SAS Invest produit aux débats les deux constats de commissaire de justice sur internet précités établissant que la SARL Janni Janni commercialise, à tout le moins via les sites parisfashionshops.com/fr$gt; et efashion-paris.com$gt;, divers modèles de ballerines pour homme dotées de semelles blanches sous la marque “Kadiman” (ses pièces n°5, 6 et 13).
Le modèle n° 009203581-0001, publié au nom de la SAS Invest, se présente comme suit (sa pièce n°2) :

Les produits argués de contrefaçon du modèle n° 009203581-0001 présentent la bordure de semelle suivante :

Il ressort de l’examen comparatif que les modèles “Kandiman” litigieux reproduisent les caractéristiques essentielles du modèle communautaire n° 009203581-0001, en particulier un aspect de tressage vertical de fins cordages écru clair, traversé d’un liseré continu à mi-hauteur, surmonté de petites boucles continues de même couleur, l’ensemble au-dessus d’une mince semelle blanche parsemée d’un grumelage ténu et irrégulier.

Le modèle n° 009203581-0002, publié au nom de la SAS Invest, se présente comme suit (sa pièce n°2) :
Les produits argués de contrefaçon du modèle n° 009203581-0002 présentent la bordure de semelle suivante :
31. Il ressort de l’examen comparatif que les modèles “Kandiman” litigieux reproduisent les caractéristiques essentielles du modèle communautaire n° 009203581-0002, en particulier un aspect de tressage vertical de fins cordages écru clair surligné d’un motif continu en forme d’arceaux composés de trois lignes d’égales longueurs de couleur beige foncé.

La circonstance que les semelles de ces modèles “Kandiman” soient surmontées de petites boucles continues écru clair constitue une différence minime.
Il résulte de l’ensemble que les modèles litigieux produisent sur l’utilisateur averti, défini comme l’acheteur professionnel de chaussures se tenant régulièrement informé, une même impression visuelle globale, en sorte que la contrefaçon des modèles communautaires n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002 est caractérisée.
III - Sur la demande subsidiaire en concurrence déloyale et parasitisme

Aux termes de l’article 768 alinéa 2 du code de procédure civile, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Les moyens qui n'auraient pas été formulés dans les conclusions précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
En l’espèce, si la SAS Invest développe dans la partie discussion de son assignation divers moyens visant à caractériser l’existence de faits distincts de la contrefaçon de ses modèles, elle ne présente, dans le dispositif de ses conclusions, de demande au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme qu’à titre subsidiaire. Le tribunal n’est donc saisi que de cette demande subsidiaire.
Sa demande principale au titre de la contrefaçon de modèles communautaires étant accueillie, il n’y a, dès lors, pas lieu à statuer sur la demande subsidiaire.
IV - Sur les mesures réparatrices

Selon l'article L.521-7 du code de la propriété intellectuelle, applicable aux cas de contrefaçon de modèles communautaires en application de l'article L.522-1 du même code, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : 1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

L'article L.521-8 du même code, également applicable aux cas de contrefaçon de modèles communautaires, prévoit qu'en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les produits reconnus comme produits contrefaisants, les matériaux et instruments ayant principalement servi à leur création ou fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée.La juridiction peut aussi ordonner toute mesure appropriée de publicité du jugement, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu'elle désigne, selon les modalités qu'elle précise. Ces mesures sont ordonnées aux frais du contrefacteur.

L'article L.521-7 du code de la propriété intellectuelle, lequel emploie l'adverbe “distinctement” et non “cumulativement”, commande une appréciation distincte des chefs de préjudice et non pas cumulative.
Au soutien de ses demandes, en particulier de son préjudice commercial, la SAS Invest avance des chiffres de vente pour les années 2021 à 2023 et une marge moyenne brute de 3,45 euros par paire de chaussure vendue, sans, cependant, les étayer d’aucune pièce.
Néanmoins, les actes constitutifs de contrefaçon des modèles communautaires n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002 justifient le prononcé de mesures de communication forcée de pièces par la SARL Janni Janni, dans les termes du dispositif et sous astreinte.
Ils justifient, également, sa condamnation à verser à la SAS Invest une indemnité provisionnelle de 20 000 euros, ainsi que des mesures d’interdiction sous astreinte dans les termes du dispositif.
En revanche, le surplus des demandes de la SAS Invest en publication sera rejeté.

V - Sur les demandes accessoires

V.1 - Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.
Selon l’article 699 du même code, les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision.La partie contre laquelle le recouvrement est poursuivi peut toutefois déduire, par compensation légale, le montant de sa créance de dépens.

La SARL Janni Janni, partie perdante à l'instance, sera condamnée aux dépens, avec distration au profit de l’avocat de la SAS Invest.
V.2 - Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
La SARL Janni Janni, parties tenues aux dépens, sera condamnée à payer 8000 euros à la SAS Invest à ce titre, incluant les frais de constat de commissaire de justice.
V. 3 - Sur l'exécution provisoire

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
L’exécution provisoire de droit n’a pas à être écartée en l’espèce.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Condamne la SARL Janni Janni à payer 20 000 euros à la SAS Invest, à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation des actes de contrefaçon des modèles communautaires n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002 ;

Ordonne à la SARL Janni Janni de communiquer à la SAS Invest les éléments comptables relatifs à la commercialisation en France, y compris dans les territoires ultra-marins, des modèles “Kandiman” jugés contrefaisants les modèles communautaires n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002, dans le délai d’un mois suivant la signification du jugement, puis sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard courant pendant cent quatre-vingts jours ;

Interdit à la SARL Janni Janni toute commercialisation des modèles “Kandiman” jugés contrefaisants les modèles communautaires n° 009203581-0001 et n° 009203581-0002, dans le délai d’un mois suivant la signification du jugement, puis sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard courant pendant cent quatre-vingts jours ;

Se réserve la liquidation de l’astreinte ;

Déboute la SAS Invest de ses demandes fondées sur la contrefaçon de droits d’auteur et de ses demandes en publication ;

Dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de la SAS Invest fondée sur la concurrence déloyale et parasitaire ;

Condamne la SARL Janni Janni aux dépens, avec droit pour Maître Roland Lienhardt, avocat au barreau de Paris, de recouvrer ceux dont il a fait l’avance sans recevoir provision ;

Condamne la SARL Janni Janni à payer 8000 euros à la SAS Invest en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 24 avril 2024

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 3ème chambre 3ème section
Numéro d'arrêt : 23/15955
Date de la décision : 24/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-24;23.15955 ?
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