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24/04/2024 | FRANCE | N°23/15565

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 3ème chambre 3ème section, 24 avril 2024, 23/15565


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le :
Copie exécutoire délivrée à :
- Maître Roux, vestiaire C210




3ème chambre
3ème section


N° RG 23/15565 -
N° Portalis 352J-W-B7H-C3KA7

N° MINUTE :


Assignation du :
01 décembre 2023















JUGEMENT
rendu le 24 avril 2024
DEMANDEURS

S.A.S. [6]
[Adresse 2]
[Localité 5]

Monsieur [G] [S]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentés par Maître Olivier ROUX de la SELEURL AG

APÊ, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C0210



DÉFENDERESSE

S.A.S. B12
[Adresse 1]
[Localité 4]

défaillante





Décision du 24 Avril 2024
3ème chambre 3ème section
N° RG 23/15565 - N° Portalis 352J-W-B7H-C...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le :
Copie exécutoire délivrée à :
- Maître Roux, vestiaire C210

3ème chambre
3ème section


N° RG 23/15565 -
N° Portalis 352J-W-B7H-C3KA7

N° MINUTE :

Assignation du :
01 décembre 2023

JUGEMENT
rendu le 24 avril 2024
DEMANDEURS

S.A.S. [6]
[Adresse 2]
[Localité 5]

Monsieur [G] [S]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentés par Maître Olivier ROUX de la SELEURL AGAPÊ, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C0210

DÉFENDERESSE

S.A.S. B12
[Adresse 1]
[Localité 4]

défaillante

Décision du 24 Avril 2024
3ème chambre 3ème section
N° RG 23/15565 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KA7

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jean-Christophe GAYET, premier vice-président adjoint
Anne BOUTRON, vice-présidente
Arthur COURILLON-HAVY, juge

assistés de Lorine MILLE, greffière

DEBATS

A l'audience d'orientation du 1er février 2024, en accord avec le conseil des demanderesses, il a été procédé conformément aux dispositions de l'article 778 dernier alinéa du code de procédure civile ; l’instruction a été close et la demanderesse, ayant déposé son dossier, a été informée que la décision serait rendue le 24 avril 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire
En premier ressort

Exposé des faits et de la procédure

M. [G] [S] est le dirigeant de la société [6], immatriculée le 03 mai 2018, spécialisée dans la restauration rapide. Cette société exploite un restaurant de sandwichs de type kebab dans le [Localité 5] de [Localité 7], sous l’enseigne “[6] - berliner kebap”.
M. [S] est titulaire de trois marques : - la marque française verbale “[6]” n°4445936, déposée le 13 avril 2018 et publiée le 04 mai 2018, en classes 30, 32 et 43 notamment pour des sandwichs, kebabs, diverses boissons et des services de restauration, traiteurs et restauration rapide,
- la marque française semi-figurative suivante n°4466540, déposée le 03 juillet 2018 et publiée le 27 juillet 2018, en classes 29, 30, 32 et 43, notamment pour des plats cuisinés essentiellement composés de kebabs, des sandwichs, diverses boissons et des services de restauration, traiteurs et restauration rapide :

- la marque verbale de l’Union européenne “[6]” n°018257006, déposée le 19 juin 2020 et publiée le 26 juin 2020, en classe 43 pour des services de restauration rapide.

La société [6] est cotitulaire de la marque de l’Union européenne n°018257006 et licenciée exclusive des marques de M. [S] depuis le 1er août 2018. Elle exploite l’ensemble de ces signes au travers de son restaurant, de son site internet [6]paris.fr$gt; et de son compte Instagram.
La société B12, immatriculée le 13 septembre 2021, est spécialisée dans la restauration. Le 09 mai 2023, M. [S] a découvert qu’elle avait ouvert un restaurant de sandwichs kebabs sous l’enseigne “[6]” dans le [Localité 4] de [Localité 7]. Le 16 mai 2023, les demanderesses ont fait constater par commissaire de justice que ce restaurant avait pour enseigne “[6] kebab” et une bannière “le meilleur kebab”. Sur sommation interpellative, l’employé présent a déclaré être salarié de la société B12, dont son épouse est gérante. Le même jour, il était remis un courrier de mise en demeure à la société B12 de cesser toute utilisation à quelque titre que ce soit du signe “[6]” dans la vie des affaires.
Cette mise en demeure étant restée vaine, la société [6] et M. [S] ont fait assigner en référé, par acte du 22 juin 2023, la société B12 aux fins de voir interdire l’usage du signe “[6]” et d’ordonner le retrait de tous les produits portant la mention “[6]” aux frais de la société B12, sous astreinte. Par ordonnance rendue le 14 novembre 2023 (RG n°23/55084), le juge des référés a : - rejeté toutes les demandes de la société [6] ;
- fait interdiction à la SAS B12 de faire usage du signe“[6]” sur tout support et à quelque titre que ce soit, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, laquelle commencera à courir à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter de la signification de la présente ordonnance et durant 90 jours ;
- réservé la liquidation des astreintes,
- condamné la SAS B12 à payer à M. [G] [S] 5000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice résultant de la contrefaçon vraisemblable de ses marques françaises n°4445936 et n°4466540 ;
- rejeté le surplus des demandes de M. [G] [S] ;
- condamné la SAS B12 aux dépens et à payer à M. [G] [S] 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l’article L.716-4-6 dernier alinéa du code de la propriété intellectuelle, par acte d'huissier du 1er décembre 2023, la société [6] et M. [S] ont fait assigner la société B12 à l’audience du 1er février 2024 de ce tribunal en contrefaçon de marques.
Bien que régulièrement cité par dépôt de l'acte à l'étude de commissaire de justice, les vérifications confirmant le domicile de la défenderesse étant faites (présence du nom et de l’enseigne sur la boîte aux lettres et confirmation par le voisinage), la société B12 n'a pas constitué avocat et n’a pas comparu. À l'audience d'orientation du 1er février 2024, en accord avec le conseil des demanderesses, il a été procédé conformément aux dispositions de l'article 778 dernier alinéa du code de procédure civile ; l’instruction a été close et la demanderesse, ayant déposé son dossier, a été informée que la décision serait rendue le 24 avril 2024.
Prétentions et moyens des parties

Aux termes de leur assignation signifiée le 1er décembre 2023, la société [6] et M. [S] demandent au tribunal de : Faire interdiction à la société B12 de faire usage, directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit, du signe “[6]”, sous astreinte de 1000 euros par infraction constatée et par jour de retard, passé le délai de 8 jours, à compter de la signification du jugement à intervenir, Ordonner le retrait du marché, sous contrôle de commissaire de justice et aux frais exclusifs de la société B12 de tous les produits et supports revêtus de la dénomination “[6]” se trouvant directement ou indirectement entre les mains de la société B12 ou de ses représentants et préposés, et ce, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard ou par infraction constatée, à compter d’un délai de 8 jours suivant la signification de l’ordonnance à intervenir, Se réserver la liquidation des asteintes ordonnées, Condamner la société B12 à payer à M. [S] 10 000 euros, à titre de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice résultant de la contrefaçon de ses marques françaises n°4445936 et 4466540, Condamner la société B12 à payer à M. [S] 10 000 euros, à titre de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice résultant de la contrefaçon de sa marque de l’Union européenne n°018257006, Condamner la société B12 à payer à la société [6] 10 000 euros, à titre de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice résultant de la contrefaçon des marques françaises n°4445936 et 4466540 dont elle est licenciée exclusive, Condamner la société B12 à payer à la société [6] 10 000 euros, à titre de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice résultant de la contrefaçon de sa marque de l’Union européenne n°018257006, Condamner la société B12 à payer 20 000 euros, à titre de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale et notamment de l’usurpation des dénomination sociale, enseigne et nom de domaine antérieurs, Condamner la société B12 au paiement de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile tant à M. [S] qu’à la société [6].
La société [6] et M. [S] considèrent qu’en exploitant un établissement de restauration rapide, vendant des sandwichs de type kebab, sous l’enseigne “[6] kebab” la société B12 commet des actes de contrefaçon des marques françaises n°4445936 et n°4466540 et de la marque de l’Union européenne n°018257006,outre que par ses agissements la société B12 porte atteinte à la dénomination sociale statutaire de la société [6], à leur enseigne “[6] - berliner kebap” et à leur nom de domaine [6]paris.fr$gt;.
Motifs

À titre liminaire, il sera rappelé que conformément à l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
I- Sur la contrefaçon de marques

En vertu de l’article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle : “Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l'usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :1° D'un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;
2° D'un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s'il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d'association du signe avec la marque.”

L’article L.713-3-1 du même code précise qu’est notamment interdit l’offre des produits, leur mise sur le marché ou leur détention à ces fins sous le signe protégé.
Aux termes de l’article L.716-4 du même code, “l'atteinte portée au droit du titulaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits attachés à la marque la violation des interdictions prévues aux articles L.713-2 à L.713-3-3 et au deuxième alinéa de l'article L.713-4”.
De la même manière, selon l’article 9.2 “Droit conféré par la marque de l'Union européenne” du Règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne, “2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque: (...) b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque;”
Interprétant les dispositions identiques au règlement précité de l'article 5 § 1 de la première Directive du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques (89/104/CEE), dont les dispositions précitées du code de la propriété intellectuelle réalisent la transposition en droit interne, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour doit que, constitue un risque de confusion au sens de ce texte, le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement (CJCE, 29 septembre 1998, Canon, aff. C-39/97, point 29 ; CJCE, 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik, aff. C-342/97). Selon cette même jurisprudence, l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce (CJCE, 11 novembre 1997, Sabel, aff. C-251/95, point 22), en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants.
Afin d'apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, la juridiction nationale doit déterminer leur degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle et, le cas échéant, évaluer l'importance qu'il convient d'attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (voir CJCE, 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik, C-342/97, point 27).
La bonne foi est indifférente en matière de contrefaçon de marque (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 21 février 2012, n° 11-11.752).

En l’espèce, le procès verbal de constat du 16 mai 2023 et les diverses captures d’écran communiqués par les demandeurs (pièces n°6 et 9) attestent que la société B12 exploite un restaurant de restauration rapide sous l’enseigne “[6] kebab”. Les services en cause sont identiques en ce qu’il s’agit dans les deux cas de services de restauration rapide. De même, les produits vendus sont dans les deux établissements des sandwichs de type kebab, protégés par les marques des demanderesses.
Au regard des produits et services concernés, le public pertinent est constitué des consommateurs à la recherche de services de restauration rapide de moyenne gamme. Son degré d’attention est moyen.
D’un point de vue visuel, l’élément dominant des marques françaises invoquées est le terme “[6]”. Ce mot figure à l’identique dans l’enseigne de la demanderesse. Il s’agit de l’élément le plus distinctif de cette enseigne dans la mesure où le second terme, “kebab”, décrit le produit vendu au sein du restaurant.
D’un point de vue phonétique, le terme “[6]” est repris à l’identique dans l’enseigne en cause, la prononciation est donc la même.
D’un point de vue conceptuel, les signes en cause renvoient à des mots à consonance allemande, qui ne renvoient à aucun mot français, de sorte que le consommateur français de restauration rapide, normalement informé et attentif, considèrera les signes comme identiques. De même, le consommateur européen d’un degré d’attention moyenne qui comprendrait le sens du terme “[6]”, signifiant légume en allemand, confondrait les deux signes dans la mesure où il n’est pas descriptif d’associer les légumes aux sandwichs de type kebab pour lesquels l’ingrédient principal est la viande.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, le public pertinent sera susceptible de confondre les signes en cause et sera enclin à attribuer une origine commune aux produits et services qui en sont revêtus.
Il en résulte qu’en exploitant le signe “[6] kebab” pour des sandwichs et des services de restauration rapide, la société B12 contrefait les marques françaises n°4445936 et n°4466540 déténues par M. [S] dont la société [6] est licenciée exclusive (pièce n°22), et la marque de l’Union européenne n°018257006, dont sont cotitulaires M. [S] et la société [6].
II- Sur les mesures demandées en réparation du préjudice subi au titre de la contrefaçon

En application de l’article L.716-4-10 du code de la propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :“1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.”

L’article L.716-4-11 du même code prévoit qu'en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les produits reconnus comme produits contrefaisants, les matériaux ou instruments ayant principalement servi à leur création ou fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée. La juridiction peut aussi ordonner toute mesure appropriée de publicité du jugement, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu'elle désigne, selon les modalités qu'elle précise. Ces mesures sont ordonnées aux frais du contrefacteur.
Le tribunal saisi d'une demande indemnitaire pour des faits de contrefaçon doit se prononcer au regard des critères énoncés par l'article L.716-4-10 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle, sauf à être saisi par la partie lésée d'une demande d'indemnisation forfaitaire prévue au second alinéa du même article (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 6 décembre 2016, n° 15-16.304). L’emploi, dans ce même article, de l’adverbe « distinctement », commande une appréciation distincte et non cumulative des chefs de préjudice.
Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon s’établissent au regard de la marge brute de la partie lésée rapportée à la masse contrefaisante (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 17 mars 2021, pourvoi n° 17-28.221, 18-19.206).
En l’espèce, les demandeurs ne versent au soutien de leurs demandes aucun élément permettant d’apprécier les conséquences économiques négatives de la contrefaçon. Seul un préjudice moral pourra être retenu du fait des clients qui auraient pû légitimement croire à l’ouverture d’une seconde enseigne par M. [S] et la société [6] dans un autre arrondissement parisien. Ce préjudice sera réparé à hauteur de 5000 euros pour chacun des demandeurs.
Concernant la demande de retrait, les demandeurs fournissent uniquement une photo (pièce n°8) montrant une personne de dos portant un tee-shirt avec le signe “[6]” au soutien de leur demande, sans aucune indication sur la source et la date de cette photo. Il n’est, dès lors, pas démontré que la société B12 utilise de tels produits. Il n’y a donc pas lieu d’en ordonner le retrait. Il sera fait droit aux demandes d’interdiction selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision.
III- Sur la concurrence déloyale

Il résulte de l'article 1240 du code civil que “tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer”.

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.
La concurrence déloyale exige la preuve d'une faute relevant de faits distincts de ceux allégués au titre de la contrefaçon (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 16 décembre 2008, n° 07-17.092).
En l’espèce, la société [6] et M. [S] ne démontrent pas de faits distincts des actes de contrefaçon qui leur causerait un préjudice distinct. En effet, le préjudice subi est intégralement réparé par la condamnation au titre de la contrefaçon. En conséquence, les demandes au titre de la concurrence déloyale doivent être rejetées.
IV- Dispositions finales

IV.1 - Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.
La société B12, partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens.
IV.2 - Sur les frais non compris dans les dépens
L'article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation.
La société B12, partie tenue aux dépens, sera condamnée à payer 1500 euros à la société [6], d’une part, et à M. [S], d’autre part, au titre des frais non compris dans les dépens.
IV.3 - Sur l’exécution provisoire
En application des articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement. Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.
En l'espèce, l'exécution provisoire, nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, n'a pas à être écartée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Condamne la société B12 à payer 5000 euros à M. [G] [S] à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre de la contrefaçon des marques françaises n°4445936 et n°4466540 et de la marque de l’Union européenne n°018257006 ;

Condamne la société B12 à payer 5000 euros à la société [6] à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre de la contrefaçon des marques françaises n°4445936 et n°4466540 et de la marque de l’Union européenne n°018257006 ;

Fait interdiction à la société B12 d’utiliser le signe “[6]” sur tout support et à quelque titre que ce soit, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, laquelle commencera à courir à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement et durant 90 jours ;

Se réserve la liquidation de l’astreinte ;

Déboute M. [G] [S] et la société [6] de leurs demandes de retrait ;

Déboute M. [G] [S] et la société [6] de leurs demandes présentées sur le fondement de la concurrence déloyale ;

Condamne la société B12 aux entiers dépens ;

Condamne la société B12 à payer à M. [G] [S] et à la société [6] 1500 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 24 avril 2024

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 3ème chambre 3ème section
Numéro d'arrêt : 23/15565
Date de la décision : 24/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-24;23.15565 ?
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