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24/04/2024 | FRANCE | N°23/06834

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 24 avril 2024, 23/06834


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :


Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/06834 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2T4K

N° MINUTE : 4/2024







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 24 avril 2024


DEMANDERESSE
S.C.I. EFM, [Adresse 1], représentée par Me Jean Christophe LEGROS, avocat au barreau de MONTPELLIER, 3Place Chabaneau 34000 Montpellier

DÉFENDERESSE
Madame [J] [W], demeurant [

Adresse 2], représentée par Me Linda HOCINI, avocat au barreau de PARIS, 25 Rue de Turin 75008 Paris, ToqueD1383, aide juridictionnelle N°C75056-2023-502500 du 09/11/2023

COM...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/06834 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2T4K

N° MINUTE : 4/2024

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 24 avril 2024

DEMANDERESSE
S.C.I. EFM, [Adresse 1], représentée par Me Jean Christophe LEGROS, avocat au barreau de MONTPELLIER, 3Place Chabaneau 34000 Montpellier

DÉFENDERESSE
Madame [J] [W], demeurant [Adresse 2], représentée par Me Linda HOCINI, avocat au barreau de PARIS, 25 Rue de Turin 75008 Paris, ToqueD1383, aide juridictionnelle N°C75056-2023-502500 du 09/11/2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Aurélie LESAGE, juge des contentieux de la protection
assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

DATE DES DÉBATS : 29 février 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée le 24 avril 2024 par Aurélie LESAGE, Vice-présidente, assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

Décision du 24 avril 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/06834 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2T4K

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 15 mai 2007 à effet au 1er juin 2007, la SCI EFM a consenti à Madame [J] [W] un bail d'habitation portant sur un logement situé [Adresse 2] à [Localité 4] (RDC - 1ere porte droite) moyennant un loyer mensuel actuel de 1.063,68 euros et une provision sur charges de 62 euros.

Un commandement de payer la somme de 4.009,74 euros en principal visant la clause résolutoire insérée au bail a été délivré le 13 février 2023 à Madame [J] [W].

Par acte de commissaire de justice du 19 juillet 2023, la SCI EFM a fait assigner Madame [J] [W] devant le juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Paris statuant en référé aux fins de :

- constater la résiliation du bail intervenue le 13 avril 2023,

- ordonner en conséquence son expulsion et celle de tous occupants de son chef des lieux avec l'aide de la force publique et d'un serrurier si besoin,

- la condamner par provision au paiement de la somme de 3.291,10 euros au titre de l'arriéré arrêté fin avril 2023,

- fixer le montant mensuel de l'indemnité d'occupation due à compter du 1er mai 2023 à la somme de 1.125,68 euros et la condamner par provision au paiement de cette somme jusqu'à complète libération des lieux,

- la condamner au paiement de la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Appelée à l'audience du 31 octobre 2023, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 17 janvier 2024 en raison du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle puis à l'audience du 29 février 2024 afin de permettre aux parties de se mettre en état.

A l'audience du 29 février 2024, la SCI EFM, représentée par son conseil, maintient ses demandes, actualise sa créance à la somme de 3.119,73 euros, conclut au débouté de Madame [J] [W] de l'ensemble de ses demandes et précise s'en rapporter sur les délais de paiement suspensifs de la clause résolutoire sollicités, le paiement du loyer courant ayant repris.

Elle fait valoir qu'elle ne conteste pas que le logement a connu des désordres mais a fait preuve de célérité dans leur résolution, que ces désordres n'ont jamais rendu le logement inhabitable et sont pour certains le fait d'un tiers, qu'il existe une contestation sérieuse quant à la demande de suspension des loyers et d'indemnisation.

Madame [J] [W], représentée par son conseil, sollicite de :

A titre principal :

- débouter la SCI EFM de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- constater l'existence de contestations sérieuses,

- juger n'y avoir lieu à référé,

- condamner à titre provisionnel la SCI EFM au paiement de la somme de 8.812,80 euros en remboursement des loyers versés depuis le mois de février 2023 jusqu'à février 2024 inclus,

A titre subsidiaire :

- suspendre les effets de la clause résolutoire insérée au bail,

- lui accorder 36 mois de délais pour s'acquitter de l'arriéré locatif,

- fixer la dette locative à la somme de 3.119,73 euros et les mensualités à la somme de 86,65 euros en sus du loyer courant,

En tout état de cause :

- condamner la SCI EFM à la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, outre les entiers dépens,

- dire n'y avoir lieu à l'article 700 du code de procédure civile à son encontre en application de la décision d'aide juridictionnelle et de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1991,

- déduire les frais d'huissier et les mettre à la charge de l'Etat en application de la décision d'aide juridictionnelle totale et de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle expose que le logement ne comporte pas de ventilation, que le service technique de l'habitat a constaté le 27 février 2023 une importante humidité de condensation en raison d'une aération permanente inefficace, qu'aucune solution concrète n'a été apportée pour remédier aux désordres, qu'elle a donc cessé le paiement intégral du loyer, qu'elle est bien fondée à solliciter la suspension du paiement des loyers depuis le mois de février 2023 et le remboursement des sommes versées depuis cette date, soit la somme de 8.812,80 euros.

Elle fait valoir que la demande d'acquisition de la clause résolutoire se heurte à une contestation sérieuse en raison du préjudice de jouissance subi, étant bien fondée à opposer l'exception d'inexécution.

Subsidiairement, elle sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire et des délais de paiement, ayant retrouvé un emploi.

Il a été donné lecture du diagnostic social qui indique que le bailleur n'a pas donné suite à la possibilité d'un FSL et que Madame [J] [W] a repris un emploi en novembre 2023, ce qui permet la mise en place d'un plan d'apurement de la dette.

La décision a été mise en délibéré au 24 avril 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire

Conformément aux dispositions de l'article 24 III de la loi du 6 juillet 1989, l'assignation a été régulièrement notifiée au Préfet de [Localité 3] le 21 juillet 2023, soit au moins deux mois avant l'audience.

Il est par ailleurs justifié de la saisine de la CCAPEX le 14 février 2023, soit plus de deux mois avant la délivrance de l'assignation conformément aux dispositions de l'article 24 II de la loi du 6 juillet 1989.

L'article 24 alinéa 1 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version applicable au litige dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes prévus produit effet deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l'espèce, le bail prévoit une clause résolutoire et les loyers et charges réclamés dans le commandement de payer délivré le 13 février 2023 n'ont pas été réglés dans le délai de deux mois comme il en ressort du décompte produit.

Madame [J] [W] indique qu'il existe une contestation sérieuse, les loyers n'ayant pas été intégralement payés du fait des désordres affectant le logement, ce qui l'autorise à opposer à sa bailleresse l'exception d'inexécution.

Il est constant que le locataire n'est fondé à opposer au bailleur un refus légitime de payer son loyer que lorsque le logement est impropre à son usage (Cass. 3e civ., 21 nov. 1995).

Madame [J] [W] produit deux courriers adressés au gestionnaire de l'appartement du 1er juin 2021 et du 13 juin 2022 faisant état d'un problème de moisissures, des photographies non datées et un courrier du service technique de l'habitat de la ville de [Localité 3] du 27 février 2023 qui indique : " une importante humidité de condensation règne dans le logement en raison d'une aération permanente inefficace (le système d'aération est non fonctionnel, absence de réglette en partie haute dans le séjour, apparition et développement de moisissures au niveau des murs du séjour et chambre) ".

Si ces éléments établissent la réalité d'un désordre dû à une humidité excessive, ils sont insuffisants à caractériser que le logement soit impropre à son usage. Il apparaît en outre que la copropriété a fait poser un joint étanche en septembre 2020 entre la façade et le trottoir, que le bailleur a fait poser une grille d'entrée d'air sur les menuiseries du séjour le 10 novembre 2023 et de l'échange de courriels de février 2024 que Madame [J] [W] ne parvient pas à se rendre disponible pour contrôler le taux d'humidité des murs et faire établir le devis de reprise des peintures.

Dès lors, Madame [J] [W] échoue à démontrer l'existence d'une contestation sérieuse concernant le constat d'acquisition de la clause résolutoire.

N'étant pas fondée à opposer l'exception d'inexécution, elle sera également déboutée de sa demande en paiement de la somme de 8.812,80 euros en remboursement des loyers versés depuis le mois de février 2023 jusqu'à février 2024 inclus.

Par conséquent, il y a lieu de constater la résiliation de plein droit du bail par acquisition de la clause résolutoire à la date du 13 avril 2023.

Sur les sommes dues au titre de l'arriéré locatif

Il résulte du décompte locatif produit par la SCI EFM qu'au 12 février 2024 (échéance de février 2024 incluse), Madame [J] [W] restait lui devoir la somme de 3.119,73 euros, somme non contestée par la défenderesse. En conséquence, Madame [J] [W] sera condamnée à payer cette somme.

Sur la demande de délais de paiement suspensifs de la clause résolutoire

En application de l'article 24 V de la loi du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années au locataire en situation de régler sa dette locative.

En application de l'article 24 VII de la même loi, lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais accordés par le juge dans les conditions prévues aux V et VI du présent article. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge.

Au vu de la reprise du paiement du loyer courant, de l'ancienneté du bail, de la légère baisse de la dette depuis le commandement de payer et de la proposition de Madame [J] [W], il convient de faire droit à la demande de délais de paiement et de suspension de la clause résolutoire. La dette sera ainsi réglée comme précisé au dispositif ci-après.

En cas de non respect de ces délais, la clause résolutoire reprendra ses effets et Madame [J] [W] pourra être expulsée et devra régler les sommes restant dues au titre des loyers et charges impayés, ainsi qu'une indemnité d'occupation jusqu'à complète libération des lieux.

Sur l'indemnité d'occupation

En cas de résiliation du bail, afin de préserver les intérêts du bailleur, le locataire est redevable à son égard d'une indemnité d'occupation mensuelle qui se substitue au loyer, et ce, jusqu'à libération effective des lieux matérialisée par remise des clés ou procès-verbal d'expulsion.

En l'espèce, une telle indemnité d'occupation serait due par Madame [J] [W] au cas où la clause résolutoire devrait reprendre son effet du fait du non respect des délais de paiement accordés par la présente ordonnance.

Il convient de prévoir que cette indemnité d'occupation mensuelle sera égale aux loyers et charges contractuellement prévus par le bail résilié, soit une somme de 1.125,68 euros .

Sur les mesures accessoires

Madame [J] [W], qui succombe, supportera les dépens de l'instance, en ce compris les frais du commandement de payer, de l'assignation et de sa notification à la Préfecture, et sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Il convient, en équité, au vu de la situation financière précaire de la défenderesse, de débouter la SCI EFM de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Paris, statuant après débats en audience publique par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Au principal, RENVOYONS les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront mais dès à présent et par provision, vu l'urgence,

CONSTATONS l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 13 avril 2023 du bail conclu le 15 mai 2007 portant sur le logement situé [Adresse 2] à [Localité 4] (RDC - 1ere porte droite) ;

DEBOUTONS Madame [J] [W] de sa demande en remboursement des loyers versés depuis le mois de février 2023 jusqu'à février 2024 inclus ;

CONDAMNONS Madame [J] [W] au paiement à la SCI EFM de la somme provisionnelle de 3.119,73 euros au titre des loyers et charges impayés au 12 février 2024 avec intérêt au taux légal à compter du commandement de payer ;

AUTORISONS Madame [J] [W] à régler cette somme en 36 mensualités consécutives de 86 euros chacune, payables en plus du loyer courant, le 1er de chaque mois et pour la première fois le 1er du mois suivant la signification de la présente ordonnance, la dernière mensualité étant majorée du solde de la dette ;

SUSPENDONS les effets de la clause résolutoire durant le cours de ces délais ;

DISONS que la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais joué si la dette de loyers et charges est réglée selon les modalités fixées ;

A défaut de paiement d'une seule mensualité ou d'un seul loyer à son échéance, 15 jours après une mise en demeure restée infructueuse,

DISONS que la totalité de la somme restant due sera immédiatement exigible et le bail sera résilié de plein droit sans formalité préalable ;

DISONS qu'alors, et à défaut d'avoir libéré les lieux deux mois après la signification du commandement de quitter les lieux, il pourra être procédé à l'expulsion de Madame [J] [W] et à celle de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin est ;

CONDAMNONS en ce cas Madame [J] [W] au paiement à la SCI EFM d'une indemnité d'occupation mensuelle provisionnelle égale au montant du loyer et des charges contractuellement prévus par le bail résilié soit la somme de 1.125,68 euros, et ce jusqu'à complète libération des lieux se matérialisant par remise des clés ou procès-verbal d'expulsion ;

CONDAMNONS Madame [J] [W] aux dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer, de l'assignation et de sa notification à la Préfecture ;

DEBOUTONS la SCI EFM de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS pour le surplus ;

RAPPELONS que la présente ordonnance bénéficie de l'exécution provisoire.

LE GREFFIERLE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/06834
Date de la décision : 24/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-24;23.06834 ?
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