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24/04/2024 | FRANCE | N°22/13176

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 9ème chambre 2ème section, 24 avril 2024, 22/13176


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




9ème chambre 2ème section

N° RG :
N° RG 22/13176 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX63P

N° MINUTE : 6




Assignations des :
04 et 10 Octobre 2022 et 03 Novembre 2022









JUGEMENT
rendu le 24 Avril 2024
DEMANDERESSE

S.A. Crédit Industriel et Commercial
[Adresse 4]
[Localité 5]

représentée par Maître Nicolas SIDIER de la SELAS PECHENARD & Associés, avocats au barreau

de PARIS, vestiaire #R0047



DÉFENDEURS

Monsieur [B] [E]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Monsieur [C] [L]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Monsieur [Z] [D]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentés par M...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

9ème chambre 2ème section

N° RG :
N° RG 22/13176 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX63P

N° MINUTE : 6

Assignations des :
04 et 10 Octobre 2022 et 03 Novembre 2022

JUGEMENT
rendu le 24 Avril 2024
DEMANDERESSE

S.A. Crédit Industriel et Commercial
[Adresse 4]
[Localité 5]

représentée par Maître Nicolas SIDIER de la SELAS PECHENARD & Associés, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0047

DÉFENDEURS

Monsieur [B] [E]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Monsieur [C] [L]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Monsieur [Z] [D]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentés par Maître Marc DUMON de la SELARL CMD Société d’Avocats, avocats au barreau de PARIS, avocat constitué, vestiaire #E0193

Décision du 24 Avril 2024
9ème chambre 2ème section
N° RG 22/13176 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX63P

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Gilles MALFRE, 1er Vice-président adjoint
Monsieur Alexandre PARASTATIDIS, Juge
Monsieur Augustin BOUJEKA, Vice-Président

assisté de Clarisse GUILLAUME, Greffière lors de l’audience, et de Pierre-Louis MICHALAK, Greffier lors de la mise à disposition,

DÉBATS

A l’audience du 14 Février 2024 tenue en audience publique devant Monsieur Alexandre PARASTATIDIS, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 24 Avril 2024.

JUGEMENT

Prononcé en audience publique
Contradictoire
en premier ressort

FAITS ET PROCEDURE

Selon acte du 2 janvier 2020, la SA Crédit industriel et commercial (ci-après le CIC) a consenti à la société MLC [Localité 7] un crédit professionnel d'un montant de 50.000 euros destiné à financer l'acquisition d'un fonds de commerce de restaurant au taux de 0,95 % l'an, remboursable en 84 mensualités.

Par acte du 3 janvier 2020, MM. [K] [X] et [B] [E], ainsi que Mme [V] [W] se sont portés cautions solidaires dans la limite chacun de 20.400 euros, l'engagement de la troisième ayant été repris par MM. [C] [L] et [Z] [D]-[Y], dans la limite chacun de 10.200 euros, selon avenant du 21 juillet 2021, les sommes énoncées incluant principal, intérêts, frais et accessoires.

Par jugement du tribunal de commerce de Paris du 19 mai 2022, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société MLC [Localité 7].

Par lettre recommandée avec AR du 3 juin 2022, le CIC a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire à titre privilégié pour un montant de 36.898,99 euros, outre les intérêts évalués pour les besoins de la déclaration à la somme d'un euro.

Par lettres du même jour, la banque a demandé aux cautions solidaires de se substituer à la société MLC [Localité 7] pour le règlement des échéances postérieures à l'ouverture du redressement judiciaire, et ce en vain.

Par jugement du 23 août 2022, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société MLC [Localité 7].

Par lettres recommandées avec AR du 30 août 2022, le CIC a adressé aux cautions une mise en demeure de payer les sommes dues au titre de leurs engagements respectifs qui est restée infructueuse.

C'est dans ces conditions que par exploits d'huissier de justice des 4 et 10 octobre, et 3 novembre 2022, le CIC a fait assigner MM. [E], [L] et [D]-[Y] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de les voir principalement condamnés au paiement de diverses sommes en leur qualité de cautions solidaires.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 20 décembre 2023, aux visas des articles 1103, 1104, 1130, 1217, 1343-2, 1343-5 et 2298 du code civil, L.643-1 du code de commerce, et 30 à 32 et 514 et 695 à 700 du code de procédure civile, il est demandé au tribunal de :

"- RECEVOIR le CIC en l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, et les dire bien fondées.

- DÉBOUTER Messieurs [B] [E], [C] [L] et [Z] [D]-[Y] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions.
En conséquence,

- JUGER pleinement valables et non disproportionnés les engagements de caution de Messieurs [B] [E], [C] [L] et [Z] [D]-[Y] ;

- JUGER qu'il n'appartient pas au Tribunal de se prononcer sur la validité ni la proportionnalité de l'engagement de caution de Monsieur [K] [X] ;

- CONDAMNER Monsieur [B] [E], en sa qualité de caution solidaire de la société MLC [Localité 7], à payer au CIC la somme de 12.545,66 euros, outre intérêts de retard au taux contractuel de 0,95 % depuis le 30 août 2022, continuant à courir jusqu'à parfait paiement.

- CONDAMNER chacun de Messieurs [C] [L] et [Z] [D]-[Y], chacun en leur qualité de caution solidaire de la société MLC [Localité 7], à payer au CIC la somme de 6.272,83 euros, outre intérêts de retard au taux contractuel de 0,95 % depuis le 30 août 2022, continuant à courir jusqu'à parfait paiement.

- ORDONNER la capitalisation des intérêts de retard.

Subsidiairement,

- CONDAMNER Monsieur [B] [E], en sa qualité de caution solidaire de la société MLC [Localité 7], à payer au CIC la somme de 12.545,66 euros, outre intérêts de retard au taux légal depuis le 30 août 2022, continuant à courir jusqu'à parfait paiement.

- CONDAMNER chacun de Messieurs [C] [L] et [Z] [D]-[Y], chacun en leur qualité de caution solidaire de la société MLC [Localité 7], à payer au CIC la somme de 6.272,83 euros, outre intérêts de retard au taux légal depuis le 30 août 2022, continuant à courir jusqu'à parfait paiement.

- ORDONNER la capitalisation des intérêts de retard.

- DÉBOUTER Messieurs [B] [E], [C] [L] et [Z] [D]-[Y] du surplus de leurs demandes.

En tout état de cause,

- CONDAMNER chacun de Messieurs [B] [E], [C] [L] et [Z] [D]-[Y] à payer au CIC la somme de 4.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- CONDAMNER in solidum Messieurs [B] [E], [C] [L] et [Z] [D]-[Y] aux entiers dépens de l'instance, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions des articles 695 à 699 du code de procédure civile.

- RAPPELER que l'exécution provisoire est de droit. "

Aux termes de leurs dernières conclusions communes signifiées par voie électronique le 7 novembre 2023, aux visas des articles L.341-4 du code de la consommation et 1343-5 du code civil, les défendeurs demandent au tribunal de :

" A TITRE PRINCIPAL

- DIRE ET JUGER nul l'engagement de caution disproportionné de Monsieur [B] [E] ;

- DIRE ET JUGER nul l'engagement de caution de Monsieur [C] [L] pour erreur sur le caractère proportionné des engagements souscrits par ses cofidéjusseurs, erreur qui a été déterminante quant à son consentement ;

- DIRE ET JUGER nul l'engagement de caution de Monsieur [Z] [D] pour erreur sur le caractère proportionné des engagements souscrits par ses cofidéjusseurs, erreur qui a été déterminante quant à son consentement ;

En conséquence,

- REJETER l'intégralité des demandes, fins et prétentions du CIC.

A TITRE SUBSIDIAIRE

ORDONNER, avant dire droit, au CIC de produire un nouveau décompte de sa créance sur lequel devra figurer le montant des intérêts contractuels perçus depuis l'origine du prêt et qui seront déduit du capital restant dû à la date de leur perception,

DEBOUTER le CIC de sa demande d'application des intérêts contractuels;

A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE

- DIRE que le CIC a manqué à son devoir de mise en garde vis-à-vis de [Z] [D], [B] [E], et [C] [L];

En conséquence,

- CONDAMNER le CIC à payer à Messieurs [C] [L] et [Z] [D] une somme de 6.727,83 € au titre de dommages et intérêts;

- CONDAMNER le CIC à payer à Monsieur [B] [E] une somme de 12.545,66 € au titre de dommages et intérêts ;

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE

ACCORDER à Monsieur [B] [E] des délais de paiement sous forme de 23 versements mensuels de 500 €, un 24ème versement portant sur le solde restant dû.

ACCORDER à Monsieur [C] [L] des délais de paiement sous forme de 23 versements mensuels de 250 €, un 24ème versement portant sur le solde restant dû.

ACCORDER à Monsieur [Z] [D] des délais de paiement sous forme de 23 versements mensuels de 250 €, un 24ème versement portant sur le solde restant dû.

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER le CIC à régler à Messieurs [Z] [D], [B] [E] et [C] [L] la somme 7.500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER le CIC aux entiers dépens. "

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour l'exposé des moyens et arguments venant au soutien de leurs demandes.

L'ordonnance de clôture de l'instruction de l'affaire a été rendue le 10 janvier 2024 et l'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience tenue en juge rapporteur du 14 février 2024 à laquelle elle a été évoquée et mise en délibéré au 24 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 - Sur la nullité des actes de cautionnement

1.1 - Sur le caractère disproportionné des engagements de cautionnement

A titre principal, les défendeurs font valoir, sur le fondement des dispositions de l'article L.341-1 du code de la consommation, le caractère disproportionné des engagements de MM. [E] et [X].

Ainsi, M. [E] expose s'être porté caution à hauteur de 20.400 euros alors qu'il est hébergé par sa mère, sans patrimoine immobilier et allocataire du RSA. Il soutient que la moyenne annuelle de ses revenus sur les trois années précédant son engagement était de 2.767,33 euros et donc dix fois moindre que celui-ci, rappelant par ailleurs être caution à hauteur de 30.000 euros d'un second crédit accordé par le CIC à la société ASAP [Localité 8] qui appartient au même groupe que la société MLC [Localité 7]. Il ajoute que les deux fonds de commerce qu'il détient partiellement et indirectement via les sociétés La Comitiva et MLC [Localité 7] sont estimés à tort par la banque à la somme de 260.000 euros dès lors que les sociétés qui en étaient les propriétaires ont cessé totalement leurs activités et donc perdu de facto leurs substances économiques et commerciales suite à leur placement en liquidation judiciaire.

S'agissant de M. [X], les défendeurs exposent que ce dernier s'est porté caution à hauteur de la même somme que M. [E] alors qu'il est locataire, sans patrimoine immobilier et allocataire d'une indemnité de chômage mensuelle de 1.200 euros, précisant que ses revenus annuels pour les années 2018 à 2020 étaient de 20.497, 13.202 et 12.974 euros et rappelant par ailleurs être caution à hauteur de 30.000 euros du second crédit accordé par le CIC à la société ASAP [Localité 8]. Il ajoute que la banque ne pouvait ignorer ses difficultés financières, celle-ci lui ayant accordé un crédit renouvelable le 28 décembre 2019 d'un montant de 6.000 euros pour subvenir à ses besoins, précisant que dans le cadre de l'homologation d'un accord portant sur ce dernier, le juge des contentieux de la protection a relevé d'office la violation des dispositions du code de la consommation.

Les défendeurs concluent dès lors au caractère manifestement disproportionné des engagements de MM. [E] et [X] et sollicite la décharge du premier du fait de cette disproportion.

En réplique, le CIC fait valoir qu'en application de l'article L.332-1 ancien du code de la consommation le caractère disproportionné de l'engagement de cautionnement s'apprécie à la date de la conclusion de l'engagement au regard des biens, incluant les parts sociales et la créance inscrite en compte courant d'associé dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée, et revenus de la caution sur laquelle pèse la charge de la preuve du caractère manifestement disproportionné.

Il expose qu'en l'espèce, M. [E] entretient la confusion entre sa situation au moment de la conclusion de son engagement et sa situation actuelle et que ne peuvent être pris en considération d'une part, la fiche patrimoniale datée du 15 février 2021 qu'il produit et dont il soutient qu'elle ne lui a jamais été communiquée auparavant et, d'autre part, les éléments postérieurs à l'acte d'engagement, à savoir les déclarations d'impôts effectuées postérieurement à l'engagement de caution et le second engagement qui date du 22 avril 2021.

L'établissement bancaire soutient qu'en revanche, il résulte de la fiche patrimoniale du 10 décembre 2019 et de ses propres écritures que M. [E] n'est ni locataire ni propriétaire et qu'il ne supporte aucune charge personnelle, relevant que les charges déclarées dans la fiche sont toutes des charges supportées par la société La Comitiva. Il ajoute que le demandeur a déclaré percevoir une rémunération de 1.500 euros en qualité de salarié gérant qui, de toute évidence, correspond à un salaire mensuel et non annuel comme indiqué dans le document. Il expose que par ailleurs, M. [E] détenait des participations dans les sociétés La Comitiva et MLC [Localité 7] estimées respectivement, sur la base d'un actif de 260.000 euros correspondant aux fonds de commerce, à 68.000 euros pour la première et 17.340 euros pour la seconde, soit une valeur totale quatre fois supérieure au montant de son engagement.

S'agissant de M. [X], sur le fondement des articles 30 à 32 du code civil, elle soutient que ce dernier étant attrait devant le tribunal de commerce et non devant la présente juridiction, les défendeurs ne sont pas fondés à former des prétentions relatives à la proportionnalité de l'engagement de ce dernier qui relève de la compétence exclusive de la juridiction consulaire saisie.

Sur ce,

En application de l'article 768 du code de procédure civile, le tribunal n'est tenu de statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Au cas particulier, aucune prétention n'est présentée au nom de M. [X] dans le dispositif des dernières écritures des défendeurs. Par suite, il n'y a pas lieu de répondre aux moyens tirés de la situation de ce dernier.

Par ailleurs, l'article L.332-1 du code de la consommation, dans sa version antérieure applicable en l'espèce, dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Il appartient à la caution de rapporter la preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement à la date de sa souscription, au regard de ses déclarations s'agissant de ses biens et revenus ainsi que de ses autres engagements, sans tenir compte des revenus escomptés de l'opération garantie, et dont le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier l'exactitude et l'exhaustivité.

Le caractère averti de la caution est sans incidence.

En l'espèce, l'appréciation du caractère disproportionné de l'engagement s'appréciant au jour de sa souscription, seules les pièces antérieures à cette date peuvent être prises en considération.

Il résulte de la " fiche patrimoniale caution " en date du 10 décembre 2019, dont il n'est pas contesté qu'elle contient les renseignements fournis par M. [E], que ce dernier fait mention qu'il n'était ni locataire ni propriétaire et qu'il percevait des revenus annuels d'un montant de 1.500 euros, outre un patrimoine immobilier se composant des participations correspondant aux fonds de commerce détenus par les sociétés La Comitiva et MLC [Localité 7] dont les actifs étaient évalués à la somme de 260.000 euros. Il déclarait par ailleurs un patrimoine financier et mobilier sous la forme d'une participation dans la société La Comitiva dont l'actif était évalué à la somme de 47.500 euros.

Comme relevé par la banque, les charges déclarées sont celles supportées par la société La Comitiva et non directement par le défendeur.

La banque n'ayant pas à vérifier l'exactitude et l'exhaustivité des déclarations faites par la caution, M. [E] ne peut faire grief à la banque de ne pas avoir pris en considération d'autres éléments relatifs à sa situation qu'il n'avait pas à l'époque estimé utile de mentionner.

Il résulte de ces éléments que l'engagement souscrit par M. [E] à hauteur de 20.400 euros n'était manifestement pas disproportionné par rapport à ses revenus et son patrimoine, étant relevé qu'en janvier 2020, les sociétés dans lesquelles il détenait des participations ne faisaient pas l'objet de procédures collectives.

En conséquence, le moyen est rejeté.

1.2 - Sur la nullité pour erreur

MM. [L] et [D]-[Y] font valoir que leur engagement, s'inscrivant dans un projet commun avec les autres défendeurs consistant dans le financement d'un fonds de commerce en vue de l'ouverture d'un restaurant, la décharge de MM. [E] et [X] du fait de leur disproportion entraîne la nullité de leur propre engagement qui était conditionné à celui de ses autres associés.

En réplique, le CIC relève qu'en se prévalant seulement de la prétendue disproportion de l'engagement de leurs cofidéjusseurs, M. [L] et [D]-[Y] reconnaissent implicitement l'absence de disproportion les concernant.

Il fait valoir que l'engagement de M. [E] n'étant pas disproportionné, les défendeurs sont dès lors irrecevables à invoquer un tel moyen pour soutenir l'existence d'un vice du consentement tiré de l'erreur qui suppose en tout état de cause la démonstration de ce que l'engagement de leurs cofidéjusseurs était une condition déterminante de leur propre engagement. Il expose qu'en l'espèce, il résulte de l'absence de solidarité entre les cautions personnes physiques, de leur renonciation aux bénéfices de discussion et de division ainsi que des stipulations contractuelles que MM. [L] et [D]-[Y] savaient qu'en cas de défaillance de la société MLC [Localité 7], leur responsabilité pourrait être engagée à hauteur de 10.200,00 euros chacun, indépendamment de la mise en jeu des engagements de leurs cofidéjusseurs et qu'ils ne peuvent dès lors soutenir que ceux-ci constituaient une condition déterminante de leur consentement à cautionner.

Sur ce,

L'article 1130 du code civil dispose que l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

En l'espèce, MM. [L] et [D]-[Y] ne sauraient se prévaloir des conséquences de la décharge de M. [E], le tribunal n'ayant pas fait droit à une telle demande.

Par ailleurs, le contrat de crédit paraphé et signé par les défendeurs stipule en page 6 au paragraphe "Pluralité de cautions ou de garanties" que les cautions “s'engagent solidairement avec l'emprunteur mais non solidairement entre elles et les montants de leurs engagements s'ajoutent en eux".

En page 5 du même document, le paragraphe intitulé "Connaissance par la caution de la situation du cautionné - Information" stipule que "La caution ne fait pas de la situation du cautionné ainsi que de l'existence et du maintien d'autres cautions la condition déterminante de son cautionnement ".

Il résulte de cet acte contractuel, de manière claire et non équivoque, que si les cautions se sont engagées solidairement avec la société emprunteuse, en revanche, aucune solidarité n'existe entre elles et qu'en conséquence les obligations souscrites par l'une ne peuvent être subordonnées aux obligations des autres.

En conséquence, MM. [L] et [D]-[Y] ne pouvaient se méprendre sur la portée de leur engagement, indépendamment de l'intervention d'autres cautions aux cotés de la société MLC [Localité 7].

Le moyen tiré d'une erreur de droit ou de fait affectant la validité de leur engagement est rejeté.

2 - Sur l'injonction au CIC de produire un décompte actualisé

Les défendeurs soutiennent que le décompte joint à la correspondance du 30 août 2022 ne permet pas de vérifier l'historique allégué de la dette du CIC, affirmant que le tableau d'amortissement annexé au contrat ainsi que la déclaration de créance produits par la demanderesse ne suffisent pas à eux seuls pour établir de manière certaine et précise le montant de la dette due par la caution et donc de contrôler l'exactitude des sommes réclamées et de vérifier si tous les paiements effectués ont été correctement pris en compte, conformément aux dispositions de l'article L.313-22 du code monétaire et financier. Ils demandent en conséquence au tribunal de faire injonction au CIC, avant dire droit, de produire un décompte actualisé de sa créance en principal, intérêts et accessoires arrêté au 30 août 2022.

En réplique, la banque conclut au rejet de cette demande qu'elle qualifie de dilatoire soutenant qu'il ressort clairement des documents précités joints à la déclaration de créance que le crédit a été réglé jusqu'au mois de mai de 2022, échéance du 5 mai 2022 incluse, et qu'à la date du prononcé du redressement judiciaire, à savoir le 19 mai 2022, la société emprunteuse restait devoir la somme de 36.898,99 euros correspondant aux échéances de juin 2022 à juin 2027. Elle ajoute que la déclaration de créance faisant mention de cette somme outre les intérêts au taux contractuel de 0,95% à compter du jugement d'ouverture, évalués pour les besoins de la déclaration à la somme d'un euro, n'a fait l'objet d'aucune contestation et a été admise à hauteur de ce montant, à titre privilégié et à échoir, selon notification du 6 mars 2023.

Sur ce,

Le CIC verse aux débats le tableau d'amortissement du crédit dont il résulte que le capital restant dû au 5 juin 2022 était de 36.898,99 euros, somme qui correspond bien à la créance en principal déclarée auprès du mandataire judiciaire par lettre du 3 juin 2022, étant relevé qu'il n'est pas allégué, et a fortiori démontré, que la société emprunteuse aurait antérieurement fait des remboursements anticipés qui auraient diminué le capital restant dû au jour de l'ouverture de la procédure collective, soit le 19 mai 2022.

De plus, le CIC n'a déclaré au titre des intérêts qu'une somme d'un euro pour les besoins de la procédure.

Il résulte de ces éléments qu'aucune somme injustifiée ou à tout le moins susceptible d'être contestée n'est réclamée par la banque.

En conséquence, la demande tendant au prononcé d'une injonction est rejetée.

3 - Sur l'absence d'information de la caution au titre des années 2021 et 2023

A titre subsidiaire, les défendeurs font valoir qu'en application de l'article L.313-22 du code monétaire et financier, dans sa version applicable, le créancier professionnel est tenu à une obligation d'information annuelle des cautions quant aux sommes dues par le débiteur et que la violation de ces dispositions d'ordre public entraîne la déchéance du droit de la banque aux intérêts contractuels.

Ils exposent qu'en l'espèce, le CIC ne verse aux débats qu'une seule lettre d'information adressée aux défendeurs en date du 18 mars 2022 et qu'il ne rapporte donc pas la preuve d'avoir respecté son obligation au titre des années 2021 et 2023.

Ils concluent en conséquence au rejet de la demande visant à appliquer un taux contractuel de 0,95% à compter du 30 août 2022.

En réplique, le CIC fait valoir que la sanction prévue par l'article L.313-22 du code précité est la déchéance du droit aux intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information, soit jusqu'au 18 mars 2022, date à laquelle les cautions ont reçu une lettre d'information, ce qu'elles ne contestent pas. Il expose qu'en l'espèce, les sommes réclamées aux défendeurs ne sont pas constituées par ces intérêts mais par une partie du capital restant dû au 19 mai 2022 ainsi que par des intérêts à compter du 30 août 2022, soit postérieurs à la lettre d'information. Il ajoute que si les cautions n'ont pas été destinataires de lettres d'information en 2023 en raison de la procédure collective ouverte contre la société MLC [Localité 7], celles-ci ont néanmoins été informées des montants dus, ayant été destinataires d'une copie de la déclaration de créance. Il conclut au rejet de la demande.

A titre subsidiaire, il sollicite la condamnation des défendeurs au paiement des sommes en principal, augmentées des intérêts de retard au taux légal depuis le 30 août 2022, date de la mise en demeure.

Sur ce ,

L'article 2302 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, applicable dès le 1er janvier 2022, y compris aux cautionnements constitués antérieurement et reprenant en substance les dispositions énoncées par l'article L.313-22 du code monétaire et financier dans sa version antérieure, dispose que " Le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année et à ses frais, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette, des intérêts et autres accessoires restant dus au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu'à celle de la communication de la nouvelle information. Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette. Le créancier professionnel est tenu, à ses frais et sous la même sanction, de rappeler à la caution personne physique le terme de son engagement ou, si le cautionnement est à durée indéterminée, sa faculté de résiliation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci peut être exercée. Le présent article est également applicable au cautionnement souscrit par une personne morale envers un établissement de crédit ou une société de financement en garantie d'un concours financier accordée à une entreprise ".

La seule sanction de la mauvaise information de la caution est la déchéance des intérêts entre la date à laquelle l'information manquante aurait dû être donnée et celle à laquelle elle l'a effectivement été excluant tout autre indemnisation sauf en cas de dol ou faute.

En l'espèce, s'agissant de l'année 2022, les cautions ne contestent pas la réception de la lettre d'information en date du 18 mars 2022 produite par la banque et donc le respect de son obligation pour cette année.

S'agissant de l'année 2023, le CIC justifie de l'envoi d'une mise en demeure aux cautions en date du 03 juin 2022 à laquelle était jointe sa déclaration de créance figeant le montant de la dette. Par ailleurs, l'établissement bancaire a fait assigner par exploits des 4 et 10 octobre, et 3 novembre 2022 les défendeurs qui, constitués, ont eu connaissance des écritures de la banque tout au long de la procédure et donc de ses demandes à leur encontre qui n'ont pas évoluées dans leur quantum depuis l'introduction de l'instance. Ils ne peuvent dès lors soutenir un manquement à l'obligation d'information pour cette période.

En revanche, le CIC ne produit pas la lettre d'information aux cautions pour l'année 2021 et ne démontre pas avoir ainsi rempli son obligation d'information prévue alors par l'article L.313-22 précité pour la période du 1er avril 2021 au 18 mars 2022, date de la dernière lettre d'information.

En conséquence, la déchéance du droit aux intérêts et pénalités échus entre le 1er avril 2021 et le 18 mars 2022 est prononcée.

4 - Sur le devoir d'information et de conseil

A titre infiniment subsidiaire, les défendeurs font valoir que le CIC a manqué à son devoir d'information et de conseil en ne s'étant pas assuré de la faisabilité du projet de la société emprunteuse, qui d'ailleurs a été placée en liquidation judiciaire, et donc de mettre en garde les cautions sur les risques encourus.

Plus particulièrement, MM. [L] et [D]-[Y] soutiennent que la banque a été défaillante lors de l'évaluation du risque en ne relevant pas leur absence de compétences et de connaissances spécifiques dans les divers aspects de la gestion d'une entreprise de restauration qui laissait présager l'échec du projet.

S'agissant de M. [E], il est fait grief à la banque de son défaut de diligence dans la vérification de la capacité financière, des compétences et de l'expertise de la caution pour assurer la réussite du projet.

Les défendeurs font ainsi valoir une perte de chance de ne pas contracter l'engagement qui fonde les poursuites et sollicitent en conséquence la condamnation de la banque à leur payer des dommages et intérêts d'un montant égal aux sommes qu'elle leur réclame respectivement.

En réplique, le CIC expose que sous l'empire de la loi ancienne qui trouve à s'appliquer en ce que les cautionnements litigieux ont été conclus avant le 1er janvier 2022, la banque est tenue d'un devoir de mise en garde envers la seule caution non avertie, à savoir celle qui ne dispose pas des compétences nécessaires à l'appréciation du risque inhérent à l'opération garantie et donc mesurer l'ampleur des engagements souscrits par le débiteur principal.

Il soutient qu'en l'espèce, au moment de leurs engagements, les défendeurs étaient des cautions averties.

Ainsi, M. [E] a indiqué à la banque être titulaire d'une formation au sein d'une école de commerce et s'est prévalu d'une expérience de plus de 15 ans dans le domaine de la restauration, précisant être devenu directeur de restaurant en 2016 puis gérant en 2017 et 2018. Il ajoute que ces informations sont corroborées par le profil LinkedIn de l'intéressé qui y souligne son expérience de dirigeant d'entreprise, indiquant être l'un des fondateurs en mars 2019 du groupe de restauration Way To Take, précisant que ce dernier était déjà composé en janvier 2020 de plusieurs fonds de commerce de restauration.

M. [L] s'est également présenté comme l'un des fondateurs du groupe Way To Take et s'est prévalu d'une expérience dans le domaine de la publicité et de sa qualité de fondateur de sociétés, ce que confirme la consultation de sa page LinkedIn qui mentionne qu'il a fondé une société en 2018 et qu'il présente des compétences acquises antérieurement en matière de budget d'entreprises. Le CIC ajoute que le 21 juillet 2021, M. [L] était également associé d'une deuxième société.

Enfin, l'établissement bancaire indique que M. [D]-[Y] était au moment de son engagement, le 21 juillet 2021, dirigeant de cinq sociétés dont la société ASAP [Localité 8], spécialisée dans la restauration, et la société BTCL Advisory, une holding dont il était l'actionnaire unique et qui elle-même est devenue en août 2021 dirigeante et actionnaire de la société WLG, spécialisée dans la gestion de fonds, qui était à la tête du groupe Way To Take, via ses participations dans les filiales. Il ajoute que le défendeur s'était d'ailleurs présenté auprès de la banque comme le Chief Financial du groupe et doté d'une expertise dans la finance, ce que corrobore son profil LinkedIn.

L'établissement bancaire soutient dès lors que les cautions, qui se sont présentées comme des dirigeants expérimentés d'un groupe en expansion et qui avaient nécessairement déjà constitué des dossiers de financement et dirigé des négociations en vue de financer leurs activités, ne peuvent prétendre avoir été non averties en matière de crédit. Il en conclut qu'il n'était pas tenu à une devoir de mise en garde à leur égard.

Il ajoute qu'en tout état de cause les défendeurs ne rapportent pas la preuve que leurs engagements n'étaient pas adaptés à leurs capacités financières personnelles, ni qu'il existait un risque d'endettement excessif né de l'octroi du crédit garanti eu égard aux capacités de la débitrice principale, la société MLC [Localité 7]. Il expose qu'en l'espèce, lors de la souscription du crédit, la viabilité du projet était corroborée par la production de diverses pièces financières et notamment un business plan pour la période 2019-2022, un plan de trésorerie et un tableau de charges mensuelles et que le crédit de 79.000 euros accordé entraînait pour la structure une charge de remboursement mensuelle de 633.88 euros, soit 7.606,56 euros par an. Il ajoute que la rentabilité du projet était soutenue par les défendeurs qui prévoyaient, sur la base des résultats d'un autre restaurant leur appartenant et du fonds de commerce repris par la société MLC [Localité 7], un chiffre d'affaires de 53.962 euros généré sur les trois derniers mois de 2019, le fonds ayant été acquis le 19 octobre de cette année, et d'un chiffre d'affaires de 335.114 euros pour l'année 2020. Enfin, il souligne que les échéances du crédit ont été acquittées sans incident jusqu'à l'ouverture de la procédure collective. Il conclut en conséquence au rejet de la demande.

Sur ce,

La banque est tenue à un devoir de mise en garde à l'égard de la caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n'est pas adapté aux capacités financières de la caution ou qu'il existe un risque d'endettement né de l'octroi du prêt garanti, lequel résulte de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur. Le caractère averti de la caution doit être apprécié in concreto, au regard de sa capacité à apprécier les risques de son engagement.

La circonstance que la banque a octroyé le prêt sans disposer d'éléments comptables sur l'activité prévisionnelle de l'emprunteur ne dispense pas la caution non avertie qui soutient que la banque était tenue à son égard d'un devoir de mise en garde, d'établir qu'à la date à laquelle son engagement a été souscrit, il existait un risque d'endettement né de l'octroi du prêt, lequel résultait de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur.

Enfin, le préjudice de la caution consécutif au manquement d'un établissement de crédit à son devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur non averti consiste dans la perte de la chance que l'emprunteur renonce au prêt et qu'elle ne s'engage donc pas comme caution, évitant ainsi le risque qu'on lui demande de payer la dette garantie. La réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.

En l'espèce, le CIC produit les documents financiers fournis par les défendeurs qui ne contestent pas leur remise et aux termes desquels ceux-ci font une présentation détaillée et chiffrée de leur projet tendant à démontrer la fiabilité de celui-ci et les compétences des porteurs du projet, à savoir notamment les trois cautions initiales, MM. [X] et [E] et Mme [W] mettant en avant une expérience d'au moins dix années chacun dans des établissements de restauration et/ou hôteliers.

Au regard des éléments fournis par les défendeurs, la banque ne pouvait pas relever un risque d'endettement né de l'octroi du prêt résultant de l'inadaptation de celui-ci aux capacités financières de la société emprunteuse ou aux compétences de ses actionnaires, étant relevé par ailleurs que la société a honoré ses échéances jusqu'à l'ouverture d'une procédure collective en mai 2022, soit postérieurement à la substitution de cautions en juillet 2021.

Par ailleurs, il n'est pas allégué que les engagements de MM. [L] et [D]-[Y] n'étaient pas adaptés à leurs capacités financières et il a été démontré précédemment que M. [E] ne pouvait également pas soutenir un tel moyen.

Dès lors, il n'est pas démontré que les engagements respectifs des cautions n'étaient pas adaptés aux capacités financières de chacune d'entre elles ou qu'il existait un risque décelable par la banque d'endettement né de l'octroi du prêt garanti.

En conséquence, il convient de dire que le CIC n'était pas tenu à un devoir de mise en garde sans qu'il y ait besoin de rechercher le caractère averti ou non des cautions.

Le moyen est dès lors rejeté.

5 - Sur la demande en paiement

Le CIC fait valoir les actes de cautionnement et la défaillance de la société MLC [Localité 7] suite à la procédure collective ouverte, pour solliciter la condamnation des cautions, qui ont renoncé expressément aux bénéfices de discussion et de division, à lui payer, s'agissant de M. [E], la somme de 12.545,66 euros, et, s'agissant de MM. [L] et [D]-[Y] la somme de 6.272,83 euros chacun, outre les intérêts de retard au taux contractuel de 0,95% depuis le 30 août 2022, date de la mise en demeure, et la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur ce,

Considérant les actes de cautionnement paraphés et signés par eux, M. [E] est condamné à payer au CIC la somme de 12.545,66 euros et MM. [L] et [D]-[Y] sont condamnés à payer chacun au CIC la somme de 6.272,83 euros, avec intérêt au taux contractuel de 0,95% à compter du 30 août 2022, date de la mise en demeure.

L'article 1343-2 du code civil prévoyant la capitalisation de droit des intérêts dès lors qu'il s'agit d'intérêts dus pour une année au moins, le tribunal fait droit à la demande formée à ce titre et dit que les intérêts dus pour une année entière à compter de la demande en justice produiront eux-mêmes intérêts.

6 - Sur la demande de délais

A titre infiniment subsidiaire, sur le fondement de l'article 1345-5 du code civil, les débiteurs sollicitent des délais de paiement sur 24 mois faisant valoir la faiblesse de leurs capacités de remboursement respectives qu'ils opposent à la solidité financière du CIC qui, selon eux, ne saurait être impactée par la mise en place d'un échéancier.

En réplique, le CIC conteste tout d'abord la bonne foi des défendeurs dont le silence à ses relances et mises en demeure l'a contraint à saisir la justice. Il s'oppose ainsi à la demande de délais qui n'est étayée par aucune pièce justifiant de leurs situations financières respectives qui, selon lui, sont bien plus favorables que celles qu'ils présentent dans leurs écritures.

Sur ce,

L'article 1343-5 du code civil dispose que " Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. Toute stipulation contraire est réputée non écrite. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment ".

En l'espèce, les défendeurs ne produisent pas de justificatifs actualisés de leurs revenus et charges, aucun avis d'imposition pour les revenus postérieurs à l'année 2021 n'étant versé aux débats.

Par suite, le tribunal étant dans l'incapacité d'apprécier leurs situations respectives, MM. [E], [L] et [D]-[Y], qui ont bénéficié de délais de paiement de fait pendant toute la durée de la procédure judiciaire, ne justifient pas remplir les conditions posées par les dispositions de l'article 1343-5 du code civil pour bénéficier de délais de grâce, de sorte que leur demande formée à ce titre est rejetée.

7 - Sur les demandes accessoires

7.1 - Sur les frais du procès

Les parties, qui succombent partiellement dans leurs prétentions respectives, conserveront chacune la charge de leurs propres dépens ainsi que les frais exposés par elles et n'entrant pas dans les dépens.

7.2 - Sur l'exécution provisoire

La présente décision est revêtue de droit de l'exécution provisoire conformément aux dispositions de l'article 514 du code de procédure civile dans sa version applicable en l'espèce, l'instance ayant été introduite postérieurement au 31 décembre 2019.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts et pénalités échus entre le 1er avril 2021 et le 18 mars 2022 ;

DEBOUTE MM. [B] [E], [C] [L] et [Z] [D]-[Y] de leurs autres demandes ;

CONDAMNE MM. [B] [E] à payer à la SA Crédit industriel et commercial la somme de 12.545,66 euros outre les intérêts de retard au taux contractuel de 0,95% à compter du 30 août 2022 ;

CONDAMNE [C] [L] à payer à la SA Crédit industriel et commercial la somme de 6.272,83 euros outre les intérêts de retard au taux contractuel de 0,95% à compter du 30 août 2022 ;

CONDAMNE [Z] [D]-[Y] à payer à la SA Crédit industriel et commercial la somme de 6.272,83 euros outre les intérêts de retard au taux contractuel de 0,95% à compter du 30 août 2022 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année au moins à compter de la demande en justice conformément à l'article 1343-2 du code civil ;

DIT que les parties conserveront chacune la charge de leurs propres dépens ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 24 Avril 2024

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 9ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 22/13176
Date de la décision : 24/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-24;22.13176 ?
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