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05/04/2024 | FRANCE | N°21/10918

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 3ème section, 05 avril 2024, 21/10918


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le:
à Me HILDEBRAND
Copies certifiées
conformes délivrées le:
à Me HÉRAL




8ème chambre
3ème section

N° RG 21/10918
N° Portalis 352J-W-B7F-CVB6S

N° MINUTE :

Assignation du :
27 août 2021











JUGEMENT

rendu le 05 avril 2024
DEMANDEURS

Monsieur [L] [E]
Madame [V] [T] épouse [E]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentés par Maître Charlotte HILDEBRAND de la S

CP Société Civile Professionnelle d’avocats HUVELIN & associés, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #R0285, et par Maître Olivier GSELL de la SELARL GRIMAL - GSELL, avocat au barreau d...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le:
à Me HILDEBRAND
Copies certifiées
conformes délivrées le:
à Me HÉRAL

8ème chambre
3ème section

N° RG 21/10918
N° Portalis 352J-W-B7F-CVB6S

N° MINUTE :

Assignation du :
27 août 2021

JUGEMENT

rendu le 05 avril 2024
DEMANDEURS

Monsieur [L] [E]
Madame [V] [T] épouse [E]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentés par Maître Charlotte HILDEBRAND de la SCP Société Civile Professionnelle d’avocats HUVELIN & associés, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #R0285, et par Maître Olivier GSELL de la SELARL GRIMAL - GSELL, avocat au barreau de COLMAR, avocat plaidant

DÉFENDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], représenté par son syndic la S.A. GIDECO
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Maître Philippe HÉRAL, avocat au barreau de PARIS,, vestiaire #B0174

Décision du 05 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 21/10918 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVB6S

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Frédérique MAREC, première vice-présidente adjointe
Madame Céline CHAMPAGNE, juge
Monsieur Cyril JEANNINGROS, juge

assistés de Léa GALLIEN, greffier,

DÉBATS

A l’audience du 09 février 2024 tenue en audience publique devant Madame Céline CHAMPAGNE, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
Premier ressort

FAITS ET PRÉTENTIONS

M. et Mme [E] sont propriétaires, au sein de l'immeuble du [Adresse 2] à [Localité 4], placé sous le régime de la copropriété, du lot n°32 dans lequel ils ont entrepris des travaux de rénovation.

En vue de l'assemblée générale du 28 juin 2021, a été mise à l'ordre du jour une résolution n°14 intitulée « clause d'aggravation des charges suite aux travaux privatifs effectués dans le lot n°32 sans autorisation ni avertissement (copropriétaire M. [E]) », tendant à mettre à la charge du copropriétaire du lot n°32 tous les frais exposés par le syndicat des copropriétaires par le fait, la faute ou la négligence de ce copropriétaire ou de l'une des personnes résidant sous son toit.

Par courrier en date du 23 juin 2021 adressé à l'ensemble des copropriétaires, M. et Mme [E] ont contesté le contenu de cette résolution et expliqué les raisons pour lesquelles ils considéraient qu'elle était entachée de nullité.

Par courrier adressé le même jour au syndic, leur conseil a attiré son attention sur le fait que cette clause était, selon lui, contraire à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 et que son client n'aurait d'autre solution que d'assigner le syndicat aux fins d'annulation si elle devait être adoptée.

Lors de l'assemblée générale du 28 juin 2021, cette résolution a toutefois été adoptée à la majorité de l'article 24 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965.

Par acte délivré le 27 août 2021, M. et Mme [E] ont donc fait assigner le syndicat des copropriétaires aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, l'annulation de cette résolution outre sa condamnation aux dépens et à leur verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs conclusions responsives et récapitulatives, notifiées par voie électronique le 04 janvier 2023, M. et Mme [E] demandent au tribunal, au visa des articles 5, 10, 11 de la loi du 10 juillet 1965, 45-1 du décret du 17 mars 1967 et 1103 du code civil, de :
« Juger la demande de Madame [V] [E] née [T] et de Monsieur [L] [E] régulière et recevable
La déclarant bien fondée
Annuler la résolution n°14 adoptée par l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] à l'occasion de l'assemblée générale des copropriétaires du 28 juin 2021
Déclarer le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] irrecevable en sa demande reconventionnelle
Subsidiairement
Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] de ses fins, moyens et conclusions
Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] à payer à Madame [V] [E] née [T] et à Monsieur [L] [E] une somme de 6.000,00 euros par application des dispositions de l'article 700 CPC
Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 2] aux entiers frais et dépens.
Juger qu'en application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, Madame [V] [E] née [T] et Monsieur [L] [E] seront dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de procédure (honoraires, dépens et frais irrépétibles) dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires.
Rappeler le caractère exécutoire par provision de plein droit du jugement à intervenir. »

Dans ses conclusions récapitulatives, notifiées par voie électronique le 14 juin 2022, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal, au visa de l'article 1240 du code civil, de :
« Dire et juger Madame [V] [T] épouse [E] et Monsieur [L] [E] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions
Les en débouter purement et simplement
CONDAMNER Madame [V] [T] épouse [E] et Monsieur [L] [E] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] une somme de 8.025,75 euros en réparation du préjudice matériel subi,
Condamner Madame [V] [T] épouse [E] et Monsieur [L] [E] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] une somme de 6.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens. »

Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits, de la cause et des prétentions des parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 avril 2023 et l'affaire fixée pour plaidoiries à l'audience du 09 février 2024, date à laquelle la décision a été mise en délibéré au 05 avril 2024.

Par message adressé par voie électronique le 20 mars 2024, les parties ont été invitées à transmettre, avant le 28 mars 2024, leurs observations sur la recevabilité de l'exception de procédure tenant au défaut d'habilitation du syndic à agir, soulevée par M. et Mme [E] devant le tribunal.

Décision du 05 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 21/10918 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVB6S

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'exception de procédure soulevée par M. et Mme [E]

Le syndicat des copropriétaires sollicite, à titre reconventionnel, la condamnation des époux [E] à lui régler la somme de 8 025,75 euros, demande à laquelle ces derniers s'opposent en soulevant son irrecevabilité.
Ils soutiennent en effet que cette demande a pour but de mettre en jeu leur responsabilité civile afin de leur imputer le coût des travaux et que cette action n'est recevable que si le syndic a été dûment habilité par l'assemblée générale, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Invités à transmettre leurs observations sur la recevabilité de cette exception de procédure soulevée devant le tribunal, M. et Mme [E] n'ont transmis aucune note dans les délais impartis alors que le syndicat des copropriétaires a, pour sa part, simplement indiqué dans son message adressé le 20 mars 2024 que « s'agissant de la demande du syndicat d'imputer aux époux [E] la somme de 8025,75 euros correspondant au préjudice matériel subi par la faute de ces derniers, la décision a été prise aux termes de la décision n°14 de l'assemblée générale du 28 juin 2021 ».

Or, selon les dispositions de l'article 789 du code de procédure civile, dans sa version applicable au présent litige, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l'article 47 et les incidents mettant fin à l'instance.

Aux termes de l'article 73 du code de procédure civile constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière, ou éteinte, soit à en suspendre le cours.

En l'espèce, le défaut d'habilitation du syndic, constitutif d'un défaut de pouvoir et sanctionné par une nullité de fond, relève des irrégularités de fond édictées par l'article 117 du code de procédure civile et donc des exceptions de procédure relevant du régime de l'article 73 dont font partie les exceptions d'incompétence, de litispendance et de connexité ainsi que de nullité pour vice de forme ou de fond.

Cette exception de procédure, qui aurait donc dû être soulevée devant le juge de la mise en état, est par conséquent irrecevable devant le tribunal.

Sur la demande d'annulation de la résolution n°14 de l'assemblée générale du 28 juin 2021

Cette résolution est ainsi libellée :

« Clause d'aggravation des charges suite aux travaux privatifs effectués dans le lot n°32 sans autorisation ni avertissement (copropriétaire M. [E])
Conditions de majorité de l'article 24

Décision du 05 avril 2024
8ème chambre 3ème section
N° RG 21/10918 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVB6S

L'assemblée générale, après en avoir délibéré, décide de rappeler aux copropriétaires la ligne de conduite à adopter en cas de réalisation de travaux importants dans leurs appartements, et touchant ou non les parties communes.
Une communication est indispensable, il appartient donc au propriétaire de communiquer la nature et la date des travaux prévus au syndic et au conseil syndical ce qui n'a pas été fait pour le lot n°32.
Lors des travaux d'aménagement du lot n°32 (ex loge) de nombreux désordres et sinistres dégâts des eaux se sont produits.
Du fait de ces travaux, la copropriété s'est trouvée dans l'obligation d'engager certaines dépenses dans l'urgence. Soit un montant total de 8025,75 euros (suivants documents ci-dessous ci-joints).
Toutes ces dépenses aggravant les charges n'auraient pas eu lieu sans ces travaux privatifs.
Devis 21010019 : montant TTC 1778,58 euros facture en cours
Facture TA1381 : montant TTC 1983,56 euros
Devis 21010018 : montant TTC 3286,86 euros facture en cours
Devis 20120042 : montant TTC 607,55 euros facture en cours
Facture [J] Huissier N2010.4456 : montant 369,20 euros

Pour une bonne collaboration et le maintien d'une relation harmonieuse entre les copropriétaires, l'assemblée générale, après en avoir délibéré, décide que, d'une façon générale, tous les frais exposés par le syndicat des copropriétaires, par le fait, la faute ou la négligence du copropriétaire du lot 32 ou de l'une des personnes résidant sous son toit, lui seront imputables ».

M. et Mme [E] expliquent que la répartition des charges prévue au règlement de copropriété ne peut être modifiée qu'à l'unanimité des copropriétaires, toute décision en ce sens adoptée à une autre majorité étant entachée de nullité, et que, plus spécialement, une résolution ayant pour objet d'adopter une clause d'aggravation des charges du fait d'un copropriétaire requiert un vote à l'unanimité. Or, ils soutiennent que tel est bien l'objet de la résolution attaquée, qui n'a pourtant été adoptée qu'à la majorité de l'article 24.

Ils soutiennent également que cette résolution est entachée d'un excès de pouvoir de l'assemblée générale puisqu'elle les déclare unilatéralement fautifs et qu'elle décide discrétionnairement et arbitrairement de leur imputer diverses dépenses.

Ils expliquent en effet que la preuve d'une telle aggravation des charges, qui ne peut être rapportée que par application des règles générales de responsabilité civile, suppose que soit démontré un comportement fautif du copropriétaire, dont l'appréciation ne peut résulter que d'une décision de justice et non d'une décision de l'assemblée générale, et que l'adoption d'une clause d'aggravation des charges n'autorise pas pour autant l'assemblée générale à imputer directement au compte du copropriétaire mis en cause des sommes arbitrées unilatéralement par le syndicat des copropriétaires.

Le syndicat des copropriétaires ne conteste pas qu'une clause d'aggravation des charges ne peut recevoir application que dans le cadre des règles générales de la responsabilité civile, et donc de l'appréciation du tribunal.

Décision du 05 avril 2024
8ème chambre 3ème section
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Il considère cependant que, « dans la mesure où le tribunal de céans a été saisi au sujet de l'application de cette clause, il retiendra l'ensemble des éléments produits au dossier démontrant l'imprudence avec laquelle les époux [E] ont mené leur campagne de travaux, pour considérer que ces derniers sont à l'origine de la nécessité de remplacer les colonnes de l'immeuble ».

Il soutient en effet que ce n'est que concomitamment aux lourds travaux engagés par ces derniers dans leur appartement, aux dévoiements des arrivées d'eau et aux raccordements aux canalisations communes que des fuites sont survenues et que le remplacement des colonnes a été rendu nécessaire. Il considère ainsi que le comportement fautif des époux [E] doit être retenu et qu'en application de la clause d'aggravation des charges, l'assemblée a donc valablement adopté la résolution n°14.

L'article 10 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 dispose notamment que les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité objective que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot, dès lors que ces charges ne sont pas individualisées. Ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes, générales et spéciales, et de verser au fonds de travaux mentionné à l'article 14-2 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5.

L'article 10-1 du même texte énumère quant à lui, de manière exhaustive, les frais exposés par la copropriété dont celle-ci peut réclamer remboursement auprès d'un copropriétaire.

Pour justifier cette décision de l'assemblée générale, le syndicat des copropriétaires invoque l'article 14 du règlement de copropriété, qui stipule s'agissant de l'usage des parties communes, que « toutes les dégradations causées aux choses communes par le fait d'un co-propriétaire, de son locataire, de son personnel, ou des personnes se rendant chez lui sont réparées aux frais du co-propriétaire intéressé ».

Une telle clause d'aggravation des charges est licite mais doit être mise en œuvre suivant les règles générales de la responsabilité civile, son application étant ainsi subordonnée à l'existence d'une faute engageant la responsabilité de son auteur, dont la constatation ne peut émaner que du juge et non de l'assemblée générale.

Le syndicat des copropriétaires ne peut, en effet, en l'absence d'une décision de justice faisant droit à sa demande tendant à la condamnation du copropriétaire à payer les divers frais réclamés à titre de dommages et intérêts et qui constitue le titre exécutoire justifiant leur engagement, les imputer directement sur le compte du copropriétaire du seul fait que la clause existe pour avoir été votée en assemblée générale.

Or, en l'espèce, le syndicat a mis au vote la résolution contestée en l'absence de toute décision de justice préalable retenant la responsabilité des époux [E].

Décision du 05 avril 2024
8ème chambre 3ème section
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Il a ainsi, en mettant à leur charge les frais dont il les estime responsables, par un simple vote en assemblée générale, déterminé unilatéralement l'existence d'une faute et le montant de la réparation exigible, le fait que le tribunal soit désormais saisi « au sujet de l'application de cette clause » ne pouvant suppléer cette absence de décision de justice préalable.

Par conséquent, dès lors que le syndicat des copropriétaires ne peut imputer au compte d'un copropriétaire des sommes qu'il a déterminées unilatéralement, il convient de prononcer l'annulation de la résolution n°14 de l'assemblée générale du 28 juin 2021.

Sur la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires

L'article 1240 du code civil dispose que « tout fait quelconque qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Le syndicat des copropriétaires recherche, au visa de cet article, la responsabilité des époux [E] dans les désordres subis dans les parties communes du fait de lourds travaux de rénovation de leur appartement, ayant nécessité le remplacement des canalisations communes pour un montant de 8 025,75 euros dont il demande remboursement.

Il leur reproche ainsi de n'avoir attendu ni l'accord du syndic ni celui des propriétaires des caves privatives, sollicités afin de pouvoir procéder au déplacement des arrivées d'eau et à la modification d'une colonne d'évacuation en fonte commune, et d'avoir réalisé, trois jours seulement après cette demande, des percements entre le plancher de leur appartement et le plancher haut des caves.

Il leur fait également grief d'être à l'origine de la rupture d'une vanne commune d'eau avant compteur, à l'origine d'un dégât des eaux, qu'ils ont par ailleurs reconnu aux termes d'une lettre circulaire adressée aux copropriétaires le 23 juin 2021. Il indique que c'est donc à l'occasion de ces lourds travaux de plomberie qu'il a été contraint de faire procéder au remplacement des canalisations communes, rendu nécessaire par les travaux privatifs réalisés par les époux [E].

Concernant la vétusté des descentes d'eau, il fait valoir que les photographies versées aux débats démontrent certes qu'elles étaient en état d'usage mais qu'il n'est cependant pas démontré qu'elles auraient été fuyardes avant l'exécution des travaux litigieux. Il soutient donc que l'attitude fautive des demandeurs doit être retenue et il réclame la somme de 8 025,75 euros en réparation du préjudice causé par ces derniers.

M. et Mme [E] soutiennent pour leur part que le remplacement des canalisations n'est dû qu'à leur vétusté et n'est nullement imputable à leurs travaux de rénovation qui n'ont entraîné aucun dommage ni aux parties communes ni aux parties privatives.

Ils font ainsi valoir que le syndicat des copropriétaires ne démontre aucune faute qui pourrait leur être imputée ni aucun lien de causalité entre la nécessité de remplacer les colonnes de l'immeuble et leurs travaux. Ils reconnaissent une fuite d'eau dans la nuit du 07 au 08 octobre 2020, expliquant qu'elle avait pour origine la vétusté d'une vanne située avant le compteur, constituant une partie commune, comme reconnu par le syndic.
Décision du 05 avril 2024
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Ils précisent qu'elle n'a cependant généré aucun dommage et que lors de son intervention, l'artisan mandaté par le syndicat des copropriétaires a constaté la vétusté des colonnes en fonte et la nécessité de les remplacer, tel que cela ressort des photographies produites. Ils considèrent qu'il n'est toutefois nullement établi de lien de causalité entre les travaux réalisés pour leur compte et la nécessité de remplacer les colonnes vétustes, l'artisan du syndicat des copropriétaires ayant au surplus confirmé ce point par courriel en date du 22 juin 2021.

La mise en jeu de la responsabilité délictuelle de M. et Mme [E] nécessite que le syndicat des copropriétaires démontre l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.

Il ressort des pièces produites que le devis établi le 14 décembre 2020 par l'entreprise Flageolet, missionnée par le syndic, indique : « vous nous avez demandé d'étudier le remplacement de la fonte chez Monsieur [E] dans son appartement actuellement en travaux à l'immeuble sis référencé » suivi du descriptif des travaux et de leur coût (1 983,56 euros TTC).

La facture, d'un montant de 552,32 euros et établie le 12 janvier 2021 à la suite de cette intervention, mentionne :
« le 07/01/2021
(…)
Exécution de notre recherche de fuite destructive entre la cave de Mme [N]
l'appartement de M [E] du RDC
Après ouverture et recherche des réseaux, il y a 2 réseaux d'évacuation l'une de diamètre 100 et la 2ème de diamètre 200 à remplacer par de la fonte de diamètre 125 qui rejoint le local ménage de la cour, devis en cours. »

Dans ses devis établis le 13 janvier 2021, elle indique ainsi :
« pour donner suite à notre passage du 07/01/2021 concernant une recherche de fuite destructive entre la cave de Mme [N] et l'appartement en travaux de M. [E] du RDC dans l'immeuble sis référencé.
Lors de notre intervention, notre compagnon plombier a constaté la nécessité de procéder au remplacement de fonte de diamètre 200 par de la 125 entre la gaine technique et le local ménage » suivi du descriptif des travaux et de leur coût (1778,58 euros TTC),

et :
« pour donner suite à notre passage du 07/01/2021 concernant une recherche de fuite destructive entre la cave de Mme [N] et l'appartement en travaux de M. [E] du RDC dans l'immeuble sis référencé.
Lors de notre intervention, notre compagnon plombier a constaté la nécessité de procéder au remplacement de fonte de diamètre 100 » suivi du descriptif des travaux et de leur coût (3286,86 euros TTC).

Ces pièces attestent ainsi seulement que l'artisan mandaté a constaté la nécessité de remplacer les canalisations, aucun élément ni autre pièce produite ne permettant de démontrer que ce remplacement est la conséquence des travaux entrepris par M. et Mme [E].

Décision du 05 avril 2024
8ème chambre 3ème section
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Au surplus, dans un courriel adressé le 22 juin 2021 à M. [E], M. [B] de l'entreprise Flageolet lui a indiqué :
« pour votre information, les fontes datent de la construction de l'immeuble.
Elles ont créé les dégâts des eaux dans les caves, principalement dans celle de Madame [K] dans les traversées de mur, de plancher et de gaine technique maçonnée, dû à leur vétusté.
Nous avons effectué des recherches de fuites destructives, en ouverture et dégagement de fonte afin de déterminer les portions de fontes les plus endommagées qui étaient à remplacer.
Nous espérons avoir répondu à vos interrogations. »

Le syndicat des copropriétaires, qui ne caractérise ni une faute à l'encontre des époux [E] ni le lien de causalité entre leurs travaux et le préjudice subi ne peut donc qu'être débouté de sa demande indemnitaire.

Sur les autres demandes

Le syndicat des copropriétaires, partie perdante, est condamné aux dépens.

En application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, M. et Mme [E] sont dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires.

Tenu aux dépens, le syndicat des copropriétaires est également condamné à régler à M. et Mme [E], ensemble, la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et est débouté de sa demande formulée à ce titre.

L'exécution provisoire est de droit et il n'y a pas lieu de l'écarter.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant en audience publique, par jugement contradictoire rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevable l'exception de procédure soulevée par M. [L] [E] et Mme [V] [T] épouse [E] ;

ANNULE la résolution n°14 adoptée lors de l'assemblée générale du 28 juin 2021 ;

DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] de l'intégralité de ses demandes ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] aux dépens ;

DISPENSE M. [L] [E] et Mme [V] [T] épouse [E] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires conformément aux dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] à régler à M. [L] [E] et Mme [V] [T] épouse [E], ensemble, la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit.

Fait et jugé à Paris le 05 avril 2024

Le greffierLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 3ème section
Numéro d'arrêt : 21/10918
Date de la décision : 05/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-05;21.10918 ?
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