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04/04/2024 | FRANCE | N°24/00199

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jtj proxi fond, 04 avril 2024, 24/00199


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Société TRANSPORTES AEREOS PORTUGUESES


Copie exécutoire délivrée
le :
à :Maître Karène BIJAOUI-CATTAN

Pôle civil de proximité


PCP JTJ proxi fond

N° RG 24/00199 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3XTP

N° MINUTE :
10 JTJ






JUGEMENT
rendu le jeudi 04 avril 2024

DEMANDERESSES
Madame [V] [N] épouse [P], demeurant [Adresse 5]

Madame [K] [P], demeurant [Adresse 2]

Madame [S] [N] épouse [W], de

meurant [Adresse 1]

Madame [D] [W], demeurant [Adresse 3]

représentées par Maître Karène BIJAOUI-CATTAN de la SELEURL KBC AVOCAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #B...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Société TRANSPORTES AEREOS PORTUGUESES

Copie exécutoire délivrée
le :
à :Maître Karène BIJAOUI-CATTAN

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi fond

N° RG 24/00199 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3XTP

N° MINUTE :
10 JTJ

JUGEMENT
rendu le jeudi 04 avril 2024

DEMANDERESSES
Madame [V] [N] épouse [P], demeurant [Adresse 5]

Madame [K] [P], demeurant [Adresse 2]

Madame [S] [N] épouse [W], demeurant [Adresse 1]

Madame [D] [W], demeurant [Adresse 3]

représentées par Maître Karène BIJAOUI-CATTAN de la SELEURL KBC AVOCAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #B0613

DÉFENDERESSE
Société TRANSPORTES AEREOS PORTUGUESES (TAP AIR PORTUGAL), dont le siège social est sis [Adresse 4]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, statuant en juge unique
assisté de Aline CAZEAUX, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 08 février 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 04 avril 2024 par Romain BRIEC, Juge assisté de Aline CAZEAUX, Greffier
EXPOSE DU LITIGE

Le 14 novembre 2019, Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] ont réservé auprès de la société TRANSPORTES AEREOS PORTUGUESES (TAP AIR PORTUGAL) des billets d'avion aller-retour [Localité 7]-[Localité 6] pour les 11 avril et 23-24 avril 2020, pour un montant de 5323,63 euros. Les vols ont été annulés en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19.

Se plaignant de ne pas être remboursées, Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] ont, par actes de commissaire de justice du 19 octobre 2023 fait assigner la société TAP AIR PORTUGAL devant le tribunal judiciaire de Paris chambre de proximité aux fins d'obtenir sa condamnation en paiement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de :
3549,08 euros en remboursement des 4 billets d'avion aller-retour,2000 euros (250 euros par billet) de dommages et intérêts,1000 euros de dommages et intérêts,2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 8 février 2024.

A l'audience, Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] ont fait viser des écritures soutenues oralement, aux termes desquelles ils ont maintenu les termes de leur acte introductif d'instance.

Bien que régulièrement assignée à personne morale, la société TAP AIR PORTUGAL n'a pas comparu ni ne s'est fait représenter ni n'a indiqué du motif de son absence. En application de l'article 473 du code de procédure civile, la décision sera réputée contradictoire.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 4 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande indemnitaire

En application des articles 5, 7, 8 et 9 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004, les passagers, en cas d’annulation d’un vol, ont droit à :
une indemnisation dont le montant est fixé à 600 euros pour tous les vols de 1500 kilomètres ou plus,un remboursement de leur billet ou un réacheminement vers leur destination,une assistance et prise en charge matérielle.
S'agissant de l'indemnisation, l'article 12.1 précise que le présent règlement s'applique sans préjudice du droit d'un passager à une indemnisation complémentaire, notamment s'il est rapporté la preuve d'un préjudice matériel ou moral autre que le retard lui même, en lien avec le retard. Cette disposition vise à permettre que l'application des mesures prévues par ledit règlement puisse être complétée, afin que les passagers soient indemnisés de la totalité du préjudice qu'ils ont subi en raison du manquement du transporteur aérien à ses obligations contractuelles, et ce en application du droit national, soit en France en application de l'article 1231-1 du code civil (CJUE, 13 oct. 2011, aff. C-83/10, Aurora Sousa Rodriguez).

Un transporteur aérien effectif n'est par ailleurs pas tenu de verser l'indemnisation en application de l'article 5.3 s'il est en mesure de prouver que l'annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n'auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises.

La double charge de la preuve de l'existence d'une circonstance extraordinaire et de son caractère insurmontable incombe donc au transporteur aérien, étant rappelé que les considérants 14 et 15 du règlement précisent que de telles circonstances peuvent se produire « en particulier, en cas d'instabilité politique, de conditions météorologiques incompatibles avec la réalisation du vol concerné, de risques liés à la sécurité, de défaillances imprévues pouvant affecter la sécurité du vol, ainsi que de grèves ayant une incidence sur les opérations d'un transporteur aérien effectif » et « qu'il devrait être considéré qu'il y a circonstance extraordinaire, lorsqu'une décision relative à la gestion du trafic aérien concernant un avion précis pour une journée précise génère un retard important, un retard jusqu'au lendemain ou l'annulation d'un ou de plusieurs vols de cet avion, bien que toutes les mesures raisonnables aient été prises par le transporteur aérien afin d'éviter ces retards ou annulations ».

La Cour de justice a rappelé qu'en application des principes généraux d'interprétation du droit de l'Union européenne, toute exception est d'interprétation stricte et que les situations énumérées dans le règlement ne sauraient être qualifiées d'extraordinaires que si elles se rapportent à un événement qui n'est pas inhérent à l'exercice normal de l'activité du transporteur aérien concerné et échappe à la maîtrise effective de celui-ci du fait de sa nature ou de son origine (CJCE, 22 déc. 2008, aff. C-549/07, Wallentin-Hermann).

Il en ressort que la cause extraordinaire, telle que définie au considérant 14, peut produire un effet exonératoire de responsabilité au-delà du vol affecté par la cause extraordinaire dès lors que cela a eu des répercussions en cascade sur plusieurs vols postérieurs, jusqu'au lendemain. En revanche, ne saurait être une cause extraordinaire toute décision de trafic aérien portant sur un vol en particulier.

En outre, même lorsqu'il a existé une cause extraordinaire, celle-ci est de nature à perturber les vols devant avoir lieu dans les heures qui suivent. En effet, la survenance de circonstances extraordinaires rend difficile, voire impossible, la réalisation du vol selon l'horaire prévu. Il a alors été jugé que le transporteur aérien doit mettre en œuvre toutes les mesures raisonnables pour obvier à ces dernières et notamment planifier des moyens en temps utile, afin de pouvoir assurer le vol après que les circonstances ont pris fin. Plus particulièrement, afin d'éviter que tout retard, même insignifiant, résultant de la survenance de circonstances extraordinaires ne conduise inéluctablement à l'annulation du vol, le transporteur aérien raisonnable doit planifier ses moyens en temps utile afin de disposer d'une certaine réserve de temps, pour être en mesure, si possible, d'effectuer ledit vol une fois que les circonstances extraordinaires ont pris fin.

Au moment où lesdites circonstances extraordinaires prennent fin ou par rapport à l'horaire prévu pour le décollage, le retard pris initialement est susceptible de s'amplifier par la suite, en raison de l'enchaînement de diverses complications secondaires liées au fait que le vol en cause ne pourrait plus être effectué régulièrement, selon l'horaire prévu, telles que les difficultés tenant à une réattribution des couloirs aériens ou aux conditions d'accessibilité de l'aéroport d'atterrissage, y compris l'éventuelle fermeture totale ou partielle de ce dernier durant certaines heures de la nuit. L'appréciation du caractère raisonnable des mesures prises par le transporteur aérien lors de sa planification du vol doit, par conséquent, également tenir compte de ces risques secondaires (Cour de justice de l'Union européenne 12 mai 2011 affaire C-294/10).

En l'espèce, il est constant que les vols des 11 avril et 23-24 avril 2020 ont été annulés. Absente à l'audience utile, la société TAP AIR PORTUGAL n'apporte par définition aucun élément de nature à établir que cette annulation résulterait d'une cause qui l'exonérerait de sa responsabilité. En conséquence, la société TAP AIR PORTUGAL sera condamnée à payer à Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] 3549,08 euros correspondant à la demande en remboursement du prix des 4 billets d'avion aller-retour.

Pour le même motif, il sera aussi fait droit à la demande forfaitaire de 500 euros par demandeur (soit 250 euros par billet) en deçà du montant maximal prévu par la loi applicable en telles circonstances.

En revanche, s'agissant de la demande indemnitaire pour le temps passé et en réparation du préjudice moral, Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] n'apportent aucun élément de nature à établir de la réparation dudit préjudice allégué ni en quoi il serait indépendant de ceux susvisés. Cette demande sera donc rejetée.

Sur les mesures accessoires

la société TAP AIR PORTUGAL, qui succombe, supportera les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge des demandeurs les frais exposés par eux dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 700 euros leur sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

Décision du 04 avril 2024
PCP JTJ proxi fond - N° RG 24/00199 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3XTP

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe réputé contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE la société TRANSPORTES AEREOS PORTUGUESES (TAP AIR PORTUGAL) à verser Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] la somme de 3549,08 euros en remboursement du prix des billets ;

CONDAMNE la société TAP AIR PORTUGAL à verser à Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] la somme de 500 euros chacun de dommages et intérêts ;

CONDAMNE la société TAP AIR PORTUGAL à verser à Madame [V] [N] épouse [P], Madame [K] [P], Madame [S] [N] épouse [W] et Madame [D] [W] la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE le surplus des demandes des parties ;

CONDAMNE la société TAP AIR PORTUGAL aux dépens ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par le Président et le Greffier susnommés.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jtj proxi fond
Numéro d'arrêt : 24/00199
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-04;24.00199 ?
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