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04/04/2024 | FRANCE | N°23/08540

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 04 avril 2024, 23/08540


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [F] [V]
Madame [B] [T]


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/08540 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3GNJ

N° MINUTE : 3







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 04 avril 2024

DEMANDERESSE

Etablissement public PARIS HABITAT OPH,
[Adresse 1]

représentée par Maître Karim BOUANANE de l’ASSOCIATION LEGITIA,

avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [F] [V],
[Adresse 2]

comparant en personne

Madame [B] [T],
[Adresse 2]

comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BR...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [F] [V]
Madame [B] [T]

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/08540 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3GNJ

N° MINUTE : 3

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 04 avril 2024

DEMANDERESSE

Etablissement public PARIS HABITAT OPH,
[Adresse 1]

représentée par Maître Karim BOUANANE de l’ASSOCIATION LEGITIA, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [F] [V],
[Adresse 2]

comparant en personne

Madame [B] [T],
[Adresse 2]

comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, juge des contentieux de la protection
assisté de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 09 février 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 04 avril 2024 par Romain BRIEC, Juge, assisté de Aurélia DENIS, Greffier
Décision du 04 avril 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/08540 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3GNJ

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 28 mars 2022, PARIS HABITAT OPH a donné à bail à Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] un appartement à usage d’habitation situé [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel initial de 534,66 euros, outre une provision sur charges. 

Des loyers étant demeurés impayés, PARIS HABITAT OPH a fait signifier par acte de commissaire de justice du 12 juin 2023 un commandement de payer la somme de 3807,80 euros, en principal, correspondant à l’arriéré locatif, terme du mois de mai 2023 inclus et visant la clause résolutoire contractuelle.

Par acte de commissaire de justice du 24 octobre 2023, PARIS HABITAT OPH a fait assigner en référé Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
- constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties sur le fondement de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989,
- ordonner l'expulsion de Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] et de tous occupants de leur chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est,
- ordonner le transport et la séquestration des meubles en tel lieu qu'il lui plaira, aux frais et aux risques de Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T],
- condamner solidairement Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] à lui payer une provision au titre des loyers et charges impayés au 29 septembre 2023, soit la somme de 5198,79 euros, sous réserve des loyers à échoir, avec intérêts légaux à compter du commandement de payer, ainsi qu'une indemnité d'occupation provisionnelle jusqu'à libération effective des lieux d'un montant mensuel égal au montant du loyer et des charges si le bail s'était poursuivi,
- condamner in solidum Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] à lui payer la somme de 390 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer, de l’assignation et de sa notification à la préfecture.

Un diagnostic social et financier a été communiqué en amont de l’audience et porté à la connaissance des parties à l’audience utile. Relativement succinct, il y est indiqué que les locataires ont un reste à vivre mensuel de 732 euros, soit un taux d’effort de 47,45%.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 9 février 2024.

A cette audience PARIS HABITAT OPH, représentée par son conseil, a maintenu ses demandes, a actualisé celle relative à l'arriéré de loyers à la somme de 6488,70 euros. Le bailleur a indiqué que le paiement des loyers courants était repris. Il ne s'est pas opposé à l'octroi de délais de paiement qui pourraient être accordés par le juge, à hauteur de 180 euros par mois

Comparants en personne, Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] ont reconnu le montant de la dette et ont sollicité des délais de paiement à hauteur de 180 euros par mois, avec suspension des effets de la clause résolutoire. Les locataires ont indiqué percevoir 965 euros de revenus (800+165) et rembourser deux crédits avec des mensualités de 235 euros (85+150). Les APL ne sont perçues que depuis janvier 2024 si bien qu’ils n’ont pu jusque là assumer leur charge de loyer. Une subvention de 4527,56 euros leur a en outre été accordée par le FSL en date du 31 octobre 2023 afin d’apurer in fine leur dette auprès du bailleur.

La décision sera contradictoire. A l'issue de l'audience, la décision a été mise en délibéré au 4 avril 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le juge du contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il peut également allouer au créancier une provision, lorsque l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Sur la recevabilité de la demande de résiliation et d’expulsion

Conformément à l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, l’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 27 octobre 2023 soit au moins six semaines avant l’audience, et la situation a été signalée à la CCAPEX le 15 juin 2023, soit deux mois au moins avant la délivrance de l'assignation du 24 octobre 2023.

En conséquence, l’action introduite par PARIS HABITAT OPH est recevable.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire

L’une des obligations essentielles du preneur d’un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l'’article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. L’article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

En matière de bail, l'article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, le bail signé par les parties le 28 mars 2022 comporte une clause résolutoire prévoyant qu'en cas de défaut de paiement des loyers et charges, le bail sera résilié de plein droit deux mois après la délivrance d'un commandement de payer resté infructueux, conformément aux dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

Un commandement de payer visant cette clause a été signifié aux locataires le 12 juin 2023 pour la somme en principal de 3807,80 euros.

Au vu du décompte, ce commandement est demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 12 août 2023.

Sur le montant de l'arriéré locatif

Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] sont redevables des loyers impayés jusqu'à la date de résiliation du bail en application des articles 1103 et 1217 du code civil. Par ailleurs, le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l’espèce PARIS HABITAT OPH produit un décompte faisant apparaître que Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] restaient devoir la somme de 6667,18 euros à la date du 6 février 2024, échéance du mois janvier 2024 incluse (la dernière somme au crédit est de 435 euros le 1er févirer 2024).

Les frais de poursuite de 178,48 euros, dont il n'est pas démontré qu'ils sont dus contractuellement, seront retirés conformément à l'article 24 V de la loi du 6 juillet 1989 précisant que le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative, étant rappelé que les frais du commandement de payer et de l'assignation sont inclus dans les dépens.

Pour la somme au principal, Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] n’apportent par définition aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette, qu’ils reconnaîssent d’ailleurs à l’audience.

Ils seront donc condamnés à titre de provision au paiement de la somme de 6488,70 euros arrêtée au 6 février 2024, avec les intérêts au taux légal sur la somme de 3807,80 euros à compter de la délivrance du commandement de payer, et à compter de la présente décision pour le surplus conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil.

Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] seront également condamnés au paiement à compter du 7 février 2024, en lieu et place des loyers et charges, d’une indemnité mensuelle d’occupation qu'il convient de fixer à titre provisionnel au montant du loyer qui aurait été dû en l’absence de résiliation et des charges mensuelles dûment justifiées, et ce jusqu'à la libération effective des lieux.

En présence d’une clause de solidarité dans le contrat de bail (article 10), les défendeurs seront condamnés au paiement de cette somme provisionnelle solidairement.

Sur les délais de paiement et la suspension de la clause résolutoire

Conformément aux articles 24 de la loi du 6 juillet 1989 et 1343-5 nouveau (1244-1 ancien) du code civil, le juge peut, même d'office, accorder au locataire défaillant en situation de régler sa dette des délais de paiement dans la limite de trois années.

Pendant le cours des délais ainsi accordés et si le paiement du loyer courant a été repris (cette dernière condition peut cependant être écartée à la demande du locataire ou du bailleur), les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus.

Si le locataire se libère dans le délai et selon les modalités fixées par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne jamais avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l'espèce, les loyers courants sont payés. Le bailleur n’est pas pas opposé à l’octroi de délais de paiement à hauteur de 180 euros par mois. Les locataires ont bénéficié d’une décision du FSL le 31 octobre 2023 comme exposé à l’audience. Ils perçoivent en outre les APL depuis janvier 2024. Au final, ils paraissent en mesure de respecter l’échéancier proposé au vu de leurs ressources et charges.

Compte tenu de ces éléments, des délais de paiement leur seront octroyés conformément aux modalités décrites au dispositif de la présente décision, en deça de la somme de 180 euros porposée qui paraît trop importante au vu de leur taux d’effort actuel de 47,45%.

Faute pour Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] de respecter les modalités de paiement ainsi accordées, le solde de l'arriéré de loyers et de charges deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra son plein effet, entraînant la résiliation du bail à la date de son acquisition et permettant leur expulsion avec si nécessaire l'assistance de la force publique.

Sur les demandes accessoires

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] parties perdantes, supporteront in solidum la charge de l’intégralité des dépens de la présente procédure, qui comprendront notamment le coût de l'assignation et du commandement de payer.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais exposés par lui dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 300 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection statuant en référé, publiquement, par décision contradictoire, susceptible d'appel et prononcée par mise à disposition au greffe,

CONSTATONS que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 28 mars 2022 entre PARIS HABITAT OPH et Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T], concernant l’appartement à usage d’habitation situé [Adresse 2] sont réunies à la date du 12 août 2023 ;

CONDAMNONS solidairement Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] à payer à PARIS HABITAT OPH à titre de provision à valoir sur les loyers et charges impayés et indemnités d’occupation au 6 février 2024, échéance du mois janvier 2024 incluse (la dernière somme au crédit est de 435 euros le 1er février 2024) la somme de 6488,70 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2023 pour la somme de 3807,80 euros et à compter de la présente décision pour le surplus ;

AUTORISONS Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] à s’acquitter de cette somme, outre le loyer et les charges courants, en 35 mensualités d'un montant d'au moins 100 euros et une 36 ème mensualité qui soldera la dette en principal et intérêts, sauf meilleur accord des parties ;

PRECISONS que chaque mensualité devra être versée au terme prévu contractuellement pour le paiement du loyer et pour la première fois le mois suivant la signification de la présente décision ;

SUSPENDONS l’effet de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais accordés ;

DISONS que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise et le bail sera réputé n'avoir jamais été résilié ;

RAPPELONS en revanche qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité ou du loyer à son terme :
* la clause résolutoire retrouvera ses entiers effets et le bail sera résilié,
* le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
* Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] devront quitter les lieux en respectant les obligations de tout locataire sortant (état des lieux et remise des clés notamment),
* Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] seront solidairement tenus au paiement d'une indemnité d'occupation payable au plus tard le 30 de chaque mois et fixée par provision au montant des loyers qui auraient été dus en cas de non-résiliation du bail augmenté des charges dûment justifiées et ce jusqu'à complète libération des lieux à compter du 7 février 2024,
* qu'à défaut pour Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] de libérer les lieux volontairement et deux mois après la signification d'un commandement d'avoir à quitter les lieux resté sans effet, il sera procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de leur chef, avec l'assistance d'un serrurier et de la force publique si besoin est,
* que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera alors régi conformément aux dispositions des articles L433-1 et suivants et R433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNONS in solidum Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] à verser à PARIS HABITAT OPH une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS le surplus des demandes ;

CONDAMNONS in solidum Monsieur [F] [V] et Madame [B] [T] aux entiers dépens de la présente procédure, qui comprendront notamment le coût de l'assignation et du commandement de payer ;

RAPPELONS que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire.

Le greffier,Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/08540
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-04;23.08540 ?
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