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04/04/2024 | FRANCE | N°17/07730

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 2ème section, 04 avril 2024, 17/07730


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions exécutoires
délivrées le :
à Maître AUDINEAU et
à Maître PEROT-
CANNAROZZO

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître SAUREL





8ème chambre
2ème section


N° RG 17/07730
N° Portalis 352J-W-B7B-CKTC5


N° MINUTE :


Assignation du :
31 Mai 2017








JUGEMENT
rendu le 04 Avril 2024

DEMANDERESSE

S.C.I. CASSANDRE
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maî

tre Pierre SAUREL de la SELEURL EIDETIX SELARL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0743


DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires sis [Adresse 3] représenté par son syndic, la société DEFFORGE IMMOBILIER
[Adresse...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions exécutoires
délivrées le :
à Maître AUDINEAU et
à Maître PEROT-
CANNAROZZO

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître SAUREL

8ème chambre
2ème section


N° RG 17/07730
N° Portalis 352J-W-B7B-CKTC5

N° MINUTE :

Assignation du :
31 Mai 2017

JUGEMENT
rendu le 04 Avril 2024

DEMANDERESSE

S.C.I. CASSANDRE
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Pierre SAUREL de la SELEURL EIDETIX SELARL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0743

DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires sis [Adresse 3] représenté par son syndic, la société DEFFORGE IMMOBILIER
[Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Eric AUDINEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0502
Décision du 04 Avril 2024
8ème chambre
2ème section
N° RG 17/07730 - N° Portalis 352J-W-B7B-CKTC5

Société DEFFORGE IMMOBILIER
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Maître Marie-Odile PEROT-CANNAROZZO, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire #PC205

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Frédéric LEMER GRANADOS, Vice-président
Madame Anita ANTON, Vice-présidente
Monsieur Olivier PERRIN, Vice-Président

assistés de Madame Delphine PROVOST-GABORIEAU, Greffière lors des débats, et de Madame Lucie RAGOT, Greffière lors du prononcé,

DÉBATS

A l’audience du 08 Février 2024 tenue en audience publique devant Madame Anita ANTON, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

L'ensemble immobilier sis [Adresse 3]) est soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis et a pour syndic la société Defforge Immobilier.

La SCI Cassandre est copropriétaire au sein dudit immeuble des lots 102 et 107.

Lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017, les copropriétaires ont adopté la résolution n°2 relative à l'approbation des comptes de la copropriété établis pour l'exercice clos au 31/12/2016 pour un montant de 23.058,71 €.

Par ailleurs, la constitution d'un fonds travaux a été évoquée au point n° 7 de l'ordre du jour. La résolution n°7 n'a pas fait l'objet d'un vote.

Par exploit d'huissier délivré le 31 mai 2017, la SCI Cassandre a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins d'obtenir notamment l'annulation de la résolution n°2 portant sur l'approbation des comptes et l'annulation de la résolution n°7 relative à l'ouverture d'un compte travaux.

Cette affaire a été enrôlée sous le numéro de RG 17/07730.

Par exploit d'huissier délivré le 3 juin 2019, la SCI Cassandre a assigné le syndicat des copropriétaires et la société Defforge Immobilier, syndic, afin d'obtenir d'une part la nullité du contrat de syndic depuis le 15 juin 2017 pour défaut d'ouverture du compte travaux de l'article 14-2 de la loi de 1965, sur le fondement de l'article 18 de la loi de 1965, et d'autre part la désignation d'un " syndic professionnel ", en demandant la jonction des deux dossiers.

Cette affaire a été enrôlée sous le numéro de RG 19/6404.

Les deux instances ont été jointes par le juge de la mise en état le 6 février 2020.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 1er juin 2022, la SCI Cassandre demande au tribunal de :

"Vu la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 et notamment ses articles 14-2, 18 et 42
Vu les pièces versées aux débats,

DIRE NULLE ET DE NUL EFFET la résolution d'approbation des comptes prise lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 ;

DIRE NULLE ET DE NUL EFFET la résolution n°7 prise lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 liée à l'ouverture d'un compte travaux ;

CONSTATER que malgré son caractère obligatoire, le compte bancaire séparé pour recevoir les fonds travaux de l'article 14-2 n'a pas été ouvert par le Syndic ni lors de l'assemblée générale 2017 ni lors de l'assemblée générale 2018, le Syndic ayant trompé la copropriété et les copropriétaires à ce sujet ;

CONSTATER que le syndic ne fait des appels de charges que sur un unique compte bancaire ce qui exclut tout fonctionnement d'un compte séparé pour charges travaux tel qu'il est pourtant prévu par l'article 18 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, à cause de nullité du mandat du syndic.

En tirer toutes conséquences et :

DIRE que le contrat de syndic est nul et de nul effet depuis le 15 juin 2017 conformément aux dispositions d'ordre public de l'article 18 relatif au compte séparé prévu à l'article 14-2 ;

DESIGNER tel syndic professionnel qu'il plaira au tribunal afin de remplacer le syndic actuel compte tenu de ses manquements pour respecter les obligations légales en matière de comptes bancaires et de sincérité et exactitude des comptes de la copropriété et des copropriétaires et rétablir les comptes en conséquence ;

ORDONNER l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel ;

CONDAMNER le défendeur au paiement au demandeur d'une somme de 800 € au titre du préjudice moral,

CONDAMNER le défendeur au paiement d'une indemnité de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

CONDAMNER le défendeur aux entiers dépens dont distraction au profit de Eidetix Selarl, prise en la personne de Maître [I] [D] dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile".

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 27 décembre 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) demande au tribunal de :

"Vu l'article 42 de la Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis
Vu l'article 9 du code de procédure civile

DEBOUTER la SCI Cassandre de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

CONDAMNER la SCI Cassandre à payer au syndicat des copropriétaires concluant la somme de 7.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ECARTER l'exécution provisoire,

CONDAMNER la SCI Cassandre aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Eric Audineau, avocat aux offres de droit, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile."

Par conclusions en défense n°2 notifiées par voie électronique le 1er février 2022, la société Defforge Immobilier demande au tribunal de :

"Vu les dispositions de l'article 1240 du code civil,
Vu les dispositions de la loi du 10 juillet 1065 et du décret du 17 mars 1967,
Vu les pièces versées aux débats,

DEBOUTER purement et simplement la SCI Cassandre de toutes ses demandes fins et prétentions dirigées à l'encontre de Defforge Immobilier.

JUGER que la SCI Cassandre est irrecevable à solliciter devant le tribunal la désignation d'un administrateur provisoire sur le fondement de l'article 47 du décret du 17 mars 1967, procédure de la compétence exclusive du Président dudit tribunal statuant sur requête, alors et surtout que le mandat de syndic de la SCI Cassandre n'encourt aucune nullité la copropriété disposant des deux comptes bancaires séparés prévus par l'article 18-II alinéas 2 et 3 de la loi du 10 juillet 1965.

CONDAMNER la SCI Cassandre à verser à Defforge Immobilier la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

JUGER qu'il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit.

CONDAMNER la SCI Cassandre en tous les dépens."

Pour l'exposé exhaustif de leurs moyens en fait et en droit, il est renvoyé aux dernières écritures des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 mai 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience de plaidoiries du 8 février 2024.

À l'issue des débats, les parties ont été informées de la mise en délibéré de la décision au 4 avril 2024, date à laquelle elle a été prononcée par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur la demande d'annulation de la résolution n° 2 de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 relative à l'approbation des comptes

La SCI Cassandre soutient que :

- la résolution relative à l'approbation des comptes porte sur des comptes qui sont inexacts et qui n'ont pas été rectifiés de sorte qu'elle doit être annulée,

- les comptes soumis à l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 font apparaître un solde pour la SCI Cassandre d'un montant de 5 311, 69 euros avec la mention 01502 et 18 910,19 euros avec la mention 01503, ces soldes soumis au vote des copropriétaires ne tenant pas compte des sommes versées au syndic de copropriété le 1er août 2015 d'un montant de 5 289,60 euros pour le lot n°107 et d'un montant de 2 129,56 euros pour le lot n°102,

- la résolution relative au compte travaux s'appuie sur des affirmations fausses dès lors que les sommes versées par la SCI Cassandre ont été encaissées par le syndic sans être intégrées dans le compte de la SCI Cassandre,

- la SCI Cassandre a versé une somme de 1 954,34 €, somme prétendument due au titre du compte travaux sur un vote antérieur à l'acquisition par la SCI Cassandre de ses lots qui n'a jamais été portée au crédit de son compte par le syndic.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) fait valoir que :

- depuis la délivrance de l'assignation, le syndic a pris acte des versements effectués par la SCI Cassandre, la réintégration desdites sommes ayant été effectuée,

- en tout état de cause, l'assemblée générale a approuvé les dépenses du syndicat des copropriétaires pour l'exercice 2016 et en aucune façon les décomptes individuels des copropriétaires,

- si la SCI Cassandre entend contester son compte individuel, l'action à mettre en œuvre n'est pas une action en contestation de l'assemblée générale ayant approuvé les comptes,

- dans la même logique, il est également vain pour la SCI Cassandre de prétendre qu'elle aurait versé une somme de 1.954,34 € qui ne serait pas due, cette allégation ne constituant pas un motif d'annulation d'une résolution d'assemblée générale.

Le syndic fait valoir que :

- la SCI Cassandre critique en réalité, non pas les dépenses générales de l'immeuble, mais son compte personnel copropriétaire à raison de versements qui ne lui auraient pas été crédités ou de sommes qui ne lui seraient pas imputables,

- ces motifs ne constituent pas un moyen d'annulation du vote approuvant les dépenses de la copropriété dont la nature et le montant ne sont pas mises en cause.

En droit, l'approbation des comptes du syndicat par l'assemblée générale ne constitue pas une approbation par chacun des copropriétaires de son compte individuel, selon l'article 45-1, alinéa 1er du décret du 17 mars 1967.

La jurisprudence, constante sur ce point, confirme que "l'approbation des comptes emporte seulement constatation de la régularité comptable et financière des comptes du syndicat" (Civ. 3ème 14 mars 2019, n° 17-26.190) et qu'elle ne constitue pas pour autant "une approbation du compte individuel de chacun des copropriétaires" (Civ. 3ème, 1er février 2018, n° 16-26.992).

Il en résulte qu'une erreur reprochée au syndic dans le solde débiteur du décompte d'un copropriétaire, reprise sur les documents comptables soumis à l'analyse des copropriétaires en vue de l'approbation des comptes, n'est pas de nature à entraîner l'irrégularité des comptes approuvés.

En ce sens, il a déjà été jugé que le moyen d'un copropriétaire relatif à la contestation de sa dette de charges est insuffisant à appuyer sa demande d'annulation de l'approbation des comptes même si sa dette de charges est reprise dans l'état financier communiqué avec la convocation à l'assemblée générale (ex. : Cour d'appel, Paris, Pôle 4, chambre 2, 12 Octobre 2022 - n° 17/12180).

En l'espèce, la SCI Cassandre critique, non pas les dépenses générales de l'immeuble, mais son compte personnel copropriétaire à raison de versements qui ne lui auraient pas été crédités ou de sommes qui ne lui seraient pas imputables.

Or, quand bien même les comptes soumis à l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 auraient fait apparaître un solde erroné s'agissant de son compte individuel, cet élément ne serait de nature à entrainer l'irrégularité des comptes approuvés.

Il en résulte que la contestation de la SCI Cassandre sur le solde de son compte individuel n'est pas de nature à justifier sa demande d'annulation de l'approbation des comptes.

En conséquence, la SCI Cassandre sera déboutée de sa demande d'annulation de la résolution n°2 de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 relative à l'approbation des comptes.

2. Sur la demande d'annulation de la résolution n° 7 de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 relative à l'ouverture d'un compte travaux

La SCI Cassandre soutient que :

- lors de l'assemblée générale du 15 mars 2017, l'ouverture d'un compte travaux et des appels de fonds liés étaient soumis à l'assemblée générale, cette résolution n°7 ayant fait l'objet d'une mention au procès-verbal selon laquelle ce compte bancaire séparé existe déjà de même que la décision antérieure qui justifie des appels travaux,

- elle a fait sommation au syndic de lui adresser cette décision antérieure ainsi que les références de ce compte bancaire séparé associé,

- le syndic n'a jamais ouvert de compte bancaire séparé ni lors de l'assemblée générale de 2017, ni lors des assemblées antérieures ni même lors de l'assemblée générale de 2018,

- la résolution n°7 est donc inexacte et elle devra être annulée par le Tribunal.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) soutient que :

- l'application de l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis suppose l'existence d'une prise de décision sanctionnée par un vote,

- la décision se définit comme étant une "disposition adoptée par l'assemblée générale qui revêt une efficacité juridique la distinguant de mesures préparatoires ou de résolution de principe" ou encore selon la Cour d'appel de Paris "l'adoption d'une position définitive consacrée par un vote" (cour d'appel Paris 23e ch A 17 avril 1996).

- il doit donc y avoir une délibération sanctionnée par un vote,

- or en l'espèce, en l'absence de vote, aucune résolution n'a été adoptée,

- la SCI Cassandre ne peut donc solliciter l'annulation de la résolution n°7, faute de vote.

Le syndic fait valoir que la SCI Cassandre invoque "l'inexactitude" du texte ce qui là encore n'est pas source d'annulation, outre qu'aucun vote n'est survenu.

En droit, selon l'alinéa 2 de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa version applicable au présent litige, pour agir en contestation des décisions des assemblées générales, les copropriétaires opposants ou défaillants, disposent d'un délai de deux mois à peine de déchéance à compter de la notification desdites décisions.

La décision d'assemblée générale résulte exclusivement d'une délibération sanctionnée par un vote (Cass. 3ème Civ., 13 nov. 2004, pourvoi n° 03-11.741, publié). L'action en nullité d'une résolution de l'assemblée générale n'est possible que si une question a été soumise à l'ensemble des copropriétaires et qu'elle a été sanctionnée par un vote (Cass. 3ème Civ., 26 févr. 2003 pourvoi n°01-16.417, publié).

En revanche, une résolution non sanctionnée par un vote, ne constitue pas une décision au sens de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, de sorte que les copropriétaires ne sont pas recevables à la contester (ex. Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4ème chambre A, 12 juin 2014, n° RG 13/14003, résolution relative au compte-rendu annuel de la mission du conseil syndical non soumise au vote).

En l'espèce, la résolution n°7 apparaissant au procès-verbal d'assemblée générale des copropriétaires est rédigée comme suit :

"7. Constitution d'un fonds travaux
Le compte Epargne Travaux étant déjà créé, cette résolution devient sans objet" (pièce n°7 de la SCI Cassandre).

Le tribunal relève donc que cette résolution n'a été sanctionnée par aucun vote.

En conséquence, la demande d'annulation de la résolution n° 7 de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 formulée par la SCI Cassandre est irrecevable et sera rejetée.

3. Sur la demande d'annulation du contrat de syndic

La SCI Cassandre soutient que :

- le syndic n'a jamais ouvert de compte bancaire séparé ni lors de l'assemblée générale de 2017, ni lors des assemblées antérieures ni même lors de l'assemblée générale de 2018,

- le tribunal devra en tirer toutes conséquences prévues par les textes et notamment déclarera nul le contrat de syndic à compter de l'assemblée générale du 15 juin 2017 en application des dispositions de l'article 18 applicables aux comptes séparés prévus à l'article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) soutient que :

- le tribunal ne peut pas désigner un syndic professionnel mais uniquement un administrateur judiciaire,

- seul le juge des requêtes est compétent pour le faire au visa de l'article 47 du décret du 17 mars 1967,

- le mandat du cabinet Defforge est parfaitement valable et aucun administrateur ne pourra être désigné,

- il est communiqué le procès-verbal de l'assemblée générale du 8 février 2018 renouvelant le mandat du cabinet Defforge et cette assemblée générale est devenue définitive faute de contestation dans le délai de deux mois de l'article 42 de la loi du 18 mai 1965.

Le syndic fait valoir que :

- le compte travaux séparé est obligatoire, à peine de nullité du contrat de syndic, depuis le 1er janvier 2017, étant entendu que pour la période antérieure, rien n'interdisait aux syndicats de le constituer s'ils le souhaitaient,

- ce compte existe dans la copropriété depuis l'assemblée du 12 septembre 1998 qui a voté en sa 10ème résolution l'ouverture d'un compte épargne travaux ainsi qu'il en est justifié par les pièces versées aux débats,

- le contrat de syndic de Defforge Immobilier a par ailleurs été renouvelé par les assemblées générales du 8 février 2018 et 15 janvier 2019 qui n'ont fait l'objet d'aucune contestation et sont donc définitives,

- la demande maintenue aujourd'hui ne repose sur aucun fondement.

Il ajoute que si par extraordinaire, la nullité du contrat de syndic de Defforge Immobilier devait être prononcée, la demande de la SCI Cassandre serait irrecevable dès lors que seul un administrateur provisoire pourrait être désigné par application de l'article 47 du décret de 1967,

désignation qui relève de la compétence exclusive du président du tribunal statuant sur requête à la demande de tout intéressé.

En droit, l'obligation pour le syndic d'ouvrir, dans l'établissement bancaire qu'il a choisi ou que l'assemblée générale a choisi pour le compte séparé général, un compte séparé rémunéré au nom du syndicat, sur lequel sont versées sans délai les cotisations au fonds de travaux prévu à l'article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 a été instituée à compter du 1er janvier 2017.
La méconnaissance par le syndic de ces obligations emporte la nullité de plein droit de son mandat à l'expiration du délai de 3 mois suivant sa désignation. Pour les syndics en place au 1er janvier 2017, l'obligation s'impose à eux trois mois après leur renouvellement ou, à défaut, à leur successeur trois mois après sa désignation.

Selon l'article 18 II 4ème alinéa de la loi du 10 juillet 1965, "Le syndic assure la gestion comptable et financière du syndicat et, à ce titre, est chargé : […] d'ouvrir un compte bancaire ou postal séparé au nom du syndicat sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs reçues au nom ou pour le compte du syndicat. L'assemblée générale peut en décider autrement à la majorité de l'article 25 et, le cas échéant, de l'article 25-1 lorsque l'immeuble est administré par un syndic soumis aux dispositions de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce ou par un syndic dont l'activité est soumise à une réglementation professionnelle organisant le maniement des fonds du syndicat. La méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l'expiration du délai de trois mois suivant sa désignation. Toutefois, les actes qu'il aurait passés avec des tiers de bonne foi demeurent valables".

Il sera également rappelé que, conformément aux dispositions de l'article 47 du décret du 17 mars 1967 : "Dans tous les cas, autres que celui prévu par le précédent article, où le syndicat est dépourvu de syndic, le président du tribunal judiciaire, statuant par ordonnance sur requête, à la demande de tout intéressé, désigne un administrateur provisoire de la copropriété qui est notamment chargé, dans les délais fixés par l'ordonnance, de se faire remettre les références des comptes bancaires du syndicat, les coordonnées de la banque et l'ensemble des documents et archives du syndicat et de convoquer l'assemblée en vue de la désignation d'un syndic dans les conditions prévues à l'article 9".

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) verse aux débats :

- le relevé du compte sur livret "travaux" ouvert au nom du "syndicat des copropriétaires" auprès de la Banque Monte Paschi sous le N° 01413785001, sur lequel au 31/01/2019, le solde créditeur est de 11.920,74 €, ainsi que le premier relevé d'ouverture au 28/06/2002 sur lequel le solde créditeur était de 7.598,49 € (Pièces n°1 du syndicat des copropriétaires),

- le relevé du compte courant ouvert au nom du "syndicat des copropriétaires 074" auprès de la Banque Monte Paschi sous le N° 02659923001, sur lequel au 31/07/2019, le solde créditeur est de 12.923,29 €, ainsi que le premier relevé d'ouverture au 31/07/2015 sur lequel le solde créditeur était de 262,28 € (Pièces n°2 du syndicat des copropriétaires),

- le procès-verbal de l'assemblée générale du 1er avril 2015 ayant voté l'ouverture du compte séparé (Pièce n°3 du syndicat des copropriétaires),

Le syndicat des copropriétaires justifie également par les pièces versées aux débats que la copropriété disposait bien d'un compte bancaire séparé dès juin 2015 comme en atteste l'ouverture de compte, la convention de compte, le grand livre pour l'année 2015 (pièces n° 10, 11 et 12 du syndicat des copropriétaires).

Il ressort également des pièces versées aux débats que le contrat de syndic de la société Defforge Immobilier, a été renouvelé par les assemblées générales de copropriétaires des 8 février 2018 et 15 janvier 2019 (pièces n°4 et 5 du syndicat des copropriétaires).

Il résulte de ces éléments que le grief formulé par la SCI Cassandre tenant à l'absence d'ouverture d'un compte bancaire n'est pas établi et doit donc être écarté.

Par conséquent, elle apparaît mal fondée en sa demande d'annulation du contrat de syndic et devra en être déboutée.

La SCI Cassandre sera en outre déclarée irrecevable en sa demande de désignation d'un syndic professionnel afin de remplacer le syndic actuel dès lors que, lorsque la copropriété est dépourvue de syndic, il doit être procédé judiciairement à la désignation d'un administrateur provisoire par ordonnance sur requête du président du tribunal judiciaire selon la procédure définie à l'article 47 du décret du 17 mars 1967, à défaut pour tout copropriétaire d'avoir convoqué une assemblée générale aux fins de désigner un syndic dans les conditions de l'article 17 de la loi du 10 juillet 1965 (l'article 17 dernier alinéa de la loi du 10 juillet 1965 aujourd'hui abrogé étant applicable à la date des faits).

Le tribunal précise, à titre surabondant, que cette demande était, au surplus, mal fondée pour les mêmes motifs que ceux ayant conduit au débouté de la demande d'annulation du contrat de syndic.

4. Sur la demande de dommages et intérêts

La SCI Cassandre sollicite la condamnation du défendeur - sans préciser de quel défendeur il s'agit, alors que son action est dirigée à la fois contre le syndicat des copropriétaires et le syndic à titre personnel - à des dommages et intérêts à hauteur de 800 euros en raison des fausses informations qui auraient été selon elle indiquées en assemblée générale la concernant.

Toutefois, elle n'apporte aucun élément en fait et en droit permettant de démontrer une quelconque faute, un préjudice et un lien de causalité entre les deux qui justifieraient cette demande de condamnation sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

En conséquence, la SCI Cassandre sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

5. Sur les demandes accessoires

- Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Compte tenu du sens de la présente décision, la SCI Cassandre sera condamnée au paiement des dépens, qui pourront être recouvrés par Maître Eric Audineau, avocat en ayant fait la demande, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

- Sur les frais non compris dans les dépens

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

Il y a lieu de condamner au titre des frais irrépétibles la SCI Cassandre à payer la somme de 5.000 euros au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) et la somme de 2.500 euros à la société Defforge Immobilier.

La SCI Cassandre sera déboutée de sa propre demande formulée à ce titre.

- Sur l'exécution provisoire

Aux termes des articles 514 et suivants du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens, de leur distraction et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par un jugement contradictoire, en premier ressort, après débats en audience publique et par mise à disposition au greffe,

DEBOUTE la SCI Cassandre de sa demande d'annulation de la résolution n° 2 de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 relative à l'approbation des comptes ;

DECLARE la SCI Cassandre IRRECEVABLE en sa demande d'annulation de la résolution n° 7 de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2017 relative à l'ouverture d'un compte travaux ;

DEBOUTE la SCI Cassandre de sa demande d'annulation du contrat de syndic ;

DECLARE la SCI Cassandre IRRECEVABLE en sa demande de désignation d'un syndic professionnel ;

DEBOUTE la SCI Cassandre de sa demande de dommages et intérêts ;

CONDAMNE la SCI Cassandre aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés par Maître Eric Audineau, avocat en ayant fait la demande, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCI Cassandre à payer la somme de 5.000 euros au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3]) et la somme de 2.500 euros à la société Defforge Immobilier, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens, de leur distraction et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 04 Avril 2024.

La GreffièreLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 17/07730
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-04;17.07730 ?
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