TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:
7ème chambre 1ère section
N° RG 22/08077
N° Portalis 352J-W-B7G-CXIDS
N° MINUTE :
Assignation du :
29 Juin 2022
JUGEMENT
rendu le 02 Avril 2024
DEMANDERESSE
- Société AMTRUST INTERNATIONAL UNDERWRITERS
[Adresse 2]
[Adresse 2] / IRLANDE
représentée par Me Benoît VERNIERES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B1059
DÉFENDERESSES
- Mutuelle SMABTP en qualité d’assureur de la société ICE BATIMENT
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée par Maître Emmanuelle BOCK de la SCP NABA ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0325
- S.A. AXA FRANCE IARD
[Adresse 1]
[Adresse 1]
défaillant
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Perrine ROBERT, Vice-Président
Madame Malika KOURAR, Juge
Monsieur Mathieu DELSOL, Juge
assistée de Madame Ines SOUAMES, Greffier,
Décision du 02 Avril 2024
7ème chambre 1ère section
N° RG 22/08077 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXIDS
DÉBATS
A l’audience du 29 Janvier 2024 tenue en audience publique devant Monsieur DELSOL, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.
JUGEMENT
Prononcé en audience publique
Réputé contradictoire
en premier ressort
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues aux deuxième alinéa de l’article de l’article 450 du Code de procédure civile
Signé par Madame Perrine ROBERT, Présidente, et par Madame Inès SOUAMES, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
La société AMTRUST INTERNATIONAL UNDERWRITERS (ci-après la société AMTRUST), est l’assureur dommages-ouvrages de deux maisons individuelles situées [Adresse 3], selon police DO- AMT-11102490 souscrite par V2 PROMOTION.
Sont notamment intervenues à l’acte de construire de cet ouvrage :
- la société ICE BATIMENT, maître d’œuvre, assurée auprès de la SMABTP, et ayant depuis fait l’objet d’une radiation ;
- la société RM CONSTRUCTIONS, locateur d’ouvrage, assurée auprès de la société AXA FRANCE IARD et ayant depuis fait l’objet d’une radiation.
La déclaration d’ouverture de chantier est intervenue le 19 septembre 2011.
La réception est intervenue le 02 juillet 2012.
Le bénéficiaire de la police dommages-ouvrage, Monsieur [X], a procédé le 12 novembre 2014 à une déclaration de sinistre dénonçant notamment les désordres suivants : « Moisissures sur le plafond et les murs de certaines pièces ».
Le Cabinet SARETEC a organisé une réunion d’expertise en date du 18 février 2015, à laquelle les sociétés RM CONSTRUCTIONS, ICE BATIMENT, SMABTP et AXA FRANCE IARD n’ont pas assisté.
A l’issue de cette réunion, le cabinet SARETEC a rédigé un rapport préliminaire et d’expertise en date du 24 février 2015.
La société AMTRUST, qui soutient avoir payé au bénéficiaire une indemnité d’un montant de 22.518,19 euros au titre du désordre précité, a ensuite sollicité le paiement de cette somme à la société AXA FRANCE IARD, assureur de la société RM CONSTRUCTIONS, en vain.
C’est dans ce contexte que par actes d’huissier en date du 29 juin 2022, la société AMTRUST a assigné la société SMABTP et la société AXA FRANCE IARD devant le tribunal judiciaire de PARIS.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 13 juillet 2023,elle demande au Tribunal de :
“JUGER irrecevables les fins de non-recevoir soulevées par la SMABTP, ces dernières
relevant exclusivement de la compétence du Juge de la mise en état,
DEBOUTER la SMABTP de l’ensemble de ses demandes,
Dossier ACS 15000988
A TITRE PRINCIPAL
JUGER que le désordre de nature décennale est imputable à l’intervention de la société RM
CONSTRUCTIONS,
CONDAMNER la société AXA France IARD à payer la somme de 22 518,19 € à la société AMTRUST INTERNATIONAL UNDERWRITERS augmentée des intérêts de droit et capitalisation s’il y a lieu.
A TITRE SUBSIDIAIRE
JUGER que le désordre de nature décennale est imputable à l’intervention des sociétés RM CONSTRUCTIONS et ICE BATIMENT,
CONDAMNER in solidum la société AXA France IARD et la société SMABTP à payer la somme de 22 518,19 € à la société AMTRUST INTERNATIONAL UNDERWRITERS augmentée des intérêts de droit et capitalisation s’il y a lieu.
EN TOUT ETAT DE CAUSE
CONDAMNER chaque succombant à payer à la société AMTRUST INTERNATIONAL
UNDERWRITERS la somme de 3.000,00 € chacun en application des dispositions de
l’article 700 du CPC,
CONDAMNER les mêmes en tous les dépens en ce compris le coût de délivrance de
l’assignation.”
Au soutien de ses prétentions, elle expose au visa des articles L.121-12 du code des assurances et 1346 et 1346-1 du code civil :
- que les fins de non-recevoir soulevées par la société SMABTP sont irrecevables en application de l’article 789 du code de procédure civile;
- qu’elle est valablement subrogée dans les droits du maître de l’ouvrage, à qui elle a bien réglé l’indemnité d’assurance ; elle effectue son recours sur le fondement de l’article 1792 du code civil et subsidiairement sur celui de la responsabilité civile contractuelle ;
- que le rapport d’expertise est contradictoire ;
- que la société RM CONSTRUCTION a mis en oeuvre l’isolant mince dans la toiture, à l’origine du désordre ;
- que l’assurée de la société SMABTP, la société ICE BATIMENT est assurée pour la mission “Ordonnancement, pilotage et coordination” alors qu’elle intervenue sur le chantier en qualité de maître d’œuvre d’exécution, ayant notamment pour mission de coordonner les différentes entreprises et gérer l’avancement du chantier ;
- que les désordres résultent de malfaçons d’exécution du lot Cloisons-doublages, alors que la société ICE BATIMENT avait pour mission de coordonner les différentes entreprises et gérer l’avancement du chantier, qu’elle n’a porté aucune réserve sur ce point sur le procès-verbal de réception, et qu’elle est donc responsable au sens de l’aticle 1792 du code civil.
*
Dans ses dernières conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 31 mai 2023,la société SMABTP demande au Tribunal de :
“JUGER que la société AMTRUST INTERNATIONAL ne produit pas l’intégralité du contrat qui pourrait justifier de sa qualité d’assureur dommages ouvrage,
JUGER que la société AMTRUST INTERNATIONAL ne produit pas la moindre preuve comptable d’un paiement qui pourrait justifier de sa qualité de subrogé,
JUGER que la société AMTRUST INTERNATIONAL ne justifie, même en dépit de la quittance subrogative, avoir versé le moindre euro à qui que ce soit, notamment faute de production d’un mandat avec la société ACS et faute de preuve d’un paiement de l’assureur vers la société ACS
JUGER que la société AMTRUST INTERNATIONAL ne peut donc prétendre avoir un quelconque intérêt ou qualité pour agir à l’encontre de la SMABTP.
JUGER que la société AMTRUST INTERNATIONAL n’est aucunement subrogée dans les droits du bénéficiaire de la police dommages ouvrages au titre des indemnités consenties.
JUGER que l’activité déclarée aux conditions particulières du contrat par la société ICE BATIMENT ne correspond pas à l’activité exercée sur le chantier par la société ICE BATIMENT
JUGER que la police souscrite ne couvre pas le désordre allégué qui relève d’une activité non déclarée
REJETER les demandes dirigées contre la SMABTP,
EN OUTRE,
JUGE que le désordre allégué n’est pas imputable à la société ICE BATIMENT
JUGER que le désordre est entièrement imputable à la société RM CONSTRUCTIONS
Débouter, en conséquence, et en toute hypothèse, la société AMTRUST
INTERNATIONAL de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions, y compris au titre de la prétendue résistance abusive.
EN TOUTE HYPOTHESE
ACCUEILLIR la SMABTP en ses appels en garantie,
CONDAMNER la Compagnie AXA FRANCE à relever et garantir indemne la SMABTP de l’ensemble des condamnations mise à sa charge,
JUGER que la SMABTP ne saurait être tenue au-delà de ses limites contractuelles (dommages immatériels 544 997,13 Euros et 3 franchises statutaires), plafond et franchise opposable à tout tiers au contrat par application de l’article L112.6 du code des assurances,
CONDAMNER la société AMTRUST INTERNATIONAL à verser à la société SMABTP une somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamner la société AMTRUST INTERNATIONAL aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Emmanuelle BOCK, membre de la SCP NABA & Associés, avocat aux offres de droit, en application de l’article 699 du CPC.”
Au soutien de ses prétentions, elle soulève diverses fins de non recevoir, et expose que :
- la société AMTRUST ne justifie pas avoir réglé l’indemnité d’assurance ;
- la société ICE BATIMENT, son assurée, n’a jamais déclaré une activité de maitrise d’oeuvre d’exécution ;
- il ressort du rapport d’expertise que seule la responsabilité de la société RM CONSTRUCTIONS est engagée ;
- subsidiairement, elle forme un appel en garantie à l’encontre de la société AXA FRANCE IARD, assureur de la société RM CONSTRUCTIONS.
*
La société AXA FRANCE IARD, bien que régulièrement assignée à personne, n’a pas constitué avocat.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des moyens développés.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 09 octobre 2023.
L’affaire a été appelée à l’audience du 21 janvier 2024 et mise en délibéré au 02 avril 2024.
MOTIFS
A titre liminaire, il est rappelé que le tribunal n’est pas tenu de statuer sur les demandes de « constater que », « dire et juger que » et « juger que » qui ne sont pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile mais un rappel des moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
L’article 472 du code de procédure civile dispose que si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur les fins de non recevoir
L’article 789 du code de procédure civile dispose que : “Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : (...) Statuer sur les fins de non-recevoir. (...) Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.”
En l’espèce, la société SMABTP n’a pas soulevé sa fin de non-recevoir devant le juge de la mise en état, mais devant le tribunal.
Partant, les fins de non-recevoir soulevées par la société SMABTP seront déclarées irrecevables.
Sur la demande principale
L’article L.121-12 du code des assurances dispose que l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.
L'assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l'assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l'assuré, s'opérer en faveur de l'assureur.
Par dérogation aux dispositions précédentes, l'assureur n'a aucun recours contre les enfants, descendants, ascendants, alliés en ligne directe, préposés, employés, ouvriers ou domestiques, et généralement toute personne vivant habituellement au foyer de l'assuré, sauf le cas de malveillance commise par une de ces personnes.
L’article 1792 du code des assurances prévoit que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
Il est acquis que s’il est constant que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, l’expertise dommages-ouvrage soumise aux dispositions d’ordre public de l’article A243-1 Annexe II échappe à cette règle et est opposable à l’ensemble des constructeurs visés par l’article 1792-1 du code civil et liés au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage, aux fabricants, aux contrôleurs techniques et à leurs assureurs dès lors que le principe du contradictoire a été respecté, que l'expert les a consultés pour avis chaque fois qu'il l'estimait nécessaire et les a systématiquement informés du déroulement des différentes phases du constat des dommages et du règlement des indemnités.
Décision du 02 Avril 2024
7ème chambre 1ère section
N° RG 22/08077 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXIDS
En l’espèce, pour prouver qu’elle a versé l’indemnité d’assurance, la société AMTRUST produit :
- un mandat conclu avec la société ACS SOLUTIONS pour la gestion des sinistres,
-une quittance subrogative au nom de M.[X] pour la somme de 22.518,19 euros au titre du désordre intitulé “Villa de M.[X] : larges moisissures sur le plafond et les murs de certaines pièces” signée le 05 mai 2017 par le bénéficiaire, Monsieur [X],
- un chèque de ce même montant adressé par la société ACS SOLUTIONS à Monsieur [X].
Ces éléments démontrent que la société AMTRUST a réglé l’indemnité d’assurance au maître de l’ouvrage, bénéficiaire de l’assurance dommages-ouvrages. Elle est donc subrogée légalement dans les droits de ce dernier.
La société AMTRUST produit également le rapport d’expertise amiable établi par la société SARETEC le 24 février 2015, étant rappelé que les sociétés RM CONSTRUCTIONS, AXA FRANCE IARD, ICE BATIMENT et SMABTP n’ont pas participé à ces opérations.
Pour démontrer que les parties ont été convoquées contradictoirement, elle produit les courriers de convocation des sociétés RM CONSTRUCTIONS, AXA FRANCE IARD, ICE BATIMENT, et SMABTP, dépourvues toutefois des accusés de réception correspondants.
Elle verse également aux débats un e-mail du 05 janvier 2018 envoyé par Madame [M] [J], membre de la Direction service clients construction de la société AXA FRANCE IARD ([Courriel 5]) rédigé dans les termes suivants : “Bonjour, Nous venons recevoir le rapport de notre expert EURISK que vous trouverez en ficher joint. Comme vous pouvez le constater, nous ne pouvons pas donner suite à votre recours du 08/06/2017. En effet, laresponsabilité de notre assuré n’est pas engagé dans la survenance du dommage déclaré puisque son intervention ne nous a pas été démontrée malgré les demandes de pièce de notre expert (marché - les factures - le PV de Réception). De plus l’expert estime du fait de la présence du décroché à l’aplomb de la hauter de 1,80m que ce dommage résulte d’une erreur de conception. Par conséquent, nos garanties n’ont pas lieu de s’appliquer.”
Il résulte de ces éléments que la société AXA FRANCE IARD a été valablement convoquée aux opérations d’expertise dommages-ouvrage, que le rapport d’expertise dommages-ouvrage lui a été adressé, et qu’elle avait connaissance du sinistre, comme en témoigne l’e-mail précité dans lequel elle indique avoir réalisé son propre rapport d’expertise. Le rapport d’expertise produit par la société AMTRUST est donc opposable à la société AXA FRANCE IARD.
Quant à la société SMABTP, elle ne se prévaut d’aucune violation du contradictoire et ne conteste pas avoir été régulièrement convoquée aux opérations d’expertise dommages-ouvrage. Le rapport lui est donc opposable.
Selon le rapport préliminaire et d’expertise dommages-ouvrage, l’ouvrage consiste en la construction de deux maisons individuelles R+1 attenantes par un porche commun, chacune pourvue d’une piscine.
L’expert indique avoir constaté le développement de moisissures en plafonds rampants des pièces en étage. Le maître de l’ouvrage lui a indiqué avoir pu constater la formation de gouttes d’eau en ces points par temps pluvieux et froids. Il a en outre constaté quelques moisissures ponctuelles dans les angles sud du plafond de la chambre RDC.
L’expert considère que les désordres de moisissures observés comme les gouttelettes d’eau ont pour origine une condensation des vapeurs d’eau propres à l’habitation. Selon lui, l’intensité des condensations en sous-face du faux-plafond rampant des pièces à l’étage, à savoir la formation de gouttes d’eau, permet de conclure à des défauts importants de l’isolation thermique de la toiture. Il indique que cette malfaçon a déjà été rencontrée sur la villa jumelée de Monsieur[U], voisin de Monsieur [X], qui contrevient au maintien d’une température de 19 degrés dans l’habitation, comme au maintien d’une température suffisamment élevée des parois enveloppant la construction pour parer au phénomène de la condensation.
L’expert conclut que le phénomène de condensation constaté résulte d’une insuffisance de l’isolation thermique du toit.
Il indique avoir relevé dans la maison voisine que l’isolation thermique avait été réalisée avec une laine de verre déroulée sur les plaques de plâtre du faux plafond côté amont du toit et avec un film mince thermo-réfléchissantcôté égoût du toit où le faux plafond est réhaussé. Il fait état d’un plénum réduit entre le faux-plafond et la couverture PST fibrociment. Selon lui, le film mince thermoréfléchissant posé en vrac, sans précaution d’enfermer un volume d’air étanche isolant, n’apporte aucune résistance thermique et s’avère la cause principe de l’insuffisance d’isolation constatée.
L’expert affirme que le dommage résulte de malfaçons d’exécution non décelables du lot Cloisons-Doublages : il estime que le plaquiste est intervenu après que la couverture PST ait été achevée, et qu’il a posé l’isolant thermique sur les plaques avec l’avancement des faux-plafonds qu’il réalisait.
Il précise que l’entreprise RM CONSTRUCTION, locateur d’ouvage a réalisé l’isolation thermique sur les faux-plafonds (sous-toit).
L’expert préconise la reprise de toute l’isolation thermique placée entre les faux plafonds rampants de l’étage et la couverture PST et tuiles, et a chiffré le coût de la reprise de l’ouvage à la somme de 22.518,19 euros (égal au montant de l’indemnité versée au maître de l’ouvrage).
La société AMTRUST produit en outre :
- un devis de la société RM CONSTRUCTION pour des travaux de Carrelage et de Peinture (et non de Cloisons doublage) ;
- un procès-verbal de réception signé le 02 juillet 2012 par la société RM CONSTRUCTION, mentionnant dans la rubrique “Objet du marché” le lot : Cloisons / Doublages ;
- l’attestation d’assurance de la société RM CONSTRUCTION, assurée auprès de la société AXA FRANCE IARD au titre de la responsabilité civile décennale, pour les activités “Charpente / Structures en bois”, “Menuiseries intérieures”, et “Isolation thermique”.
Il résulte de ces éléments que la société RM CONSTRUCTION a réalisé les travaux de Cloison/Doublage, en ce compris les travaux d’isolation de la toiture, pour lesquels elle était assurée auprès de la société AXA FRANCE IARD.
Les constatations de l’expert démontrent clairement, notamment par les photographies produites, l’apparition de moisissures de taille considérable sur les plafonds de la maison de Monsieur [X]. L’apparition de ces moisissures et la formation de gouttelettes d’eau résultent d’un phénomène de condensation, lui même causé par l’insuffisance de l’isolation thermique du toit réalisée par la société RM CONSTRUCTION, qui a également été relevée sur la maison voisine construite par cette société.
L’apparition de ces moisissures et la formation des gouttelettes d’eau par temps de pluie privent l’ouvrage de sa destination d’habitabilité, en ce que le défaut d’isolation thermique qui en est à l’origine contrevient au maintien d’une température suffisante à l’intérieur de la maison et dans les parois de celles-ci. La prolifération de ces moisissures est contraire aux exigences sanitaires et de confort normalement exigées dans un immeuble destiné à l’habitation. Le désordre est donc de nature décennal au sens de l’article 1792 du code civil.
La société RM CONSTRUCTION est ainsi responsable du désordre constaté sur le fondement de l’article 1792 du code civil. La garantie d’assurance de responsabilité décennale de la société AXA FRANCE IARD, dont l’attestation est produite, est donc engagée.
Le montant du coût réparatoire du désordre, qui s’élève à la somme de 22.518,19 euros réglée par la société AMTRUST à Monsieur [X], est justifié par les énonciations de l’expert et sera retenu. La société AXA FRANCE IARD sera donc condamnée à payer à la société AMTRUST la somme de 22.518,19 euros.
S’agissant de la société SMABTP, assureur de la société ICE BATIMENT, maître d’oeuvre, il ressort du dispositif des conclusions de la société AMTRUST que sa responsabilité est uniquement recherchée à titre subsidiaire, alors que la société AXA FRANCE IARD a été condamnée. Il n’y a pas donc lieu de statuer sur les demandes formées contre elle.
En conséquence, la société AXA FRANCE IARD sera condamnée à payer à la société AMTRUST la somme de 22.518,19 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 08 juin 2017, avec capitalisation des intérêts.
Sur les demandes accessoires
•Sur les dépens :
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, la société AXA FRANCE IARD, partie perdante, sera condamnée aux dépens en ce compris le coût de l’assignation.
•Sur les frais irrépétibles :
L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
En l’espèce, la société AXA FRANCE IARD, partie condamnée aux dépens, sera tenue de verser à la société AMTRUST la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La demande de la société SMABTP, formée uniquement contre la société AMTRUST, non condamnée aux dépens, sera rejetée.
•Sur l’exécution provisoire :
L’article 514 du Code de procédure civile, issu de l’article 3 du décret du 19 novembre 2019 applicable aux instances introduites au 01er janvier 2020, dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
En conséquence, l’exécution provisoire est de droit.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe :
DECLARE irrecevables les fins de non-recevoir soulevées par la société SMABTP ;
CONDAMNE la société AXA FRANCE IARD à payer la somme de 22.518,19 euros à la société AMTRUST INTERNATIONAL UNDERWRITERS, avec intérêts au taux légal à compter du 08 juin 2017 ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil;
CONDAMNE la société AXA FRANCE IARD aux dépens, en ce compris le coût de l’assignation, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Emmanuel BOCK, avocat membre de la SCP NABA & ASSOCIES;
CONDAMNE la société AXA FRANCE IARD à payer la somme de 3.000 euros à la société AMTRUST INTERNATIONAL UNDERWRITERS au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE la demande de la société SMABTP au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
Fait et jugé à Paris le 02 Avril 2024
Madame Inè SOUAMES Madame Perrine ROBERT
Le GreffierLe Président