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25/03/2024 | FRANCE | N°23/05123

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 25 mars 2024, 23/05123


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [N] [Z]


Copie exécutoire délivrée
le :
à :La SCP MENARD - WEILLER

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/05123 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2EPO

N° MINUTE :
3/2024






ORDONNANCE DE REFERE
INITIALEMENT EN DATE DU 12 MARS 2024
PROROGÉE EN DATE DU 25 MARS 2024



DEMANDERESSE
PARIS HABITAT - OPH (anciennement OPAC DE [Localité 4])
dont le siège social est situé [Ad

resse 1]
représenté par la SCP MENARD - WEILLER, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P0128

DÉFENDEUR
Monsieur [N] [Z]
demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
compa...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [N] [Z]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :La SCP MENARD - WEILLER

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/05123 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2EPO

N° MINUTE :
3/2024

ORDONNANCE DE REFERE
INITIALEMENT EN DATE DU 12 MARS 2024
PROROGÉE EN DATE DU 25 MARS 2024

DEMANDERESSE
PARIS HABITAT - OPH (anciennement OPAC DE [Localité 4])
dont le siège social est situé [Adresse 1]
représenté par la SCP MENARD - WEILLER, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P0128

DÉFENDEUR
Monsieur [N] [Z]
demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparant en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Pascale GAULARD, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection assistés de Nicolas RANA, greffier lors des débats et de Christopher LEPAGE, greffier lors du délibéré

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 12 janvier 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 25 mars 2024 par Pascale GAULARD, Vice-présidente, assistée de Christopher LEPAGE, Greffier

Décision du 25 mars 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/05123 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2EPO

Exposé du litige

Par acte sous seing privé du 20 janvier 2022, [Localité 4] HABITAT- OPH a consenti un bail d’habitation à M. [N] [Z] portant sur des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 3], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 289,02 euros outre les charges.

Par acte de commissaire de justice du 15 février 2023, la bailleresse a fait délivrer au locataire un commandement de payer la somme principale de 5306,15 euros au titre de l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [N] [Z] le 22 février 2023.

Par assignation du 1er juin 2023, [Localité 4] HABITAT-OPH a ensuite saisi en référé le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisée à faire procéder à l’expulsion de M. [N] [Z] et obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :
une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer majoré de 50%, subsidiairement égale au loyer, et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,5006,24 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif arrêté au 30 avril 2023,350 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 6 juin 2023, et un diagnostic social et financier a été réalisé. Ses conclusions ont été reçues au greffe avant l’audience, à laquelle il en a été donné lecture.

À l'audience du 12 janvier 2024, [Localité 4] HABITAT-OPH maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 31 décembre 2023, s'élève désormais à 6073,43 euros. [Localité 4] HABITAT-OPH considère enfin qu'il y a bien eu une reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

M. [N] [Z] expose qu’il a connu des difficultés à la suite de décès dans sa famille. Il précise qu’il a trouvé un emploi de conducteur et devrait percevoir un revenu mensuel de 2500 euros. Il propose de régler la dette par mensualités de 200 euros.

M. [N] [Z] sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais de paiement.

Motifs de la décision

Sur la demande de constat de la résiliation du bail

Sur la recevabilité de la demande
PARIS HABITAT-OPH justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de deux mois avant l’audience.

Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

Sur la résiliation du bail
Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de location a été signifié au locataire le 15 février 2023. Or, d’après l'historique des versements, la somme de 5306,15 euros n’a pas été réglée par ce dernier dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

La bailleresse est donc bien fondée à se prévaloir des effets de la clause résolutoire dont les conditions sont réunies depuis le 16 avril 2023.

Cependant, selon l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges. Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l’espèce, conformément à l'article 4 du code de procédure civile, la condition de reprise du paiement intégral du loyer courant avant la date de l'audience est réputée satisfaite.

Par ailleurs, il ressort des éléments du dossier, et notamment de l’audience et du diagnostic social et financier réalisé dans les conditions de l’article 24 III de la loi du 6 juillet 1989, que les revenus du foyer de M. [N] [Z] lui permettent raisonnablement d’assumer le paiement d’une somme de 200 euros par mois en plus du loyer courant afin de régler sa dette. Il ressort en effet du diagnostic social et financier qu’après avoir connu des difficultés, M. [Z] s’est remobilisé ; qu’il débute un nouvel emploi de chauffeur de bus à compter du 1er octobre 2023 et qu’il s’est saisi de la proposition d’un accompagnement social.

Dans ces conditions, il convient de lui accorder des délais de paiement pour s’acquitter des sommes dues, selon les modalités prévues ci-après, et de faire droit à la demande de M. [N] [Z] de suspension les effets de la clause résolutoire durant le cours de ces délais.

En cas de respect de ces modalités de paiement, la clause résolutoire sera donc réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre.

L’attention du locataire est toutefois attirée sur le fait qu’à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle décision de justice ne soit nécessaire : dans ce cas, et pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse pourra faire procéder à son expulsion, et à celle de tout occupant de son chef.

Sur la dette locative

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, [Localité 4] HABITAT-OPH verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 31 décembre 2023, M. [N] [Z] lui devait la somme de 5893,91 euros, soustraction faite des frais de procédure.

M. [N] [Z] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, il sera condamné, à titre provisoire, à payer cette somme à la bailleresse.

Toutefois, eu égard aux délais de paiement évoqués ci-avant, il convient de différer l'exigibilité de cette somme en autorisant M. [N] [Z] à se libérer de cette dette selon les modalités détaillées ci-après.

Sur l’indemnité d’occupation

Le cas échéant, en cas de maintien dans les lieux du locataire ou de toute personne de son chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due à titre provisoire.

L'indemnité d'occupation a un caractère mixte indemnitaire et compensatoire dans la mesure où elle est destinée, à la fois à rémunérer le propriétaire de la perte de jouissance du local et à l'indemniser du trouble subi du fait de l'occupation illicite de son bien. Elle entre ainsi dans le champ d'application de l'article 1231-5 du code civil qui permet au juge, même d'office, de modérer une clause pénale manifestement excessive.

Au vu des éléments de fait propres à l'affaire, l'indemnité mensuelle d'occupation sera fixée, non au montant réclamé par le bailleur à titre principal, manifestement excessif (montant du loyer majoré de 50% outre les charges), mais au montant du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, afin de réparer le préjudice découlant pour le demandeur de l'occupation indue de son bien et de son impossibilité de le relouer.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

M. [N] [Z], qui succombe à la cause, sera condamné aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité commande par ailleurs de faire droit à hauteur de 100 euros à la demande de [Localité 4] HABITAT-OPH concernant les frais non compris dans les dépens, en application des dispositions précitées.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par ordonnance mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 15 février 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que les conditions d’acquisition des effets de la clause résolutoire prévue au contrat conclu le 20 janvier 2022 entre [Localité 4] HABITAT-OPH, d’une part, et M. [N] [Z], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 3] étaient réunies le 16 avril 2023,

CONDAMNE M. [N] [Z] à payer à [Localité 4] HABITAT-OPH la somme de 5893,91 euros (cinq mille huit cent quatre-vingt treize euros et quatre-vingt onze centimes) à titre de provision sur l’arriéré locatif arrêté au 31 décembre 2023,

AUTORISE M. [N] [Z] à se libérer de sa dette en réglant chaque mois pendant 29 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 200 euros (deux cents euros), la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à M. [N] [Z],

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise,

DIT qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée quinze jours après l’envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception,

le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 16 avril 2023,
le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de M. [N] [Z] et à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique,
le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
M. [N] [Z] sera condamné à verser à titre de provision à [Localité 4] HABITAT-OPH une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux,
CONDAMNE M. [N] [Z] à payer à [Localité 4] HABITAT-OPH la somme de 100 euros (cent euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [N] [Z] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer du 15 février 2023 et celui de l'assignation du 1er juin 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 25 mars 2024, et signé par le juge et le greffier susnommés.

Le greffier Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/05123
Date de la décision : 25/03/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée en référé avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-25;23.05123 ?
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