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22/03/2024 | FRANCE | N°21/13172

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/2 nationalité b, 22 mars 2024, 21/13172


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/2 nationalité B

N° RG 21/13172 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVNFW

N° PARQUET : 21/474

N° MINUTE :


Assignation du :
11 Mai 2021

V.B.


[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :








JUGEMENT
rendu le 22 Mars 2024

DEMANDERESSE

Madame [J] [V]
domiciliée : chez Maître Sarah CUZIN-TOURHAM
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Asmae EL IDRISSI, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, ves

tiaire #C1068, Me Sarah CUZIN-TOURHAM, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant


DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 5]
[Localité 3]

Virginie PR...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/2 nationalité B

N° RG 21/13172 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVNFW

N° PARQUET : 21/474

N° MINUTE :

Assignation du :
11 Mai 2021

V.B.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 22 Mars 2024

DEMANDERESSE

Madame [J] [V]
domiciliée : chez Maître Sarah CUZIN-TOURHAM
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Asmae EL IDRISSI, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C1068, Me Sarah CUZIN-TOURHAM, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 5]
[Localité 3]

Virginie PRIÉ, substitute

Décision du 22/03/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 21/13172

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Manon Allain, Greffière.

DEBATS

A l’audience du 02 Février 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Contradictoire,
En premier ressort,
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente et par Manon Allain, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 11 mai 2020 par Mme [J] [V] au procureur de la République,

Vu les dernières conclusions de Mme [J] [V] notifiées par la voie électronique le 3 février 2023,

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 27 mars 2023,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 1er décembre 2023 ayant fixé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 2 février 2024,

MOTIFS

Sur la procédure

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 30 mars 2022. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur les conclusions de Mme [J] [V]

Dans ses dernières conclusions du 3 février 2023, la demanderesse ne répond qu'aux conclusions du ministère public du 31 janvier 2023.

Le tribunal rappelle qu'aux termes de l'alinéa 3 de l'article 768 du code de procédure civile, les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

Dès lors, en application de ces dispositions, le tribunal ne tiendra compte seulement des moyens contenus les conclusions du 3 février 2023.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

Mme [J] [V], se disant née le 29 novembre 1961 à [Localité 4] (Algérie), revendique la nationalité française par filiation maternelle sur le fondement de l'article 18 du code civil. Elle fait valoir qu’elle est descendante de [R] [Y], admis à la qualité de citoyen français par jugement du tribunal de Bougie rendu le 7 avril 1925.

Son action fait suite à la décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française qui lui a été opposée le 31 janvier 2008 par le greffier en chef du service de la nationalité des Français nés et établis hors de France aux motifs que l'acte de mariage de ses grands parents maternels, transcrit plus de cinquante ans après leur mariage, était sans valeur probante pour une personne de statut civil de droit commun, et qu'en outre, elle ne produisait aucun acte d'état civil dressé avant l’indépendance sur les registre d'état civil européen, ni ne justifiait d’élément de possession d 'état pour elle même ou pour sa mère (pièce n°1 de la demanderesse).

Le ministère public demande au tribunal de dire qu'elle n'est pas française.

Sur le fond

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.
Aux termes de l'article 32-1 du code civil, les Français de statut civil de droit commun domiciliés en Algérie à la date de l’annonce officielle des résultats du scrutin d’autodétermination conservent la nationalité française quelle que soit leur situation au regard de la nationalité algérienne.

Il est donc rappelé que les effets sur la nationalité française de l’accession à l’indépendance des départements d’Algérie, fixés au 1er janvier 1963, sont régis par l’ordonnance n°62-825 du 21 juillet 1962 et par la loi n°66-945 du 20 décembre 1966 ; ils font actuellement l’objet des dispositions des articles 32-1 et 32-2 du code civil ; il résulte en substance de ces textes que les Français originaires d’Algérie ont conservé la nationalité française :

- de plein droit, s’il étaient de statut civil de droit commun ce qui ne pouvait résulter que de leur admission ou de celle de l’un de leur ascendant, ce statut étant transmissible à la descendance, à la citoyenneté française en vertu exclusivement, soit d’un décret pris en application du sénatus-consulte du 14 juillet 1865, soit d’un jugement rendu sur le fondement de la loi du 4 février 1919 ou, pour les femmes, de la loi du 18 août 1929, ou encore de leur renonciation à leur statut personnel suite à une procédure judiciaire sur requête,

- s’ils étaient de statut civil de droit local, par l’effet de la souscription d’une déclaration de reconnaissance au plus tard le 21 mars 1967 (les mineurs de 18 ans suivant la condition parentale dans les conditions prévues à l’article 153 du code de la nationalité française), ce, sauf si la nationalité algérienne ne leur a pas été conférée postérieurement au 3 juillet 1962, faute de quoi ils perdaient la nationalité française au 1er janvier 1963.

Il appartient donc à Mme [J] [V], non titulaire d'un certificat de nationalité française, de démontrer, d'une part, la qualité de français de statut civil de droit commun de son ascendant revendiqué et, d'autre part, une chaîne de filiation ininterrompue légalement établie à l'égard de celui-ci, par la production d'actes d’état civil fiables et probants au sens de l’article 47 du code civil étant rappelé qu'aux termes de l’article 20-1 du code civil, la filiation de l'enfant n'a d'effet sur la nationalité de celui-ci que si elle est établie durant sa minorité.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et l'Algérie, les actes d'état civil sont dispensés de légalisation par l'article 36 du protocole judiciaire signé le 28 août 1962 et publié par décret du 29 août 1962 ; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer.

Par ailleurs, nul ne peut se voir attribuer la nationalité française à quelque titre que ce soit s’il ne justifie pas de façon certaine de son état civil et de celui des ascendants qu’il revendique, par la production de copies intégrales de l’état civil en original, étant précisé que le premier bulletin de la procédure rappelle la nécessité de produire de tels actes.

En l'espèce, pour justifier de l'admission à la qualité de français de son ascendant revendiqué, Mme [J] [V] produit une photocopie certifiée conformée à l'original, délivrée en 2010, par [I] [U] [Z], agent délégué pour le président de l'assemblée populaire communale, d'une expédition certifiée conforme à l'original, délivrée le 27 septembre 2004 par l'archiviste du tribunal, de l'extrait des minutes de greffe du tribunal de Bejaia, arrondissement d'Alger, concernant le jugement du 7 avril 1925 admettant [R] [M] [Y] à la qualité de citoyen français (pièce n°2 de la demanderesse).

Comme indiqué à juste titre par le ministère public, cette photocopie n'a pas été délivré par l'autorité compétente, le tribunal de Bougie, mais un agent de l'assemblée populaire communale.

En outre, en tout état de cause, le tribunal rappelle qu'à défaut de production de la copie certifiée conforme à l'original de la minute du jugement d'admission au statut civil de droit commun, rendu le 7 avril 1925 par le tribunal de première instance de Bougie, la copie dactylographiée ainsi versée aux débats par la demanderesse est dépourvue de force probante.

Mme [J] [V] ne justifie donc pas de l'admission de [R] [Y] à la qualité de citoyen français. Ne rapportant pas ainsi la preuve qu'elle était de statut civil de droit commun par la branche maternelle, elle ne démontre pas qu'elle a pu conserver de plein droit la nationalite française lors de l'accession à l'indépendance de l'Algérie.

En conséquence, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens soulevés par le ministère public, il y a lieu de débouter Mme [J] [V] de sa demande tendant à voir dire qu'elle est de nationalité française par filiation maternelle. Par ailleurs, dès lors qu'elle ne revendique la nationalité française à aucun autre titre, il sera jugé, conformément à la demande reconventionnelle du ministère public, qu'elle n'est pas de nationalité française.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, Mme [J] [V], qui succombe, sera condamnée aux dépens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Mme [J] [V] ayant été condamnée aux dépens, sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ne peut qu'être rejetée.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile ;

Déboute Mme [J] [V] de l'ensemble de ses demandes ;

Juge que Mme [J] [V], née le 29 novembre 1961 à [Localité 4] (Algérie), n'est pas de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Rejette la demande de Mme [J] [V] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [J] [V] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 22 Mars 2024

La GreffièreLa Présidente
M. ALLAIN A. FLORESCU-PATOZ


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/2 nationalité b
Numéro d'arrêt : 21/13172
Date de la décision : 22/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-22;21.13172 ?
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