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22/03/2024 | FRANCE | N°19/14882

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/2 nationalité b, 22 mars 2024, 19/14882


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/2 nationalité B

N° RG 19/14882 - N° Portalis 352J-W-B7D-CRK5J

N° PARQUET : 19/1135

N° MINUTE :


Assignation du :
12 Décembre 2019

V.B.


[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :








JUGEMENT
rendu le 22 Mars 2024

DEMANDEURS

Monsieur [M] [R] en tant que représentant légal de [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], [E] [R]


Madame [Z] [U] en son nom propre et en tant que représentante légale de [

J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], [E] [R]
[Adresse 8]
[Localité 10] (TUNISIE)
représentés par Me Julie MADRE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #A0688


DEFENDERESSE

LA ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/2 nationalité B

N° RG 19/14882 - N° Portalis 352J-W-B7D-CRK5J

N° PARQUET : 19/1135

N° MINUTE :

Assignation du :
12 Décembre 2019

V.B.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 22 Mars 2024

DEMANDEURS

Monsieur [M] [R] en tant que représentant légal de [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], [E] [R]

Madame [Z] [U] en son nom propre et en tant que représentante légale de [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], [E] [R]
[Adresse 8]
[Localité 10] (TUNISIE)
représentés par Me Julie MADRE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #A0688

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 7]
[Localité 1]
Virginie PRIÉ, substitute
Décision du 22/03/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 19/14882

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Manon Allain, Greffière.

DEBATS

A l’audience du 02 Février 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Contradictoire,
En premier ressort,
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente et par Manon Allain, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 12 décembre 2019 au procureur de la République, par Mme [Z] [U] en son nom propre et conjointement avec M. [M] [R] en qualité de représentants légaux de [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R] et [E] [R],

Vu les conclusions de désistement des demandeurs, notifiées le 26 juillet 2023,

Vu les dernières conclusions des demandeurs notifiées par la voie électronique le 17 mars 2023,

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 2 septembre 2021,

Vu l’ordonnance rendue le 1er décembre 2023, constatant que le désistement n'était pas parfait et clôturant l'affaire, en la fixant à l''audience de plaidoiries du 2 février 2024,

Vu la note d'audience,

MOTIFS

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture

Lors de l'audience du 2 février 2024, le tribunal a autorisé la production par les demandeurs de la copie de la déclaration de nationalité française souscrite le 13 janvier 2021, revêtue de la mention de l’enregistrement.

Le 2 février 2024, la demanderesse a produit cette pièce via la voie électronique.

Il convient donc de révoquer l'ordonnance de clôture, de déclarer cette pièce recevable et de clore l'instruction.

Sur la procédure

Le ministère public sollicite du tribunal de « constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré ». Il sera donc rappelé que cette demande de « constat » ne constitue pas une prétention au sens des dispositions de l'article 4 du code de procédure civil de sorte qu'elle ne donnera pas lieu à mention au dispositif.

Le tribunal rappelle toutefois qu'aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, applicable à la date de l'assignation, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 3 janvier 2020. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

Les demandeurs revendiquent la nationalite française par filiation pour Mme [Z] [U], se disant née le 2 octobre 1975 à [Localité 4] (Tunisie) et pour leurs enfants mineurs :
- [J] [R], dit né le 8 juin 2005 à [Localité 5] (Tunisie),
- [C] [R], dit né le 31 décembre 2006 à [Localité 10] (Tunisie),
- [N] [R], dit né le 15 janvier 2009 à Hubioun [Localité 5] (Tunisie),
- [G] [R], dite née le 6 décembre 2011 à Hubuon-[Localité 5] (Tunisie),
- [E] [R], dite née le 20 décembre 2016 à [Localité 5] (Tunisie).

Ils exposent que la mère de Mme [Z] [U], Mme [H] [W], née le 17 décembre 1956 à [Localité 6] (Tunisie) est française pour être née à l’étranger, de [O] [T] [S], née le 13 janvier 1927 à [Localité 2] (Tunisie), elle-même française pour être issue de [A] [S], né le 1er janvier 1894 à [Localité 9] (Tunisie), naturalisé par décret du 9 octobre 1924.

Le 4 avril 2016, Mme [Z] [U] s'est vu opposer un refus de délivrance de certificat de nationalité française, sur le fondement de l'article 30-3 du code civil (pièce n°4 des demandeurs).

Sur la désuétude

Aux termes de l’article 30-3 du code civil, lorsqu’un individu réside ou a résidé habituellement à l’étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d’un demi-siècle, cet individu ne sera pas admis à faire la preuve qu’il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n’ont pas eu la possession d’état de Français.

L’application de l’article 30-3 du code civil invoqué par le ministère public doit être examinée au regard des seuls termes de ce texte, lequel n’institue pas un délai de prescription susceptible de suspension ou d’interruption mais instaure une perte du droit à apporter la preuve devant les tribunaux de sa nationalité française, sanctionnant le non usage de celle-ci aux personnes qui résident habituellement à l’étranger et dont les ascendants n’ont pas plus été sur le sol français depuis un certain temps. Il s’ensuit qu’il ne peut donc être constaté une inégalité entre l’action négatoire du ministère public, qui peut être combattue par la possession d’état reconnue par l’article 21-13 du code civil, et l’action déclaratoire de nationalité française, dont l’exercice n’est pas davantage subordonné à un délai, dès lors que l’intéressé dispose d’éléments de possession d’état durant la période visée.

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code précité, lequel impose de mentionner, dans le jugement, la date à laquelle la nationalité française a été perdue, ou, le cas échéant, la date à laquelle elle avait été perdue par les auteurs de l’intéressé, en précisant que ce dernier n’a jamais été français.

Pour l'application de l’article 30-3 précité, il convient de déterminer :
- que le requérant revendique la nationalité française par filiation,
- que le requérant réside ou a résidé habituellement a l'étranger et qu’il n’a pas eu de possession d’état de français, c’est à dire qu’il n’a pas été en possession de passeport ou carte nationale d’identité française, inscrit au Consulat ou sur les listes électorales notamment,
- que le ou les ascendants dont il tient par filiation la nationalité, sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle a l’étranger et que son parent direct, duquel il revendique la nationalité française, n’a pas davantage de possession d’état de français.

A cet égard, il ressort de la rédaction même de l'article 30-3 du code civil, que le législateur a distingué entre la condition de résidence habituelle à l'étranger, pour laquelle sont concernés « les ascendants dont il tient la nationalité », de la condition propre à la possession d'état pour laquelle sont visés les seuls « père et mère ». Ainsi, s'agissant de la fixation à l'étranger pendant plus de 50 ans des « ascendants » du demandeur, il n'y a pas de distinction quant au degré d'ascendance, et sont donc également concernés les grand-parents, à condition qu'ils appartiennent à la branche par laquelle est revendiquée la nationalité française.

Le délai cinquantenaire s’apprécie en la personne de l’ascendant du requérant à l’action déclaratoire. Le point de départ de la résidence a l’étranger de l’ascendant est :
- pour les ascendants nés avant l’accession à l’indépendance du pays où ils résident, constitué par la date de cette accession à l’indépendance puisque c’est bien depuis cette date qu’elles sont fixées a l’étranger,
- pour ceux nés postérieurement à cette accession à l’indépendance, la date depuis laquelle ces ascendants ayant été susceptibles de transmettre la nationalité française, sont fixés à l’étranger c’est à dire depuis l’accession à l’indépendance également, le texte de l’article 30-3 incluant tous les ascendants et non pas seulement la première génération de ceux-ci.

Le délai cinquantenaire s’apprécie en la personne de l’ascendant du requérant à l’action déclaratoire. Le point de départ de la résidence a l’étranger de l’ascendant est la date depuis laquelle ces ascendants ayant été susceptible de transmettre la nationalité française, sont fixés à l’étranger.

La fixation à l'étranger s'entend d'une absence de résidence en France.

L’article 30-3 du code civil interdit ainsi, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude.

Édictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir.

Ainsi, le requérant qui agit en action déclaratoire de nationalité française alors qu’il réside ou a résidé habituellement à l’étranger et que ses ascendants y ont été fixés depuis plus de 50 ans sans avoir eu d’élément de possession d’état pour venir faire exception, sur cette période, à la désuétude encourue du fait de leur fixation à l’étranger, a déjà perdu la nationalité française, comme il résulte de l’application de l’article 23-6 du code civil, sans qu’aucune régularisation postérieure ne puisse intervenir.

Pour Mme [Z] [U]

Mme [Z] [X] revendique la nationalité française par filiation maternelle.

L'ascendant dont la demanderesse revendique tenir la nationalité française est [A] [S], qui a fixé sa résidence à l'étranger, en l'espèce en Tunisie, dont il ne ressort pas des éléments du dossiers qu'il ait un jour fixé sa résidence en France. Celui-ci ayant ainsi toujours résidé à l'étranger, le point de départ du délai cinquantenaire visé à l'article 30-3 du code civil doit être examiné à compter du 9 octobre 1924, date de son décret de naturalisation (pièce n° 25 des demandeurs).

La saisine datant du 12 décembre 2019 pour un délai de cinquante ans acquis le 9 octobre 1974, seule la démonstration d’une résidence habituelle en France de Mme [Z] [X] ou d’un de ses ascendants maternels, ou la démonstration d’une possession d’état de française d'elle-même ou de sa mère avant le 9 octobre 1974, permet d’écarter la désuétude.

La demanderesse soutient que la condition de perte de la nationalité française par désuétude ne s'applique qu'à l'absence de résidence en France de l'ascendant, qu'en l'espèce Mme [H] [W] dispose d’élément de possession d'état depuis 2014, notamment un certificat de nationalité française, un passeport français, une carte nationale d'identité que de surcroît, elle a fixé sa résidence en France métropolitaine.

Néanmoins, le tribunal observe qu'ucune pièce n’est produite, ni aucun élément même invoqué, pour rapporter la preuve d’une résidence en France de Mme [Z] [X] ou de ses ascendants maternels pendant la période visée par l’article 30-3 du code civil. Comme relevé à juste titre par le ministère public, les justificatifs d'une résidence à [Localité 11] en 2019 pour Mme [H] [W] visent ainsi une période postérieure au 9 octobre 1974 (pièce n°19 des demandeurs).

Par ailleurs, il n’est pas rapporté en l’espèce d’élément d’une possession d’état de Française de l’intéressée ou de sa mère avant le 9 octobre 1974. Le certificat de nationalité française délivré à Mme [H] [W] en 2014, le passeport français et la carte nationale d'identité qui lui ont été délivrés en 2017, ainsi que la transcription de son acte de naissance sur les registres du services central de l'état civil, constituent des éléments de possession d'état de français postérieurs à la période visée par l'article 30-3 du code civil (pièces n °8, 16, 17, 18 des demandeurs).

Il apparaît ainsi que Mme [Z] [X] a agi après le 9 octobre 1974 alors que ni elle ni sa mère, n'ont d’élément de possession d’état de la nationalité française avant cette date, et ni elle ni aucun de ses ascendants maternels n’ont eu une résidence habituelle sur le territoire français au cours du délai cinquantenaire fixé par l'article 30-3 du code civil.

Par suite, il convient de faire droit à la demande du ministère public en ce qui concerne la désuétude soulevée.

Il sera donc jugé que Mme [Z] [U] n'est pas admise à faire la preuve qu’elle a, par filiation, la nationalité française.

En application du dernier alinéa de l’article 23-6 du code civil, le jugement détermine la date à laquelle la nationalité française a été perdue.

En l'espèce, au regard des éléments précédemment relevés, il y a lieu de juger que Mme [Z] [X] est réputée n'avoir jamais été française.

Pour [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R],

Les demandeurs revendiquent la nationalité française par filiation maternelle pour leurs enfants [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R].

L'ascendant revendiqué, dont les enfants tiendraient la nationalité française, est [A] [S], qui a fixé sa résidence à l'étranger, en l'espèce en Tunisie. En outre, il ne ressort pas des éléments du dossiers qu'il ait un jour fixé sa résidence en France. Celui-ci ayant ainsi toujours résidé à l'étranger, le point de départ du délai cinquantenaire visé à l'article 30-3 du code civil doit être examiné à compter du 9 octobre 1924, date de son décret de naturalisation (pièce n° 25 des demandeurs).

La saisine datant du 12 décembre 2019 pour un délai de cinquante ans acquis le 9 octobre 1974, seule la démonstration d’une résidence habituelle en France des enfants ou d’un de ses ascendants maternels, ou la démonstration d’une possession d’état de française d'elle-même ou de sa mère avant le 9 octobre 1974 permet d’écarter la désuétude.

Aucune pièce n’est produite, ni aucun élément même invoqué, pour rapporter la preuve d’une résidence en France des enfants ou de leurs ascendants maternels pendant la période visée par l’article 30-3 du code civil.

Par ailleurs, il n’est pas rapporté en l’espèce d’élément d’une possession d’état de Français des enfants.

Il apparaît ainsi que les demandeurs ont agi après le 9 octobre 1974 alors que ni les enfants, ni leur mère, n'ont d’élément de possession d’état de la nationalité française, et aucun des enfants ou de leurs ascendants maternels n’ont eu une résidence habituelle sur le territoire français au cours du délai cinquantenaire fixé par l'article 30-3 du code civil.

Par suite, il convient de faire droit à la demande du ministère public en ce qui concerne la désuétude soulevée.

Il sera donc jugé que [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R] ne sont pas admis à faire la preuve qu’ils ont, par filiation, la nationalité française.

En application du dernier alinéa de l’article 23-6 du code civil, le jugement détermine la date à laquelle la nationalité française a été perdue.

En l'espèce, au regard des éléments précédemment relevés, il y a lieu de juger que [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R] sont réputés n'avoir jamais été français.

Sur l'action en contestation de refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité française

Le 16 avril 2019, le ministère de la justice a refusé l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 9 avril 2018 au titre de l'article 21-14 du code civil, par Mme [Z] [X], de nationalité tunisienne (pièces n°3 des demandeurs).

Celle-ci expose remplir l'ensemble des conditions de l'article 21-14 du code civil et sollicite l’enregistrement de cette déclaration de nationalité française et l'effet collectif pour ses enfants mineurs.

Aux termes de l'article 21-14 du code civil « Les personnes qui ont perdu la nationalité française en application de l'article 23-6 ou à qui a été opposée la fin de non-recevoir prévue par l'article 30-3 peuvent réclamer la nationalité française par déclaration souscrite conformément aux articles 26 et suivants.
Elles doivent avoir soit conservé ou acquis avec la France des liens manifestes d'ordre culturel, professionnel, économique ou familial, soit effectivement accompli des services militaires dans une unité de l'armée française ou combattu dans les armées françaises ou alliées en temps de guerre.
Les conjoints survivants des personnes qui ont effectivement accompli des services militaires dans
une unité de l'armée française ou combattu dans les armées françaises ou alliées en temps de guerre peuvent également bénéficier des dispositions du premier alinéa du présent article. »

Il résulte de l'article 26-3 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, que le ministre ou le directeur des services de greffe refuse d'enregistrer les déclarations qui ne satisfont pas aux conditions légales ; sa décision motivée est notifiée au déclarant qui peut la contester devant le tribunal judiciaire durant un délai de six mois. L'action peut être exercée personnellement par le mineur dès l'âge de seize ans ; la décision de refus d'enregistrement doit intervenir six mois au plus après la date à laquelle a été délivré au déclarant le récépissé constatant la remise de toutes les pièces nécessaires à la preuve de recevabilité de la déclaration. L'article 26-4 du code civil poursuit qu'à défaut de refus d'enregistrement dans les délais légaux, copie de la déclaration est remise au déclarant revêtue de la mention de l'enregistrement.

En l'espèce, il n'est produit aucune pièce permettant de déterminer la date à laquelle le récépissé de la déclaration souscrite le 9 avril 2018 a été remis à Mme [Z] [X]. La décision de refus a été notifiée le 16 avril 2019. Toutefois, la demanderesse ne soutient pas que la décision soit intervenue plus de six mois après la remise du récépissé.

Il appartient donc à Mme [Z] [X], de rapporter la preuve de ce que les conditions de la déclaration de nationalité française, posées par les dispositions de l'article 21-14 du code civil, sont remplies.

En l'espèce, le tribunal relève d'emblée que les demandeurs ne produisent pas la déclaration de nationalité française dont ils sollicitent l'enregistrement.

Dès lors, le tribunal ne pouvant ordonner l'enregistrement d'une déclaration dont il ne dispose pas, notamment pour vérifier si les conditions pour l'effet collectif concernant l'ensemble des enfants mineurs sont réunies, il y a lieu de rejeter la demande d'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 9 avril 2018.

Sur la demande reconventionnelle du ministère public

Le ministère public sollicite du tribunal de dire que Mme [Z] [X], [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R] ne sont pas français.

Or, Mme [Z] [X] a souscrit le 13 janvier 2021 une déclaration de nationalité française devant le consulat général de France à [Localité 12] sur le fondement de l'article 21-14 du code civil, enregistrée 2 juin 2021 sous le numéro 2021/0100.

Il résulte de cette déclaration de nationalité française que bénéficient de l'effet collectif [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R].

Dès lors, il est établi que Mme [Z] [X], [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R] ont acquis la nationalité française le 13 janvier 2021.

En conséquence, le ministère public sera débouté de sa demande tendant à voir dire que Mme [Z] [X], [J] [R], [C] [R], [N] [R], [G] [R], et [E] [R] ne sont pas français.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, la mention de la présente décision sera ordonnée en application de cet article.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Les demandeurs conservant la charge de leurs propres dépens, sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement en premier ressort et contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe :

Révoque l'ordonnance de clôture du 1er décembre 2023,

Déclare recevable la déclaration de nationalité française souscrite par Mme [Z] [U] ;

Ordonne la clôture ;

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile ;

Juge que Mme [Z] [X] n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française ;

Juge que Mme [Z] [X], née le 2 octobre 1975 à [Localité 4] (Tunisie), est réputée n'avoir jamais été française ;

Juge que M. [J] [R] n'est pas admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française ;

Juge que M. [J] [R], né le 8 juin 2005 à [Localité 5] (Tunisie) est réputé n'avoir jamais été française ;

Juge que M. [C] [R] n'est pas admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française ;

Juge que M. [C] [R] né le 31 décembre 2006 à [Localité 10] (Tunisie) est réputé n'avoir jamais été français ;

Juge que M. [N] [R] n'est pas admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française ;

Juge que M. [N] [R], né le 15 janvier 2009 à [Localité 3] [Localité 5] (Tunisie), est réputé n'avoir jamais été français ;

Juge que Mme [G] [R] n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française ;

Juge que Mme [G] [R], née le 6 septembre 2011 à [Localité 3] [Localité 5] (Tunisie), est réputée n'avoir jamais été française ;

Juge que Mme [E] [R] n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française ;

Juge que Mme [E] [R], née le 20 décembre 2016 à [Localité 5] (Tunisie), est réputée n'avoir jamais été française ;

Rejette le surplus des demandes de Mme [Z] [X] et de M. [M] [R] ;

Déboute le ministère public du surplus ses demandes ;

Ordonne la mention prévue à l’article 28 du code civil en marge des actes concernés ;

Rejette la demande de Mme [Z] [U] et de M. [M] [R] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [Z] [U] et M. [M] [R] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 22 Mars 2024

La GreffièreLa Présidente
M. ALLAIN A. FLORESCU-PATOZ


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/2 nationalité b
Numéro d'arrêt : 19/14882
Date de la décision : 22/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-22;19.14882 ?
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