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21/03/2024 | FRANCE | N°22/11693

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/2 nationalité b, 21 mars 2024, 22/11693


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/2 nationalité B

N° RG 22/11693 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX542

N° MINUTE :


Assignation du :
23 Septembre 2022

A.F.P.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :






JUGEMENT
rendu le 21 Mars 2024
DEMANDEUR

Monsieur [B] [R]
[Adresse 2]
[Localité 5] / ALGERIE
représenté par Me Solal CLORIS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, avocat plaidant, vestiaire #PC77



DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQ

UE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 4]
[Localité 1]
Sophie Bourla Ohnona, vice-procureure










Décision du 21/03/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 22/116...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/2 nationalité B

N° RG 22/11693 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX542

N° MINUTE :

Assignation du :
23 Septembre 2022

A.F.P.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 21 Mars 2024
DEMANDEUR

Monsieur [B] [R]
[Adresse 2]
[Localité 5] / ALGERIE
représenté par Me Solal CLORIS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, avocat plaidant, vestiaire #PC77

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 4]
[Localité 1]
Sophie Bourla Ohnona, vice-procureure

Décision du 21/03/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 22/11693

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Manon Allain, Greffière. .

DEBATS

A l’audience du 01 Février 2024 tenue publiquement sans opposition des représentants des parties, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile par Madame Antoanela Florescu-Patoz, magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries et en a rendu compte au tribunal dans son délibéré.

JUGEMENT

Contradictoire,
En premier ressort,
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente et par Manon Allain, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 23 septembre 2022 par M. [B] [R] au procureur de la République, constituant ses dernières conclusions ;

Vu l'absence de conclusions du ministère public,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 22 décembre 2023 ayant fixé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 1er février 2024,

MOTIFS

Sur la procédure

Le tribunal rappelle qu'aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 20 avril 2023. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

M. [B] [R], se disant né le 8 octobre 1959 à [Localité 5] (Algérie), revendique la nationalité française par filiation maternelle sur le fondement de l'article 24-1° du code de la nationalité française dans sa version issue de l'ordonnance du 19 octobre 1945. Il expose qu'il est français, pour avoir bénéficié de l'effet collectif attaché à la déclaration de nationalite souscrite le 13 mars 1963 devant le tribunal d'instance de Verdun, par sa propre mère, [K] [A], née le 30 mars 1937 à [Localité 5] (Algérie) (dossier n°14.370 DR 63).

M. [B] [R] n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française.

Aux termes de ses conclusions, le demandeur sollicite du tribunal de dire qu’il est français.

Le ministère public n'a pas conclu.

Sur le fond

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

Il est rappelé que les effets sur la nationalité française de l’accession à l’indépendance des départements d’Algérie, fixés au 1er janvier 1963, sont régis par l’ordonnance n°62-825 du 21 juillet 1962 et par la loi n°66-945 du 20 décembre 1966 ; ils font actuellement l’objet des dispositions des articles 32-1 et 32-2 du code civil ; il résulte en substance de ces textes que les Français originaires d’Algérie ont conservé la nationalité française :

- de plein droit, s’il étaient de statut civil de droit commun ce qui ne pouvait résulter que de leur admission ou de celle de l’un de leur ascendant, ce statut étant transmissible à la descendance, à la citoyenneté française en vertu exclusivement, soit d’un décret pris en application du sénatus-consulte du 14 juillet 1865, soit d’un jugement rendu sur le fondement de la loi du 4 février 1919 ou, pour les femmes, de la loi du 18 août 1929, ou encore de leur renonciation à leur statut personnel suite à une procédure judiciaire sur requête, étant précisé que relevaient en outre du statut civil de droit commun les personnes d’ascendance métropolitaine, celles nées de parents dont l’un relevait du statut civil de droit commun et l’autre du statut civil de droit local, celles d’origine européenne qui avaient acquis la nationalité française en Algérie et les israélites originaires d’Algérie qu’ils aient ou non bénéficié du décret “Crémieux” du 24 octobre 1870 s’ils étaient de statut civil de droit local, par l’effet de la souscription d’une déclaration de reconnaissance au plus tard le 21 mars 1967 (les mineurs de 18 ans suivant la condition parentale dans les conditions prévues à l’article 153 du code de la nationalité française), ce, sauf si la nationalité algérienne ne leur a pas été conférée postérieurement au 3 juillet 1962, faute de quoi ils perdaient la nationalité française au 1er janvier 1963.

Compte tenu de sa date de naissance, l'action de M. [B] [R] relève de l'article 153 du code de la nationalité française.

Ainsi, en vertu des dispositions des articles 152 du code de la nationalité française, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°45-2441 du 19 octobre 1945, modifiée par la loi n°60-752 du 28 juillet 1960 applicable à la date de la déclaration souscrite, conformément à l'article 17-2 du code civil « les Français originaires du territoire de la République française, tel qu'il était constitué à la date du 28 juillet 1960, et qui étaient domiciliés au jour de son accession à l'indépendance sur le territoire d'un Etat qui avait eu antérieurement le statut de territoire d'outre-mer de la République française, ont conservé la nationalité française. Il en est de même des conjoints, des veufs ou veuves et des descendants desdites personnes. »

Selon l'article 153 du même code « les enfants mineurs de dix-huit ans, non mariés, des personnes ayant bénéficié des dispositions de l’article 152 suivront la condition :
1° s’ils sont légitimes, de leur père ou, en cas de prédécès, de leur mère survivante ;
2° s’ils sont enfants naturels, du parent à l’égard duquel leur filiation est d’abord établie ou, en cas de prédécès de celui-ci, de l’autre parent survivant ».

Il appartient donc à M. [B] [R], non titulaire d'un certificat de nationalité française, d'une part, de démontrer un lien de filiation à l'égard de son père revendiqué, et, d'autre part, d'établir qu’il était mineur de dix-huit ans lorsque son père a souscrit une déclaration recognitive de nationalité française dans les conditions précitées, par des actes d’état civil fiables et probants au sens de l’article 47 du code civil, étant rappelé qu'aux termes de l’article 20-1 du code civil, la filiation de l'enfant n'a d'effet sur la nationalité de celui-ci que si elle est établie durant sa minorité.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et l'Algérie, les actes d'état civil sont dispensés de légalisation par l'article 36 du protocole judiciaire signé le 28 août 1962 et publié par décret du 29 août 1962 ; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer.

Par ailleurs, nul ne peut se voir attribuer la nationalité française à quelque titre que ce soit s’il ne justifie pas de façon certaine de son état civil et de celui des ascendants qu’il revendique, par la production de copies intégrales de l’état civil en original, étant précisé que le premier bulletin de la procédure rappelle la nécessité de produire de tels actes.

En l'espèce, M. [B] [R] produit une copie originale, délivrée le 24 juillet 2022, de son acte de naissance n°250, sur formulaire EC7, comportant un code de barre et un numéro de référence, mentionnant qu'il est né le 8 octobre 1959 à [Localité 5], fils de [E], âgé de 24 ans, pécheur et de [K] [A], âgée de 22 ans, sans profession, domiciliés à [Localité 5], l'acte ayant été dressé le 10 octobre 1959 à 10h30, par l'officier d'état civil, sur déclaration du père (pièce n°1 du demandeur).

M. [B] [R] justifie donc d'un état civil probant.

Le demandeur produit ensuite en pièce n°3 la copie de l'acte de naissance de [K] [A], délivrée le 22 juin 2022 par l'officier d'état civil de [Localité 3], mentionnant qu'elle est née le 30 mars 1937 à [Localité 5], ayant comme père [X] [S] [A] et comme mère [N] [W] [H].
Cet acte comporte la mention de la déclaration de nationalité française souscrite le 13 mars 1963 sous le nom de : [K] [A] (dossier n° 14.370 DR 63).

M. [B] [R] justifie donc d'un état civil probant de [K] [A].

Il résulte de l'acte produit en pièce n° 5 que [K] [A] et [E] [R] se sont mariés le 10 février 1959 de sorte qu’il justifie d'un lien de filiation à l'égard de [K] [A] durant sa minorité.

Il est démontré ensuite que [K] [A] a souscrit une déclaration récognitive de nationalite française le 13 mars 1963, et a ainsi pu conserver la nationalite française après l'accession à l'indépendance de l'Algérie (pièce n°6 du demandeur).

Dès lors, son fils, M. [B] [R], alors mineur de 18 ans, a suivi sa condition en application de l’article 153 du code de la nationalité française, précité.

Partant, M. [B] [R], ayant bénéficié de l'effet collectif attaché à la déclaration souscrite le 13 mars 1963 par [K] [A], il a conservé la nationalité française lors de l’accession à l’indépendance de l’Algérie.

Il sera donc jugée qu'il est français.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, l’instance judiciaire ayant été nécessaire à l’établissement des droits, le demandeur conservera la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile ;

Juge que M. [B] [R], né le 8 octobre 1959 à [Localité 5] (Algérie), est de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Laisse à M. [B] [R] la charge de ses propres dépens.

Fait et jugé à Paris le 21 Mars 2024

La GreffièreLa Présidente
M. ALLAIN A. FLORESCU-PATOZ


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/2 nationalité b
Numéro d'arrêt : 22/11693
Date de la décision : 21/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-21;22.11693 ?
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