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21/03/2024 | FRANCE | N°22/05598

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/2 nationalité b, 21 mars 2024, 22/05598


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/2 nationalité B

N° RG 22/05598 - N° Portalis 352J-W-B7G-CW3TF

N° PARQUET : 22/522

N° MINUTE :


Assignation du :
10 Mai 2022

A.F.P.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :






JUGEMENT
rendu le 21 Mars 2024
DEMANDERESSE

Madame [V] [J] [E] [X]
[Adresse 5]
[Adresse 2] (TOGO)

représentée par Me Adoté BLIVI, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #G0017



DEFENDERESSE

LA

PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
Parvis du Tribunal de Paris
[Localité 1]
Sophie Bourla Ohnona, vice-procureure







Décision du 21/03/2024
Chambre du contentieux
de la nation...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/2 nationalité B

N° RG 22/05598 - N° Portalis 352J-W-B7G-CW3TF

N° PARQUET : 22/522

N° MINUTE :

Assignation du :
10 Mai 2022

A.F.P.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 21 Mars 2024
DEMANDERESSE

Madame [V] [J] [E] [X]
[Adresse 5]
[Adresse 2] (TOGO)

représentée par Me Adoté BLIVI, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #G0017

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
Parvis du Tribunal de Paris
[Localité 1]
Sophie Bourla Ohnona, vice-procureure

Décision du 21/03/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 22/05598

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Manon Allain, Greffière.

DEBATS

A l’audience du 01 Février 2024 tenue publiquement sans opposition des représentants des parties, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile par Madame Antoanela Florescu-Patoz, magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries et en a rendu compte au tribunal dans son délibéré.

JUGEMENT

Contradictoire,
En premier ressort,
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente et par Manon Allain, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 10 mai 2022 par Mme [V] [J] [E] [X] au procureur de la République constituant ses dernières conclusions et le dernier bordereau de communication de pièces notifié par la voie électronique le 17 mai 2022 ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 30 juin 2023,

Vu le jugement rendu le 22 septembre 2023 la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture en date du 30 juin 2023 afin de permettre à Mme [V] [J] [E] [X] de produire la copie de l'acte de mariage de ses parents en copie originale, la copie de l'acte de naissance de M. [Z] [X] et répondre aux conclusions du ministère public;

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 7 juin 2023,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 19 janvier 2024 ayant fixé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 1er février 2024,

MOTIFS

Sur la procédure

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 7 septembre 2022. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire, conformément à la demande du ministère public, que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

Mme [V] [J] [E] [X], se disant née le 24 novembre 1992 à [Localité 3] (Seine-[Localité 6]), revendique la nationalité française par filiation paternelle, sur le fondement de l'article 19-3 du code civil tel que rendu applicable par l'article 23 de la loi du 9 janvier 1973 modifié par
l'article 44 de la loi du 22 juillet 1993 comme née en France d’un père, M. [Z] [X], né vers 1951 à [Localité 7] (République Centrafricaine), autrefois dénommée Oubangui-Chari, ancien territoire d’outre mer français devenu indépendant le 13 août 1960.

Mme [V] [J] [E] [X] n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française.

Sur la demande de retrait du rôle

Lors de l'audience du 1er février 2024, la demanderesse a formulée une demande orale de retrait du rôle de l'affaire au motif qu'elle a des difficultés pour produire les pièces selon le jugement de réouverture des débats du 22 septembre 2023.

Or, selon de l'article 775 du code de procédure civile, la procédure est écrite sauf disposition contraire.

Selon, l'article 382 du même code, le retrait du rôle est ordonné lorsque toutes les parties en font la demande écrite et motivée.

La demande de retrait du rôle formulée oralement par la demanderesse est donc irrecevable.

Décision du 21/03/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 22/05598

Sur le fond

Sur le lien de filiation de Mme [V] [J] [E] [X] à l'égard de M. [Z] [X]

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

Conformément à l'article 17-1 du code civil, compte tenu de la date de naissance revendiquée par la demanderesse, l'action relève des dispositions de l’article 18 du code civil aux termes duquel est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français.

Il doit être également rappelé que les effets sur la nationalité de l’accession à l’indépendance des anciens territoires d’outre-mer d’Afrique (hors Algérie, Comores et Djibouti) sont régis par la loi n°60-752 du 28 juillet 1960 et par le chapitre VII du titre 1er bis du livre premier du code civil (soit ses articles 32 à 32-5), qui s’est substitué au titre VII du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, qui s’est lui-même substitué aux articles 13 et 152 à 156 du même code dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 19 octobre 1945 et modifiée par la loi du 28 juillet 1960.

Il résulte de l’application combinée de ces textes qu’ont conservé la nationalité française :
- les originaires du territoire de la République française tel que constitué le 28 juillet 1960, auxquels étaient assimilés les “métis” (et leurs descendants) nés de parents dont l’un, demeuré légalement inconnu, était présumé de souche européenne et d’origine française, reconnus comme tels citoyens français par jugements rendus sur le fondement du décret du 5 septembre 1930 (pour l’Afrique Occidentale Française) ou du 15 septembre 1936 (pour l’Afrique équatoriale française),
- les personnes qui ont souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française,
- celles qui ne se sont pas vu conférer la nationalité de l’un des nouveaux Etats anciennement sous souveraineté française,
- enfin, celles, originaires de ces territoires, qui avaient établi leur domicile hors de l’un des Etats de la Communauté lorsqu’ils sont devenus indépendants,
- les enfants mineurs de 18 ans suivant la condition parentale selon les modalités prévues à l’article 153 du code de la nationalité française de 1945 dans sa version issue de l'ordonnance du 19 octobre 1945 telle que modifiée par la loi du 28 juillet 1960.

Le domicile au sens du droit de la nationalité s’entend d’une résidence effective présentant un caractère stable et permanent et coïncidant avec le centre des attaches familiales et des occupations ; il ne se réduit pas au lieu de travail.

Il appartient ainsi à Mme [V] [J] [E] [X], qui n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française, de démontrer, d'une part, la nationalité française du parent duquel elle la tiendrait et, d’autre part, un lien de filiation légalement établi a l’égard de celui-ci, au moyen d’actes d’état civil probants au sens de l’article 47 du code civil, étant précisé qu’afin de satisfaire aux exigences de l’article 20-1 du code civil, cet établissement doit être intervenu pendant sa minorité pour avoir des effets sur la nationalité.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et la République Centrafricaine, les actes et décisions judiciaires de l'état civil sont dispensés de légalisation par l'article 21 de l'accord de franco-centrafricain du 18 janvier 1965, publié au Journal Officiel du 19 mai 1967 et entré en vigueur le 31 janvier 1967. Il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer et certifiés conformes à l'original par ladite autorité.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s’il ne dispose d’un état civil fiable et certain.

En l'espèce, il résulte de la copie de son acte de naissance produit en pièce n° 1, que Mme [V] [J] [E] [X] est née le 24 novembre 1992 à [Localité 3], en France, de [Z] [X], né vers 1951 à [Localité 7] (République Centrafricaine), lietenant Eau et forêt et de [A] [H] [N] [P], son épouse, née le 4 mai 1956 à [Localité 4] (Togo), sans profession, domiciliés à [Localité 8], l'acte ayant été dressé le 26 novembre 1992 sur la déclaration de [T] [F] [G], 23 ans, adjoint administratif à [Localité 3], par l'officier d'état civil de la commune de [Localité 3].

La demanderesse produit ensuite en pièce n° 2 la copie de l'acte de naissance de M. [Z] [X] en simple photocopie.

Cet acte est dépourvu de toute garantie d'intégrité et d'authenticité, alors même qu'il est rappelé dès le premier bulletin de procédure que l’avocat en demande doit s'assurer qu'il détient bien une copie intégrale en original de l'acte de naissance de son client, qui devra figurer dans le dossier de plaidoirie, exigence rappelée dans le bulletin notifiant la clôture s'agissant de tous les actes de l’état civil du dossier de plaidoirie, qui doivent être produits en original.

Par ailleurs, ayant été déclarée par un tiers, Mme [V] [J] [E] [X] doit justifier de sa filiation à l'égard de M. [Z] [X] par la production de l'acte de mariage de ses parents revendiqués.
Or, malgré le jugement du 22 septembre 2023 ayant ordonné la réouverture des débats, à la suite de sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 30 juin 2023, Mme [V] [J] [E] [X] n'a produit ni la copie originale de l'acte de naissance de M. [Z] [X], son père dont elle revendique la nationalité française, ni l'acte de mariage de ses parents.

Elle ne rapporte donc la preuve ni de sa filiation à l'égard de M. [Z] [X] son père revendiqué, ni de la naissance de celui-ci dans un ancien territoire d’outre mer français.

En conséquence, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés par le ministère public sur ce point, Mme [V] [J] [E] [X] sera déboutée de sa demande tendant à se voir reconnaître la nationalité française par filiation, sur le fondement de l'article 18 du code civil.

Par ailleurs, dès lors que Mme [V] [J] [E] [X] ne revendique la nationalité française sur aucun autre fondement, il sera jugé, conformément à la demande reconventionnelle du ministère public, qu'elle n'est pas de nationalité française.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, Mme [V] [J] [E] [X], qui succombe, sera condamnée aux dépens. Sa demande de recouvrement des dépens au profit de Maître Adoté Blivi, sera en conséquence rejetée.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Mme [V] [J] [E] [X] ayant été condamnée aux dépens, sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ne peut qu'être rejetée.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile ;

Juge irrecevable la demande de Mme [V] [J] [E] [X] de retrait du rôle de l'assignation ;

Juge que Mme [V] [J] [E] [X], née le 24 novembre 1992 à [Localité 3] (Seine-Saint-Denis), n'est pas de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Rejette la demande de Mme [V] [J] [E] [X] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [V] [J] [E] [X] aux dépens ;

Rejette la demande de Mme [V] [J] [E] [X] relative au recouvrement des dépens au profit de Maître Adoté Blivi.

Fait et jugé à Paris le 21 Mars 2024

La GreffièreLa Présidente
M. ALLAIN A. FLORESCU-PATOZ


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/2 nationalité b
Numéro d'arrêt : 22/05598
Date de la décision : 21/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-21;22.05598 ?
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