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19/03/2024 | FRANCE | N°19/13781

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 6ème chambre 1ère section, 19 mars 2024, 19/13781


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




6ème chambre 1ère section

N° RG 19/13781 -
N° Portalis 352J-W-B7D-CRGJJ

N° MINUTE :




Assignation du :
22 novembre 2019




JUGEMENT
rendu le 19 mars 2024
DEMANDERESSE

S.A.S. OPTIM’HOME RENOVATION
[Adresse 1]
[Localité 9]

représentée par Maître Stéphanie TONDINI de la SELARL LEXLINEA, avocats au barreau d’ESSONNE









DÉFENDEURS

SA M

IC INSURANCE venant aux droits de MILLENNIUM INSURANCE COMPANY LIMITED
[Adresse 3]
[Localité 8]

représentée par Maître Charles DE CORBIÈRE de la SCP STREAM, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P132

Décision...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

6ème chambre 1ère section

N° RG 19/13781 -
N° Portalis 352J-W-B7D-CRGJJ

N° MINUTE :

Assignation du :
22 novembre 2019

JUGEMENT
rendu le 19 mars 2024
DEMANDERESSE

S.A.S. OPTIM’HOME RENOVATION
[Adresse 1]
[Localité 9]

représentée par Maître Stéphanie TONDINI de la SELARL LEXLINEA, avocats au barreau d’ESSONNE

DÉFENDEURS

SA MIC INSURANCE venant aux droits de MILLENNIUM INSURANCE COMPANY LIMITED
[Adresse 3]
[Localité 8]

représentée par Maître Charles DE CORBIÈRE de la SCP STREAM, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P132

Décision du 19 mars 2024
6ème chambre 1ère section
N° RG 19/13781 -
N° Portalis 352J-W-B7D-CRGJJ

CAISSE REGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES RHONE-ALPES AUVERGNE( GROUPAMA RHONE-ALPES AUVERGNE)
[Adresse 4]
[Localité 5]

représentée par Maître Patrice PIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0039

Monsieur [S] [H]
[Adresse 2]
[Localité 7]

Madame [L] [V]
[Adresse 2]
[Localité 7]

représentés par Maître Samuel BONTÉ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0394

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Céline MECHIN, vice-président
Marie PAPART, vice-président
Clément DELSOL, juge

assisté de Catherine DEHIER, greffier,

DÉBATS

A l’audience du 17 janvier 2024 tenue en audience publique devant Clément DELSOL, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Décision publique
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Céline MECHIN, président et par Catherine DEHIER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******************

En qualité de maître d’ouvrage, [S] [H] et [L] [V] ont entrepris des travaux de rénovation de l’appartement dont ils sont propriétaires dans l’immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 11].

L’exécution des travaux a été confiée à la société Optim’Home Rénovation et a débuté le 08 octobre 2018.

En cours de chantier, les relations entre le maître d’ouvrage et le locateur se sont dégradées.

Le 14 mai 2019, Maître [E], huissier de justice mandaté par le maître d’ouvrage, a constaté l’état des lieux et en a dressé procès-verbal.

Par actes d’huissier de justice délivrés le 22 novembre 2019, la société Optim’Home Rénovation a fait citer Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] devant le tribunal de grande instance de Paris. Elle sollicitait notamment la fixation de la réception des travaux le 05 mars 2019 et leur condamnation in solidum à lui verser 36 992,90 € ttc au titre de la facture n°F19/03-00061 du 13 mars 2019, 1 034,04 € ttc au titre du préjudice matériel, 3 699,29 € au titre de la résistance abusive, 2 000,00 € au titre du préjudice d’image et de réputation, 2 000,00 € au titre du préjudice économique et financier et 4 000,00 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu’au paiement des dépens. L’affaire a été inscrite au rôle sous la référence n°RG19/13781.

Par actes d’huissier de justice délivrés le 25 novembre 2021, Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] ont fait citer en intervention forcée la Caisse Régionale d’Assurances Mutuelles Agricoles de Rhône-Alpes Auvergne (Groupama) et la société Mic Insurance devant le tribunal judiciaire de Paris. Ils sollicitaient leur condamnation solidaire avec Monsieur [R] [D] et la société Optim’Home Rénovation à leur verser diverses sommes au titre des préjudices qu’ils ont subis. L’affaire a été inscrite au rôle sous la référence n°RG22/03054.

Par mentions aux dossiers du 20 juin 2022, le juge de la mise en état a joint ces affaires sous la référence unique n°RG19/13781.

Par conclusions n°3 notifiées par voie électronique le 08 septembre 2021, la société Optim’Home Rénovation forme les prétentions suivantes :
« Vu l’article 1792-6 du code civil ;
Vu les articles 1103 et 1104 du Code civil ;
Vu les articles 1217, 1231-2 et 1231-6 al3 du code civil ;
Il est demandé au Tribunal de Judiciaire de PARIS de :
DIRE ET JUGER recevable et bien fondée la société OPTIM’HOME RENOVATION en ses demandes, fins et conclusions ;
RAPPELER que l’absence d’achèvement des travaux n’interdit pas de prononcer leur réception judiciaire dès lors que les travaux sont en état d’être reçus ;
CONSTATER que depuis le 6 mars 2019, la société OPTIM’HOME RENOVATION a été empêchée d’exécuter ses obligations par les consorts [H] / [V] lui ayant interdit d’accéder au chantier, et donc de réaliser les derniers travaux de finition restant ;
Dans ces conditions,
PRONONCER la réception judiciaire des travaux réalisés par la société OPTIM’HOME RENOVATION pour M. [H] et Madame [V], suivant devis n°114 du 15 juin 2018, au [Adresse 2] ,
FIXER la date de réception desdits travaux au 5 mars 2019, date à laquelle les consorts [H]/ [V] ont interdit l’accès du chantier à la société OPTIM’HOME RENOVATION et INDIQUER les réserves suivantes :
- Pose de plinthes dans les WC ;
- Raccordement EF des wc et lave-main ;
- Finition de la crédence dans la cuisine ;
- Raccordement interrupteur plafonnier de la chambre parentale ;
- Remplacement de la fenêtre de la cuisine.
CONDAMNER Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à permettre l’accès du chantier situé [Adresse 2], aux équipes de la société OPTIM’HOME RENOVATION, afin de lever lesdites réserves, pendant un délai de trois mois à compter de la décision à intervenir ;
En conséquence,
CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à verser à la société OPTIM’HOME RENOVATION la somme de 36.992,90 euros TTC au titre du paiement de la facture n°F19/03-00061 du 13 mars 2019, outre les intérêts de retard au taux légal ;
CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à verser à la société OPTIM’HOME RENOVATION la somme de 1.034,04 euros TTC de dommages et intérêts au titre du préjudice matériel ;
CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à verser à la société OPTIM’HOME RENOVATION la somme de 3.699, 29 euros de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive ; CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à verser à la société OPTIM’HOME RENOVATION la somme de 2.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice d’image et de réputation subi par elle ;
CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à verser à la société OPTIM’HOME RENOVATION la somme de 2.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice économique et financier subi en raison de la perte de chance d’avoir pu réaliser d’autres chantiers ;
CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à verser à la société OPTIM’HOME RENOVATION la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;
CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] aux entiers dépens au titre de l’article 695 du CPC ;
ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir. »
Par conclusions n°5 notifiées par voie électronique le 21 octobre 2022, [S] [H] et [L] [V] forment les prétentions suivantes :
«Vu l’article 8 de la Convention Européenne des droits de l’homme ;
Vu les dispositions des articles 9, 1103, 1104,1193, 1231, 1231-1, 1231-2, 1792-4-1 du Code civil ;
Vu les articles L241-1 et L242-2 du code des assurances
Vu les dispositions des articles 6, 9 et 700 du code de procédure civile ;
Vu la jurisprudence,
Il est demandé au Tribunal judiciaire de PARIS :
DÉBOUTER la société OPTIM HOME RENOVATION, la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhône Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE de l’intégralité de leurs demandes et prétentions ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 13.760,44 € aux consorts [V] [H] au titre des travaux surfacturés.
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 310,72 € aux consorts [V] [H] au titre des réparations de la chaudière non pris en charge au titre de la garantie.
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION à payer la somme de 136.302,09 € aux consorts [V] [H] au titre des travaux de reprises et de remises en conformité ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 21.736,13 € aux consorts [V] [H] au titre des charges mensuelles dépensées par les maîtres d’ouvrages-propriétaires pour non-jouissance de l’appartement ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 350.000,00 € aux consorts [V] [H] au titre des pertes financières liées à l’état du bien ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 9.564,00 € aux consorts [V] [H] au titre frais engagés pour les réunions expertales ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 1.300,00 € aux consorts [V] [H] par mois de privation de jouissance depuis le 1er décembre 2019 jusqu’à complet paiement des travaux de reprise par la société OPTIM HOME RENOVATION ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 13.200,00 € aux consorts [V] [H] au titre des frais de relocations durant le chantier du fait des désordres interdisant d’en prendre possession en l’état.
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION, à payer la somme de 1.432,20 € aux consorts [V] [H] au titre de l’indemnisation de la perte de chance de bénéficier d’un avantage fiscal ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION à payer la somme de 25.000,00 € aux consorts [V] [H] au titre du préjudice moral subit par ces derniers ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION à payer aux consorts [V] [H] la somme de 9.000,00 € (soit 1.500,00 € par photos publiées) au titre du préjudice subi pour violation de leur vie privée ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION à payer aux consorts [V] [H] la somme de 1034,04 € en remboursement des fournitures (faïence) enlevés par les préposés de la demanderesse.
CONDAMNER solidairement Monsieur [R] [D], la société OPTIM HOME RENOVATION et la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles de Rhone Alpes Auvergne et la société MIC INSURANCE, représentée par son mandataire la société LEADER UNDERWRITING, ès qualité d’assureurs de la société OPTIM HOME RENOVATION à payer aux consorts [V] [H] la somme de 10.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;
DIRE que les dépens seront recouvrés par Maître Samuel BONTE au visa de l’article 699 du code de procédure civile »

Par conclusions n°6 notifiées par voie électronique le 08 décembre 2022, la société Caisse Régionale d’Assurances Mutuelles Agricoles de Rhône-Alpes Auvergne (Groupama) forme les prétentions suivantes :
«Débouter Mme [V] et M. [H] de l’ensemble de leurs demandes dirigées à l’encontre de GROUPAMA RHÔNE-ALPES AUVERGNE.
A TITRE SUBSIDIAIRE
En cas de condamnation de GROUPAMA RHÔNE-ALPES AUVERGNE,
Faire application des franchises de 1.000 euros par sinistre et par type de garantie, opposables erga omnes conformément à l’article L 112-6 du code des assurances.
EN TOUTE HYPOTHESE,
Condamner Mme [V] et M. [H] à payer à GROUPAMA RHÔNE-ALPES AUVERGNE la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du CPC.
Les condamner aux dépens. »
Par conclusions en défense n°2 notifiées par voie électronique le 03 novembre 2022, la société Mic Insurance forme les prétentions suivantes :
«Vu l’article 1792 du Code civil,
Vu l’article L. 124-1-1 et suivants du Code des assurances,
Il est demandé au Tribunal judiciaire de Paris de :
A TITRE PRINCIPAL
DEBOUTER les consorts [V]-[H] et toute autre partie de l’intégralité de leurs demandes contre MIC INSURANCE ;
A TITRE SUBSIDIAIRE
DECLARER opposables les plafonds de garantie et LIMITER toute condamnation de MIC au montant des plafonds de garanties dans l’hypothèse d’une condamnation les excédant ;
DEDUIRE la franchise de 3.000 EUR opposable aux consorts [V]-[H] de toute condamnation ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE
CONDAMNER les consorts [V]-[H] ou tout succombant à la somme de 3.000 EUR au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’instance. »

Pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à la lecture de leurs écritures en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture date du 17 avril 2023.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de préciser que les demandes des parties tendant à voire « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas nécessairement des prétentions au sens des dispositions des articles 4 et 30 du code de procédure civile dès lors qu’elles ne confèrent pas de droit spécifique à la partie qui en fait la demande. Elles ne feront alors pas l’objet d’une mention au dispositif.

Par ailleurs, Monsieur [R] [D] n’a jamais été cité à la procédure, ceci de telle sorte que les prétentions formées à son encontre sont irrecevables.

I. La demande de réception judiciaire

L’article 1792-6 alinéa 1er du code civil dispose que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

Il est constant que la réception judiciaire suppose de déterminer la date à laquelle l'ouvrage était en état d'être reçu (n°89-20.327).

En l’espèce, la société OHR et le maître d’ouvrage produisent respectivement en pièces n°1 et 18 un devis n°114 du 15 juin 2018 d’un montant total de 95 172,44 € ht soit 103 727,25 € ttc ayant pour objet la « rénovation du [Adresse 2] » visé et signé par les parties.

Ce socle contractuel constitue l’assiette des travaux sur laquelle les critères relatifs à la réception judiciaire doivent être appréciés.

a. La preuve

L’article 9 du code de procédure civile dispose qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

La preuve de faits peut résulter d'un rapport d'expertise non judiciaire, dès lors qu'il a été soumis à la libre discussion des parties et qu'il a été établi contradictoirement ou que, bien que non établi contradictoirement, il est complété par d'autres éléments de preuve (n°11-18.710).

En l’espèce, en sa qualité de locateur tenu d’une obligation de résultat quant à l’exécution des travaux prévus au devis et demandeur à la réception judiciaire de l’ouvrage, il pèse sur la société OHR de prouver que l’ouvrage était en état d’être reçu le 05 mars 2019.

Par ailleurs, au soutien de ses prétentions et notamment afin de démontrer que l’immeuble n’était pas en état d’être reçu, le maître d’ouvrage peut opposer les rapports d’expertise amiable réalisés à sa demande et contradictoirement produits aux débats s’ils sont corroborés par d’autres éléments tels que des procès-verbaux d’huissier de justice.

b. L’appréciation de l’état du bien

En l’espèce, il est notamment produit aux débats un procès-verbal de constat établi par Maître [E], huissier de justice, le 14 mai 2019.

Du constat d’huissier établi par Maître [E], il convient de retenir qu’il y a une fenêtre de marque Veka ; que les références « CSTB » et « 172-101 » sont visibles ; que l’armature de la fenêtre située dans le couloir séparant la salle de bain de la cuisine est inachevée et son alignement imparfait ; que la dépose d’une fenêtre révèle un support grossier comblé avec de la mousse ; que la chape présente des fissurations éparses et réagit au poids de corps ; qu’un sondage destruction en sa présence révèle que le béton d’une épaisseur de 2 cm repose directement sur les gaines ; qu’un sondage destruction a mis en évidence de la laine de verre au-dessus des collecteurs de vannes EC et EF ; que la trappe de visite du tablier de la baignoire est obstruée par le meuble installé ; que des prises électriques dans la salle de bain sont situées à proximité de la robinetterie ; qu’il y a une fissuration du carrelage dans la pièce principale ; et que dans la dernière pièce, il y a des bandes de béton visibles à l’état brut avec un trou, la chape étant friable et partant en poussière par un simple grattage manuel.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments appuyées par des photographies prises par l’huissier instrumentaire que l’ouvrage n’était pas en état d’être reçu, les prestations principales du devis susvisés portant sur les fenêtres, le sol et l’électricité n’étant manifestement pas achevées.
En conséquence, la société OHR est déboutée sa demande de prononcé de la réception judiciaire au 05 mars 2019 avec réserves.

Dès lors, la demande de condamnation du maître d’ouvrage à lui donner accès pour lever les réserves est sans objet.

II. Les demandes indemnitaires du maître d’ouvrage

A titre liminaire, il convient de rappeler que [S] [H] et [L] [V] qui ont contesté la demande au fin de prononcé d’une réception judiciaire de la société OHR, laquelle en a été déboutée, ne peuvent pas se prévaloir des dispositions légales des articles 1792 et suivants du code civil relatives à la garantie décennale des constructeurs, dont l’effectivité est conditionnée par la réception de l’ouvrage.

L’article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Les entrepreneurs sont tenus d'une obligation de résultat à l'égard du maître de l'ouvrage (n°08-14.714).

a. La matérialité des désordres et la réalité des manquements

En pages 35 à 55 de ses écritures, le maître d’ouvrage invoque cinq manquements correspondant au manquement à l’obligation de conseil du maître d’œuvre, le non-respect des délais d’exécution, la délivrance de fenêtres non-conformes, les désordres générés par la non-conformité des fenêtres et les autres désordres.

Le manquement à l’obligation de conseil du maître d’œuvre
En l’espèce, le maître d’ouvrage ne produit aucun contrat de maîtrise d’œuvre conclu avec la société OHR.

Par ailleurs, il ne peut pas se prévaloir d’un manquement de la société OHR lors des opérations de réception alors qu’il soutient et qu’il résulte des débats qu’il n’y a pas eu d’opération de réception.
En conséquence, les demandes indemnitaires ne peuvent pas prospérer sur ce fondement.

Le non-respect des délais d’exécution
L’article L216-1 du code de la consommation dispose que le professionnel livre le bien ou fournit le service à la date ou dans le délai indiqué au consommateur, conformément au 3° de l'article L. 111-1, sauf si les parties en ont convenu autrement. A défaut d'indication ou d'accord quant à la date de livraison ou d'exécution, le professionnel livre le bien ou exécute la prestation sans retard injustifié et au plus tard trente jours après la conclusion du contrat. La livraison s'entend du transfert au consommateur de la possession physique ou du contrôle du bien.

En l’espèce, le contrat conclu le 15 juin 2018 ne mentionne aucun délai d’achèvement des travaux.

A défaut de contractualisation du délai de quatre mois évoqué dans une missive du 26 septembre 2019, la société OHR était tenue d’exécuter les travaux dans le délai mensuel susvisé, soit au plus tard le 15 juillet 2018.

En application des dispositions de l’article 4 alinéa 1er du code de procédure civile, il convient de faire courir le retard à compter du terme du délai de quatre mois invoqué par le maître d’ouvrage, soit le 15 octobre 2018.

Le retard a cessé à la date du 08 mars 2019 à partir de laquelle le maître d’ouvrage a refusé l’accès au chantier à la société OHR.

En conséquence, la faute de la société OHR correspondant à un retard de 144 jours est caractérisé.

La délivrance de fenêtres non-conformes
En l’espèce, le devis n°114 du 15 juin 2018 stipule la livraison, la fourniture et la pose de neuf fenêtres aux caractéristiques spécifiées à l’exception de la marque.

Il est produit aux débats deux courriels écrits par le maître d’ouvrage le 4 et le 12 novembre 2018 rappelant qu’au cours d’une réunion de juin 2018, il avait été convenu de la fourniture de fenêtres de marque Atlantem.

Or, ces courriels sont postérieurs à l’installation effective des fenêtres de marque Veka le 10 octobre 2018 et aucun autre élément produit aux débats ne permet de démontrer que le marque Atlantem Am Pvc aurait été préalablement contractualisée.

Néanmoins, force est de constater qu’après les courriels susvisés et tel que le mentionne la société OHR dans sa missive du 25 septembre 2019, celle-ci a accepté de changer les huisseries pour installer des fenêtres Atlantem de gamme AM-PVC-82 et a produit à ce titre une facture n°227 au nom du maître d’ouvrage, d’un montant de 17 984,90 € ttc ayant pour objet neuf huisseries de cette marque modèle AM-PVC-82.

Il est également justifié d’un versement de 12 984,90 € en date du 21 décembre 2018 complétant un acompte de 5 000,00 € du 15 juin 2018 mentionné dans cette facture, ceci de telle sorte que la prestation a été intégralement réglée.

Par ailleurs, il est produit un courriel du 18 avril 2019 de Monsieur [F] [I], directeur industriel d’Atlantem, lequel confirme que les produits livrés sur le chantier ont été fabriqués par cette société en gamme PVC AM82 sous les numéros d’ARC 7791961 et 7806911.

Or, il convient de retenir des éléments produits aux débats que l’huissier instrumentaire a constaté sur les huisseries les mentions « 172-101 » qui indiquent qu’elles ont été fabriquées dans l’usine d’Eboué et CSTB indiquant qu’elles sont certifiées ; qu’il résulte des constatations de Maître [K] [P], huissier de justice, du 05 octobre 2020 et des travaux de Monsieur [W] que le CSTB n'a certifié l’usine d’Eboue pour réaliser des fenêtres AM-PVC-82 qu’à compter du 23 juillet 2019 ; qu’auparavant, cette usine était uniquement certifiée pour réaliser des modèles AM-PVC-70 ; qu’il résulte donc de ces éléments deux hypothèses, soit les modèles fournis sont en réalité de gamme AM-PVC-70 et ne sont pas conformes au contrat, soit ces modèles sont de gamme AM-PVC-82 et il y a une erreur sur l’identifiant du site de fabrication.

A ce titre, aucun manquement ne peut être imputé à la société OHR dans la mesure où le 14 mai 2019, date de la réunion organisée entre les parties notamment en présence de deux huissiers et du cabinet Ixi représentant l’assureur de cette dernière, le maître d’ouvrage a refusé l’accès aux locaux au technicien dépêché par la société Atlantem, lequel avait apporté des échantillons d’huisseries. Ceci d’autant plus que l’expert technique sollicité par le maître d’ouvrage n’a pas pris soin de mesurer les dimensions des fenêtres installées, ce qui aurait permis d’établir un comparatif avec celles des fenêtres AM-PVC-82 et ainsi de déterminer une non-conformité éventuelle.

En conséquence, les demandes indemnitaires ne peuvent pas prospérer sur ce fondement.

Les défauts de pose des fenêtres
En l’espèce, il résulte des constatations réalisées le 07 octobre 2019 et le 13 juillet 2020 par Maître [P], huissier de justice, qu’il y a de nombreux désordres relatifs à la pose des menuiseries et notamment des frottements entre les ouvrants et les dormants manifestés par des traces, des espaces, l’absence de pièce de finition, des défauts de planéité, des différentiels de hauteur des battants, des problèmes de dimensionnement des fenêtres dont le bâti rentre dans le mur, des fissures dans les murs depuis les fenêtres et la présence de trous sous les huisseries.

Il est également produit aux débats un rapport d’intervention n°22.INF.0058.P du 31 janvier 2022 de la société Airt Contrôle faisant état de multiples défauts d’étanchéité affectant les huisseries de la salle de bain, des WC et du salon ainsi que des points thermiques dans la cuisine.

Il ressort de ces éléments que la société OHR n’a pas posé les huisseries dans les règles de l’art et a ainsi failli à son obligation de résultat.

En conséquence, le manquement de la société OHR quant à la pose des huisseries est caractérisée.

Les autres désordres allégués
En l’espèce, il résulte des constatations réalisées le 07 octobre 2019 et le 13 juillet 2020 par Maître [P], huissier de justice, corroborant les constatations de Monsieur [M] [W] de la société Blackwood Concept du 05 mars 2019 suite à la visite du 25 février 2019 qu’il y a des défauts de reprises et de finitions, des défauts d’équerrage, une non-préparation des murs et l’absence d’isolation phonique par endroits, une non-conformité des menuiseries extérieures, l’absence de joints d’étanchéité, le dépassement de têtes de vis s’agissant des menuiseries intérieures, une implantation du réseau électrique dans les murs qui fait fi d’une logique de passage, l’absence de production d’un plan de passage des réseaux électriques, l’absence d’identification sur le tableau électrique, l’absence de vanne individuelle sur le réseau de plomberie, le non-respect de la séparation des fluides d’EC et EF, l’absence d’étanchéité de la chaudière, l’absence de note de calcul sur le dimensionnement des radiateurs et sur l’extraction de l’air, s’agissant du carrelage, une étanchéité partielle, la baignoire et la douche étant posées directement sur le sol, un défaut d’écoulement de l’eau, un défaut de planéité du faux-plafond, des gaines qui pendent du plafond, un défaut de correspondance des niveaux du sol des WC et de l’entrée, des traces d’usure prématurée de la porte d’accès au salon, des fissures dans le mur de la cuisine, une fuite au niveau du robinet du radiateur de la cuisine, l’absence d’interrupteur pour modifier la puissance de la VMC, un défaut affectant les câbles RJ45 qui réduit le débit distribué dans les différentes pièces, et l’absence de ponçage des supports préalablement aux travaux de peinture.

Dès lors, ces travaux étant en lien direct avec les prestations prévues dans le devis du 15 juin 2018, la faute de la société OHR eu égard à son obligation de résultat dans le respect des règles de l’art est caractérisée.

En revanche, le maître d’ouvrage ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une garantie de 5 ans de la chaudière et de l’obligation à laquelle la société OHR aurait été tenue s’agissant d’une quelconque déclaration.

Par ailleurs, en l’absence d’expertise judiciaire, les constatations faites par l’huissier de justice, professionnel assermenté mais dépourvu de qualification spécifique et technique en matière de construction, ne permettent pas de retenir les manquements aux réglementations techniques identifiées par Monsieur [W].

b. Les préjudices et les liens de causalité

Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] mentionnent dix postes de préjudice.

Les travaux de reprise des désordres et de mise en conformité
S’agissant du montant de 90 000,00 € ht évalué à « dire d’expert », le maître d’ouvrage ne produit aucun élément permettant de vérifier le contenu des prestations intégrées dans ce montant, ni leur pertinence par rapport aux désordres et manquements avérés.

Par ailleurs, le maître d’ouvrage produit aux débats trois devis pour un montant total de 124 821,27 € ht.

Le devis n°173/19 de la société SASU C.O.M du 1er avril 2019 de 90 192,00 € ht soit 99 211,20 € ttc stipule des prestations conformes aux prestations du devis du 15 juin 2018 et en adéquation avec les désordres susvisés. Il convient de le retenir à l’exception des postes suivants : les poses des meubles de la salle de bain pour 1 400,00 €ht, la pose d’une nouvelle chaudière pour 4 200,00 €, la pose de radiateurs pour 2 120,00 €, soit un total des travaux de reprise de 90 719,20 € ttc.

Eu égard aux développements précédents sur la conformité des fenêtres et en l’absence de preuve de l’impossibilité de les réutiliser, il convient d’écarter le devis de la société Artisan France Fenêtre [Localité 10] n°19/6/1247032 de 26 006,65 € ttc.

Quant au devis de la société Darty de 9 978,45 € ht, en l’absence d’expertise judiciaire, il n’est pas démontré que la cuisine dût être détruite pour réaliser les travaux de reprise.

En conséquence, l’assiette du préjudice matériel correspondant aux travaux de reprise est de 90 719,20 € ttc. Eu égard à la demande de 36 992,90 € ttc au titre des travaux exécutés et non réglés, l’entrepreneur reconnaît que 14 870,73 € ttc de travaux n’ont pas été exécutés, ceci de telle sorte qu’il convient de déduire ce montant du préjudice matériel, considérant que ces prestations non payées ne sont pas dues, lequel est alors de 75 848,47 € ttc.

La surfacturation
En l’espèce, le maître d’ouvrage énumère dans ses écritures des éléments supplémentaires qu’il estime ne pas être conforme aux prestations réglées.

Or, force est de constater le maître d’ouvrage, en page n°35 de ses écritures se fonde sur une facture qu’il produit en pièce n°37 laquelle n’intègre pas les postes qu’il énumère au titre de la surfacturation.

En conséquence, le maître d’ouvrage est débouté de la prétention formée au titre de la surfacturation.

La faïence
En l’espèce, le maître d’ouvrage ne produit aucun élément de preuve qui permettrait de démontrer que le locateur a soustrait la faïence lui appartenant et entreposée dans les locaux.

En conséquence, le maître d’ouvrage est débouté de la prétention formée au titre de la faïence.

Le préjudice financier correspondant au double loyer
Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] invoquent la nécessité de louer un autre logement entre le 1er novembre 2018 et le 30 novembre 2019.

En l’espèce, le maître d’ouvrage produit des quittances de loyer pour un logement situé [Adresse 6] du 1er janvier 2019 au 30 novembre 2019 pour un montant mensuel de 1 470,00 € dont 70,00 € de charges.

A défaut de preuve de la date d’entrée dans les lieux, il convient de retenir le préjudice au titre de la double location à compter du 1er janvier 2019, date postérieure au terme légal des travaux, jusqu’au 30 novembre 2019.

11 x 1 400,00 = 15 400

Le préjudice financier pour dédoublement des charges de logement est de 15 400,00 €.

Le préjudice correspondant à la perte de valeur bien
En l’espèce, Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] ne peuvent pas solliciter un préjudice correspondant au coût des travaux de reprise et un préjudice correspondant à la perte de valeur en raison de l’état du logement du fait des désordres sans porter atteinte au principe de réparation intégral.

Ceux-ci ayant obtenu précédemment, un montant relatif au coût des travaux de reprise, ils ont la possibilité d’affecter ces sommes à la reprise de l’appartement pour qu’il soit dans un état correct sans dévalorisation par rapport au marché.

Les frais relatifs aux opérations d’expertise technique
En l’espèce, il est produit aux débats deux factures de la société Blackwood Concept n°2019-013 de 1 752,00 € ttc et n°2019-013 complémentaire de 2 472,00 € ttc. Ces travaux ayant été utiles à la compréhension du litige, il convient de faire droit à la demande en paiement de 4 224,00 €.

En revanche, les frais de conseil et les frais d’huissier seront intégrés dans le poste relevant des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le préjudice pour trouble de jouissance
Le maître d’ouvrage indique qu’il a emménagé dans les lieux et a réalisé les travaux minimums pour pouvoir y vivre, trois pièces demeurant inhabitables pour un total de 45,15m², soit 56,43 % de la surface du bien.

En l’espèce, l’estimation par la société La Tour produite en pièce n°40 de 2 300,00 € par mois ne mentionne aucun terme de comparaison, ceci de telle sorte que sa pertinence est relative. Néanmoins, il résulte des constatations faites par huissier de justice que les locaux demeurent dans un état qui ne permet pas leur jouissance intégrale. Il convient de fixer le préjudice de jouissance à 600,00 € par mois depuis le 1er décembre 2019 et jusqu’à la date du jugement le 19 mars 2024.

600 x 51 + 600/30x19 = 30 980,00

Ainsi, le préjudice de jouissance est fixé à 30 980,00 € du 1er décembre 2019 au 19 mars 2024. Le maître d’ouvrage est débouté de la demande en condamnation au titre de la période postérieure au jugement et jusqu’à la réalisation effective des travaux, l’exécution de ceux-ci dépendant de sa seule volonté.

Le trouble de jouissance au cours des travaux de reprise
En l’espèce, en l’absence de rapport d’expertise judiciaire, aucun élément ne permet de démontrer que les travaux de reprise ne peuvent pas avoir lieu en site occupé.

Par ailleurs, aucun élément ne permet de démontrer que de tels travaux auront une durée de quatre mois.

Enfin, aucun élément ne permet de justifier d’un coût de 1 000,00 € pour les frais d’agence et de 3 000,00 € de garde-meubles.

En conséquence, le maître d’ouvrage est débouté de ce chef.

La perte de chance de bénéficier d’un avantage fiscal
En l’espèce, il n’est produit aucun élément aux débats qui permettrait d’établir que l’installation de la chaudière stipulée dans le devis du 15 juin 2018 était susceptible de donner lieu à un avantage fiscal ni que ce dernier ait été contractualisé.

Par ailleurs, aucun document ne permet de déterminer le montant dudit avantage fiscal dans l’hypothèse ou son principe serait établi.

En conséquence, le maître d’ouvrage est débouté de ce chef.

Le préjudice moral
En l’espèce, il résulte des débats que la société OHR a manqué de professionnalisme et n’a pas respecté ses obligations d’information et de conseil que ce soit sur la durée prévisible des travaux et le suivi de ceux-ci.

Par ailleurs, les travaux qu'elle a exécutés sont affectés de désordres.

Le préjudice moral distinct du trouble de jouissance est caractérisé par l’anxiété liée aux très fortes sommes engagées dans un projet de vie correspondant à l’aménagement d’un foyer familial, la vision quotidienne d’un chantier inachevé cumulant les désordres, l’insécurité quant à la faculté de récupérer les sommes engagées ou d’obtenir le résultat prévu au contrat, le sentiment d’abandon de la part du cocontractant défaillant et la conscience de l’aléa judiciaire quant à la possibilité d’obtenir gain de cause.

En conséquence, il convient de fixer le préjudice moral à 12 000,00 €.

L’atteinte au droit à l’image
L’article 544 du code civil dispose que la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

En l’espèce, il résulte des constatations de Maître [P], huissier de justice, en date du 05 octobre 2022, que la société Valeur d’Home Rénovation a utilisé des clichés photographiques pris dans le logement du maître d’ouvrage.

Ces clichés étant exploités par la société VHR, la société OHR ne peut pas être condamnée à ce titre.

En conséquence, le maître d’ouvrage est débouté de ce chef.

*

En conséquence, l’ensemble de ces préjudices étant en lien avec les manquements susvisés de la société OHR, celle-ci sera condamnée à payer à Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] les sommes suivantes :
75 848,47 € ttc au titre du préjudice correspondant au coût des travaux de reprise,15 400,00 € au titre du préjudice financier pour dédoublement des charges de logement,4 224,00 € au titre du préjudice correspondant au coût d’intervention de la société Blackwood,30 980,00 € au titre du préjudice pour trouble de jouissance du 1er décembre 2019 au 19 mars 2024,12 000,00 € au titre du préjudice moral.
c. Les assureurs

L’article L124-3 du code des assurances dispose que le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

Groupama
En l’espèce, il est produit aux débats les conditions générales et particulières de la police n°CRCD01-018633 qui intègrent une responsabilité civile décennale et ses régimes connexes inapplicables en l’absence de désordre de nature décennale ainsi qu’une responsabilité civile avant et après réception. En l’absence de réception, il convient de déterminer si la responsabilité civile avant réception est susceptible de s’appliquer.

D’une part, l’article 3.1 Responsabilité civile générale avant et/ou après réception des travaux stipule dans le §3.1.1 que l’assureur assure […] à raison des préjudices ne consistant pas en des […] dommages matériels intermédiaires, dommages matériels ou immatériels […] causés par ses travaux de construction ».

D’autre part, l’article 3.1.3.15 stipule au titre des exclusions « les dommages affectant les travaux de l’assuré, réalisés en propre ou donnés en sous-traitance ».

En conséquence, [S] [H] et [L] [V] sont déboutés des prétentions formées contre la société Groupama.

La société Mic Insurance
En l’espèce, il est produit aux débats les conditions particulières et générales de la police n°67201 prenant effet le 1er avril 2019.

L’article 4.3 des conditions générales stipule au titre des exclusions de garantie « tout fait dommageable dont l’assuré avait connaissance ou qu’il ne pouvait ignorer à la date de souscription du contrat ».

A ce titre, le contrat a été signé le 29 mars 2019, soit 23 jours après la convocation du 06 mars 2019 à une expertise contradictoire, 21 jours après la plainte déposée le 08 mars 2019 par Monsieur [H] dénonçant des injures et des menaces et faisant état d’un abandon de chantier à la suite de la réunion ayant eu lieu le jour-même et 18 jours après la missive du 11 mars par laquelle la société Blackwood Concept a notifié son rapport suite à la visite du 25 février 2019.

Ainsi, la société OHR n’ignorait pas, à la date de la signature de la police, l’existence d’un fait dommageable.

En conséquence, [S] [H] et [L] [V] sont déboutés des prétentions formées contre la société Mic Insurance.
III. Le paiement du solde du marché

L’article 1221 du code civil dispose que le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s'il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour le créancier.

En l’espèce, il est produit à l’instance un devis du 15 juin 2018 d’un montant de 103 727,25 € visé et signé par les parties.

Il ressort des débats que le maître d’ouvrage a réglé 31 118,17 € le 28 juin 2018 et 20 745,45 € le 17 octobre 2018.

103 727,25 - 31 118,17 - 20 745,45 = 51 863,63

Il demeure donc un montant à régler de 51 863,63 €.

Il convient de rappeler que la société OHR plafonne sa demande au montant de 36 992,90 € ttc.

Le maître d’ouvrage ne peut pas résister à cette prétention en opposant l’exception d’inexécution alors qu’il bénéficie d’ores et déjà d’une condamnation de la société OHR à l’indemniser des préjudices subis au titre de sa responsabilité contractuelle.

Conformément aux principes de la force obligatoire des conventions et de réparation intégrale, il convient de condamner le maître d’ouvrage à payer 36 992,90 € à la société OHR au titre du solde du prix.

IV. Les demandes indemnitaires de la société OHR

L’article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

S’agissant du matériel que la société OHR n’aurait jamais pu récupérer sur le chantier, le principe et l’évaluation du préjudice ne sont pas caractérisés, ceci de telle sorte qu’elle est déboutée de sa demande.

Décision du 19 mars 2024
6ème chambre 1ère section
N° RG 19/13781 -
N° Portalis 352J-W-B7D-CRGJJ

S’agissant du préjudice d’image et de réputation, il résulte des développements précédents que la société OHR a exécuté des prestations de piètres qualité en s’affranchissant des règles de l’art. Elle est donc déboutée de la demande indemnitaire formée à ce titre.

S’agissant du préjudice correspondant à la perte de chance d’intervenir sur d’autres chantier, la société OHR ne rapporte pas la preuve d’une telle faculté, celle-ci ayant concouru à la réalisation de son préjudice en manquant à ses obligations. Elle est donc déboutée de la demande indemnitaire formée à ce titre.

S’agissant de la résistance abusive, celle-ci n’est pas caractérisée dans la mesure où c’est à bon droit que le maître d’ouvrage a mis fin au chantier constatant les nombreux désordres évoqués précédemment. La société OHR est donc déboutée de la demande indemnitaire formée à ce titre.

V. Les décisions de fin de jugement

a. Les intérêts et la compensation

Les intérêts sur les sommes dues, ne courent qu’à compter du présent jugement, qui seul détermine le principe et le montant de la créance.

En application des dispositions des articles 1347 et 1348 du code civil, la compensation des créances réciproques est ordonnée jusqu’à l’extinction de la plus faible.

b. Les dépens

L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

La société OHR succombe et est condamnée aux dépens.

Le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile est accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

c. Les frais irrépétibles

L’article 700 1° du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
La société OHR succombe et est condamnée aux dépens.

L’équité commande de condamner la société OHR à payer 9 000,00 € à Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V], cette somme intégrant les frais de constat d’huissier et d’avocat au cours de la phase d’expertise technique, et 3 000,00 € à la société Mic Insurance au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Groupama qui forme exclusivement sa demande au titre des frais irrépétibles contre Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V], qui ne succombent pas et ne sont pas condamnés aux dépens, en est déboutée.

d. L’exécution provisoire

En application des dispositions de l’article 515 ancien du code de procédure civile l’exécution provisoire est opportune en raison de l’ancienneté du litige et sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire statuant après débat en audience publique par jugement contradictoire en premier ressort et mis à disposition au greffe,

DECLARE IRRECEVABLES les demandes formées contre Monsieur [R] [D] ;

DÉBOUTE la société Optim’Home Rénovation de sa demande tendant à voir prononcer la réception judiciaire de l’ouvrage ;

DÉBOUTE la société Optim’Home Rénovation et Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] de l’ensemble des prétentions formées contre les sociétés Caisse Régionale d’Assurances Mutuelles Agricoles de Rhône-Alpes Auvergne et Mic Insurance ;

CONDAMNE la société Optim’Home Rénovation à payer à Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] les sommes suivantes :
75 848,47 € ttc au titre du préjudice correspondant au coût des travaux de reprise,15 400,00 € au titre du préjudice financier pour dédoublement des charges de logement,4 224,00 € au titre du préjudice correspondant au coût d’intervention de la société Blackwood,30 980,00 € au titre du préjudice pour trouble de jouissance du 1er décembre 2019 au 19 mars 2024,12 000,00 € au titre du préjudice moral ;
DÉBOUTE Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] du surplus de leurs demandes indemnitaires ;

CONDAMNE Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] à payer 36 992,90 € à la société Optim’Home Rénovation au titre du solde du prix ;

DÉBOUTE la société Optim’Home Rénovation de toutes ses autres prétentions ;

DIT que les sommes précitées porteront intérêt au taux légal à compter du jugement ;

ORDONNE la compensation des créances réciproques ;

CONDAMNE la société Optim’Home Rénovation aux dépens ;

CONDAMNE la société Optim’Home Rénovation à payer 9 000,00 € à Monsieur [S] [H] et Madame [L] [V] et 3 000,00 € à la société Mic Insurance au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la société Caisse Régionale d’Assurances Mutuelles Agricoles de Rhône-Alpes Auvergne de la demande formée au titre des frais irrépétibles ;
ADMET les avocats qui en ont fait la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire du jugement ;

Fait et jugé à Paris le 19 mars 2024

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 6ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 19/13781
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;19.13781 ?
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