TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Mme [F]
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me SIGLER
Pôle civil de proximité
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PCP JCP ACR référé
N° RG 23/06870 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2UFG
N° MINUTE : 24/
ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 15 mars 2024
DEMANDERESSE
Société CDC HABITAT,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Lauren SIGLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #L0007
DÉFENDERESSE
Madame [U] [F],
demeurant [Adresse 2]
comparante en personne
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Morgane JUMEL, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Sanaâ AOURIK, Greffière lors des débats et de Alexis QUENEHEN, Greffier lors du délibéré
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 18 décembre 2023
ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 15 mars 2024 par Morgane JUMEL, Vice-présidente, assistée de Sanaâ AOURIK, Greffière lors des débats et de Alexis QUENEHEN, Greffier lors du délibéré
Décision du 15 mars 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/06870 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2UFG
EXPOSE DU LITIGE
Par acte d’huissier du 8 août 2023, la société CDC HABITAT a fait assigner Madame [F] [U] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PARIS, statuant en référé, afin notamment que celui-ci:
- constate l’acquisition de la clause résolutoire prévue à l’engagement de location portant sur le logement ;
- ordonne l’expulsion de Madame [F] [U] ainsi que de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique si necessaire, ce jusqu’au jour de complète liberation des lieux caractérisée par la remise des clés ;
- ordonne l’enlèvement et le dépôt des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux loués en un lieu approprié aux frais, risques et périls du défendeur ;
- condamne Madame [F] [U] à lui payer la somme de 2.179,25 euros avec intérêts de droit à compter du 31 mars 2023 à hauteur de 870,41 euros et à compter de l’assignation pour le surplus, outre le paiement des loyers impayés venus à échéance au jour du jugement à intervenir, et ce avec intérêts de droit à compter de la présente instance;
- condamne Madame [F] [U] à lui payer une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer courant outre les charges et révisable selon les dispositions contractuelles, à compter de l’acquisition de la clause résolutoire et jusqu’à parfaite liberation des lieux ;
- condamne Madame [F] [U] au versement d’une somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
A l’audience, la société CDC HABITAT, représentée par son avocat, a actualisé sa demande en paiement à la somme de 4.796,93 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 15 décembre 2023. Pour le surplus, elle a sollicité le bénéfice de son exploit introductif d’instance. La société CDC HABITAT s’est opposée à l’octroi de délais de paiement suspendant la clause résolutoire au regard de l’ancienneté de la dette locative.
Madame [F] [U] a insisté sur sa bonne foi. Elle a fait état de problèmes de santé ayant entraîné des difficultés financières. Elle s’est engagée à reprendre le versement du loyer en proposant d’effectuer un versement de 1.000 euros avant le 22 décembre 2022. Elle a sollicité pour finir des délais de paiement suspensifs de l’acquisition de la clause résolutoire en proposant de s’acquitter du solde de sa dette par des versements de 250 euros en sus du loyer courant.
Par note en délibéré dûment autorisée, la société CDC HABITAT a indiqué que la défenderesse n’avait pas respecté l’engagement de règlement pris lors de l’audience du 18 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Vu la loi du 6 juillet 1989, et notamment les articles 7 et 24,
Vu le contrat de bail conclu le 21 novembre 2022, portant sur le logement situé [Adresse 2],
Vu le commandement de payer en date du 31 mars 2023 portant sur une somme en principal de 870,41 euros,
Vu la saisine CCAPEX en date du 4 avril 2023,
Vu la notification de l’assignation au Préfet le 9 août 2023,
En application de l’article 834 du code de procédure civile, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire peut, dans tous les cas d’urgence et dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Sur la demande d’expulsion :
L'article 24 I de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 dans sa version en vigueur depuis le 29 juillet 2023 prévoit que :
« I. - Tout contrat de bail d'habitation contient une clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie. Cette clause ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux.
Le commandement de payer contient, à peine de nullité :
1° La mention que le locataire dispose d'un délai de six semaines pour payer sa dette ;
2° Le montant mensuel du loyer et des charges ;
3° Le décompte de la dette ;
4° L'avertissement qu'à défaut de paiement ou d'avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s'expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d'expulsion ;
5° La mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département, dont l'adresse est précisée, aux fins de solliciter une aide financière ;
6° La mention de la possibilité pour le locataire de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil.
Lorsque les obligations résultant d'un contrat de location conclu en application du présent titre sont garanties par un cautionnement, le commandement de payer est signifié à la caution dans un délai de quinze jours à compter de sa signification au locataire. A défaut, la caution ne peut être tenue au paiement des pénalités ou des intérêts de retard.
Lorsque le locataire est en situation d'impayé de loyer ou de charges locatives sans interruption depuis une durée de deux mois ou lorsque la dette de loyer ou de charges locatives du locataire est équivalente à deux fois le montant du loyer mensuel hors charges locatives, les commandements de payer, délivrés pour le compte d'un bailleur personne physique ou société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus, sont signalés par le commissaire de justice à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives prévue à l'article 7-2 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée. Lors de ce signalement, le commissaire de justice précise les coordonnées téléphoniques et électroniques et la situation socioéconomique des occupants au vu des informations en sa connaissance. Le signalement s'effectue par voie électronique par l'intermédiaire du système d'information prévu au dernier alinéa du même article 7-2.
Le représentant de l'Etat dans le département saisit l'organisme compétent désigné par le plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l'offre globale de services d'accompagnement vers et dans le logement prévue à l'article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée, afin qu'il réalise un diagnostic social et financier pour les locataires ainsi signalés par le commissaire de justice. Le diagnostic est transmis par l'opérateur à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives prévue à l'article 7-2 de la même loi avant l'expiration du délai mentionné au III du présent article. »
L’article 24 V indique pour sa part :
« Le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation. »
L’article 24 VII précise :
« Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais accordés par le juge dans les conditions prévues aux V et VI du présent article. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet. »
En l’espèce, le bail conclu entre les parties contient une clause résolutoire et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 31 mars 2023, pour la somme en principal de 870,41 euros, en mentionnant que cette somme doit être réglée dans un délai de deux mois. Ce commandement est demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail étaient réunies à la date du 31 mai 2023.
L’examen du décompte locatif laisse apparaître que le loyer courant n’est pas réglé depuis de nombreux mois.
Madame [F] [U], qui n’a pas repris le paiement du loyer courant, ne justifie pas disposer des moyens financiers suffisants pour lui permettre de s'acquitter du paiement du loyer courant ainsi que du solde de sa dette dans les délais impartis par la loi. Il n’y a donc lieu de lui accorder ni de délais de paiement, ni de délais suspensifs des effets de la clause résolutoire.
Il convient en conséquence d’autoriser l’expulsion de Madame [F] [U].
Aucun élément du dossier ne justifie de supprimer le délai prévu par l'article L. 433-1 du Code des procédures civiles d'exécution.
Jusqu’à la complète libération des lieux par le locataire, il est légitime, faute pour le bailleur de justifier d’un préjudice plus important que celui résultant de la seule perte du montant des loyers et charges, de fixer une indemnité d’occupation égale au montant du loyer actuel et des charges à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la complète libération des lieux, avec revalorisation de droit telle que prévue au contrat de bail.
Sur la demande en paiement de la dette de loyer :
L’examen du décompte locatif laisse apparaître que Madame [F] [U] reste redevable de la somme de 4.796,93 euros au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation impayés au 15 décembre 2023.
Dès lors, Madame [F] [U] sera condamnée au paiement de la somme de 4.796,93 euros, à titre provisionnel, augmentée des intérêts au taux légal tel que précisé au dispositif.
Sur les frais et dépens :
L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile. La demande formulée de ce chef sera rejetée.
Madame [F] [U], partie perdante, sera condamnée aux dépens tels que définis par l'article 695 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Nous, juge des contentieux de la protection, statuant en matière de référé, par ordonnance contradictoire, en premier ressort, et par mise à disposition au greffe,
CONSTATONS que la clause résolutoire prévue au contrat de bail conclu le 21 novembre 2022, portant sur le logement situé [Adresse 2], est acquise par la société CDC HABITAT depuis le 31 mai 2023 ;
ORDONNONS, faute de départ volontaire de Madame [F] [U], son expulsion, ainsi que celle de tout occupant de son chef, avec au besoin le concours de la force publique conformément aux dispositions des articles L.153-1 et L.153-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
RAPPELONS que l’expulsion ne pourra être mise en œuvre qu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant le commandement d’avoir à quitter les lieux et dans les conditions prévues aux articles L.412-1 et L.412-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
RAPPELONS, s’agissant des meubles et objets mobiliers laissés dans les lieux, qu’il devra être procédé conformément aux dispositions de l'article L.433-1 du code des procédures civiles d'exécution;
CONDAMNONS Madame [F] [U] au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle égale au montant des loyers actuels et des charges à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la complète libération des lieux, avec revalorisation de droit telle que prévue au contrat de location susvisé ;
CONDAMNONS Madame [F] [U] à payer à la société CDC HABITAT la somme de 4.796,93 euros, à titre provisionnel, au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation au 15 décembre 2023, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
REJETONS la demande de délais présentée par Madame [F] [U] ;
RENVOYONS les parties à mieux se pourvoir pour le surplus de leurs demandes ;
DISONS n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNONS Madame [F] [U] aux entiers dépens, tels que définis par l'article 695 du Code de procédure civile ;
RAPPELONS que la présente décision est exécutoire de plein droit ;
AINSI jugé et mis à la disposition des parties les jour, mois et an précités.
LE GREFFIER LE PRESIDENT