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15/03/2024 | FRANCE | N°22/01965

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jtj proxi fond, 15 mars 2024, 22/01965


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :


Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité


PCP JTJ proxi fond

N° RG 22/01965 - N° Portalis 352J-W-B7G-CWSHS

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le vendredi 15 mars 2024


DEMANDERESSE
Madame [S] [T], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Louis ROBATEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #A0574


DÉFENDERESSE
Société GLAD, dont le siège social est sis [Adre

sse 1]
représentée par Me Hannah-annie MARCIANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0273



COMPOSITION DU TRIBUNAL
Frédéric GICQUEL, Juge, statuant en juge unique
assisté de...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi fond

N° RG 22/01965 - N° Portalis 352J-W-B7G-CWSHS

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le vendredi 15 mars 2024

DEMANDERESSE
Madame [S] [T], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Louis ROBATEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #A0574

DÉFENDERESSE
Société GLAD, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Hannah-annie MARCIANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0273

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Frédéric GICQUEL, Juge, statuant en juge unique
assisté de Laura DEMMER, Greffière lors de l’audience, et de Antonio FILARETO, Greffier lors du prononcé

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 17 mai 2023, délibéré au 5 septembre 2023, prorogé au 15 mars 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 15 mars 2024 par Frédéric GICQUEL, Juge assisté de Antonio FILARETO, Greffier

Décision du 15 mars 2024
PCP JTJ proxi fond - N° RG 22/01965 - N° Portalis 352J-W-B7G-CWSHS

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant devis accepté le 17 juin 2019, Madame [S] [T] a conclu avec la société GLAD un contrat de maîtrise d'œuvre ayant pour objet la réhabilitation et la rénovation de son appartement. Un acompte en règlement de 3 000euros a été versé.

Le 10 septembre 2019, la société GLAD a communiqué au maître d'ouvrage deux propositions de marché de travaux pour des montants de 132 517 euros et de 157 797,47 euros puis le 17 septembre suivant une dernière proposition pour la somme de 82 524,20 euros.

Par courrier du 5 octobre 2019, Madame [S] [T] a indiqué à la société GLAD qu'elle n'entendait plus faire appel à ses services, au motif que son contractant n'avait pas tenu compte du nécessaire respect du budget de travaux de 70 000 euros, ni de sa demande portant sur le réaménagement des combles.

Alors que Madame [S] [T] proposait la conservation par son contractant de la somme de 1 000 euros et la restitution à son profit de la somme de 2 000euros, la société GLAD a par courrier du 15 octobre 2019 sollicité le paiement du solde de sa facture pour les phases 1 et 2 à hauteur de 1 500 euros.

Par acte d'huissier du 21 décembre 2020, Madame [S] [T] a fait assigner la société GLAD devant le pôle civil de proximité du tribunal judiciaire de Paris en paiement, sur le fondement de l'inexécution par le prestataire de son devoir de conseil et de l'article L.111-1 du code de la consommation, à lui payer les sommes suivantes :
- 3 000 euros en réparation de l'inexécution contractuelle,
- 1 200 euros à titre de résistance abusive,
- 1 200 euros à titre de préjudice moral,
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

L'affaire a fait l'objet d'une décision de caducité le 5 juillet 2021 dont Madame [S] [T] a été relevée par ordonnance du 30 novembre 2021, puis a été retenue à l'audience du 5 septembre 2022.

À la demande de la société GLAD le tribunal a par jugement du 27 octobre 2022 ordonné la réouverture des débats.

À l'audience du 17 mai 2023 à laquelle l'affaire a été retenue, Madame [S] [T], représentée par son conseil, a poursuivi la condamnation de la société GLAD à lui payer les sommes suivantes :
- 3 000 euros en réparation de l'inexécution contractuelle,
- 2 000 euros à titre de résistance abusive,
- 2 000 euros à titre de préjudice moral,
- 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société GLAD, représentée par son conseil, a conclu au débouté des demandes de Madame [S] [T] et à titre reconventionnel à sa condamnation à lui payer :
- 3 000 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2019 correspondant au solde des sommes dues au titre des phases 1 et 2,
- 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation des préjudices moral, matériel et financier subi du fait des agissements et accusations mensongères de Madame [S] [T],
- 3 000 euros HT au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à l'assignation et aux conclusions visées à l'audience pour l'exposé des moyens des parties à l'appui de leurs prétentions.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 5 septembre 2023 puis a été prorogée à plusieurs reprises pour être définitive prononcée ce jour.

MOTIFS

Sur l'inexécution contractuelle et la demande reconventionnelle en paiement

L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, tandis que l'article 1106 alinéa 1er du code civil précise que le contrat synallagmatique lorsque les contractants s'obligent réciproquement les uns envers les autres.

Aux termes de l'article 1710 du code civil le louage d'ouvrage est un contrat par lequel l'une des parties s'engage à faire quelque chose pour l'autre moyennant un prix convenu entre elles.

L'obligation principale du client dans un contrat de prestation de services est de rémunérer le prestataire en contrepartie de son travail.

Par ailleurs, l'article 1217 du code civil dispose que la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation, poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation, provoquer la résolution du contrat, demander réparation des conséquences de l'inexécution. Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées, des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.

L'article 1231-1 du même code ajoute que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Celui qui agit en responsabilité contractuelle contre son cocontractant doit démontrer l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre le manquement contractuel et le dommage allégué.

Il appartient au professionnel, tenu d'un devoir de conseil auprès de son client profane, de rapporter la preuve de ce qu'il a rempli son obligation. Particulièrement concernant les maîtres d'œuvre, ceux-ci sont tenus informer complètement leurs clients sur les conditions de faisabilité de leur projet et de son adéquation ou de son inadéquation au budget prévisionnel.

En l'espèce, il est constant que les parties ont signé le 17 juin 2019 un contrat de mission de maîtrise d'œuvre d'exécution confiée à la société GLAD par Madame [S] [T] pour des travaux de réhabilitation et de rénovation d'un appartement situé [Adresse 2] à [Localité 3] distinguant trois phases :
- phase interfaces avec les travaux de renforts du plancher moyennant un forfait de 1 500 euros hors-taxes,
- phase études au titre de la consultation des entreprises avec appel d'offres, analyse et assistance à la passation des marchés moyennant un honoraire de 3 500 euros hors-taxes,
- phase travaux avec VISA/Direction exécution des travaux, assistance aux opérations de réception et décompte général définitif est facturé sur la base de 10 % du montant hors taxes des travaux.

Il est stipulé que les honoraires des phases 1 et 2 du contrat sont indépendants des honoraires de la phase travaux et que pour les deux premières phases, un acompte de 50 % sera versé par Madame [S] [T] à la signature du contrat.

Nonobstant ces stipulations contractuelles, il n'est pas contesté qu'à la signature du contrat, un acompte de 3 000 euros a été versé par le maître d'ouvrage.

Il n'est pas plus discuté que la phase 3 (travaux), contractuellement indépendante des deux premières, n'a pas été exécutée, les deux devis proposés par le maître d'œuvre GLAD en août 2019 n'ayant pas été acceptés par le maître d'ouvrage.

Le litige porte exclusivement sur l'exécution des phases 1 et 2.

En droit, au titre de son devoir de conseil et d'information, le maître d'œuvre doit vérifier l'adéquation du projet à l'enveloppe budgétaire dont dispose le maître d'ouvrage, le projet devant ensuite se conformer à l'objectif budgétaire défini.

La compatibilité du projet proposé passe par la connaissance du cadre budgétaire de sa mission, condition même de la faisabilité même du projet. En effet la faisabilité financière d'un projet de construction est pour un maître d'œuvre une caractéristique du service au sens des dispositions de l'article L.111-1 du code de la consommation.

En l'espèce, le contrat ne fait aucune mention du budget et le maître d'œuvre a établi un projet de rénovation sans avoir invité le maître d'ouvrage à lui préciser le budget qu'il entendait consacrer à l'opération.

En sa qualité de professionnel tenu d'un devoir de conseil, il appartient au maître d'œuvre de se renseigner sur le budget du maître d'ouvrage. Il ne peut justifier de l'absence d'accord entre les parties quant à l'adéquation des travaux proposés au budget du maître d'ouvrage en faisant valoir que le maître d'ouvrage n'a pas exprimé sa capacité en termes de budget.

Faute de s'être renseigné, le maître d'œuvre GLAD n'a proposé que des devis inadaptés, le premier devis de travaux s'élevant à 132 517 euros TTC et le second à 157 797 euros TTC, soit des prestations de travaux d'un montant de 2 000 euros TTC par m² (appartement de 59 m²) pour le devis le moins onéreux, puis au vu des réclamations du maître d'ouvrage un dernier devis d'un montant de 82 524,20 euros TTC n'intégrant pas l'ensemble des travaux prévus, notamment ceux concernant la cuisine et la de bains.

Cette absence d'adéquation du projet par la méconnaissance fautive du coût d'objectif défini par le maître de l'ouvrage, constitue un manquement contractuel la résolution du contrat à ses torts.

Cependant, cette inexécution n'a que partiellement affecté l'accomplissement par le maître d'œuvre des obligations souscrites au titre de la phase 2 dite d'étude.

Il ressort en effet des débats que dans la cadre de cette phase d'étude, la société GLAD a visité à plusieurs reprises les lieux, en a réalisé les plans et a établi le descriptif qualitatif et d'identification des lots ainsi que le tableau général des surfaces, qu'elle a adressé à Madame [S] [T] le 4 août 2019.

Madame [S] [T] ne conteste pas que ces prestations ont été exécutées, ainsi qu'il ressort de son mail du 5 octobre 2019 à la société GLAD.

Le coût d'exécution de cette prestation sera retenu pour un montant de 1 200 euros.

Dès lors, en l'état d'une phase 1 qui n'a pas été réalisée et d'une phase 2 partiellement inexécutée, il conviendra de condamner la société GLAD à restituer à Madame [S] [T] la somme de 1 800 euros, étant rappelé que l'acompte versé à la signature du contrat s'est élevé à 3 000 euros.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Le préjudice moral invoqué par Madame [S] [T] n'est pas établi.

De même, ni le fait générateur au soutien de la demande au titre d'une résistance abusive ni le préjudice n'étant établis, la demande complémentaire de dommages et intérêts sera rejetée.

La société GLAD qui allègue des préjudices moral, matériel et financier mais sans les établir sera également déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

La société GLAD, partie perdante pour l'essentiel, sera condamnée aux dépens de l'instance conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Ni l'équité ni la situation économique des parties ne justifie d'écarter l'application des dispositions de l'article 700 du code de Procédure Civile et la société GLAD sera condamnée à payer à Madame [S] [T] la somme de 1200 euros à ce titre.

Il est rappelé que le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE la société GLAD à payer à Madame [S] [T] la somme de 1 800 euros au titre de l'inexécution contractuelle,

DÉBOUTE les parties de toute autre demande, comme infondée ou contraire,

CONDAMNE la société GLAD à payer à Madame [S] [T] la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société GLAD aux dépens de l'instance,

RAPPELLE que le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire de droit.

Fait et jugé à Paris le 15 mars 2024

LE GREFFIER,LE JUGE,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jtj proxi fond
Numéro d'arrêt : 22/01965
Date de la décision : 15/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-15;22.01965 ?
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