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15/03/2024 | FRANCE | N°21/04294

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/2 nationalité b, 15 mars 2024, 21/04294


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/2 nationalité B

N° RG 21/04294 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUB27

N° PARQUET : 21-226

N° MINUTE :


Assignation du :
27 Décembre 2019

A.F.P.


[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :








JUGEMENT
rendu le 15 Mars 2024

DEMANDERESSE

Madame [W] [O]
[Adresse 2]
[Localité 8]
NEVADA [Localité 8] (ETATS UNIS)
représentée par Me Stéphanie CALVO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire

#A0599


DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 10]
[Localité 1]

Sophie Bourla Ohnona, vice-procureure






Décision du 15/03/2024
Chambre du contentie...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/2 nationalité B

N° RG 21/04294 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUB27

N° PARQUET : 21-226

N° MINUTE :

Assignation du :
27 Décembre 2019

A.F.P.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 15 Mars 2024

DEMANDERESSE

Madame [W] [O]
[Adresse 2]
[Localité 8]
NEVADA [Localité 8] (ETATS UNIS)
représentée par Me Stéphanie CALVO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #A0599

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 10]
[Localité 1]

Sophie Bourla Ohnona, vice-procureure

Décision du 15/03/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 21/04294

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Manon Allain, Greffière.

DEBATS

A l’audience du 26 Janvier 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Contradictoire,
En premier ressort,
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente et par Manon Allain, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 27 décembre 2019 au procureur de la République par Mme [U] [T] et M. [A] [O] en qualité de représentants légaux de leurs enfants [W] [O] et [V] [O] ;

Vu les conclusions de reprise d'instance de Mme [W] [O] en son nom personnel, notifiées par la voie électronique le 11 mars 2021 et l'ordonnance de disjonction du juge de la mise en état du 12 mars 2021 ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 23 septembre 2022 ;

Vu les conclusions de révocation de l'ordonnance de clôture et au fond de Mme [W] [O] notifiées par la voie électronique le 11 octobre 2022 ;

Vu la mention au dossier de révocation de l'ordonnance de clôture rendue à l'audience de plaidoirie du 13 octobre 2022 pour la communication des pièces par Mme [W] [O] ;

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 12 octobre 2023,

Vu l’ordonnance de clôture du 1er décembre 2023 et la fixation de l'affaire à l'audience du 26 janvier 2024 ;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'assignation

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé. En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 4 novembre 2021. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée.

Sur le fond

Mme [W] [O], comme née le 18 juillet 2002 à [Localité 3] ( Côte d'Ivoire), revendique la nationalité française sur le fondement de l’article 18 du code civil, par filiation paternelle, son père, M. [A] [O], né le 18 janvier 1964 à [Localité 7] (Guinée) étant de nationalité française sur le fondement de l'article 30-2 du code civil par possession d'état de français et en vertu des articles 17 du code de la nationalité française dans sa rédaction de la loi du 9 janvier 1973, pour être né à l'étranger d'une mère, [B] [I], née le 25 mars 1929 à [Localité 5] (Guinée française), de nationalité française ; cette dernière a acquis la nationalité française le 26 mars 1950 conformément à l'article 5 du décret du 5 novembre 1928 et par l'effet de sa naissance et de sa résidence à sa majorité à [Localité 7], Guinée Française, un ancien territoire d'outre-mer, elle a conservé de plein droit la nationalité française lors de l'indépendance de Guinée, en application de l'article 32-3 du code civil, n'ayant pas été saisie par la loi guinéenne de nationalité (pièce n°23 de la demanderesse).

Cette action fait suite au refus de délivrance d’un certificat de nationalité française opposé par le directeur des services de greffe judiciaires du pôle de la nationalité français le 12 février 2019, au motif que les pièces complémentaires sollicitées le 28 mars 2014 n'avaient pas été produites et la démonstration du titre de la nationalité française de l'intéressée n'était pas faite (pièce n° 9).

Conformément à l'article 17-1 du code civil, compte tenu de la date de naissance de Mme [W] [O], l’action relève des dispositions de l'article 18 du code civil, selon lequel est français l'enfant dont l'un des parents au moins est français.

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

il convient de rappeler que les effets sur la nationalité de l’accession à l’indépendance des anciens territoires d’outre-mer d’Afrique (hors Algérie, Comores et Djibouti) sont régis par la loi numéro 60-752 du 28 juillet 1960 et par le chapitre VII du titre 1er bis du livre premier du code civil (soit ses articles 32 à 32-5), qui s’est substitué au titre VII du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, qui s’est lui-même substitué aux articles 13 et 152 à 156 du même code dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 19 octobre 1945 et modifiée par la loi du 28 juillet 1960. Il résulte de l’application combinée de ces textes qu’ont conservé la nationalité française :
- les personnes originaires du territoire de la République française tel que constitué le 28 juillet 1960
- les personnes qui ont souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française,
- les personnes qui ne se sont pas vu conférer la nationalité de l’un des nouveaux Etats anciennement sous souveraineté française,
- les personnes originaires de ces territoires, qui avaient établi leur domicile hors de l’un des Etats de la Communauté lorsqu’ils sont devenus indépendants,
- les enfants mineurs de dix-huit ans suivant la condition parentale selon les modalités prévues à l’article 153 du code de la nationalité française dans sa version issue de l'ordonnance du 19 octobre 1945 telle que modifiée par la loi du 28 juillet 1960.

Il appartient à la demanderesse de justifier, d'un lien de filiation légalement établi pendant sa minorité à l'égard de son père par des actes civils probants.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et la Côte d'Ivoire, les actes d'état civil sont dispensés de légalisation par l'article 21 de l'accord de coopération en matière de justice signé le 24 avril 1961 et publié le 10 février 1982 ; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer et, s'il s'agit d'expéditions, certifiés conformes à l'original par ladite autorité.

En effet, nul ne peut revendiquer la nationalité française à quelque titre que ce soit s’il ne dispose pas d’un état civil fiable.

Sur l'état civil et la filiation de Mme [W] [O] à l'égard de M. [A] [O]

S'agissant de son état civil, Mme [W] [O] produit de la copie de son acte de naissance, telle que délivrée le 4 février 2010 par le service central de l'état civil de [Localité 9], aux termes duquel elle est née le 18 juillet 2002 à [Localité 3], commune de [Localité 6] (Côte d'Ivoire), de M. [A] [O], né le 18 janvier 1964 à [Localité 7] (Guinée), directeur de société et de Mme [U] [T], née le 27 mars 1978 à [Localité 11] (Liban), sans profession, son épouse, domiciliés à [Localité 4] (Côte d'Ivoire), l’acte ayant été dressé le 6 août 2002, par l’officier d’état civil par délégation du Consul Général de France à [Localité 3], sur la déclaration du père (pièce n°4 de la demanderesse).

Il y a lieu de constater que la demanderesse justifie du caractère fiable et certain de son état civil, ce qui n'est pas contesté par le ministère public.

La demanderesse produit ensuite la copie de l'acte de naissance n°145 de M. [A] [O], telle que délivrée le 2 août 2019 par le service central de l'état civil de [Localité 9], aux termes duquel il est né le 18 janvier 1964 à [Localité 7] (Guinée), de [G] [O], commerçant et de [B] [I], son épouse, domiciliés à [Localité 7], l’acte ayant été dressé le 20 janvier 1964 à [Localité 7], par le Gouverneur de Région, sur la déclaration du père et transcrit le 9 juillet 1976, l’officier d’état civil, l'Ambassadeur de France en Guinée (pièce n°1 de la demanderesse).

Déclarée par son père, le demanderesse justifie d'un état civil probant et d'une filiation certaine à l'égard de M. [A] [O].

Sur la nationalité française de M. [A] [O] par filiation maternelle

[A] [O] est né le 18 janvier 1964 à [Localité 7] (Guinée), du mariage célébré le 7 mai 1955, de ses parents, [G] [O], né vers 1902 à [Localité 11] au Liban et de [B] [I], née le 25 mars 1929 à [Localité 5] en Guinée Française (pièces n° 22 et 24 de la demanderesse).

La demanderesse produit en pièce n° 22, la copie de l'acte de naissance transcrit à [Localité 9], de [B] [I], selon lequel elle est née le le 25 mars 1929 à [Localité 5] en Guinée Française, de deux parents, [N] [I] et [P] [D], nés à [Localité 11], au Liban (pièces n°17, 18 et 22 de la demanderesse).

Il en résulte que [B] [I], la mère de [A] [O], n'avait au moment de la naissance, aucun titre à se voir attribuer la nationalité française en raison de son origine. En revanche, au jour de sa majorité, soit le 25 mars 1947, son domicile de nationalité étant fixé à [Localité 7], sur le territoire français et elle est donc devenue française de plein droit, en application de l'article 5 alinéa 1er du décret du 5 novembre 1928, ce qui a été constaté le 15 février 1955, par le Président du Tribunal de Première Instance de [Localité 7] en Guinée, alors sous souveraineté française, selon certificat de nationalité n°60, délivrée le 15 février 1955, à l’intéressée (pièce 23).

Lors de l'accession de la Guinée à l'indépendance, le 1er octobre 1958, [B] [I] a, de plein droit et sans formalités, conservé la nationalité française, par application des dispositions de la loi du 28 juillet 1960, devenue l'article 32-3 du Code civil. En effet, née en Guinée de parents nés au Liban, elle n'a pas été saisie par l'ordonnance numéro 011 du 1er mars 1960 (Code de la nationalité guinéenne ); elle n'avait en effet aucun titre à se voir reconnaître cette nationalité.
Il en résulte que d'une part, [B] [I] a conservé la nationalité française en application de l'alinéa 1er de l'article 32-3 du Code civil et d'autre part, elle a transmis cette nationalité à son fils [A] [O], dont la filiation maternelle est établie par le mariage de ses parents le 7 mai 1955, antérieurement à sa naissance (pièce 24).

En application de l’article 17 du code de la nationalité française, dans sa rédaction de la loi 73-42 du 9 janvier 1973, [A] [O] est français de naissance en tant qu'enfant légitime née d'une mère française et d'un père de nationalité étrangère.

Née le 18 juillet 2002 d'un père français à la date de sa naissance, il sera jugé que la demanderesse est de nationalité française en application des dispositions de l'article 18 du code civil.

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

L'instance ayant été nécessaire à l'établissement de leurs droits, en application de l’article 696 du code de procédure civile, Mme [W] [O] sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement en premier ressort et contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe :

Constate que les formalités de l’article 1043 du code de procédure civile ont été respectées,

Juge que Mme [W] [O], née le 18 juillet 2002 à [Localité 3], commune de [Localité 6] (Côte d'Ivoire), est de nationalité française,

Ordonne la mention prévue à l’article 28 du code civil en marge des actes concernés,

Condamne Mme [W] [O] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 15 Mars 2024

La GreffièreLa Présidente
M. ALLAIN A. FLORESCU-PATOZ


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/2 nationalité b
Numéro d'arrêt : 21/04294
Date de la décision : 15/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-15;21.04294 ?
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