La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2024 | FRANCE | N°23/08962

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 12 mars 2024, 23/08962


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :


Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/08962 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KSC

N° MINUTE : 3/2024







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024


DEMANDERESSE
REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS [Adresse 1], représentée par Maître Karim-Alexandre BOUANANE, avocat au barreau de PARIS, 4 Rue de la Coutellerie 75004 Paris, Toque E1971

FENDEURS
Monsieur [G] [E], demeurant [Adresse 2], non comparant, ni représenté
Madame [F] [E] née [Z], demeurant [Adresse 2], comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/08962 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KSC

N° MINUTE : 3/2024

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024

DEMANDERESSE
REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS [Adresse 1], représentée par Maître Karim-Alexandre BOUANANE, avocat au barreau de PARIS, 4 Rue de la Coutellerie 75004 Paris, Toque E1971

DÉFENDEURS
Monsieur [G] [E], demeurant [Adresse 2], non comparant, ni représenté
Madame [F] [E] née [Z], demeurant [Adresse 2], comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Christine FOLTZER, juge des contentieux de la protection
assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

DATE DES DÉBATS : 01 février 2024

ORDONNANCE
réputée contradictoire et en premier ressort prononcée le 12 mars 2024 par Christine FOLTZER, Vice-présidente, assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

Décision du 12 mars 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/08962 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KSC

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé à effet du 1er juillet 2001, la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) a consenti un bail d'habitation à Monsieur [G] [E] sur des locaux situés au [Adresse 2], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 516,16 euros et d'une provision pour charges de 68,60 euros. Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z] sont mariés et vivent dans ce logement avec leurs deux enfants. Ils ont engagé une procédure de divorce suite à leur séparation en octobre 2021.

Par actes de commissaire de justice du 12 mai 2023, la bailleresse a fait délivrer aux locataires un commandement de payer la somme principale de 6 597,70 euros au titre de l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

La commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] le 16 mai 2023.

Par assignations du 6 novembre 2023, la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) a ensuite saisi en référé le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l'acquisition de la clause résolutoire, être autorisée à faire procéder à l'expulsion de Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] et obtenir leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :
- une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant égal à celui du loyer et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à libération des lieux,
- 10 268,62 euros à titre de provision sur l'arriéré locatif arrêté au 18 octobre 2023, terme de septembre 2023 inclus,
- 400 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L'assignation a été notifiée au représentant de l'État dans le département le 8 novembre 2023, et un diagnostic social et financier a été réalisé.

Ses conclusions ont été reçues au greffe avant l'audience, à laquelle il en a été donné lecture.

À l'audience du 1er février 2024, la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 16 janvier 2024, s'élève désormais à 8 450,42 euros, terme de décembre 2023 inclus.

Elle déclare, par ailleurs, accepter le plan d'apurement de cette dette proposé par les défendeurs. La REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) considère enfin qu'il y a bien eu une reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

Madame [F] [E] expose qu'elle est en instance de divorce avec Monsieur [G] [E] qui a quitté le logement familial depuis octobre 2021. Elle indique qu'elle a commencé à avoir des difficultés à ce moment-là, Monsieur [G] [E] ne payant plus le loyer alors qu'il était à sa charge. Elle a par ailleurs dû racheter tous les meubles, Monsieur [G] [E] étant parti avec. Elle indique qu'elle est médecin généraliste de formation, diplôme qui n'est pas reconnu en France de sorte qu'elle a travaillé en tant qu'infirmière. De mai 2023 au 31 décembre 2023, elle a obtenu un poste de médecin attaché en Province en CDD. Elle est depuis inscrite à pôle emploi et pense pouvoir toucher le chômage. Elle reconnaît également avoir repris le paiement intégral du loyer courant avant l'audience. Elle demande la suspension de la clause résolutoire et propose d'apurer sa dette en réglant chaque mois pendant 36 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 200 euros.

Bien que régulièrement cité par acte de commissaire de justice délivré à étude, Monsieur [G] [E] n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

La REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais de paiement.

En application de l'article 24 V de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les parties ont été invitées à produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

Madame [F] [E] a indiqué ne pas faire l'objet d'une telle procédure.

À l'issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu'à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant alors droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande de constat de la résiliation du bail

Sur la recevabilité de la demande

La REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) justifie avoir notifié l'assignation au représentant de l'État dans le département plus de six semaines avant l'audience.

Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l'assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l'article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

Sur la résiliation du bail

Aux termes de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l'espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de location a été signifié aux locataires le 12 mai 2023. Or, d'après l'historique des versements, la somme de 6 597,70 euros n'a pas été réglée par ces derniers dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d'apurement n'a été conclu dans ce délai entre les parties.

La bailleresse est donc bien fondée à se prévaloir des effets de la clause résolutoire dont les conditions sont réunies depuis le 13 juillet 2023.

Cependant, eu égard à la volonté des locataires de s'acquitter de leur dette et à l'accord de la bailleresse, il convient de suspendre la résiliation du bail au respect du plan d'apurement précisé ci-après.

En l'espèce, il ressort des éléments du dossier et notamment de l'audience que Madame [F] [E] a eu des difficultés de paiement du fait de sa séparation avec Monsieur [G] [E] qui a quitté le logement en octobre 2021 et ne paye plus le loyer depuis. Bien que médecin de formation en Ukraine, le diplôme de Madame [F] [E] n'est pas reconnu en France de sorte qu'elle a dû accepter plusieurs contrats précaires. Désormais inscrite à pôle emploi, elle souhaite retrouver du travail suite à un CDD en tant que médecin attaché en Province de huit mois. Il ressort alors de ces éléments que Madame [F] [E] peut raisonnablement assumer le paiement d'une somme de 200 euros par mois en plus du loyer courant afin de régler la dette locative.

En cas de respect des modalités du plan d'apurement, la clause résolutoire sera, à l'issue de ce plan, réputée n'avoir pas joué, et l'exécution du contrat de bail pourra se poursuivre. En revanche, à défaut de paiement d'une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d'apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail sera résilié de plein droit, sans qu'une nouvelle procédure judiciaire ne soit nécessaire. Dans ce cas, il est ordonné aux locataires ainsi qu'à tous les occupants de leur chef de quitter les lieux, et, pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse sera autorisée à faire procéder à l'expulsion de toute personne y subsistant, dès l'expiration d'un délai de deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux.

Sur la dette locative

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En l'espèce, la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) verse aux débats un décompte démontrant qu'à la date du 16 janvier 2024, Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] lui devaient la somme de 8 450,42 euros, soustraction faite des frais de procédure.

Conformément à l'article 220 du code civil, les époux sont responsables solidairement des dettes ménagères, lesquelles comprennent notamment le paiement du loyer et les charges.

Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] n'apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, ils seront solidairement condamnés, à titre provisoire, à payer cette somme à la bailleresse.

Toutefois, eu égard aux délais de paiement évoqués ci-avant, il convient de différer l'exigibilité de cette somme en autorisant Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] à se libérer de cette dette selon les modalités détaillées ci-après.

Sur l'indemnité d'occupation

En cas de maintien dans les lieux des locataires ou de toute personne de leur chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d'occupation sera due. Au regard du montant actuel du loyer et des charges, son montant sera provisoirement fixé à la somme mensuelle de 930,22 euros.

L'indemnité d'occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l'étaient le loyer et les charges, à partir du 13 juillet 2023, et ne cessera d'être due qu'à la libération effective des locaux avec remise des clés à la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) ou à son mandataire.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité et de la situation économique de la partie condamnée.

Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E], qui succombent à la cause, seront solidairement condamnés aux dépens de la présente instance, conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

En revanche, compte tenu de leur situation économique, il n'y a pas lieu de les condamner à une quelconque indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par ordonnance mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 12 mai 2023 n'a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu à effet du 1er juillet 2001 entre la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP), d'une part, et Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z], d'autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] est résilié depuis le 13 juillet 2023,

CONDAMNE solidairement Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z] à payer à la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) la somme de
8 450,42 euros (huit mille quatre cent cinquante euros et quarante-deux centimes) à titre de provision sur l'arriéré locatif arrêté au 16 janvier 2024, terme de décembre 2023 inclus,

AUTORISE Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z] à se libérer de leur dette en réglant chaque mois pendant 36 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 200 euros (deux cents euros), la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l'exécution des délais de paiement accordés à Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z],

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais été acquise,

DIT qu'en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l'arriéré, resterait impayée quinze jours après l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception,

-le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 13 juillet 2023,

-le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,

- la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, faire procéder à l'expulsion de Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z] et à celle de tous occupants de leur chef, au besoin avec l'assistance de la force publique,

-le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,

-Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z] seront solidairement condamnés à verser à la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu'à la date de libération effective et définitive des lieux,

RAPPELLE que la présente ordonnance est exécutoire de droit à titre provisoire,

DÉBOUTE la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE solidairement Monsieur [G] [E] et Madame [F] [E] née [Z] aux dépens comprenant notamment le coût des commandements de payer du 12 mai 2023 et celui des assignations du 6 novembre 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 12 mars 2024, et signé par le juge et le greffier susnommés.

Le Greffier Le Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/08962
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;23.08962 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award