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12/03/2024 | FRANCE | N°23/06158

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 12 mars 2024, 23/06158


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Emmanuel LANCELOT


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Morgane BLOTIN

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/06158 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2OZE

N° MINUTE : 3







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024


DEMANDERESSE
Etablissement public [Localité 3] HABITAT OPH ( anciennement OPAC DE [Localité 3]),
[Adresse 1]

représentée par Me Morgane BLOTIN, avo

cat au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [G] [Y],
[Adresse 2]

représentée par Me Emmanuel LANCELOT, avocat au barreau de PARIS,


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge,...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Emmanuel LANCELOT

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Morgane BLOTIN

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/06158 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2OZE

N° MINUTE : 3

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024

DEMANDERESSE
Etablissement public [Localité 3] HABITAT OPH ( anciennement OPAC DE [Localité 3]),
[Adresse 1]

représentée par Me Morgane BLOTIN, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [G] [Y],
[Adresse 2]

représentée par Me Emmanuel LANCELOT, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, juge des contentieux de la protection
assisté de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 11 janvier 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 12 mars 2024 par Romain BRIEC, Juge, assisté de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 12 mars 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/06158 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2OZE

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 15 mars 2017, [Localité 3] HABITAT OPH a donné à bail à Madame [G] [Y] un appartement à usage d’habitation situé [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel initial de 661,77 euros, outre une provision sur charges. 

Des loyers étant demeurés impayés, [Localité 3] HABITAT OPH a fait signifier par acte de commissaire de justice du 16 mars 2023 un commandement de payer la somme de 11839,97 euros, en principal, correspondant à l’arriéré locatif, terme du mois de février 2023, inclus et visant la clause résolutoire contractuelle.

Par acte de commissaire de justice du 6 juillet 2023, [Localité 3] HABITAT OPH a fait assigner en référé Madame [G] [Y] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
- constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties sur le fondement de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989,
- ordonner l'expulsion de Madame [G] [Y] et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est, sous astreinte de 80 euros par jour de retard,
- autoriser son expulsion immédiate par exception au délai légal de deux mois,
- ordonner le transport et la séquestration des meubles en tel lieu qu'il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur,
- condamner Madame [G] [Y] à lui payer une provision au titre des loyers et charges impayés au jour de l’assignation, soit la somme de 13755,11 euros, sous réserve des loyers à échoir, avec intérêts légaux à compter du commandement de payer, ainsi qu'une indemnité d'occupation provisionnelle jusqu'à libération effective des lieux d'un montant mensuel égal au montant du loyer et des charges si le bail s'était poursuivi,
- condamner Madame [G] [Y] à lui payer la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer, de l’assignation et de sa notification à la préfecture.

Après un renvoi, l’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 11 janvier 2024.

A cette audience, [Localité 3] HABITAT OPH représentée par son conseil, a maintenu ses demandes, a actualisé celle relative à l'arriéré de loyers à la somme de 19818,96 euros. Elle a exposé que le dernier versement date du 19 mai 2023. Elle s'est opposée à la suspension des effets de la clause résolutoire de même qu’à tout délai de paiement qui pourraient être octroyés par le juge.

Comparante en personne, Madame [G] [Y] a reconnu la dette sous réserve de la déduction de la somme de 4000 euros qu’elle a indiqué avoir payée par chèque le 26 décembre 2023. Elle a présenté à l’audience, comme consigné sur le procès-verbal d’audience, deux fiches de paie de novembre et décembre 2023 pour des montants respectifs de 1226,50 et 1278,89 euros. Elle a ajpouté avoir un enfant à charge, scolarisé à l’école élémentaire de secteur. Madame [G] [Y] a expliqué sa dette locative par des remboursements de crédits qu’elle dit avoir désormais soldés. Elle a précisé que le dépôt d’un dossier FSL maintien était à l’étude avec son assitante sociale de secteur. Elle a proposé dans ces conditions un échéancier de paiement à hauteur de 500 euros par mois.

PARIS HABITAT OPH a été autorisée à communiquer par note en délibéré au plus tard le 16 janvier 2024, un décompte actualisé de nature à étayer de l’encaissement éventuel du chèque de 4000 euros allégué par Madame [G] [Y].

La décision sera contradictoire. A l'issue de l'audience, la décision a été mise en délibéré au 12 mars 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera relevé que [Localité 3] HABITAT OPH n’a pas produit de note en délibéré.

En application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le juge du contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il peut également allouer au créancier une provision, lorsque l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Sur la recevabilité de la demande de résiliation et d’expulsion

Conformément à l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, l’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 10 juillet 2023 soit au moins deux mois avant l’audience, et la situation a été signalée à la CCAPEX le 17 mars 2023, soit deux mois au moins avant la délivrance de l'assignation du 6 juillet 2023.

En conséquence, l’action introduite par [Localité 3] HABITAT OPH est recevable.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire

L’une des obligations essentielles du preneur d’un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l'’article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. L’article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

En matière de bail, l'article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, le bail signé par les parties le 15 mars 2017 comporte une clause résolutoire prévoyant qu'en cas de défaut de paiement des loyers et charges, le bail sera résilié de plein droit deux mois après la délivrance d'un commandement de payer resté infructueux, conformément aux dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

Un commandement de payer visant cette clause a été signifié au locataire le 16 mars 2023 pour la somme en principal de 11839,97 euros.

Au vu du décompte, ce commandement est demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 16 mai 2023.

Si, en application de l'article 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989 le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, au locataire en situation de régler sa dette et qui aurait repris le paiement du loyer courant (cette dernière condition peut cependant être écartée si le bailleur y consent), lesquels suspendent les effets de la clause résolutoire, Madame [G] [Y] ne démontre pas être en capacité de régler sa dette locative de façon échelonnée. Son niveau de revenus, dont elle a justifié à l’audience, est insuffisant pour pouvoir respecter un échéancier tout en s’acquittant des loyers et charges courants, outre les autres dépenses de la vie quotidienne. En ce sens, il sera relevé qu'aucun paiement des loyers n'est intervenu depuis mai 2023 et la dette locative ne cesse de s'aggraver. Si elle allègue du versement de 4000 euros le 26 décembre 2023, elle n’en justifie aucunement et surtout n’établit pas que cette somme ait été effectivement débitée de son compte. Madame [G] [Y] ne justifie pas non plus que les crédits dont elle a fait état à l’audience utile pour expliquer l’arriéré locatif soient effectivement soldés. Enfin, le dépôt d’un dossier FSL maintien, en vue d’une prise en charge totale ou partielle de sa dette, n’est qu’hypothétique à ce stade. Dans ces conditions, il convient de la débouter de sa demande de délais.

Madame [G] [Y] étant sans droit ni titre depuis le 17 mai 2023, il convient d'ordonner son expulsion ainsi que l'expulsion de tous occupants de son chef, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

Aucune circonstance particulière de l’espèce ne justifiant que le délai de deux mois prévu par les dispositions des articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution soit réduit ou supprimé, il convient d'indiquer que passé le délai de deux mois suivant la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux, il pourra être procédé à cette expulsion, avec le concours de la force publique.

Il n'apparaît pas non plus nécessaire d'assortir l'obligation de quitter les lieux d'une astreinte. En effet, la condamnation au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation (voir ci-après), de nature à réparer le préjudice subi par la bailleresse satisfait déjà l'objectif assigné à l'astreinte en cette matière par l'article L.421-2 du code des procédures civiles d'exécution.

Il sera rappelé enfin que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution dont l’application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l’exécution et non de la présente juridiction.

Sur le montant de l'arriéré locatif et l’indemnité d’occupation

Madame [G] [Y] est redevable des loyers impayés jusqu'à la date de résiliation du bail en application des articles 1103 et 1217 du code civil. Par ailleurs, le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l’espèce [Localité 3] HABITAT OPH produit un décompte faisant apparaître que Madame [G] [Y] restait devoir la somme de 19818,96 euros à la date du 6 janvier 2024, échéance du mois de décembre 2023 incluse (la dernière somme au crédit est de 1000 euros le 19 mai 2023).

Les frais de poursuite, d’un montant total de 610,66 euros, dont il n'est pas démontré qu'ils sont dus contractuellement, seront retirés conformément à l'article 24 V de la loi du 6 juillet 1989 précisant que le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative, étant rappelé que les frais du commandement de payer et de l'assignation sont inclus dans les dépens.

Pour la somme au principal, Madame [G] [Y] n’apporte par définition aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette, qu’elle reconnaît d’ailleurs à l’audience. Le versement allégué de 4000 euros du 26 décembre 2023 n’est pas justifié.

Elle sera donc condamnée à titre de provision au paiement de la somme de 19208,30 euros (19818,96-610,66) arrêtée au 6 janvier 2024, avec les intérêts au taux légal sur la somme de 11839,97 euros à compter de la délivrance du commandement de payer, et à compter de la présente décision pour le surplus conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil.

Madame [G] [Y] sera également condamnée au paiement à compter du 7 janvier 2024, en lieu et place des loyers et charges, d’une indemnité mensuelle d’occupation qu'il convient de fixer à titre provisionnel au montant du loyer qui aurait été dû en l’absence de résiliation et des charges mensuelles dûment justifiées, et ce jusqu'à la libération effective des lieux.

En application de l'article 4 i) de la loi du 6 juillet 1989 et en l'absence de preuve d’un préjudice supérieur au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en l'absence de résiliation, la demande de majoration sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Madame [G] [Y] partie perdante, supportera la charge de l’intégralité des dépens de la présente procédure, qui comprendront notamment le coût de l'assignation et du commandement de payer.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais exposés par lui dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 300 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection statuant en référé, publiquement, par décision contradictoire, susceptible d'appel et prononcée par mise à disposition au greffe,

CONSTATONS que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 15 mars 2017 entre [Localité 3] HABITAT OPH et Madame [G] [Y], concernant l’appartement à usage d’habitation situé [Adresse 2] sont réunies à la date du 16 mai 2023 ;

ORDONNONS en conséquence à Madame [G] [Y] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision ;

DISONS qu’à défaut pour Madame [G] [Y] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, [Localité 3] HABITAT OPH pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, conformément à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

DISONS n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelons que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNONS Madame [G] [Y] à payer à [Localité 3] HABITAT OPH à titre de provision à valoir sur les loyers et charges impayés et indemnités d’occupation au 6 janvier 2024, échéance du mois de décembre 2023 incluse (la dernière somme au crédit est de 1000 euros le 19 mai 2023) la somme de 19208,30 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2023 pour la somme de 11839,97 euros, et à compter de la présente décision sur le surplus ;

RAPPELONS que les paiements intervenus postérieurement au décompte viennent s'imputer sur les sommes dues conformément à l'article 1342-10 du code civil et viennent ainsi en déduction des condamnations ci-dessus prononcées ;

CONDAMNONS Madame [G] [Y] à verser à [Localité 3] HABITAT OPH une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, à compter du 7 janvier 2024 et jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion) ;

CONDAMNONS Madame [G] [Y] à verser à [Localité 3] HABITAT OPH une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS le surplus des demandes ;

CONDAMNONS Madame [G] [Y] aux entiers dépens de la présente procédure, qui comprendront notamment le coût de l'assignation et du commandement de payer ;

RAPPELONS que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire.

Le greffier, Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/06158
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée au fond (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;23.06158 ?
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