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12/03/2024 | FRANCE | N°23/05886

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 12 mars 2024, 23/05886


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :


Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/05886 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2LKU

N° MINUTE : 6/2024







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024


DEMANDERESSE
ADOMA, [Adresse 2], représentée par la SCP JOUAN WATELET, avocats au barreau de PARIS, 26 Rue Léopold Bellan 75002 Paris, Toque P0226

DÉFENDEUR
Monsieur [R] [P] [N], demeurant [

Adresse 3], comparant en personne assisté de Me Laurent BOULA, avocat au barreau de PARIS, 156 Boulevard de Magenta, 75010 Paris, Toque E0338

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Françoise...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/05886 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2LKU

N° MINUTE : 6/2024

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024

DEMANDERESSE
ADOMA, [Adresse 2], représentée par la SCP JOUAN WATELET, avocats au barreau de PARIS, 26 Rue Léopold Bellan 75002 Paris, Toque P0226

DÉFENDEUR
Monsieur [R] [P] [N], demeurant [Adresse 3], comparant en personne assisté de Me Laurent BOULA, avocat au barreau de PARIS, 156 Boulevard de Magenta, 75010 Paris, Toque E0338

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Françoise THUBERT, juge des contentieux de la protection
assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

DATE DES DÉBATS : 31 janvier 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée le 12 mars 2024 par Françoise THUBERT, Vice-présidente, assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

Décision du 12 mars 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/05886 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2LKU

FAITS ET PROCEDURE

La société ADOMA a pour mission d'héberger les personnes visées à l'article R351-2(5°) et R351-55(2°) du CCH et de leur apporter des services complémentaires.

Par acte du 11/06/2019 à effet au 11/06/2019, la société ADOMA a conclu un contrat de résidence, en conférant à M. [N] [R] [P] la jouissance de locaux à usage d'habitation, situés au [Adresse 1], pour une redevance mensuelle de 427.29 euros. M.[N] a signé le règlement intérieur le 11/06/2019 également.

Une mise en demeure de faire cesser une occupation par des tiers en infraction à l'article 9 du règlement intérieur a été adressée par LRAR du 02/01/2023 reçue le 11/01/2023.

Par ordonnance du 17/02/2023, la société ADOMA a été autorisée à faire réaliser un constat de l'occupation des lieux , objets du contrat . Un procès-verbal de constat a été dressé le 18/03, 25/03 et 05/04/2023 par Me EMERY. Il n'y a pas rencontré M. [N] [R] [P] , mais M.[U] [E] né le 05/12/2004 , qui a indiqué demeurer dans le logement depuis environ 8 mois avec sa mère Mme [F] [C] . Il a indiqué que M. [N] [R] [P] son père était absent des lieux . Il a indiqué le nom de quatre enfants mineurs présents, comme étant ses frères et sœurs.

Par acte du 29/06/2023, la société ADOMA a fait assigner M. [N] [R] [P] sur le fondement de l'article 1103 du Code Civil ,L633-1 et R633-1 et suivant du Code de la Construction et de l'Habitation et 835 du Code de Procédure Civile aux fins de :

-Voir constater la résiliation du contrat de résidence de M. [N] [R] [P] et en conséquence son maintien dans les lieux sans droit ni titre
-Voir ordonner l'expulsion de M. [N] [R] [P] ainsi que celle de tous occupants de son chef avec assistance de la force publique le cas échéant
-Voir condamner M. [N] [R] [P] au paiement à titre provisionnel :

-d'une indemnité d'occupation à compter de l'expiration de son contrat , égale au tarif en vigueur de la redevance mensuelle jusqu'à libération des lieux ,

-d'une somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

A l'audience du 31/01/2024 , la société ADOMA maintient toutes ses demandes. La société ADOMA fait valoir que les termes de la mise en demeure sont clairs, et que l'hébergement d'un tiers est prévu par la loi, mais selon des modalités précises pour éviter l'hébergement clandestin, que si M. [N] [R] [P] a hébergé des proches , il n'en a pas demandé l'autorisation par la procédure prévue . Elle rappelle que le règlement de ADOMA prévoit la réception d'un invité, mais dans un cadre formaliste précis.

La société ADOMA soutient qu'il existe un trouble manifestement illicite, du fait de cette occupation non déclarée, sa demande se justifiant par les incidents générés par la présence de tiers non-résidents au moins entre le 11/02/2023 et le 05/04/2023 en tout état de cause , une sur occupation créant des risques pour la santé et la sécurité.

Elle rappelle que dans sa LRAR de mise en demeure, elle a respecté le préavis d'un mois et que celle-ci est demeurée infructueuse, eu égard au constat d'huissier opéré, où la personne rencontrée a déclaré vivre dans les lieux avec sa mère et M. [N] [R] [P] , son père , depuis 8 mois.

Elle fait valoir la violation d'une obligation légale, le trouble étant donc manifestement illicite.

La société ADOMA relève que la contestation de M. [N] [R] [P] n'est pas sérieuse, alors que la preuve d'un autre logement pour Mme [F] ne repose pas sur des preuves certaines, seules deux quittances étant produites et que les attestations ne sont pas probatoires.
Elle s'en remet sur la demande de délais pour quitter les lieux.

M. [N] [R] [P] a été représenté, l'aide juridictionnelle provisoire lui étant accordée , au regard de l'attestation CAF produite où il est mentionné percevoir le RSA.

Il soutient oralement ses conclusions récapitulatives auxquelles il convient de se référer en application de l'article 455 du CPC et sollicite le débouté de la société ADOMA de l'ensemble de ses demandes , de voir juger qu'il n'y a pas lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile , de voir statuer ce que de droit sur les dépens .
A l'audience, il sollicite subsidiairement des délais pour quitter les lieux .

M. [N] [R] [P] expose qu'il n'est pas le père de la personne rencontrée dans sa chambre. Il explique qu'ayant besoin d'assistance en raison de problèmes de santé, Mme [F] est venue l'assister avec ses enfants , qu'il a entamé des démarches lorsqu'il a reçu le courrier du 11/01/2023 et que Mme [F] a obtenu un logement , pour lequel il justifie des quittances reçues par celle-ci. Compte-tenu du constat d'huissier qu'il a fait établir le 17/04/2023 , il soutient que la suroccupation n'existait plus à cette date .

Il ajoute qu'il avait demandé au responsable de résidence oralement une autorisation d'héberger des tiers , mais qu'il ne peut produire d'écrit en ce sens.

Il sollicite subsidiairement des délais pour quitter les lieux .

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la résiliation de la convention :

Il convient de relever que la procédure introduite par la société ADOMA a trait à la résidence principale de M. [N] [R] [P], quand bien même la résidence a une vocation transitoire en logement foyer ; la procédure envisagée par le législateur dans le cadre d'un décret d'application d'une loi consacrant un lieu de résidence à titre principal a vocation à préserver le droit à l'hébergement, même il ne s'agit pas d'un contrat de bail, droit consacré au même titre que le droit au logement depuis la loi du 05/03/2007.

M. [N] [R] [P] a signé la convention d'occupation ; il a en outre signé le règlement intérieur auquel la clause résolutoire se réfère.

En application de l'article 11 du contrat, une clause résolutoire de plein droit du contrat est prévue : " en cas d'inexécution par le résident de l'une des obligations lui incombant au regard du présent titre d'occupation ou manquement grave et répété au règlement intérieur , la résiliation de produit effet d'un mois après la date de notification par LRAR ".

Il est prévu par l'article R633-9 du Code de la Construction et de l'Habitation, modifié par décret du 23/11/2007, que le règlement intérieur prévoit les modalités et la durée d'hébergement des tiers invités-hébergés dans un maximum de 3 mois pour une même personne hébergée.

Les modalités de la déclaration de la présence de tiers invité-hébergé sont prévues à l'actuel règlement intérieur à l'article 9, qui prévoit que pour une période maximale de trois mois par an, chaque résident à la faculté d'accueillir une personne dont il assure le couchage à l'intérieur des locaux privatifs mis à sa disposition.

Il existe donc dans ce cas une durée maximum de 3 mois, un nombre de personne limité à une seule personne, et une obligation de déclaration préalable à toute présence de tiers dans les lieux.

En application de l'article 835 al 1er du Code de Procédure Civile, l'appréciation du caractère manifestement illicite du trouble invoqué est possible, compte tenu du non - respect du contrat pour suroccupation , invoqué par la société ADOMA, lequel s'inscrit dans le cadre légal.

Il convient de noter que si le demandeur prétend ne pas se situer pas dans le cadre d'une demande de mesure qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse (art.834), mais dans le cadre du trouble manifestement illicite à faire cesser (art.835), il invoque cependant l'application d'une clause résolutoire de plein droit, qui est une mesure que le juge constate en référé, pour pouvoir ordonner l'expulsion du fait du maintien dans les lieux.

La mise en demeure du 02/01/2023 par LRAR a bien été reçue le 11/01/2023 : il y est rappelé l'article 9 du règlement intérieur et expliqué à M. [N] [R] [P] qu'il héberge une personne tierce en infraction à ce règlement ; il lui est demandé d'y mettre fin dans les 48h. Il est indiqué qu'en cas d'inexécution, le contrat sera résilié de plein droit un mois après cette mise en demeure restée sans effet. Il a donc été imparti par la mise en demeure un délai approprié de régularisation d'un mois, avant qu'une inexécution permette de solliciter l'acquisition de la clause résolutoire, en application de l'article 1225 du code civil.

Le constat d'huissier du 18/03, 25/03 et 05/04/2023 sur ordonnance sur requête du Juge des contentieux de la protection du 17/02/2023 a mentionné la présence dans la chambre de M.[U] [E] qui a indiqué demeurer dans le logement depuis environ 8 mois avec sa mère Mme [F] et précisé que M. [N] [R] [P] était son père.
S'il n'est pas établi que M.[U] né en 2004 soit le fils de M.[N] [R] [P] né en 1993, il est cependant mentionné une occupation par M.[U] avec sa mère depuis 8 mois .
Dans ces conditions les attestations produites par M. [N] [R] [P] de proches et amis ( M. [T] , M.[D] , M. [S] ) sont en contradiction avec les déclarations faites au commissaire de justice , et elles ne peuvent constituer de contestations sérieuses .

Cette occupation n'a donc pas fait l'objet de demande préalable selon la procédure prévue au règlement intérieur et est en tout état de cause supérieure en nombre à celle autorisée.
M. [N] [R] [P] s'est vu adresser la mise en demeure, qui précise les risques de résiliation en cas de maintien de la suroccupation. Un trouble manifestement illicite résulte de cette sur-occupation, qui s'est prolongée, de plusieurs personnes et sans déclaration préalable, entre le 11/01/2023 et le 05/04/2023 au moins .Quand bien même elle aurait cessé depuis le 17/04/2023 , selon le constat de commissaire de justice établi à la requête de M. [N] [R] [P], la période de suroccupation a duré et n'a pas cessé au 11/02/2023.

Il convient donc de constater l'acquisition de la clause résolutoire au 11/02/2023 à minuit, soit à compter du 12/02/2023 pour ce motif .

Il convient donc d'ordonner l'expulsion de M. [N] [R] [P] et de tout occupant de son chef à défaut de départ volontaire des lieux après commandement de quitter les lieux, et ce avec le concours de la force publique si besoin est et l'assistance d'un serrurier.

Sur l'indemnité d'occupation :

Compte tenu du contrat antérieur et afin de préserver les intérêts du demandeur, il convient de fixer le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle due de la date de résiliation au départ effectif de M. [N] [R] [P] par remise des clés ou procès-verbal d'expulsion au montant de la redevance, éventuellement révisée, et des charges qui auraient été payées si le contrat s'était poursuivi et de condamner M. [N] [R] [P] au paiement de celle-ci.

Il convient de constater l'absence de toute demande au titre d'un arriéré de redevances.

Sur la demande de délais pour quitter les lieux :

L'article L 412-3 du Code des Procédures Civiles d'Exécution dispose qu'il peut être accordé un délai pour quitter les lieux selon les critères tenant à la bonne ou mauvaise volonté de l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, la santé, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, les diligences de l'occupant faites en vue de relogement.
En vertu de l'article L412-4 du Code des Procédures Civiles d'Exécution, les délais sont de 1 mois à 1 an .

M. [N] [R] [P] fait état de problèmes de précarité pour solliciter des délais pour quitter les lieux.

La société ADOMA s'en remet.

M. [N] [R] [P] ne perçoit que le RSA et l'APL selon l'attestation CAF d'août à octobre 2023 . Il a nécessairement besoin d'un délai pour quitter les lieux , et il a jusqu'alors payé la redevance ou l'indemnité d'occupation, la suroccupation ne s'étant pas prolongée .

Il convient de lui accorder un délai supplémentaire de 2 mois pour quitter les lieux , sous réserve du paiement de l'indemnité d'occupation à sa date , à peine de déchéance des délais accordés .

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il convient de condamner M. [N] [R] [P] à payer à la société ADOMA la somme de 200 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Sur les dépens :

Il y a lieu de condamner M. [N] [R] [P] aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Le Juge des contentieux de la protection statuant en référé par ordonnance contradictoire et en premier ressort, mise à disposition au Greffe :

RENVOIE les parties à se pourvoir et dès à présent, vu les articles 834 et 835 du Code de Procédure Civile,

RAPPELLE qu'il a été accordé l'aide juridictionnelle à titre provisoire à l'audience du 31/01/2024 à M. [N] [R] [P]

CONSTATE la résiliation du contrat de résidence conclu entre les parties à compter du 12/02/2023 portant sur les lieux situés au [Adresse 1] pour suroccupation des lieux

DIT que l'indemnité d'occupation due de la date de la résiliation jusqu'au départ effectif des lieux par remise des clés ou procès-verbal d'expulsion sera égale au montant de la redevance, éventuellement révisée et des charges, qui auraient été payées si le contrat avait continué

CONSTATE l'absence de demande au titre d'un arriéré de redevance

DIT que la société ADOMA pourra, à défaut de départ volontaire des lieux, faire procéder à l'expulsion de M. [N] [R] [P], ainsi que de tous les occupants de son chef, avec le concours de la force publique et d'un serrurier le cas échéant, sous réserve des dispositions de l'article L412-1 du Code des Procédures Civiles d'Exécution

ACCORDE un délai supplémentaire de deux mois à M. [N] [R] [P] pour quitter les lieux à compter de la signification de la décision , sous réserve du paiement de l'indemnité d'occupation à sa date , à peine de déchéance des délais accordés

Rappelle que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit

DEBOUTE les parties du surplus de leurs prétentions,

CONDAMNE M. [N] [R] [P] aux dépens qui comprendront le coût de l'assignation et du constat d'huissier

CONDAMNE M. [N] [R] [P] à payer à la société ADOMA la somme de 200 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/05886
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;23.05886 ?
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