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12/03/2024 | FRANCE | N°23/05725

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 12 mars 2024, 23/05725


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Léna BOJKO


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Sébastien MENDES GIL

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 23/05725 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2KAA

N° MINUTE :







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024


DEMANDERESSE

Etablissement public [Localité 3] HABITAT OPH,
[Adresse 1]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL, avocat au barreau de PARIS,>
DÉFENDERESSE

Madame [J] [E] [Z],
[Adresse 2]

comparante en personne assistée de Me Léna BOJKO, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, juge des contenti...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Léna BOJKO

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Sébastien MENDES GIL

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/05725 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2KAA

N° MINUTE :

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 12 mars 2024

DEMANDERESSE

Etablissement public [Localité 3] HABITAT OPH,
[Adresse 1]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [J] [E] [Z],
[Adresse 2]

comparante en personne assistée de Me Léna BOJKO, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, juge des contentieux de la protection assisté de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 11 janvier 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 12 mars 2024 par Romain BRIEC, Juge, assisté de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 12 mars 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 23/05725 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2KAA

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 26 septembre 2018, [Localité 3] HABITAT OPH a donné à bail à Madame [J] [E] [Z] un appartement à usage d’habitation situé [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel initial de 270,43 euros, outre une provision sur charges. 

Des loyers étant demeurés impayés, [Localité 3] HABITAT OPH a fait signifier par acte de commissaire de justice du 28 novembre 2022 un commandement de payer la somme de 1118,44 euros, en principal, correspondant à l’arriéré locatif arrêté au 16 novembre 2022, et visant la clause résolutoire contractuelle.

Par acte de commissaire de justice du 20 juin 2023, [Localité 3] HABITAT OPH a fait assigner en référé Madame [J] [E] [Z] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
- constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties sur le fondement de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989,
- ordonner l'expulsion de Madame [J] [E] [Z] et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est,
- ordonner le transport et la séquestration des meubles en tel lieu qu'il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur,
- condamner Madame [J] [E] [Z] à lui payer une provision au titre des loyers et charges impayés au 22 mai 2023, soit la somme de 3418,42 euros, sous réserve des loyers à échoir, ainsi qu'une indemnité d'occupation provisionnelle jusqu'à libération effective des lieux d'un montant mensuel égal au montant du loyer et des charges si le bail s'était poursuivi,
- condamner Madame [J] [E] [Z] à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer, de l’assignation et de sa notification à la préfecture.

Un diagnostic social et financier a été reçu au greffe avant l’audience et il a été porté à la connaissance des parties à l’audience. Il y est mentionné que Madame [J] [E] [Z] est en situation irrégulière sur le territoire et n’a aucune ressource. Elle a effectué une demande de titre de séjour au motif invoqué de 10 ans de présence en France et est en attente d’un rendez-vous à la Préfecture. Elle espère que sa situation administrative puisse être régularisée pour pouvoir percevoir les APL et l’AAH. Elle envisage de constiter un dossier de surendettement.

Après deux renvois, l’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 11 janvier 2024.

A cette audience, [Localité 3] HABITAT OPH représentée par son conseil, a maintenu ses demandes, a actualisé celle relative à l'arriéré de loyers à la somme de 5766,60 euros et s'est opposée à tout délai de paiement qui pourraient être octroyés par le juge. Elle a en outre refusé que les effets de la clause résolutoire soeint suspendus en l’absence de reprise même partielle des versements, le dernier datant du 10 décembre 2022.
Comparante en personne, assistée de son conseil, Madame [J] [E] [Z] a reconnu la dette et a confirmé les termes du diagnostic social et financier. Elle a ajouté être âgée de 63 ans, vivre seule, et souffrir de problèmes de santé importants. La locataire a sollicité d’écarter la condition légale de reprise du paiement intégral des loyers courant pour la suspension de l’effet de la clause résolutoire et a demandé le bénfice de délais de paiement.

[Localité 3] HABITAT OPH a été autorisé à communiquer par note en délibéré au plus tard le 16 janvier 2024 un décompte actualisé en cas de reprise de versements récents par Madame [J] [E] [Z].

La décision sera contradictoire. A l'issue de l'audience, la décision a été mise en délibéré au 12 mars 2023 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminiare, il sera relevé que [Localité 3] HABITAT OPH a produit par note en délibéré du 2 frévrier 2024 un décompte actualisé faisznt état d’un arriéré de 6839,33 euros, échéance de janvier 2024 incluse.

En application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le juge du contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il peut également allouer au créancier une provision, lorsque l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Sur la recevabilité de la demande de résiliation et d’expulsion

Conformément à l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, l’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 22 juin 2023 soit au moins deux mois avant l’audience, et la situation a été signalée à la CCAPEX le 30 novembre 2022, soit deux mois au moins avant la délivrance de l'assignation du 20 juin 2023.

En conséquence, l’action introduite par [Localité 3] HABITAT OPH est recevable.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire

L’une des obligations essentielles du preneur d’un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l'’article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. L’article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

En matière de bail, l'article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, le bail signé par les parties le 26 septembre 2018 comporte une clause résolutoire prévoyant qu'en cas de défaut de paiement des loyers et charges, le bail sera résilié de plein droit deux mois après la délivrance d'un commandement de payer resté infructueux, conformément aux dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

Un commandement de payer visant cette clause a été signifié au locataire le 28 novembre 2022 pour la somme en principal de 1118,44 euros.

Au vu du décompte, ce commandement est demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 28 janvier 2023.

Si, en application de l'article 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989 le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, au locataire en situation de régler sa dette et qui aurait repris le paiement du loyer courant (cette dernière condition peut cependant être écartée à la demande du locataire ou du bailleur), lesquels suspendent les effets de la clause résolutoire, Madame [J] [E] [Z] ne démontre pas être en capacité de régler sa dette locative de façon échelonnée. Elle se trouve être en situation irrégulière et l’octroi d’un titre de séjour n’est à ce stade qu’hypothétique. Elle ne bénéfice d’aucune ressource, sans perspective d’amélioration prochaine. Il sera relevé par ailleurs qu'aucun paiement des loyers n'est intervenu depuis plusieurs mois et que la dette locative ne cesse de s'aggraver. Dans ces conditions, il convient de la débouter de sa demande de délais.

Madame [J] [E] [Z] étant sans droit ni titre depuis le 29 janvier 2023, il convient d'ordonner son expulsion ainsi que l'expulsion de tous occupants de son chef, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

Aucune circonstance particulière de l’espèce ne justifiant que le délai de deux mois prévu par les dispositions des articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution soit réduit ou supprimé, il convient d'indiquer que passé le délai de deux mois suivant la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux, il pourra être procédé à cette expulsion, avec le concours de la force publique.

Il sera rappelé enfin que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution dont l’application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l’exécution et non de la présente juridiction.

Sur le montant de l'arriéré locatif et l’indemnité d’occupation

Madame [J] [E] [Z] est redevable des loyers impayés jusqu'à la date de résiliation du bail en application des articles 1103 et 1217 du code civil. Par ailleurs, le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l’espèce [Localité 3] HABITAT OPH produit un décompte faisant apparaître que Madame [J] [E] [Z] restait devoir la somme de 6839,33 euros à la date du 1er février 2024, échéance du mois de janvier 2024 incluse (la dernière somme au crédit est de 370,73 euros le 10 décembre 2022).

Pour la somme au principal, Madame [J] [E] [Z] n’apporte par définition aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette, qu’elle reconnaît d’ailleurs à l’audience.

Elle sera donc condamnée à titre de provision au paiement de la somme de 6839,33 euros arrêtée au 1er février 2024, avec les intérêts au taux légal sur la somme de 1118,44 euros à compter de la délivrance du commandement de payer, et à compter de la présente décision pour le surplus conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil.

Madame [J] [E] [Z] sera également condamnée au paiement à compter du 2 février 2024, en lieu et place des loyers et charges, d’une indemnité mensuelle d’occupation qu'il convient de fixer à titre provisionnel au montant du loyer qui aurait été dû en l’absence de résiliation et des charges mensuelles dûment justifiées, et ce jusqu'à la libération effective des lieux.

Sur les demandes accessoires

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Madame [J] [E] [Z] partie perdante, supportera la charge de l’intégralité des dépens de la présente procédure, qui comprendront notamment le coût de l'assignation et du commandement de payer.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais exposés par lui dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 300 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection statuant en référé, publiquement, par décision contradictoire, susceptible d'appel et prononcée par mise à disposition au greffe,

CONSTATONS que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 26 septembre 2018 entre [Localité 3] HABITAT OPH et Madame [J] [E] [Z], concernant l’appartement à usage d’habitation situé [Adresse 2] sont réunies à la date du 28 janvier 2023 ;

ORDONNONS en conséquence à Madame [J] [E] [Z] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision ;

DISONS qu’à défaut pour Madame [J] [E] [Z] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, [Localité 3] HABITAT OPH pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, conformément à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

DISONS n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelons que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNONS Madame [J] [E] [Z] à payer à [Localité 3] HABITAT OPH à titre de provision à valoir sur les loyers et charges impayés et indemnités d’occupation au 1er février 2024, échéance du mois de janvier 2024 incluse (la dernière somme au crédit est de 370,73 euros le 10 décembre 2022) la somme de 6839,33 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 novembre 2022 pour la somme de 1118,44 euros, et à compter de la présente décision sur le surplus ;

RAPPELONS que les paiements intervenus postérieurement au décompte viennent s'imputer sur les sommes dues conformément à l'article 1342-10 du code civil et viennent ainsi en déduction des condamnations ci-dessus prononcées ;

CONDAMNONS Madame [J] [E] [Z] à verser à [Localité 3] HABITAT OPH une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, à compter du 2 février 2024 et jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion) ;

CONDAMNONS Madame [J] [E] [Z] à verser à [Localité 3] HABITAT OPH une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS le surplus des demandes ;

CONDAMNONS Madame [J] [E] [Z] aux entiers dépens de la présente procédure, qui comprendront notamment le coût de l'assignation et du commandement de payer ;

RAPPELONS que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire.

Le greffier, Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 23/05725
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée au fond (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;23.05725 ?
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