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30/08/2024 | FRANCE | N°22/01134

France | France, Tribunal judiciaire de Nice, 2ème chambre civile, 30 août 2024, 22/01134


COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE
(Décision Civile)


JUGEMENT : S.A.S. SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET c/ S.C.I. ANAÏS

N° 24 /
Du 30 Août 2024

2ème Chambre civile
N° RG 22/01134 - N° Portalis DBWR-W-B7G-N7UW













Grosse délivrée à

Me Brigitte MINDEGUIA

Me Stéphane MEGYERI

expédition délivrée à

le 30/08/2024
mentions diverses














>Par jugement de la 2ème Chambre civile en date du trente Août deux mil vingt quatre


COMPOSITION DU TRIBUNAL

LACOMBE Karine, Présidente, assistée de Justine VOITRIN, Greffier

Vu les Articles 812 à 816 du Code de Procédur...

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE
(Décision Civile)

JUGEMENT : S.A.S. SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET c/ S.C.I. ANAÏS

N° 24 /
Du 30 Août 2024

2ème Chambre civile
N° RG 22/01134 - N° Portalis DBWR-W-B7G-N7UW

Grosse délivrée à

Me Brigitte MINDEGUIA

Me Stéphane MEGYERI

expédition délivrée à

le 30/08/2024
mentions diverses

Par jugement de la 2ème Chambre civile en date du trente Août deux mil vingt quatre

COMPOSITION DU TRIBUNAL

LACOMBE Karine, Présidente, assistée de Justine VOITRIN, Greffier

Vu les Articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile sans demande de renvoi à la formation collégiale ;

DÉBATS

À l'audience publique du 26 Février 2024 le prononcé du jugement étant fixé au 5 juillet 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction ;

PRONONCÉ

Par mise à disposition au Greffe le 30 Août 2024 après prorogation du délibéré, signé par LACOMBE Karine, Présidente, assistée de Estelle AYADI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DE LA DÉCISION : contradictoire, en premier ressort, au fond.

DEMANDERESSE:

S.A.S. SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Brigitte MINDEGUIA, avocat au barreau de NICE, avocat postulant, Me Pierre-vincent LAMBERT, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant

DÉFENDERESSE:

S.C.I. ANAÏS
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Stéphane MEGYERI, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Vu l'exploit d'huissier en date du 21 janvier 2022 aux termes desquels la SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET a fait assigner la SCI de droit monégasque ANAIS devant le tribunal de céans ;

Vu les conclusions (RPVA 22 novembre 2022) aux termes desquelles LA SAS SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET, sollicite au visa des articles 1103, 1104, 1231-1 et 1794 du code civil, de :

- voir condamner la SCI ANAÏS à lui payer :

- la somme de 22 604,90 € augmentée des intérêts moratoires à compter de la mise en demeure du 6 octobre 2021, avec capitalisation dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;

- la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- voir débouter la SCI ANAÏS de l’ensemble de ses prétentions,

-voir condamner la SCI ANAÏS aux dépens.

Vu les conclusions (RPVA 27 juillet 2022) aux termes desquelles la SCI de droit monégasque ANAIS sollicite au visa des articles 1103 et 1104 , 1240 du Code Civil de :

-voir débouter la SAS SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET de sa demande de condamnation à lui payer la somme de 22.604,90 € au titre du solde du marché de travaux, outre sa demande au titre des intérêts moratoires à compter de la mise en demeure du 6 octobre 2021, avec anatocisme,

À titre reconventionnel,

-voir condamner la SAS SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET à lui payer la somme de 23.800 € H.T. soit 28.560 € TTC, au titre des pénalités de retard contractuellement prévues au marché de travaux,

- voir condamner la SAS SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET à lui payer la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice spécifique qu’elle lui a causé du fait de l’inexécution du chantier,

En tout état de cause,

-voir débouter la SAS SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET de sa demande de condamnation à lui payer la somme de 4.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

-voir débouter la SAS SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET de sa demande au titre des dépens,

-voir condamner la SAS SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET à lui payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de la procédure,

-voir écarter l’exécution provisoire dans la mesure où celle-ci n’est pas compatible avec la nature de l’affaire.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 novembre 2023 evec effet différé au 12 février 2024.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément fait référence aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET fait valoir que la SCI ANAÏS reconnait avoir conclu avec elle un marché de travaux le 3 février 2020, marché modifié par la « situation 1 » du 8 juillet 2020 ramenant le montant de ce dernier à la somme totale de 67.700,60 euros TTC, que le 18 septembre 2020 le maître d’œuvre indique que le marché de travaux a été exécuté à « 75 % », que le 6 novembre 2020, la SCI ANAÏS a procédé à la réception avec réserves des travaux en sa présence, que l’architecte lui a demandé d’établir la liste des travaux concernant son marché, qu'elle a établi un devis récapitulatif des travaux réalisés, mentionnant des prestations restant à achever chiffrées à 2700 € HT, qu’elle a transmis les 9 et 16 novembre au maître d’œuvre en demandant validation, que le 23 novembre, l’architecte a rappelé la liste des réserves formulées à la réception et a annoncé la résiliation du marché par le maître d’ouvrage.

Elle indique avoir contesté les désordres allégués et fait valoir que la SCI ANAÏS n’a pas sollicité d'expertise ni demandé de réparation au titre de ces malfaçons, que cela confirme leur caractère négligeable.

Elle fait valoir qu'à supposer que des désordres ou inachèvements soient avérés, il
appartenait au maître d’ouvrage de lui permettre de lever les éventuelles réserves dans le cadre de la garantie légale de parfait achèvement et de régler le solde du marché, sous réserve d’une éventuelle retenue de garantie de 5% à consigner entre les mains d’un consignataire et à verser à l’entrepreneur à l’expiration de l’année de parfait achèvement, que la SCI ANAÏS et son maître d’œuvre ont résilié unilatéralement le marché par leurs courriers des 23 novembre et 10 décembre 2020, qu'en l'empêchant de parachever son travail, la SCI ANAÏS doit payer la totalité de la facture de solde.

S’agissant des « travaux supplémentaires » chiffrés à 1450 € HT, elle fait valoir que la défenderesse ne conteste pas qu’ils ont bien été réalisés et qu’elle en a pris possession.

En réponse aux demandes reconventionnelles de la SCI ANAIS, elle fait valoir que le marché du 3 février 2020 prévoyait un délai d’exécution du 20/01/20 au 10/04/20, que ce délai était relatif aux prestations prévues au devis initial, que ces prestations ont subi plusieurs modifications a posteriori d’un commun accord entre les parties , que l’épidémie de Covid a entrainé des perturbations dont quasiment 2 mois de confinement strict, qu'après plusieurs avenants, le marché a été modifié et actualisé en dernier lieu par la « situation 1 » du 8 juillet 2020 constituant la loi des parties, que ce document, postérieur de 5 mois au marché d’origine, ne comporte plus aucun délai d’exécution, que le devis 200154 comportant notamment le remplacement d’un « bloc serrure Raynears », indique expressément que l’acceptation de ce devis vaut annulation de toutes les pénalités de retard, qu'elle n'a pas idée du temps que va mettre Raynears à fournir les pièces.

Elle soutient que tout délai d’exécution impératif a été abandonnée par les parties avec la signature de la situation du 8 juillet 2020 qui vaut novation, qu'aucun autre délai d’exécution ferme n’a été accepté ni contractualisé, ni sanctionné par des pénalités.

Elle fait valoir que si elle a pu annoncer au mois de juin avant la signature de la « situation 1 » une date de fin de travaux à la fin du mois de juillet, il s’agissait d’un délai indicatif à un instant précis non d’un délai contractuel et impératif puisque l’économie originelle du marché avait été bouleversée.

Elle soutient que dans l'hypothèse d'un délai d'exécution contractuel assorti de pénalités de retard applicables aux parties, aucune indemnité ne serait due car il serait du exclusivement aux restrictions et confinement dus à l’épidémie de Covid-19 et à l’attitude du maître d’ouvrage qui n’avait pas finalisé son projet et qui a imposé des modifications attestées par les avenants, qu'aucun préjudice n’est avéré, la SCI ne produisant pas de justificatif quant à l’achèvement des autres travaux de rénovation et à la prétendue location envisagée.

À titre infiniment subsidiaire elle soutient qu'il y aurait lieu de faire application du plafonnement des pénalités de retard mentionnées dans le marché d’origine du 3 février 2020 soit 200 € HT/J plafond AFNOR NF-17, que la norme AFNOR NFP 03.001, dans sa version 2017 comme dans ses versions précédentes, plafonnent les pénalités de retard à 5 % du montant total du marché que le plafond des pénalités hors taxe serait de 61 546 € x 5/100 = 3077 €.

En réponse à la demande de dommages et intérêts, elle fait valoir que la SCI ne démontre pas l’existence d’un préjudice en lien de causalité avec un prétendu retard de sa part dans l’exécution des travaux qui lui ont été commandés.

La SCI ANAIS fait valoir que le marché de travaux a été résilié par le maître d’œuvre sur instruction en ce sens de sa part à une date où les travaux n’étaient pas encore achevés en raison de l’accumulation d’un retard important dans l’exécution du chantier et de la présence de diverses malfaçons.

Elle rappelle qu'avec son courrier annonçant la probable résiliation du marché de travaux en date du 23 novembre 2020 et dans son courriel de notification de la résiliation du 10 décembre 2020, le maître d’œuvre a listé de manière exhaustive les différents inachèvements et malfaçons, que des derniers ont pris place alors que l’entreprise lui a plusieurs fois imposé des délais supplémentaires afin de parvenir à terminer le chantier.

Elle fait valoir qu'il n'est pas démontré par l’entreprise qu'elle ou le maître d’œuvre ait validé des travaux supplémentaires sur la base d’un devis non accepté du 7 novembre 2020 pour un montant 1.450 euros H.T, que dès lors l’entreprise ne peut se prévaloir des dispositions de l’article 1794 du Code Civil pour se voir dédommager par le maître de l’ouvrage de travaux qui n’ont pas été accomplis.

Elle rappelle qu'il n’est pas contesté qu'elle a déjà réglé à l’entreprise la somme totale de 46.690,70 € TTC au titre du marché de travaux modifié selon la situation n°1 établie sur la base du devis n°200146 du 26 juin 2020 qui ramène le montant du marché à la somme totale de 61.546 € H.T. soit 67.700,60 euros TTC.

Elle soutient qu'en l’état des inachèvements et malfaçons l’entreprise ne peut réclamer un dédommagement correspondant au montant résultant de la différence entre le
montant du devis initial et les sommes payées.

À titre reconventionnel, elle fait valoir que l’entreprise s’est rendue coupable de retard dans l’exécution du chantier, que l’épisode du confinement ne peut justifier ni la prétendue validation tardive des couleurs des coulisses des volets roulants et/ou la prétendue absence de validation du devis n°200146 du 26 juin 2020 valant avenant au marché de travaux par elle et/ou le maître d’œuvre.

Elle soutient qu’à chaque demande de validation de l’entreprise, le maître d’œuvre a répondu rapidement permettant à l'entreprise de faire le nécessaire pour avancer le chantier.

Elle fait valoir que ce dernier devait s’achever le 4 juin 2020 après prise en compte de la période du confinement strict (10.04.2020 + 1 mois et 25 jours), qu' à la fin mai 2020, l’entreprise se montrait très en retard par rapport aux travaux restant à accomplir, que le délai d'achèvement au 10 juillet 2020 qu’elle avait indiqué au maître d’œuvre n’a pas été tenu de son propre fait, comme les nouveaux délais annoncés par la suite par l’entreprise malgré une modification du marché de travaux proposée et acceptée par le maître d’œuvre réduisant la quantité des travaux restant à accomplir pour lui permettre d’accélérer la fin des travaux.

Elle soutient qu'au jour de la résiliation du marché de travaux par le maître d’œuvre sur son instruction, les travaux n’étaient pas achevés, que dans son courrier du 23 novembre 2020 annonçant une probable résiliation du marché de travaux, le maître d’œuvre a fait valoir son intention de faire application des pénalités de retard contractuellement prévues qui étaient à cette date chiffrés à la somme de 20.400 € H.T. soit 24.480 € TTC correspondant à 102 jours (102 x 200 € H.T.), qu'au jour de la résiliation du marché, le 10 décembre 2020, le nombre de jours est de 119.

Elle fait valoir s'agissant de sa demande de dommages et intérêts que compte-tenu de la date initiale de fin des travaux automatiquement reportée au 4 juin 2020 du fait de la période du confinement lié à l’épidémie de la COVID-19, elle escomptait au bénéfice de l’engagement pris par l’entreprise que celle-ci achève ses travaux au plus tard le 10 juillet 2020 et avoir reporté la mise en location de son bien à compter de cette date.

Elle fait valoir que suite aux reports demandés par l'entreprise, elle n'a pu mettre en location son bien pendant toute la période estivale, même après que celle-ci ait libéré le chantier fin décembre 2020, le temps de faire reprendre le chantier par une autre entreprise et de terminer les travaux restés inachevés.

Sur les demandes de la SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI-LOURTET

Aux termes des dispositions de l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Aux termes de l'article 1103 du code civil les conventions tiennent lieu de loi entre ceux qui les ont faites.

Aux termes de l'article 1104 du code civil , les contrats doivent être négociés de bonne foi.
Aux termes de l'article 1231-1 du code civil le débiteur est condamné s'il y a lieu au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation soit à raison du retard dans l'exécution s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Aux termes de l'article 1794 du code civil le maître peut résilier par sa seule volonté le marché à forfait quoique l'ouvrage soit déjà commencé en dédommageant l'entrepreneur de toutes ses dépenses tous ses travaux et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.

En l'espèce, le 3 juillet 2020 a été signé entre LA SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION MORSELLI LOURTET et la SCI ANAIS un contrat de marché à prix global forfaitaire ferme et non révisable d'un montant de 82295, 845 euros TTC.

Le contrat mentionne comme maître d'oeuvre MATTEO GENNARI ARCHITECTE.

Le contrat fait état de documents contractuels qui prévalent l'un sur l'autre dans l'ordre suivant: le présent marché à forfait, les plans et dessins définissant l'ouvrage établis par le maître d'œuvre, le devis.

Il y a lieu de relever que le devis de référence n'est pas mentionné dans ce contrat.

Il n'est pas contesté par les parties que le contrat fait référence au devis 190364 du 11 décembre 2019 pour un montant de 62 961,25 euros versé au débat, qui ne comporte aucune signature.

Les parties s'opposent sur les conditions dans lesquelles a été mis fin à l'intervention de la société MORSELLI LOURTET, celle-ci soutenant voir été évincée par courriers des 23 novembre 2020 et 10 décembre 2020 par décision unilatérale du maître de l'ouvrage sans que lui été laissé la possibilité légale de procéder à la levée des réserves consécutives à la réception contradictoire des travaux le 6 novembre 2020, indiquant avoir contesté les désordres invoqués par courriel des 1er décembre 10 décembre 2020 et la SCI ANAIS indiquant avoir procédé à la résiliation du marché de travaux alors que ces derniers n'étaient pas achevés en raison du retard accumulé sur le chantier et de l'existence de malfaçons listés dans ses courriers des 23 novembre 2020 et 10 décembre 2020.

Il n'est mentionné contractuellement dans le marché aucune condition spécifique relative à la résiliation du contrat mais aux termes des dispositions de l'article 1794 du code civil précité la faculté de résiliation est donnée au maître de l'ouvrage en dehors de faute de la part du constructeur.

Il n'est pas contesté que la SCI ANAIS a mis fin unilatéralement au contrat par courrier des 23 novembre 2020 et 10 décembre 2020.

Force est de constater qu'il n'est pas versé aux débats de procès verbal de réception signé par les parties, que le courrier du 23 novembre 2020 mentionne un retard récurrent dans la réalisation du chantier avec une annexe jointe de deux colonnes l'une mentionnant les « travaux à réaliser » et l'autre mentionnant «  état d'avancement des travaux constatés le 6 /11/2020 ».

Les « réserves » mentionnées unilatéralement sur cette dernière colonne ne peuvent constituer un procès - verbal de réception.

En l'absence de tout autre élément de preuve tels qu'un procès verbal de constat d'huissier la réalité des désordres invoqués n'est pas établie d'autant qu'ils sont contestés par l'entreprise.

S'agissant des retards de l'entreprise dans la réalisation des travaux invoquées par la SCI ANAIS , il y a lieu de relever que l'article 1794 du code civil ne crée pas d'obligation au profit de l'entrepreneur quant au délai d'exécution du marché.
Par conséquent la SCI ANAIS doit dédommager l'entrepreneur de ses dépenses , de ses travaux et ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.

Il n'est pas contesté par les parties que le marché initial a été modifié par la situation 1 du 3 juillet 2020 ramenant le montant du marché à la comme de 61 546 euros HT soit 67700 ,60 euros TTC , que la SCI ANAIS a versé la somme de 46 690,70 € d'acomptes.

La société MORSELLI LOURTET sollicite la somme de 1450 euros HT au titre de la réalisation de travaux supplémentaires. Cependant le contrat de marché de travaux stipule dans son article 8 que les travaux en modification du marché initial feront l'objet d'ordre de service ou d'avenants chiffrés par l'entrepreneur et signés par les deux parties.

Faute de justifier d'un document respectant le formalisme contractuel , seul un devis 200306 du 7 novembre 2020 non signé étant produit, cette demande sera rejetée.

Par conséquent la SCI ANAIS sera condamnée à payer la somme de 21009,90 euros (soit 61546 HT X 0,10 = 6154,60, 61546+6154,6 = 67700,60 TTC, 67700,60– 46690,70 € (acomptes) = 21009,90 euros) à la société MORSELLI LOURTET avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 octobre 2021.

Il convient d’ordonner la capitalisation des intérêts échus de cette somme pour une année entière dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

Sur les demandes reconventionnelles de la SCI ANAIS

Sur la demande au titre des pénalités de retard

Aux termes de l'article 1152 du code civil lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.

La SCI ANAIS sollicite la somme de 28560 euros TTC au titre des pénalités de retard en application du contrat de marché conclu le 3 février 2020 soit pour 119 jours.

La société MORSELLI LOURTET soutient que suite aux modifications intervenues, le marché a été actualisé par la situation 1 du 8 juillet 2020, que ce document ne comporte plus de délai d'exécution, que le 4 juillet 2020 l'entreprise a communiqué un devis 200154 en indiquant que l'acceptation de ce devis vaut annulation de toutes les pénalités de retard, qu'en tout état de cause le retard est du exclusivement aux restrictions et confinement due à l'épidémie de COVID et à l'attitude du maitre de l'ouvrage, qu'aucun préjudice n'est avéré, que subsidiairement la norme AFNOR NFP 03,100 plafonne les indemnités de retard à 5% du montant total du marché soi la somme maximale de 3077 euros .

En l'espèce le contrat de marché du 3 février 2020 stipule au titre du délai et retard d'exécution un délai d'exécution du 20 janvier 2020 au 10 avril 2020, et au titre du montant des pénalités de retard journalières la somme de 200 € HT/J plafond AFNOR NF-17.

Compte tenu de la période de confinement ce délai a été reporté à un mois et 25 jours après soit au 4 juin 2020.

La société MORSELLI LOURTET ne peut invoquer l'inexistence d'un délai contractuel suite à la signature de la situation n° 1 du 3 juillet 2020, dès lors que le contrat de marché comme déjà indiqué plus haut prévoit dans son article 8 que les travaux en modification du marché initial feront l'objet d'ordre de service ou d'avenants chiffrés par l'entrepreneur et signés par les deux parties.

En l'occurrence, il est manifeste que cette situation n° 1 est relative au montant des travaux, corrigées à la main et n'a pas pour objet de remettre en cause les pénalités de retard contractuellement prévues initialement.

Seul le mail de la SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET du 4 juillet 2020 indiquant que l'acceptation du devis 200154 entrainera l'annulation de toutes les pénalités évoqué est produit aux débats, non le devis 200154.

En tout état de cause ce mail,établi de manière unilatérale, par la SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET ne peut valoir valeur contractuelle entre les parties .

La SCI ANAIS produit plusieurs courriers des 29 mai 2020, 26 juin 2020 à l'égard de la société MORSELLI faisant état des retards dans le chantier, retards que la société MORSELLI LOURTET ne conteste pas évoquant un changement de couleur tout en précisant dans un mail du 22 juillet 2020 ne pas avoir de traces écrites à cette fin.

Cependant il convient de constater qu'un mail du 29 mai 2020 du maître d'œuvre, soit deux mois avant, mentionne dèjà explicitement les couleurs des coulisses, embrasures et autres.

Dès lors la demande des pénalités de retard est fondée en son principe.

Aussi il y a lieu de condamner la société MORSELLI LOURTET au paiement d'indemnités de retard.

La norme AFNOR NF-17 visée au contrat n'est pas produite aux débats.

La SCI ANAIS ne réplique pas au moyen selon lequel la norme applicable est la NF 03.100.

Il n’est fait aucune référence à cette norme dans le contrat de marché.

Dès lors il ne peut être considéré qu’elle ait entendu s’y soumettre.

Toutefois cette norme ne peut être totalement occultée dans la réflexion menée quant au montant dû au titre des pénalités de retard.

Le juge dispose d’un pouvoir modérateur en matière de clause pénale, ce que sont les pénalités de retard prévues au planning, si celle-ci apparaît manifestement excessive ou dérisoire.

La pénalité de retard à hauteur de 200 € par jour de retard prévue en l’espèce apparaît particulièrement élevée et son montant total de 28560 €TTC correspondant à plus de 40 % du montant total final du marché, excessif.

Dans ces conditions il y a lieu de retenir une pénalité de retard limitée à 5% du montant total final du marché, soit 61546 X 5/100= 3077 euros.

La société MORSELLI LOURTET sera condamnée à payer à la SCI ANAIS la somme de 3077 euros au titre des pénalités de retard.

Sur la demande de dommages et intérêts

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La SCI ANAIS sollicite la somme de 20 000 euros de dommages et intérêts du fait de l'impossibilité de mettre son bien en location pendant la période estivale 2020.

La SCI ANAIS produit diverses factures de travaux qui datent de 2021, qui ne justifient pas d'un lien suffisant avec les malfaçons invoquées dont il a été indiqué plus haut qu'elles n'étaient pas étayées.

Cette demande sera par conséquent rejetée .

Sur l'exécution provisoire

Conformément à l’article 514 du code de procédure civile Les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Rien ne justifie que l'exécution provisoire soit écartée, elle sera par conséquent ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Eu égard à la solution du litige, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties leurs frais irrépétibles non compris dans les dépens.

La SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET et la SCI de droit monégasque ANAIS seront en conséquence déboutées de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de la solution du litige, chaque partie gardera à sa charge les dépens qu’elle a exposés au cours de l’instance,

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort par décision mise à disposition au greffe,

CONDAMNE la SCI de droit monégasque ANAIS prise en la personne de son représentant légal à payer la somme de 21 009,90 euros (vingt et un mille neuf euros et quatre vingt dix centimes) à la SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 octobre 2021,

ORDONNE la capitalisation des intérêts échus de cette somme pour une année entière dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

DÉBOUTE la SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET de sa demande enpaiement de la somme de 1450 €,

CONDAMNE la SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET prise en la personne de son représentant légal à payer à la SCI de droit monégasque ANAIS la somme de 3077 euros (trois mille soixante dix sept euros) au titre des pénalités de retard,

DÉBOUTE la SCI de droit monégasque ANAIS de sa demande de dommages et intérêts,

ORDONNE l'exécution provisoire,

DÉBOUTE la SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET et la SCI de droit monégasque ANAIS de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que la SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES ÉTABLISSEMENTS MORSELLI LOURTET et la SCI de droit monégasque ANAIS garderont chacune à leur charge les dépens qu’elles ont exposés au cours de l’instance.


LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nice
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01134
Date de la décision : 30/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 07/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-30;22.01134 ?
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