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11/06/2024 | FRANCE | N°22/00632

France | France, Tribunal judiciaire de Nice, 2ème chambre civile, 11 juin 2024, 22/00632


COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE

(Décision Civile)


JUGEMENT : [P] [T], [X] [T] /
[N] [E], [G] [W] épouse [E],
Société [J]-[S]-[R]-[I]-[B]-[O]- [F]-[K]-[D]-[Z]-[M]-[U], Société LOQUIS

MINUTE N°
Du 11 Juin 2024

2ème Chambre civile
N° RG 22/00632 - N° Portalis DBWR-W-B7G-OBLI

















Grosse délivrée à
Me Marianne FOUR
Me Hélène BERLINER

expédition délivrée à
Me Richard dixon PYNE

le

mention

s diverses
Par jugement de la 2ème Chambre civile en date du
onze Juin deux mil vingt quatre


COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Mélanie MORRAJA-SANCHEZ,
Assesseur : Karine LACOMBE,
Assesseur : F...

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE

(Décision Civile)

JUGEMENT : [P] [T], [X] [T] /
[N] [E], [G] [W] épouse [E],
Société [J]-[S]-[R]-[I]-[B]-[O]- [F]-[K]-[D]-[Z]-[M]-[U], Société LOQUIS

MINUTE N°
Du 11 Juin 2024

2ème Chambre civile
N° RG 22/00632 - N° Portalis DBWR-W-B7G-OBLI

Grosse délivrée à
Me Marianne FOUR
Me Hélène BERLINER

expédition délivrée à
Me Richard dixon PYNE

le

mentions diverses
Par jugement de la 2ème Chambre civile en date du
onze Juin deux mil vingt quatre

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Mélanie MORRAJA-SANCHEZ,
Assesseur : Karine LACOMBE,
Assesseur : Françoise BENZAQUEN,
Greffier : Estelle AYADI,

DEBATS

A l’audience du 19 mars 2024 les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu le 11 Juin 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction.

PRONONCÉ :

Par mise à disposition au Greffe le 11 Juin 2024 signé par Mélanie MORA, Présidente, et Rosalie CONTRERES, faisant fonction de Greffier.

NATURE DE LA DÉCISION :
contradictoire, en premier ressort, au fond.

DEMANDEURS:

M. [P] [T]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Richard dixon PYNE, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant
Mme [X] [T]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Richard dixon PYNE, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant

DEFENDEURS:

M. [N] [E]
[Adresse 2]
[Localité 9]
représenté par Me Marianne FOUR, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant
Mme [G] [W] épouse [E]
[Adresse 2]
[Localité 9]
représentée par Me Marianne FOUR, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant
SCP DAMIANO-CONYNCK- PANNETIER BOYSSON MIECHEL FIORONI-, Notaires associés
[Adresse 6]
[Localité 9]
représentée par Me Hélène BERLINER de la SCP D’AVOCATS BERLINER-DUTERTRE, avocats au barreau de NICE, avocats plaidant
SARL LOQUIS
[Adresse 4]
[Localité 9]
représentée par Me Marianne FOUR, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant

*****

Vu l'exploit d'huissier du 23 juin 2014, par lequel monsieur [P] [T] et madame [X] [T] ont assigné devant le tribunal de céans monsieur [N] [E], madame [G] [W] épouse [E], la SCP [J] [S], [R] [I] [B] [O] [F] [K] [D] [Z] [M] [U] et la SARL LOQUIS, au visa des articles 1108,1110,1117,1602,1603,1604,1382,1147 du code civil, aux fins de voir constater que leur consentement est entaché d'une erreur sur les qualités substancielles du bien immobilier sis à [Adresse 3], [Adresse 8], cadastré AC [Cadastre 5], suivant acte notarié de vente du 14 juin 2012 de maître [J], notaire associé à [Localité 9], de voir juger que la vente du bien est nulle, de voir ordonner une remise en état des parties et de voir condamner les époux [E] à leur payer la somme totale de 530.071,67 euros, à titre subsidiaire de voir constater que les époux [E] n'ont pas respecté leur obligation de délivrer un bien conforme, de voir juger que la vente intervenue le 14 juin 2012 est nulle, de voir condamner les époux [E] à leur payer la somme de 81.905,40 euros, de voir constater que l’agence LOQUIS a commis une faute délictuelle qui leur a causé un préjudice financier, de voir condamner l'agence LOQUIS à leur payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, de voir constater que la SCP [J] [S] [R] [I], [B] [O] [F] [K] [D] [Z] [M] [U] a commis une faute, de voir condamner la SCP [J] [S] [R] [I], [B] -[O], [F] [K] [D] [Z] [M] [U] à leur payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts, de voir condamner solidairement M. [N] [E], Mme [G] [W] épouse [E], la SCP [J] [S] [R] [I] [B] [O] [F] [K] [D] [Z] [M] [U] et la SARL LOQUIS à la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre aux dépens ;

Vu l'ordonnance de mise en état en date du 27 septembre 2018 qui a :
-Rejeté le moyen soulevé tiré de l'irrecevabilité de l'assignation SCP [B] -[O], [J] [R] [S] [F],
-Débouté monsieur [P] [T] et madame [X] [T] de leur demande d'expertise,
-Renvoyé le dossier à la mise en état du 20 décembre 2018,
-Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-Réservé les dépens ;

Vu l'appel interjeté sur l'ordonnance du juge de la mise en état ;

Vu le sursis à statuer prononcé le 10 octobre 2019 dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise judiciaire ordonnée par la cour d'appel d'AIX EN PROVENCE le 5 juin 2019 ;

Vu le dépôt du rapport d'expertise judiciaire le 23 juillet 2021 ;

Vu les dernières conclusions de monsieur et madame [T] (rpva 30 octobre 2023) qui sollicitent de voir :
Vu les articles 56 et 126 du code de procédure civile
Vu les articles anciens 1 108, 1110, 1117 du Code civil,
Vu les articles 1602, 1603, 1604, 1610 et 1611 du Code civil,
Vu les articles anciens 1382 et 1383 du Code civil,
-JUGER que l'assignation delivrée par les époux [T] n’est pas nulle du fait de la
communication des pièces sous bordereau
-JUGER que leurs demandes sont recevables en raison de la publicité de l’assignation au service des publicités foncières de [Localité 9]
A titre principal,
-JUGER que la vente intervenue du bien sis à [Adresse 3], [Adresse 8], cadastrée AC [Cadastre 5], passée suivant acte de vente notarié du 14 juin 2012 de Maitre [J], notaire associé à [Localité 9], sur le fondement des articles 1108 et 1110 du Code civil, est nulle.
-ORDONNER une remise en état des parties.
-CONDAMNER solidairement les époux [E], la SCP [J] [S] [R] [I] [B]-[O] [F] et [K] [D] [Z] [M] [U], Notaires associés à [Localité 9] et la SARL LOQUIS à leur payer la somme de 531.277,73 €,
A titre subsidiaire,
-JUGER que la vente intervenue du bien sis à [Adresse 3], [Adresse 8], cadastrée AC [Cadastre 5], passée suivant acte de vente notarié du 14 Juin 2012 de Maitre [J], notaire associé à [Localité 9], sur le fondement des articles 1604 et suivants du Code civil, est résolue.
-ORDONNER une remise en état des parties.
-CONDAMNER solidairement les époux [E], la SCP [J] [S] [R] [I] [B]-[O] [F] et [K] [D] [Z] [M] [U], Notaires associés à [Localité 9] et la SARL LOQUIS à leur payer la somme de 531.277,73 €.
-CONDAMNER solidairement les époux [E], la SCP [J] [S] [R] [I] [B]-[O] [F] et [K] [D] [Z] [M] [U], Notaires associés à [Localité 9] et la SARL LOQUIS à leur payer la somme totale de 20.000 € en reparation de leur prejudice moral.
A titre infiniment subsidiaire,
-CONDAMNER solidairement les époux [E], la SCP [J] [S] [R] [I] [B]-[O] [F] et [K] [D] [Z] [M] [U], Notaires associés à [Localité 9] et la SARL LOQUIS à leur payer la somme totale de 255.818,57 € en réparation de leur entier préjudice.
EN TOUT ETAT. DE CAUSE
-CONDAMNER solidairement les époux [E], l’Agence LOQUIS et la SCP [J] [S] [R] [I] [B] [O] [F] et [K] [D] [Z] [M] [U], notaires associés, à leur payer la somme 8.000 € sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile.
-CONDAMNER solidairement les époux [E], l’Agence LOQUIS et la SCP [J] [S] [R] [I] [B] [O] [F] et [K] [D] [Z] [M] [U], notaires associés à [Localité 9], aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions de monsieur et madame [E] et de la SARL LOQUIS (rpva 30 novembre 2023) qui sollicitent de voir :
-DEBOUTER les époux [T] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
-CONDAMNER les époux [T] à leur payer chacun la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
-CONDAMNER les époux [T] aux entiers dépens de l’instance ;

Vu les dernières conclusions de la SCP [B] [O] [J] [H] [A] [F] notaires associés (rpva 16 novembre 2022) qui sollicite de voir :
Vu l’article 1240 du code civil,
Vu les pièces aux débats
-JUGER que l’acte de vente rédigée par Maître [J] en date du 14 juin 2012 n’encourt aucune nullité ni résolution ;
En tout état de cause,
-JUGER qu'elle n’a commis aucun manquement fautif, ayant causé le préjudice invoqué par les époux [T] ;
-JUGER que les époux [T] ne justifient d’aucun préjudice indemnisable actuel, direct et certain causé par un manquement de sa part,
En conséquence,
-DEBOUTER les époux [T] ou toute autre partie de l’ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre ;
-CONDAMNER les époux [T] ou tout succombant à lui payer la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître BERLINER, avocat aux offres de droit,
-DIRE n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;

Vu l'ordonnance de clôture du 19 janvier 2023 fixant la clôture différée au 6 novembre 2023 ;

Vu le renvoi de l'affaire à l'audience collégiale du 19 mars 2024 par simple mention au dossier ;

MOTIFS :

Suivant acte authentique en date du 14 juin 2012, les époux [T] ont acquis une maison jumelée à usage d’habitation, dont la division a été effectuée peu de temps avant la vente par les époux [E], en qualité de constructeurs-vendeurs, sur terrain d’environ 1220 m², à [Localité 1], [Adresse 3], [Adresse 8], cadastrée AC [Cadastre 5], moyennant le prix de 480.000 €, au sein du lotissement le [Adresse 7].

Cette vente est intervenue par l'intermédiaire de l’agence immobilière LOQUIS.

Les époux [T] exposent que le bien n'est pas conforme au permis de construire, sollicitent l'annulation de la vente pour erreur sur les qualités substancielles de la chose, alors que le jour de la vente, l'agence LOQUIS, les vendeurs et le notaire ont soutenu la conformité du bien au permis de construire.

Ils concluent que l'absence de conformité au permis de construire est rédhibitoire comme constituant une erreur portant sur une qualité substantielle, ce qui est constitutif d’un vice du consentement qui affecte la validité de la vente.

Ils sollicitent l’annulation de la vente et la remise en l’état des parties, soit la condamnation solidaire des époux [E], de la SCP [J] [S] [R] [I] [B] [O] [F] [K] [D] [Z] [M] [U], Notaires associés et de la SARL LOQUIS à leur rembouser le prix de vente et les frais d’amélioration du bien soit la somme totale de 534.746, 13 euros.

A titre subsidiaire, ils sollicitent la résolution de la vente pour absence de délivrance conforme, sur le fondement des articles 1602 et 1603 du code civil.

Ils soulignent que depuis 9 ans, ils ne peuvent jouir paisiblement de leur bien.

A titre infiniment subsidiaire, ils sollicitent l'indemnisation de leur préjudice, soit la somme de 235.818,57 euros au titre de leur préjudice matériel et la somme de 20.000 euros au titre de leur préjudice moral.

Ils invoquent la responsabilité du notaire, au motif de son défaut de vérification des déclarations des vendeurs et de la SARL LOQUIS lors de la vente.

Ils ajoutent que la qualification de “maison jumelée” retenue par le notaire est impropre, que le bien est invendable car il doit faire l'objet d'une constitution de copropriété, que contrairement aux mentions de l'acte notarié, la parcelle fait partie d'un lotissement avec règlement, que la faute du notaire est incontestable.

Ils ajoutent que le notaire ne s'est pas assuré de l'existence d'une étude du sol, pourtant indispensable, que la mention de la date d'achèvement de la construction dans l'acte notarié est fausse.

Ils invoquent également la responsabilité de l'agence immobilière LOQUIS, mandatée par les époux [E], au motif qu'elle avait pleinement connaissance de la configuration de la maison au moment de la vente et qu'il est impossible qu'elle n’ait pas remarqué la contradiction entre le permis de construire initial, le permis moditicatif et l’état de la construction au moment de la vente, qu'en sa qualité de professionnel, elle aurait du les alerter de ces anomalies.

En réponse, les époux [E] et la SARL LOQUIS concluent au rejet des demandes des époux [T] au motif qu'il n'y a pas d'erreur sur les qualités substancielles de la chose vendue, que la Commune de [Localité 1] leur a délivré un certificat de conformité en date du 8 avril 2010, pour le permis de construire initial et les permis modificatifs, établi apres dépôt d’une déclaration d’achèvement de travaux après visite des lieux par le 1er adjoint à l’urbanisme.

Ils exposent que les travaux font l’objet d’une déclaration d’achevement et que passé un délai de trois mois, la conformité de ces travaux est obtenue soit, aprés visite des lieux, par un certificat de conformité, soit tacitement, et qu'une fois ce délai écoulé, la conformité du bien construit au permis est définitive.

Ils indiquent que la commune de [Localité 1] disposait d’un délai expirant le 6 iuillet 2010 pour
contester la conformité du bien aux permis, que cette conformité est définitivement acquise, comme mentionné valablement dans l'acte de vente.

Ils ajoutent que la position de la commune de [Localité 1] est ambigue, que dans ses courriers, elle pretend que le certificat de conformité ne portait que sur les travaux objets du permis initial de 2008 et que l’ouvrage ne serait pas conforme au permis modificatif de 2009, alors que lors de la visite du 8 avril 2010, les travaux objets du permis de 2009 avaient déjà été exécutés, qu'elle n'a pourtant jamais dressé de procès verbal d'infraction.

Ils soutiennent que la mairie de [Localité 1] ne peut pas revenir sur sa décision de conformité.

Ils concluent que l'expert judiciaire a largement outrepassé sa mission, que sa mission était circonscrite aux non-conformités au permis alléguées par Monsieur [Y], qu'il a élargi sa mission à l'intégralité des ouvrages.

Ils ajoutent que le certificat de conformité s'impose à l'expert judiciaire, que le permis initial de 2008 n’a jamais été contesté en justice par le préfet et encore moins annulé.

Ils ajoutent que les travaux de mise en conformité proposés par l’architecte des époux [T] portent principalement sur des travaux interieurs non assujettis à permis de construire, des travaux sans lien avec l'objet du litige, des travaux de gros oeuvre objets du 1er permis de construire intégrés au certificat de conformité obtenu.

Ils concluent que le bien délivré est conforme aux dispositions de l'acte de vente, qu'aucune faute ne peut être retenue à l’encontre de l'agence LOQUIS, dont la responsabilité doit être écartée.
Ils ajoutent que Monsieur et Madame [T] ne justifient d’aucune raison pour laquelle ils ne pourraient pas profiter de leur bien, même dans l’hypothese où il n’existerait pas de certificat de conformité, qu'ils réclament le remboursement de frais engagés depuis l’acquisition tels que l’installation d’une piscine et d’un systeme de climatisation …, dépenses qui démontrent la parfaite jouissance des lieux.

Ils concluent que le bien peut être conservé en l'état sans aucune difficulté, que les demandeurs ne justifient pas d'avoir mis le bien en vente et d'avoir essuyé un échec pour cause de non conformité, qu'ils ne justifient d'aucun préjudice certain et actuel, ni d'un préjudice futur ou d'une perte de chance.

Ils soutiennent que le bien a été acquis en parfaite connaissance de cause, puisque l’ensemble des étapes administratives de la propriété ont été mentionnées et annexées à l’acte de vente, qu'il a été accepté avec ses éventuelles non-conformités.

En réponse, la SCP [J] [S] [R] [I] [B] [O] [F] [K] [D] [Z] [M] [U] conclut au rejet de l'ensemble des demandes, au motif que le notaire n'a commis aucune faute.

Elle fait valoir qu'aucun élément ne permettait à Me [J] de douter de la légalité de ce certificat, le notaire n’ayant aucun devoir d’investigations complémentaires à effectuer en présence du document d’urbanisme produit et annexé à l'acte de vente.

Elle ajoute que contrairement à ce qui est affirmé par les demandeurs, l’acte de vente précise bien en pages trois et quinze que le bien forme le lot numéro deux du lotissement [Adresse 7].

Elle soutient que suite aux divers permis de construire obtenus à titre principal et modificatifs par Monsieur [N] [E] auprès de la mairie de [Localité 1], ce dernier a procédé à la déclaration d’achèvement des travaux reçue par la mairie le 6 avril 2010, attestant de leur conformité, que l’administration avait trois mois pour contrôler la véracité de la déclaration ou cinq mois pour procéder au recollement, ce qui n'a pas été le cas, que l’administration n’a donc plus la possibilité de contester la conformité.

Elle ajoute que l’administration qui n’a plus la possibilité de contester la conformité des travaux, a cependant conservé pendant trois ans à compter de leur achèvement, un droit de visite et de communication des documents techniques, en vertu de l’article L151-1 du code de la construction, permettant des éventuelles sanctions, que ce délai de trois ans a commencé à courir à compter du 6 avril 2010 date de la réception de la déclaration d’achèvement et a donc a expiré depuis le 6 avril 2013.

Elle soutient qu'aucune sanction administrative ne peut plus être encourue au titre de la construction, qu'aucune action civile ni pénale n'a été intentée par la Commune, ni par un tiers, que ces actions seraient prescrites si elles étaient engagées.

Sur la demande de résolution de la vente litigieuse pour défaut de conformité, elle expose que les époux [T] ne peuvent pas contester que le bien livré est parfaitement conforme en ce qui concerne sa consistance à celui qu’ils ont visité, lequel ne comportait déjà pas de garage.

Elle ajoute que le préjudice moral invoqué à hauteur de 20 000 € du fait d’un trouble de jouissance n’est pas démontré, le bien livré par les époux [E] étant parfaitement conforme à celui visité.

Sur la demande de nullité de la vente pour erreur sur une qualité substantielle :

Aux termes de l'article 1108 du code civil, en sa version applicable, quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention : le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter, un objet certain qui forme la matière de l'engagement, une cause licite dans l'obligation.

Aux termes de l'article 1110 du même code, en sa version applicable, l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet.
Elle n'est point une cause de nullité, lorsqu'elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention.

Aux termes de l'article R 462-6 du code de l’urbanisme, à compter de la date de réception en mairie de la déclaration d'achèvement, l'autorité compétente dispose d'un délai de trois mois pour contester la conformité des travaux au permis ou à la déclaration.
Le délai de trois mois prévu à l'alinéa précédent est porté à cinq mois lorsqu'un récolement des travaux est obligatoire en application de l'article R462-7.

Les époux [T] sollicitent à titre principal de voir prononcer la nullité de la vente au motif qu’ils auraient commis une erreur sur les qualités substantielles de la maison, en ce qu’ils croyaient avoir acquis une maison bénéficiant d’un certificat de conformité alors que tel n'est pas le cas.

Ils soutiennent que cela constitue une erreur qui porte sur une qualité substantielle, constitutive d’un vice du consentement, qui affecte la validité de la vente.

Cependant, il est établi par les pièces versées au débat, que suite aux divers permis de construire obtenus (principal et modificatifs) par les époux [E], auprès de la mairie de [Localité 1], ces derniers ont procédé à la déclaration d’achèvement des travaux, reçue par la mairie le 6 avril 2010.

La Mairie leur a alors délivré un certificat de conformité en date du 8 avril 2010.

Il n'est pas contesté qu'à compter de cette date, l’administration avait trois mois pour contrôler la véracité de la déclaration ou cinq mois pour procéder au recollement, et que passé ces délais, l’administration n’a plus la possibilité de contester la conformité.

L'administration a conservé pendant trois ans à compter de leur achèvement, un droit de visite et de communication des documents techniques, en vertu de l’article L151-1 du code de la construction, permettant des éventuelles sanctions.

Aux termes de cet articles, les bâtiments sont conçus, construits, équipés et aménagés ou rénovés de manière à ne pas porter atteinte à la santé des personnes qui y sont présentes dans des conditions normales d'occupation et d'usage de ces bâtiments et, le cas échéant, compte tenu de l'environnement dans lequel ils se situent.

Ce délai de trois ans a commencé à courir à compter du 6 avril 2010 date de la réception de la déclaration d’achèvement et a donc a expiré depuis le 6 avril 2013.

Il n'est pas contesté qu'aucune visite ou communication de documents techniques permettant le constat d’une non-conformité n’a été faite dans ce délai.

Aucun procès-verbal de constatation d’une infraction n’a été dressé avant le 6 avril 2013, ni postérieurement.

Il n'est pas démontré que la Commune aurait refusé un permis de construire au motif d'une éventuelle irrégularité de la construction, ni qu'un tiers aurait intenté une action sur le fondement d'une non-conformité de la construction, qui serait irrecevable comme prescrite.

Dès lors, il n'est pas démontré par les demandeurs qu'une sanction administrative puisse être encore encourue.

L’expert judiciaire n’a d'ailleurs émis aucun avis sur cette situation.

Au surplus, il n'est pas établi que les demandeurs avaient fait de cette conformité une condition déterminante de leur consentement, alors qu'ils ne contestent pas avoir procédé à la visite du bien et avoir parfaitement pu observer sa consistance.

Ils reconnaissent notamment, dans leur courrier du 30 mai 2013 adressé à l’agence LOQUIS, avoir observé lors de leurs visites, que le bien ne comportait pas de garage contrairement à ce qui était mentionné au compromis de vente, celui-ci étant transformé en pièce habitable.

Enfin, aucun préjudice n'est subi.

En conséquence, la demande de nullité de la vente pour erreur sur une qualité substantielle sera rejetée, la maison en cause bénéficiant d’un certificat de conformité, non attaquable.

Sur la résolution de la vente pour absence de délivrance conforme :

Aux termes de l'article 1604 du code civil, la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur.

Les époux [T] sollicitent, à titre subsidiaire, la résolution de la vente aux motifs que le bien immobilier qui leur a été livré ne correspond pas à ce qui avait été annoncé dans l’acte de vente, à savoir que le bien bénéficiait d’un certificat de conformité délivré par la mairie de [Localité 1] le 8 avril 2010, alors qu’en réalité le bien ne serait pas conforme aux règles de l’urbanisme.

Or, le bien est parfaitement conforme aux règles d’urbanisme, bénéficiant bien d’un certificat de conformité purgé de tout recours, comme développé dans le paragraphe précédent.

Ils seront déboutés de l'ensemble de leurs demandes, y compris de leur demande susbidiaire et de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur le manquement fautif du notaire :

Les époux [T] font reproche au notaire en sa qualité de rédacteur d’acte, d’avoir manqué à son obligation de vérification des déclarations du vendeur, les époux [E] sur
la construction au regard des règles d’urbanisme.

Ils reprochent au notaire de ne pas avoir vérifié si le certificat de conformité délivré par la Mairie était valable et de ne pas s’être assuré de l’exactitude de la déclaration du vendeur suivant laquelle il affirme n’avoir entrepris depuis l’obtention de la conformité, de travaux dans les biens vendus.

Eu égard à la solution du litige, les demandes à l'encontre du notaire seront rejetées, aucun manquement ne pouvant être reproché à la SCP notariale.


Sur les demandes accessoires :

Il convient de rappeler que l'exécution provisoire est de droit.

Il n'y a pas lieu de l'écarter.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de monsieur et madame [E] et de la SARL LOQUIS leurs frais irrépétibles non compris dans les dépens.

Les époux [T] seront condamnés à payer à monsieur et madame [E] la somme de 5.000 euros et à la SARL LOQUIS la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCP [B] [O] [J] [H] [A] [F] notaires associés ses frais irrépétibles non compris dans les dépens.

Les époux [T] seront condamnés à lui payer la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Partie succombant à l'instance, les époux [T] seront condamnés aux entiers dépens de l’instance, qui seront distraits conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire en premier ressort par mise à disposition au greffe,

DEBOUTE monsieur [P] [T] et madame [X] [T] de l'ensemble de leurs demandes, y compris de leur demande susbidiaire et de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit,

DIT qu'il n'y pas lieu de l'écarter,

CONDAMNE monsieur [P] [T] et madame [X] [T] à payer à madame [G] [E] et monsieur [N] [E] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE monsieur [P] [T] et madame [X] [T] à payer à la SARL LOQUIS la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE monsieur [P] [T] et madame [X] [T] à payer à la SCP [B] [O] [J] [H] [A] [F] notaires associés la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE monsieur [P] [T] et madame [X] [T] aux entiers dépens de l’instance, qui seront distraits conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nice
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00632
Date de la décision : 11/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-11;22.00632 ?
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