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02/07/2024 | FRANCE | N°22/03181

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, 4ème chambre, 02 juillet 2024, 22/03181


SG




LE 02 JUILLET 2024

Minute n°


N° RG 22/03181 - N° Portalis DBYS-W-B7G-LWKM





C.P.A.M. DE LOIRE ATLANTIQUE

C/

[H] [I]
GROUPAMA LOIRE BRETAGNE
[O] [C]





Demande en réparation des dommages causés par d’autres faits personnels





1 copie exécutoire et certifiée conforme à :
la SELARL ARMEN
la SCP AVOCATS NORD LOIRE - 62
la SELARL LEXCAP - 15




délivrées le
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
---------------------------------------------

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QUATRIEME CHAMBRE


JUGEMENT
du DEUX JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE



Composition du Tribunal lors du délibéré :

Président :Nathalie CLAVIER, Vice Présidente,
Assesseur :Laëtitia FENA...

SG

LE 02 JUILLET 2024

Minute n°

N° RG 22/03181 - N° Portalis DBYS-W-B7G-LWKM

C.P.A.M. DE LOIRE ATLANTIQUE

C/

[H] [I]
GROUPAMA LOIRE BRETAGNE
[O] [C]

Demande en réparation des dommages causés par d’autres faits personnels

1 copie exécutoire et certifiée conforme à :
la SELARL ARMEN
la SCP AVOCATS NORD LOIRE - 62
la SELARL LEXCAP - 15

délivrées le
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
---------------------------------------------------

QUATRIEME CHAMBRE

JUGEMENT
du DEUX JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors du délibéré :

Président :Nathalie CLAVIER, Vice Présidente,
Assesseur :Laëtitia FENART, Vice-Présidente,
Assesseur :Stéphanie LAPORTE, Juge,

GREFFIER : Sandrine GASNIER

Débats à l’audience publique du 09 AVRIL 2024 devant Nathalie CLAVIER, siégeant en Juge Rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

Prononcé du jugement fixé au 02 JUILLET 2024.

Jugement Réputé contradictoire rédigé par Nathalie CLAVIER, prononcé par mise à disposition au greffe.

---------------
ENTRE :

C.P.A.M. DE LOIRE ATLANTIQUE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
Rep/assistant : Maître Flavien MEUNIER de la SELARL LEXCAP, avocats au barreau de NANTES

DEMANDERESSE.

D’UNE PART

ET :

Monsieur [H] [I], demeurant [Adresse 3]
Rep/assistant : Maître Philippe GRESLE de la SCP AVOCATS NORD LOIRE, avocats au barreau de NANTES

GROUPAMA LOIRE BRETAGNE, dont le siège social est sis [Adresse 2]
Rep/assistant : Maître Martine GRUBER de la SELARL ARMEN, avocats au barreau de SAINT-NAZAIRE

Monsieur [O] [C], demeurant [Adresse 1]

DEFENDEURS.

D’AUTRE PART

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Faits, procédure et prétentions des parties

Le 22 avril 2012, au cours d'un match de football opposant le club du [Localité 5] dont il était membre, au club de [Localité 6], Monsieur [O] [C] a été blessé à la jambe gauche à la suite d'un tacle de Monsieur [H] [I], joueur de l’équipe adverse, victime d’une facture fermée des diaphyse tibiale et peronière.

Par actes d’huissier délivrés les 12 et 18 juillet 2022, la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE a fait assigner Monsieur [H] [I], GROUPAMA LOIRE BRETAGNE, assureur du club de football de [Localité 6], et Monsieur [O] [C] devant le Tribunal Judiciaire de NANTES afin d’obtenir le remboursement des débours exposés à la suite de cet accident.

***

Suivant ses dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 09 août 2023, la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE sollicite du tribunal de :

Vu l'article 1240 du Code civil,
Vu l'article 1242 al.1 er du Code civil,
Vu l'article L.376-1 du Code de la sécurité sociale,

- Condamner solidairement Monsieur [I] et GROUPAMA à payer à la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE la somme de 8.304,83 euros au titre des prestations servies à Monsieur [C] ;

- Condamner sous la même solidarité Monsieur [I] et GROUPAMA à payer à la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE une indemnité de 1.162,00 euros au titre de ses frais de gestion, en application des dispositions des articles L 376-1 et L 454-1 du Code de la sécurité sociale ;
- Condamner solidairement Monsieur [I] et GROUPAMA à payer à la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE la somme de 2.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Les condamner aux entiers dépens ;
- Dire qu'il n'y a pas lieu à écarter l'exécution provisoire ;
- Déclarer le jugement commun et opposable à Monsieur [O] [C].

***

Suivant ses dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 18 septembre 2023, Monsieur [H] [I] sollicite du tribunal de :

Vu l'article 2226 du Code Civil,

- Déclarer prescrite l'action engagée le 12/7/2022 par la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE ;
- Subsidiairement, débouter purement et simplement la C.P.A.M. de ses demandes dirigées à l'encontre de Monsieur [I] ;
- En tout état de cause, condamner la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE au paiement de la somme de 2.000,00 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.

***

Suivant ses dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 02 mars 2023, GROUPAMA LOIRE BRETAGNE sollicite du tribunal de :

Vu l'article 1242 alinéa 1 er du Code civil,
Vu les dispositions des articles 699 et 700 du Code de procédure civile,
Vu les jurisprudences évoquées et les pièces produites aux débats,
Vu les présentes écritures,

- Constater que les garanties assurantielles de la compagnie GROUPAMA LOIRE BRETAGNE n'est pas démontrée, en l'absence de responsabilité de son assuré, le club “SION LES MINES”;
- Débouter en conséquence la C.P.A.M. de la Loire-Atlantique de ses demandes de condamnations ;
- Condamner la C.P.A.M. de la Loire-Atlantique à verser à la compagnie GROUPAMA LOIRE BRETAGNE la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamner la C.P.A.M. de la Loire-Atlantique à payer les entiers dépens ;
- Débouter la C.P.A.M. de la Loire-Atlantique de toutes ses demandes plus amples et contraires.

***

Monsieur [O] [C] n’a pas constitué avocat. La présente décision, susceptible d’appel, sera réputée contradictoire en application de l’article 472 du code de procédure civile.

***

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Une ordonnance de clôture a été rendue le 15 février 2024 et l’affaire a été fixée à l’audience du 09 avril 2024. Les parties ont été informées par le président que le jugement serait rendu le 02 juillet 2024 par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande principale de la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE

Sur la recevabilité de la demande

Aux termes de l'article 789 du code de procédure civile :
“Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :

[...]
6° statuer sur les fins de non-recevoir...
Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.”.

En l'espèce, seul le juge de la mise en état était compétent pour statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [H] [I] aux termes de ses dernières conclusions et fondée sur le délai de prescription prévu par l’article 2226 du code civil, de sorte que cette fin de non-recevoir est irrecevable devant le juge du fond.

Il convient donc de constater l'irrecevabilité de cette fin de non-recevoir.

Sur le bien-fondé de la demande

Conformément aux termes de l’article 1382 du code civil (dans sa version et numérotation applicable au litige), “tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer”.

En matière d'activité sportive et plus particulièrement concernant la responsabilité d'un pratiquant à l'égard d'un autre pratiquant, il convient de rappeler que chaque sport et certaines activités de loisir sont réglementés par des “règles de jeu”, dispositions spécifiques adoptées au sein de textes officiels ou de règlements fédéraux.

La mise en oeuvre de la responsabilité civile suppose que soit au préalable constatée la violation d'une telle règle de jeu.

Si cette dernière a été respectée, le pratiquant est exonéré de toute responsabilité civile, le simple fait de jeu ne pouvant causer un préjudice à un autre pratiquant.

La faute commise, en ne respectant pas une règle de jeu, est génératrice de responsabilité civile sous certaines conditions. Elle doit être intentionnelle et avoir une certaine gravité, a fortiori quand elle porte atteinte à la sécurité et l'intégrité physique de la victime.

En matière de football, la faute grossière est assimilée à une violation des règles de jeu. L'article 12 de la circulaire 12.05 de juillet 2011 de la Fédération Française donne la définition suivante de la faute grossière : “Un joueur se rend coupable d'une faute grossière s'il agit avec excès d'engagement ou brutalité envers un adversaire lorsqu'ils disputent le ballon quand il est en jeu. Un tacle qui met en danger l'intégrité physique d'un adversaire doit être sanctionné comme faute grossière... Dans le tacle avec violence, on entend un joueur qui avec un ou les deux pieds en avant, talon décollé ou non du sol, se lance contre un joueur en possession du ballon et qu'il touche ou non le ballon, la seule intention étant celle d'arrêter violemment le joueur adverse et ainsi de mettre éventuellement en danger son intégrité physique”...

Le principe posé par les règlements organisant la pratique d'un sport selon lequel la violation des règles du jeu est laissée à l'appréciation de l'arbitre chargé de veiller à leur application, n'a pas pour effet de priver le juge civil, saisi d'une action en responsabilité fondée sur la faute de l'un des pratiquants, de sa liberté d'apprécier si le comportement de ce dernier a constitué une faute à l'encontre des règles du jeu de nature à engager sa responsabilité.

En application des dispositions de l’article 1384 alinéa 1er (dans sa version et numérotation applicable au litige), les associations ayant pour but d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres au cours des compétitions sportives auxquelles ils participent, sont responsables des dommages qu'ils causent à cette occasion, à condition toutefois qu'une faute caractérisée par une violation des règles du jeu, leur soit imputable.

En l’espèce, les parties conviennent que Monsieur [O] [C] a été blessé le 22 avril 2012 lors d’un match de football qui opposait son club du [Localité 5] à celui de [Localité 6], victime à la 63ème minute de jeu d’un tacle “dangereux” de la part de Monsieur [H] [I], joueur de l’équipe adverse, lequel a alors été expulsé du terrain sur décision de l’arbitre.

La C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE soutient que ce faisant, Monsieur [H] [I] a commis une faute engageant tant sa responsabilité, que celle de son club, en application des dispositions susvisées des articles 1382 et 1384 alinéa 1er du code civil.

Cependant, force est de constater qu’au soutien de ses prétentions, elle se contente de produire la feuille de match sur laquelle figure la seule information suivante : “Monsieur [H] [I]... a taclé de manière très dangereuse, les deux pieds décollés du sol...”.

Aucun autre élément probant permettant d’apprécier les circonstances exactes de ce tacle n’est versé aux débats et notamment, aucun témoignage, ne serait-ce que celui de Monsieur [O] [C] qui n’a manifestement pas entendu, pour sa part, voir engagée la responsabilité de Monsieur [H] [I] et obtenir réparation de ses préjudices.

La décision de la commission de discipline ou tout autre justificatif de la sanction disciplinaire qui aurait été prise à l’encontre de Monsieur [H] [I] et à laquelle la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE fait référence, n’est par ailleurs pas produite.

Ainsi et même en tenant pour établi que le comportement de Monsieur [H] [I] ait constitué un manquement technique, la preuve de ce qu’il ait agi avec une maladresse caractérisée, une brutalité volontaire ou de façon déloyale, et de ce qu'il ait joué dans des conditions créant, pour son partenaire, un risque anormal n’est pas rapportée.

La violence, la brutalité ou la déloyauté de son geste, sa force disproportionnée ou superflue, ne peuvent être déduites de la seule gravité des blessures de Monsieur [O] [C].

Dans ces conditions, il convient de considérer que la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE ne rapporte pas la preuve d'une faute commise par Monsieur [H] [I].

Tant sa responsabilité, que celle de son club de [Localité 6], ne peuvent donc être retenues.

En conséquence, la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE sera déboutée de ses demandes formées à l’encontre de Monsieur [H] [I] et de GROUPAMA LOIRE BRETAGNE, assureur du club de [Localité 6].

Il n’y a pas lieu de déclarer le présent jugement opposable à Monsieur [O] [C] qui a été régulièrement mis en cause dans le cadre de la présente procédure et qui est donc partie à l’instance.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

La C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

L'équité s'oppose en revanche à sa condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il ne sera donc pas fait droit aux demandes de Monsieur [H] [I] et de GROUPAMA LOIRE BRETAGNE au titre de leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal,
Statuant par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort;

DÉCLARE la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [H] [I] irrecevable ;

DÉBOUTE la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE de ses demandes ;

CONDAMNE la C.P.A.M. de LOIRE ATLANTIQUE aux dépens ;

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Sandrine GASNIER Nathalie CLAVIER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/03181
Date de la décision : 02/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-02;22.03181 ?
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