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13/06/2024 | FRANCE | N°19/03089

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, 1ère chambre, 13 juin 2024, 19/03089


C.L

M-C P


LE 13 JUIN 2024

Minute n°

N° RG 19/03089 - N° Portalis DBYS-W-B7D-KC2B




[J] [F]

Association LA CRIFO

[K] [W] [F],

S.C.P. [T] [D]



C/

[B] [F]







Le 13/06/2024

copie exécutoire
et
copie certifiée conforme
délivrée à
Maître Vincent CHUPIN


copie certifiée conforme
délivrée à
Maître Emmanuel FOLLOPE


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
-----------------------------------------



PREMIERE CHAMBRE>

Jugement du TREIZE JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE



Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Géraldine BERHAULT, Première Vice-Présidente,
Assesseur :Florence CROIZE, Vice-présidente,
Assesseur :Mar...

C.L

M-C P

LE 13 JUIN 2024

Minute n°

N° RG 19/03089 - N° Portalis DBYS-W-B7D-KC2B

[J] [F]

Association LA CRIFO

[K] [W] [F],

S.C.P. [T] [D]

C/

[B] [F]

Le 13/06/2024

copie exécutoire
et
copie certifiée conforme
délivrée à
Maître Vincent CHUPIN

copie certifiée conforme
délivrée à
Maître Emmanuel FOLLOPE

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
-----------------------------------------

PREMIERE CHAMBRE

Jugement du TREIZE JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Géraldine BERHAULT, Première Vice-Présidente,
Assesseur :Florence CROIZE, Vice-présidente,
Assesseur :Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,

GREFFIER : Caroline LAUNAY

Débats à l’audience publique du 02 AVRIL 2024.

Prononcé du jugement fixé au 13 JUIN 2024, date indiquée à l’issue des débats.

Jugement Contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe.

---------------

ENTRE :

Association LA CRIFO, mandataire judiciaire de protection des majeurs, en qualité de curateur aux biens de M. [J] [F], désigné en cette qualité par jugement du 20 janvier 2022 rendu par le juge du contentieux et de la protection du Tribunal judiciaire de Nantes, dont le siège social est sis [Adresse 5]
Rep/assistant : Maître Vincent CHUPIN de la SELARL PUBLI-JURIS, avocats au barreau de NANTES

Monsieur [J] [F], sous curatelle renforcée par un jugement du Tribunal d’Instance de Nantes en date du 26 janvier 2017
né le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2]
Rep/assistant : Maître Vincent CHUPIN de la SELARL PUBLI-JURIS, avocats au barreau de NANTES

Madame [K] [W] [F], née le [Date naissance 3] 1959 à
[Localité 6] nommée curatrice à la personne de M. [J] [F] par jugement du tribunal d’instance de Nantes, née le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2]
Rep/assistant : Maître Vincent CHUPIN de la SELARL PUBLI-JURIS, avocats au barreau de NANTES

S.C.P. [T] [D] Es-qualité de mandataire judiciaire du GAEC DE L’OUCHE RONDE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
Rep/assistant : Maître Vincent CHUPIN de la SELARL PUBLI-JURIS, avocats au barreau de NANTES

DEMANDEURS.

D’UNE PART
ET :

Monsieur [B] [F], né le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 6], demeurant Lieu-dit [Adresse 1]
Rep/assistant : Maître Emmanuel FOLLOPE, avocat au barreau de NANTES

DEFENDEUR.

D’AUTRE PART

Exposé du litige
En 1982 a été constitué un groupement agricole d’exploitation en commun dénommé « GAEC DE L’OUCHE RONDE » entre [B] [F] et son fils [B], défendeur à la présente procédure.
Chacun des deux associés avaient effectué un apport de 375 000 Francs, soit 57 168,38 euros.
[J] [F], frère jumeau de [B] [F], a intégré le groupement en 1986 en remplacement de son père dont le départ a donné lieu à une réduction de capital.
En 2010, des difficultés sont apparues entre les associés, liées à l’opposition de [J] [F] d’intégrer [L] [F], fils de [B] [F], dans le GAEC.
Néanmoins, en date du 31 mai 2013, [B] [F] a cédé 1 091 parts sociales à son fils [L] [F], de sorte que le capital était désormais réparti comme suit :
- [J] [F] : 5 450 parts
- [B] [F] : 4 360 parts
- [L] [F] : 1 091 parts
La mésentente s’est amplifiée au fil des années, de sorte que suivant assemblée générale extraordinaire du 24 avril 2014, les associés convenaient amiablement de mettre un terme à l’activité du GAEC à effet du 31 décembre 2014.
Les parties n’ayant jamais pu trouver un terrain d’entente sur les modalités de la liquidation amiable du GAEC, suivant jugement du tribunal de grande instance du 2 juillet 2015, la dissolution judiciaire pour mésentente grave fut prononcée et sa liquidation ordonnée.
Par des décisions ultérieures, le tribunal de grande instance de Nantes a désigné comme liquidateurs successifs Monsieur [H] [P], puis Monsieur [I] [Z], puis enfin la SCP [T] [D].
Suivant exploit en date du 5 juin 2019, la SCP [T] [D] es-qualités et Monsieur [J] [F], assisté de sa curatrice, ont saisi le tribunal de grande instance de Nantes d’une action indemnitaire à l’encontre de [B] [F], pour faute de gestion.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 21 avril 2022, ils demandent au tribunal, au visa des articles 1147 ancien, 1844-9 du code civil, 1240 du code civil de :
- Condamner [B] [F] à verser à la SCP [T], es qualité de liquidateur du GAEC DE L’OUCHE RONDE, la somme de 33 6274, 06 euros.
- Condamner [B] [F] à verser à [J] [F] la somme de 10 000 euros.
- Débouter [B] [F] de l’ensemble de ses prétentions et demandes.
- Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
- Condamner [B] [F] à régler aux consorts [F] et la SCP [T] une indemnité globale de 3 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
- Condamner [B] [F] aux entiers dépens.

Au soutien de leurs demandes le liquidateur du GAEC et [J] [F] font valoir en substance que [B] [F] a, sans attendre la désignation d’un liquidateur, commencé à céder les actifs du GAEC, parfois sans en référer à son frère, puis a prélevé des sommes très importantes sur son compte-courant d’associé qui passa d’un solde créditeur de 287 422, 60 en mai 2014 euros à un solde débiteur de 124 167,77 euros en décembre 2015, rendant difficile voire impossible la répartition finale entre associés. S’ils admettent que le compte-courant d’associé s’analyse en un prêt consenti par un associé à une société (ou inversement), en principe remboursable à tout moment dans le cadre d’une liquidation amiable, ils font valoir que commet une faute l’associé qui accepte le paiement partiel de son compte courant créditeur alors qu'il sait que la créance d'un autre créancier social n'a pas été prise en considération dans la répartition de l'actif social. Ils rappellent en outre que l'associé débiteur d'un compte courant doit évidemment en payer le solde à la société lors de la liquidation amiable de celle-ci. Ainsi ils considèrent que [B] [F] avait la possibilité d’obtenir le remboursement de son compte courant d’associé dans le cadre de la liquidation amiable, uniquement dans une proportion comparable à celle des autres associés, précisant que [J] [F] se remboursa partiellement son compte courant à hauteur 75 316,31 en 2015 tandis que [B] [F] prélevait 411 590, 37 euros, déséquilibrant le partage des actifs. [J] [F] fait en outre valoir que la déliquescence de sa situation professionnelle a entraîné un symptôme anxiodépressif, ayant conduit à son placement sous curatelle, et en impute la responsabilité à son frère [B] auquel il demande une indemnisation au titre de son préjudice moral. S’agissant de la demande reconventionnelle formée par son frère, il en sollicite le rejet, réfutant avoir fait obstacle à la liquidation amiable et avoir commis des dégradations.
 
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 21 mars 2023, [B] [F] demande au tribunal de :
- Débouter la SCP [T] [D] es-qualités de liquidateur du GAEC DE L’OUCHE RONDE de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- Très subsidiairement, ordonner la compensation des sommes susceptibles d’être mise à la charge de l’exposant et le montant de son compte courant d’associé avant dissolution ;
- Débouter Monsieur [J] [F], assisté de sa curatrice, de toutes ses demandes fins et conclusions ;
- Recevant Monsieur [B] [F] en sa demande reconventionnelle,
- Condamner Monsieur [J] [F] à lui verser une somme de 100 000 euros à titre de dommages intérêts.
- Allouer à [B] [F] une somme de 2 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
- Laisser à Monsieur [J] [F] la charge de dépens.

Au soutien de sa position, [B] [F] fait valoir en substance que la mésentente entre associés trouve son origine dans le refus de son frère d’accepter son fils [L] au sein du GAEC, en raison du handicap de ce dernier. Il affirme avoir été victime de plusieurs agressions de la part de son frère [J] [F], ce qui lui a notamment valu une condamnation à 1500 euros de dommages et intérêts dans le cadre d’une composition pénale. [J] [F] a également été condamné par le tribunal correctionnel de Nantes pour violence commises sur personne vulnérable, après avoir violemment agressé [L] en avril 2014. Il ajoute que les agressions ont perduré entre avril et novembre 2014, et accuse par ailleurs son frère [J] d’avoir sectionné les tuyaux des abreuvoirs le 8 novembre 2014.
S’agissant de la réalisation d’actifs sans concertation qui lui est reprochée, il soutient qu’il fallait réaliser les éléments d’actifs qui ne pouvaient plus être exploités, et notamment le cheptel puisqu’au début de l’année 2015, les tensions entre associés avaient conduit à ce que tous les exploitants se voient prescrire un arrêt de travail. Il estime avoir fait diligence, affirmant avoir agi en toute transparence, ayant recueilli l’accord du conseil de son frère [J] pour la vente d’animaux le 18 mars 2015. Il réfute avoir fait échouer des ventes indiquant à l’inverse que son frère a fait obstacle à certaines ventes de matériel, et versant à l’appui de ses dires les courriers des acheteurs, un constat d’huissier relatif à la dégradation d’un plateau fourrage dont les pneus avaient été crevés, pour empêcher le déplacement du matériel. Il reproche à son frère d’avoir conservé un tracteur d’une valeur de 42000€. Ainsi [B] [F] soutient que [J] [F] a appréhendé certains éléments, en a dégradé d’autres et a ainsi contribué à très fortement réduire l’actif du GAEC, créant ainsi une situation dont il tente aujourd’hui de tirer avantage.
[B] [F] déplore par ailleurs que le liquidateur ne s’explique pas sur ses diligences dans le cadre des procédures en recouvrement des créances du GAEC et notamment celle devant le tribunal de Lisieux, portant sur une créance de 49 500 € en principal, dont on ignore l’issue. [B] [F] rappelle qu’il appartient au liquidateur de remplir une mission de réalisation et recouvrement de l’actif, dans le cadre de sa mission d’intérêt commun des associés, laquelle implique une neutralité effective incompatible avec le fait que la SCP [T] soit représentée par le même conseil que celui de [J] [F]. A ce titre [B] [F] déplore que le liquidateur ne précise pas pourquoi elle agit à son encontre au titre de remboursements de compte courant dès le premier centime et pas contre son frère [J] [F] qui a également procédé, certes dans une proportion moindre, à un remboursement partiel de son compte courant, ce qui démontre la complaisance du liquidateur à l’endroit d’un des associés.
[B] [F] relève qu’il était titulaire au 1er janvier 2015, au titre de son compte courant d’associé, d’une créance liquide et exigible de 287 422,60 € à l’encontre du GAEC, qu’un associé a droit à tout moment au paiement de son compte courant, ce qui caractérise l’exigibilité. Il soutient que Maître [T] se prévaut d’une solution applicable en matière de procédure collective lorsqu’il affirme que le remboursement a contrevenu aux règles de la prohibition des paiements préférentiels en cours de période suspecte. [B] [F] considère que l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 février 1999 invoqué par les demandeurs ne vient pas étendre à une liquidation amiable le principe de prohibition des paiements en période suspecte, mais sanctionne des paiements faits au profit des associés, dès lors que ceux-ci avaient connaissance d’une autre créance qui, une fois lesdits paiements de compte courant d’associés effectués, ne pourrait être soldée. Il soutient qu’au cas d’espèce, il n’est ni allégué, ni démontré que le remboursement du compte courant de [B] [F] aurait placé le GAEC dans une situation telle que les autres créances n’auraient pu être remboursées. À défaut de rapporter la triple preuve d’une faute, d’un dommage, et d’un lien de causalité, la demande doit être rejetée.
En toute hypothèse, [B] [F] se considère recevable et fondé à opposer une compensation, telle que prévue par les articles 1289 et 1299 anciens du Code Civil applicables à la date des paiements reçus et les actuelles dispositions des article 1347 et suivants du Code Civil, entre le montant perçu et sa créance au titre du compte courant.
Au-delà de ce qui a été repris pour les besoins de la discussion et faisant application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
 L’ordonnance de clôture est intervenue le 6 février 2024.

Motifs de la décision

Sur la demande de règlement de la somme de 336 274,06 euros à Maître [T], es qualité
Aux termes de l’article 1844-9 du code civil, après paiement des dettes et remboursement du capital social, le partage de l'actif est effectué entre les associés dans les mêmes proportions que leur participation aux bénéfices, sauf clause ou convention contraire.
Alors que le compte-courant d’associé s’analyse s’il est débiteur en un prêt consenti par la société à l’associé, et s’il est créditeur en un prêt consenti par l’associé à une société, il s’agit d’un engagement contractuel en principe remboursable à tout moment dans le cadre d’une liquidation amiable.
Ce remboursement du compte courant créditeur ne peut toutefois intervenir qu’à la condition que ce remboursement ne constitue pas un paiement préférentiel au détriment d’un autre associé détenant également un compte courant créditeur.
Il est également constant que l'associé débiteur d'un compte courant doit en payer le solde à la société lors de la liquidation amiable de celle-ci.

En l’espèce, il ressort des éléments comptables produits qu’au 1er juin 2014 [B] [F] était titulaire au titre de son compte courant d’associé, d’un solde créditeur de 287 422,60 euros, et que le montant du compte courant créditeur de [J] [F] s’élevait à 288 379,20 €.

Au 31 décembre 2015, après affectation du résultat de l’exploitation de l’année N-1 et après que chaque associé a effectué des prélèvements en remboursement partiel de son compte courant, le compte courant d’associé de [J] [F] restait créditeur de 213 062,89 euros tandis que celui de [B] [F] était débiteur de 124 167,77 euros.
Il ressort en effet du grand livre comptable de l’exercice du 1er juin 2014 au 31 décembre 2015 que jusqu’au 30 décembre 2014, les deux associés ont effectué des prélèvements peu ou prou similaires en remboursement partiel de leur compte courant d’associé, et que [B] [F] a ensuite rendu son compte courant débiteur par deux prélèvements de 200 000 euros et de 42 000 euros effectués le 27 juillet 2015, un troisième prélèvement à hauteur de 81 750 euros étant intervenu le 29 juillet 2015.

Or ces trois règlements sont intervenus alors que la liquidation du GAEC venait d’être prononcée et que le liquidateur venait d’être désigné. Pourtant, à compter du prononcé de la liquidation, seul le liquidateur était chargé de réaliser l’actif du GAEC et d’en régler le passif, et il n’est pas démontré, ni même allégué par [B] [F] que ces règlements sont intervenus en accord avec le liquidateur et sous son contrôle.

Surtout, en prélevant des sommes substantielles postérieurement à la liquidation de la société, alors que [B] [F] ne pouvait ignorer que leur montant était supérieur au solde créditeur de son compte courant, il a commis une faute de gestion, à défaut notamment de s’assurer préalablement que ces paiements n’intervenaient pas au détriment de créanciers connus du GAEC et notamment de son associé [J] [F].

Ainsi, non seulement le compte courant débiteur de [B] [F] au 31 décembre 2015 l’oblige à en régler le solde au GAEC soit la somme de 124 167,77 euros, mais encore il lui appartient de restaurer l’équilibre qu’il a rompu entre les associés, en reconstituant, en vue des opérations de liquidation à intervenir, son compte courant au même niveau que celui de [J] [F].

Il existe une différence de 213 062,89 euros + 124 167,77 euros soit
337 230, 66 euros entre les soldes des comptes courants de [B] et [J] [F] mais eu égard à la demande présentée par le liquidateur, il convient de condamner [B] [F] à régler la somme de 336 274, 06 euros à Maître [T], es qualité de liquidateur du GAEC DE L’OUCHE RONDE, à charge pour ce dernier de régler le passif et de répartir ensuite l’actif entre les associés.

Sur la demande de [J] [F] en réparation de son préjudice moral

Alors que [J] [F] prétend être indemnisé par son frère pour l’altération mentale qu’il indique subir depuis plusieurs années, force est de constater que le jugement de curatelle fait état de sa bipolarité et de sa dépression. Ainsi [J] [F] ne démontre pas que son placement sous curatelle, et sa dépression sont imputables aux faits qu'il reproche à son frère [B] dans le cadre de leur exploitation en commun.
Bien plus, il ressort des différents éléments versés aux débats par [B] [F] que [J] [F] s'est rendu coupable d'agissements fautifs à l'égard de son associé, qui lui ont valu poursuites et condamnations pénales. C’est ainsi que [J] [F] a notamment fait l’objet d’une composition pénale en 2016 pour des faits commis sur son frère [B], ayant conduit à une condamnation à 1 500 euros de dommages et intérêts, et a été condamné pénalement en 2014 pour des violences commises sur son neveu [L].

Il s'ensuit qu'il ne pourra qu'être débouté de sa demande de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral.

Sur la demande reconventionnelle de [B] [F] en réparation de son préjudice moral

[B] [F] affirme que le refus de [J] [F] de mettre en œuvre une liquidation à laquelle il avait consenti a conduit à la cession isolée et en urgence d’actifs, intervenue pour un prix plus faible, que la dégradation du matériel a généré une perte de valeur, constitutif d'un préjudice propre distinct de celui du GAEC compte tenu de la diminution de valeur de ses parts.

Or force est de constater que non seulement les baisses de prix allégués pour les différentes cessions d’actif ne sont pas établies, mais encore la diminution de valeur des parts du GAEC n'est pas démontrée par [B] [F] de sorte que sa demande reconventionnelle ne pourra qu'être rejetée.

Sur les mesures de fin de jugement

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile permettent au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

En l’espèce, [B] [F] qui succombe principalement à la présente instance sera condamné aux dépens et tenu de verser à la SCP [T] et à [J] [F] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
[B] [F] sera débouté de sa propre demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable aux instances introduites après le 1er janvier 2020, comme c’est le cas en l’espèce, énonce que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
L’article 514-1 du même code prévoit cependant que le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire.
En l’espèce, rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de droit.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition, contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE [B] [F] à verser à la SCP [T], es qualité de liquidateur du GAEC DE L’OUCHE RONDE, la somme de 336 274, 06 euros, à charge pour le liquidateur de répartir cette somme dans le cadre des opérations de liquidation ;

DEBOUTE [J] [F] de sa demande de dommages et intérêts ;

DEBOUTE [B] [F] de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts ;

CONDAMNE [B] [F] à régler aux consorts [F] et la SCP [T] une indemnité globale de 3000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE [B] [F] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [B] [F] aux entiers dépens ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Caroline LAUNAY Géraldine BERHAULT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19/03089
Date de la décision : 13/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-13;19.03089 ?
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