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07/06/2024 | FRANCE | N°21/00951

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, Ctx protection sociale, 07 juin 2024, 21/00951


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
POLE SOCIAL

Jugement du 07 Juin 2024


N° RG 21/00951 - N° Portalis DBYS-W-B7F-LJEI
Code affaire : 88D

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Présidente: Frédérique PITEUX
Assesseur: Franck MEYER
Assesseur: Jérôme GAUTIER
Greffière: Julie SOHIER

DEBATS

Le tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, réuni en audience publique au palais de justice à Nantes le 10 Avril 2024.


JUGEMENT

Prononcé par Frédérique PITEUX, par mise Ã

  disposition au Greffe le 07 Juin 2024.


Demanderesse :

Madame [R] [Z]
12 rue du vivier
44400 REZE
Comparante


Défenderesse :

CAISSE ...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
POLE SOCIAL

Jugement du 07 Juin 2024

N° RG 21/00951 - N° Portalis DBYS-W-B7F-LJEI
Code affaire : 88D

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Présidente: Frédérique PITEUX
Assesseur: Franck MEYER
Assesseur: Jérôme GAUTIER
Greffière: Julie SOHIER

DEBATS

Le tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, réuni en audience publique au palais de justice à Nantes le 10 Avril 2024.

JUGEMENT

Prononcé par Frédérique PITEUX, par mise à disposition au Greffe le 07 Juin 2024.

Demanderesse :

Madame [R] [Z]
12 rue du vivier
44400 REZE
Comparante

Défenderesse :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LOIRE ATLANTIQUE
Service contentieux
9 rue Gaëtan Rondeau
44958 NANTES CEDEX 9
Représentée par Madame [V] [M], audiencière munie à cet effet d’un pouvoir spécial

La Présidente et les assesseurs, après avoir entendu le DIX AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE les parties présentes, en leurs observations, les ont avisées, de la date à laquelle le jugement serait prononcé, ont délibéré conformément à la loi et ont statué le SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE, dans les termes suivants :

Exposé du litige et des demandes

Madame [R] [Z] a bénéficié de plusieurs arrêts de travail sur la période du 11 mai au 6 novembre 2020, indemnisés par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de Loire-Atlantique au titre du risque maladie.

Constatant qu’elle n’avait pas respecté le repos total pendant ses arrêts de travail et contrevenu aux dispositions de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale en continuant à travailler pour son second employeur, la société BASIC FIT, la CPAM a estimé qu’elle lui avait versé à tort des indemnités journalières pour un montant de 3.264,93 €.

Le 11 mai 2021, la CPAM lui a donc notifié un indu d’un montant de 3.264,93 €.

Madame [Z] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable le 31 mai 2021.

Par décision du 20 juillet 2021, notifiée le 21 juillet 2021, la commission de recours amiable a rejeté son recours.

Par lettre recommandée du 6 octobre 2021, madame [Z] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Nantes pour contester cette décision.

Les parties ont été convoquées à l’audience du pôle social qui s’est tenue le 10 avril 2024.

Aux termes de ses explications développées oralement, madame [R] [Z] expose qu’à l’époque, elle exerçait deux activités dans le cadre de CDI : pour la société NESTENN depuis août 2018 et pour la société BASIC FIT depuis mai 2019.

Elle a été placée en arrêt de travail dans le cadre de son emploi auprès de la société NESTENN pour burn-out.
Elle explique qu’elle a contacté à trois reprises la CPAM pour savoir si elle pouvait néanmoins poursuivre son activité auprès de la société BASIC FIT, ce à quoi on lui a répondu par l’affirmative si son médecin l’y autorisait. Elle fournit une attestation de son médecin confirmant cette autorisation.
Elle estime donc n’avoir pas contrevenu à la règle énoncée par la caisse et avoir suivi les indications données tant par la CPAM que par son médecin traitant.

Pour répondre à la forclusion soulevée par la CPAM, elle indique qu’elle n’a pas reçu immédiatement le courrier de notification de la CRA puisque celui-ci a été envoyé à l’adresse de ses parents chez qui elle ne résidait plus alors qu’elle avait signalé son changement d’adresse sur le site de la CPAM.

La caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique demande au tribunal de :
- Constater la forclusion de la demande ;
- Dire qu’elle a fait une exacte application des textes en vigueur ;
- Débouter madame [Z] de sa demande ;
- Condamner madame [Z] au remboursement de l’indu de 3.264,93 €, déduction faite des sommes déjà prélevées, soit 3.137,70 € ;
- Condamner madame [Z] à régler à la CPAM la somme de 100 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soulève in limine litis la forclusion de la contestation de l’assurée puisque la décision de la CRA a été notifiée le 21 juillet 2021 et que madame [Z] n’a saisi le tribunal que le 6 octobre 2021, soit plus de deux mois après, en contravention des dispositions de l’article R. 142-1-A du code de la sécurité sociale.

Sur le fond, elle fait valoir que l’article L. 323-6 du même code dispose que le versement de l’indemnité journalière est subordonné à l’obligation pour le bénéficiaire de s’abstenir de toute activité non autorisée.
Or, pendant les arrêts de travail sur la période du 11 mai au 6 novembre 2020, elle a poursuivi sa seconde activité professionnelle auprès de son employeur BASIC FIT.

Elle indique que l’éventuelle indication donnée par un conseiller de la caisse au téléphone ne constitue qu’une information sur la réglementation en vigueur et non une autorisation, à charge pour elle de régulariser sa situation auprès des services. Elle n’a cependant jamais transmis de justificatifs.
Le certificat de son médecin traitant en date du 21 septembre 2021 ne peut être pris en compte puisque l’activité poursuivie pendant un arrêt de travail indemnisé par la CPAM doit avoir été autorisée expressément au moment de la date d’établissement de l’arrêt.
A défaut, le bénéficiaire doit restituer les indemnités versées correspondantes.

A titre reconventionnel, la caisse sollicite la condamnation de madame [Z] au paiement de l’indu qui s’élève à 3.137,70 €, compte tenu des sommes déjà prélevées.

L’affaire a été mise en délibéré au 7 juin 2024.

Motifs de la décision

Sur la forclusion

Il résulte de l’article R. 142-1-A III du code de la sécurité sociale que « S'il n'en est disposé autrement, le délai de recours préalable et le délai de recours contentieux sont de deux mois à compter de la notification de la décision contestée. Ces délais ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l'accusé de réception de la demande. »

Les décisions prises par les autorités administratives et les organismes de sécurité sociale ainsi que les recours préalables mentionnés à l'article L. 142-4 du même code doivent être notifiés par tout moyen leur conférant date certaine.

Il résulte des éléments versés au débat que la CPAM a notifié le 21 juillet 2021 la décision de la CRA prise en sa séance du 20 juillet 2021.
L’en-tête de la lettre de notification indique que le courrier a été envoyé en lettre recommandée le 26 juillet 2021 à l’adresse de ses parents, 2 rue Baccara à Carquefou.
Néanmoins, la caisse est dans l’incapacité de produire l’avis de réception du pli recommandé, seul à même de démontrer à quelle date le courrier a été réceptionné par l’intéressée et de faire courir le délai de forclusion.

En conséquence, la CPAM sera déboutée de sa demande à ce titre et le recours formé par madame [Z] sera déclaré recevable.

Sur le bien-fondé de l’indu

L’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale précise que :
« Le service de l'indemnité journalière est subordonné à l'obligation pour le bénéficiaire :

1° D'observer les prescriptions du praticien ;

2° De se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical prévus à l'article L. 315-2 ;

3° De respecter les heures de sorties autorisées par le praticien selon des règles et des modalités prévues par décret en Conseil d'Etat après avis de la Haute Autorité de santé ;

4° De s'abstenir de toute activité non autorisée ;

5° D'informer sans délai la caisse de toute reprise d'activité intervenant avant l'écoulement du délai de l'arrêt de travail.

En cas d'inobservation volontaire de ces obligations, le bénéficiaire restitue à la caisse les indemnités versées correspondantes, dans les conditions prévues à l'article L. 133-4-1.

En outre, si l'activité mentionnée au 4° a donné lieu à des revenus d'activité, il peut être prononcé une sanction financière dans les conditions prévues à l'article L. 114-17-1.

Les élus locaux peuvent poursuivre l'exercice de leur mandat, sous réserve de l'accord formel de leur praticien. »

La CPAM, pour justifier des sommes indument versées, indique que madame [Z] n’a pas obtenu l’autorisation de son médecin traitant pour poursuivre sa seconde activité salariée au moment où celui-ci a prescrit l’arrêt de travail.

Elle ne produit cependant aucun des arrêts de travail pour les périodes visées, soit :
- Du 29/06/2020 au 7/08/2020
- Du 8/08/2020 au 6/09/2020
- Du 8/09/2020 au 29/09/2020
- Du 2/10/2020 au 27/10/2020,
ce qui aurait permis de vérifier que madame [Z] n’avait pas été autorisée à travailler, alors que cette dernière produit un certificat médical de son médecin traitant, le Docteur [H], en date du 21 septembre 2021, indiquant que lors d’une consultation qui s’est déroulée le 12 juin 2020, il a autorisé madame [Z] à sortir et à exercer son second emploi chez BASIC FIT, estimant que le motif de son arrêt de travail n’était pas incompatible avec cette autre activité.
Madame [Z] justifie ainsi avoir été expressément et préalablement autorisée à conserver cette autre activité et n’a donc pas contrevenu aux dispositions de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale.

L’indu notifié à madame [Z] le 11 mai 2021 sera donc annulé, la CPAM sera déboutée de sa demande reconventionnelle et condamnée à reverser à madame [Z] les sommes qu’elle avait d’ores et déjà prélevées, pour un montant total de 127,23 € (3.264,93 € - 3.137,70 €).

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Depuis le 1er janvier 2019, s’appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

La CPAM de Loire-Atlantique, qui succombe, sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Le tribunal, statuant par jugement mis à disposition, contradictoire et en dernier ressort,

Annule l’indu notifié à madame [R] [Z] le 11 mai 2021, d’un montant de 3.264,93 € ;

Déboute la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique de sa demande reconventionnelle ;

Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique à verser à madame [R] [Z] la somme de 127,23 €, correspondant aux sommes prélevées à tort ;

Déboute la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique aux dépens ;

RAPPELLE que conformément aux articles 34, 612 du code de procédure civile, R211-3 du code de l'organisation judiciaire et R142-15 du code de la sécurité sociale, les parties disposent pour FORMER LEUR POURVOI EN CASSATION d’un délai de DEUX MOIS, à compter de la notification de la présente décision ;

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ par mise à disposition du jugement au greffe du tribunal le 7 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, la minute étant signée par Madame Frédérique PITEUX, Présidente, et par Madame Julie SOHIER, Greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/00951
Date de la décision : 07/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-07;21.00951 ?
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