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07/06/2024 | FRANCE | N°19/08317

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, Ctx protection sociale, 07 juin 2024, 19/08317


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
POLE SOCIAL

Jugement du 07 Juin 2024


N° RG 19/08317 - N° Portalis DBYS-W-B7C-KNWM
Code affaire : 89E

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Présidente: Frédérique PITEUX
Assesseur: Franck MEYER
Assesseur: Jérome GAUTIER
Greffière: Julie SOHIER

DEBATS

Le tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, réuni en audience publique au palais de justice à Nantes le 10 Avril 2024.


JUGEMENT

Prononcé par Frédérique PITEUX, par mise à

disposition au Greffe le 07 Juin 2024.


Demanderesse :

Société RANDSTAD
Service AT/MP
62-64 Cours Albert Thomas
69371 LYON CEDEX 08
Re...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
POLE SOCIAL

Jugement du 07 Juin 2024

N° RG 19/08317 - N° Portalis DBYS-W-B7C-KNWM
Code affaire : 89E

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Présidente: Frédérique PITEUX
Assesseur: Franck MEYER
Assesseur: Jérome GAUTIER
Greffière: Julie SOHIER

DEBATS

Le tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, réuni en audience publique au palais de justice à Nantes le 10 Avril 2024.

JUGEMENT

Prononcé par Frédérique PITEUX, par mise à disposition au Greffe le 07 Juin 2024.

Demanderesse :

Société RANDSTAD
Service AT/MP
62-64 Cours Albert Thomas
69371 LYON CEDEX 08
Représentée par Madame [R] [T], juriste munie à cet effet d’un pouvoir spécial

Défenderesse :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA LOIRE ATLANTIQUE
9 rue Gaëtan Rondeau
44958 NANTES CEDEX 9
Représentée par Madame [F] [O], audiencière munie à cet effet d’un pouvoir spécial
La Présidente et les assesseurs, après avoir entendu le DIX AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE les parties présentes, en leurs observations, les ont avisées, de la date à laquelle le jugement serait prononcé, ont délibéré conformément à la loi et ont statué le SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE, dans les termes suivants :

EXPOSE DU LITIGE ET DES DEMANDES

Monsieur [C] [E], salarié de la société RANDSTAD et mis à la disposition de la société GENERAL TECHNIQUE, en qualité d’emballeur production, a été victime d’un accident du travail le 2 février 2018, décrit en ces termes dans la déclaration d’accident du travail complétée par l’employeur : « En poussant un box sur la ligne, M. [E] déclare avoir heurté le coin d’une palette en bois. Il s’est alors coincé le pied droit et a perdu l’équilibre. »

Après instruction, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) de Loire-Atlantique a décidé le 11 mai 2018, de prendre en charge l’accident du travail de monsieur [E] au titre de la législation sur les risques professionnels.

Par courrier daté du 6 juillet 2018, la société RANDSTAD a saisi la Commission de Recours Amiable de la CPAM en contestation de l’imputabilité de l’ensemble des arrêts de travail prescrits à monsieur [E] à la suite de l’accident.

En l’absence de réponse de la commission, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes par lettre recommandée avec demande d’avis de réception reçue le 7 septembre 2018.

Par jugement du 2 juillet 2021, ce tribunal a, avant dire droit sur l'opposabilité de la prise en charge des soins et arrêts prescrits à monsieur [C] [E] à la suite de son accident du travail du 2 février 2018, ordonné une expertise médicale judiciaire et désigné le Docteur [H] pour y procéder.

L'expert a déposé son rapport le 30 octobre 2023, dans lequel il conclut que la durée des soins et arrêts en relation, au moins pour partie, avec les lésions rattachables à l'accident du travail du 2 février 2018, s'étend du 2 février 2018 au 27 avril 2018.

L'affaire a été rappelée à l'audience du 10 avril 2024.

La société RANDSTAD demande au tribunal de :
- Constater que la présomption d'imputabilité est détruite par les conclusions du rapport d'expertise ;
- Entériner le rapport d'expertise médicale du Docteur [H] ;
- Déclarer que l'ensemble des arrêts de travail et soins prescrits à compter du 28 avril 2018, ainsi que l'ensemble des conséquences médicales et financières son inopposables à la société RANDSTAD, puisque n'étant pas en relation avec l'accident du travail de monsieur [E] du 2 février 2018 ;
- Condamner la CPAM aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les 800 € d'expertise avancés par la société RANDSTAD.

Elle sollicite que soient entérinées les conclusions du rapport d'expertise du Docteur [H] qui relève que seule la lésion initiale, à savoir une contusion simple de la cheville gauche sans fracture, doit être retenue comme imputable à l'accident du travail du 2 février 2018, les lésions postérieurement diagnostiquées étant dues à un état pathologique antérieur.

Elle rappelle que l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale pose, en faveur du salarié, le principe d'une présomption d'imputabilité des lésions apparues dans la suite d'un accident du travail, mais que cette présomption simple peut être renversée par l'employeur, ce qu'elle fait au terme de l'expertise judiciaire.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Loire-Atlantique s'en remet à la sagesse du tribunal compte-tenu des conclusions du rapport d'expertise.

La décision a été mise en délibéré au 7 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'inopposabilité

Il résulte de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant, soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime.

Il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire, à savoir celle de l'existence d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec l'accident ou d'une cause postérieure totalement étrangère, auxquels se rattacheraient exclusivement les soins et arrêts de travail

En l'espèce, il est constant qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit le 2 février 2018 et a été prolongé de façon ininterrompue jusqu'au 19 mai 2019, date retenue pour la guérison de monsieur [E].

L'expert judiciaire relève qu'une contusion simple décrite comme une « ...contusion face latérale avec hématome malléole interne cheville gauche... », sans lésion osseuse, ni ligamentaire, ni tendineuse sévère, ne peut justifier un arrêt de travail de 469 jours.
Il conclut qu'il existe un état antérieur qui a évolué pour son propre compte, lequel est documenté puisqu'il est fait état dans les antécédents d'« entorses des 2 chevilles, notion de plâtre et attelle ».
Il estime en conséquence raisonnable de dire que les lésions directement et certainement imputables à l'accident du 2 février 2018 étaient guéries le 27 avril 2018, une période de trois mois étant habituellement retenue pour la guérison d'une contusion osseuse simple.
Les soins et arrêts prodigués à compter du 28 avril 2018 sont en lien avec un état antérieur.

La CPAM ne fait pas valoir de moyens opposants pour contredire les conclusions de l'expert.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande de la société RANDSTAD qui réussit à renverser la présomption légale d'imputabilité.

Sur les dépens

L’article R.144-10 du code de la sécurité sociale abrogé depuis le 1er janvier 2019 dispose que la procédure est gratuite et sans frais. Cet article reste applicable pour les procédures en cours jusqu'au 31 décembre 2018 et à partir du 1er janvier 2019, s’appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

L'article L.142-11 du code de la sécurité sociale qui prévoit que les frais résultant des consultations et expertises ordonnées par les juridictions compétentes sont pris en charge par la Caisse nationale de l’assurance maladie, n’est applicable qu’aux recours introduits à compter du 1er janvier 2020.

Par conséquent, la CPAM de Loire-Atlantique, qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens exposés postérieurement au 31 décembre 2018, y compris les frais d’expertise judiciaire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, susceptible d'appel, rendu par mise à disposition au greffe,

DECLARE les arrêts de travail et les soins prescrits postérieurement au 27 avril 2018 inopposables à la société RANDSTAD, comme n’étant pas liés à l’accident du travail du 2 février 2018 de monsieur [C] [E] ;

COMDAMNE la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Loire-Atlantique aux dépens exposés postérieurement au 31 décembre 2018, y compris les frais d’expertise judiciaire ;

RAPPELLE que conformément aux dispositions des articles 34 et 538 du code de procédure civile et R. 211-3 du code de l'organisation judiciaire, les parties disposent d’un délai d’UN MOIS à compter de la notification de la présente décision pour en INTERJETER APPEL ;

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ par mise à disposition du jugement au greffe du tribunal le 7 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, la minute étant signée par Madame Frédérique PITEUX, Présidente, et par Madame Julie SOHIER, Greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 19/08317
Date de la décision : 07/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-07;19.08317 ?
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