La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2024 | FRANCE | N°22/05414

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, 4ème chambre, 06 juin 2024, 22/05414


SG




LE 06 JUIN 2024

Minute n°


N° RG 22/05414 - N° Portalis DBYS-W-B7G-L6UN





Société CAP 22 Immatriculée au RCS de NANTES sous le n°453 031 437

C/

S.D.C. [4] [Adresse 5]





Autres demandes relatives à la copropriété





1 copie exécutoire et certifiée conforme à :
la SELARL BRG - 206
la SELARL CABINET CIZERON - 257




délivrées le
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
---------------------------------------------------


QUATRIEME CHAMBRE




JUGEMENT
du SIX JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE



Composition du Tribunal lors du délibéré :

Président :Stéphanie LAPORTE, Juge,
Assesseur :Nathalie CLAVIER, Vice Présidente,
Assesseur :Laëtitia F...

SG

LE 06 JUIN 2024

Minute n°

N° RG 22/05414 - N° Portalis DBYS-W-B7G-L6UN

Société CAP 22 Immatriculée au RCS de NANTES sous le n°453 031 437

C/

S.D.C. [4] [Adresse 5]

Autres demandes relatives à la copropriété

1 copie exécutoire et certifiée conforme à :
la SELARL BRG - 206
la SELARL CABINET CIZERON - 257

délivrées le
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
---------------------------------------------------

QUATRIEME CHAMBRE

JUGEMENT
du SIX JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors du délibéré :

Président :Stéphanie LAPORTE, Juge,
Assesseur :Nathalie CLAVIER, Vice Présidente,
Assesseur :Laëtitia FENART, Vice-Présidente,

GREFFIER : Sandrine GASNIER

Débats à l’audience publique du 02 AVRIL 2024 devant Stéphanie LAPORTE, siégeant en Juge Rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

Prononcé du jugement fixé au 06 JUIN 2024.

Jugement Contradictoire rédigé par Stéphanie LAPORTE, prononcé par mise à disposition au greffe.

---------------

ENTRE :

Société CAP 22 Immatriculée au RCS de NANTES sous le n°453 031 437, dont le siège social est sis [Adresse 2]
Rep/assistant : Maître Emmanuel RUBI de la SELARL BRG, avocats au barreau de NANTES

DEMANDERESSE.

D’UNE PART

ET :

S.D.C. [4] [Adresse 5], domiciliée : chez S.A.S. IMMO DE FRANCE OUEST, dont le siège social est sis [Adresse 1]
Rep/assistant : Maître Guillaume CIZERON de la SELARL CABINET CIZERON, avocats au barreau de NANTES

DEFENDERESSE.

D’AUTRE PART

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

EXPOSE DU LITIGE
L’immeuble situé [Adresse 5] est soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis. La SCI CAP 22 est propriétaire du lot n°1 dépendant de ladite copropriété.
La SCI CAP 22 a donné à bail ces locaux à usage commercial d’abord pour l’exploitation d’un fonds de commerce d’auto-école qui a cédé le fonds de commerce au profit d’un nouveau locataire qui exerçait une activité de « sandwicherie- restauration rapide ».
Le 26 septembre 2008, le renouvellement du bail commercial visant « un local commercial » entre la SCI CAP 22 (bailleur) et l’EURL MBICER (preneur) a été acté pour une durée de neuf années, soit jusqu’à la date du 2 janvier 2017. A la date du 2 janvier 2017, le bail commercial a été tacitement reconduit.
Le 23 novembre 2021, la SCI CAP 22 a régularisé une promesse de vente du bien immobilier au profit des Consorts [M]-[K] lesquels entendaient conserver un usage commercial du bien à titre de « restauration rapide ». La promesse de vente a été assortie d’une condition suspensive intitulée « confirmation de la possibilité d’exercer une activité commerciale dans le local » par l’assemblée générale des copropriétaires.
L’assemblée générale des copropriétaires a rejeté la résolution susdite suivant un procès-verbal en date du 17 février 2022 et la condition suspensive est devenue caduque.
Par exploit du 13 décembre 2022, la SCI CAP 22 a fait assigner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] », situé [Adresse 5], afin de faire reconnaître que le lot n°1 appartenant à la SCI CAP 22, désigné au sein du règlement de copropriété comme étant une cellule à usage de bureaux, a toujours été cédé ou pris à bail commercial depuis son achèvement aux fins d’exercer une activité commerciale et non à usage de bureaux ou d’habitation.
Par dernières conclusions du 05 décembre 2023, la SCI CAP 22 a sollicité du tribunal, au visa de l’article 2219 du code civil, de l’article 2224 du code civil, de l’article 42 alinéa 1er de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 dans sa version en vigueur à compter du 25 novembre 2018 et dans sa version en vigueur à compter du 11 juillet 1965,
Juger recevable et bien fondée la SCI CAP 22 en ses demandes ;
Débouter le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5]) pris en la personne de son syndic, la Société IMMO DE FRANCE OUEST, de l’ensemble de ses demandes, conclusions et fins ;
Juger que le lot n°1 appartenant à la SCI CAP 22 situé au rez-de-chaussée de l’immeuble situé à [Adresse 5] dénommé « [4] », et désigné au sein du règlement de copropriété comme étant « une cellule à usage de bureaux ayant accès direct par [Adresse 3] » a toujours été cédé ou pris à bail commercial depuis son achèvement aux fins d’exercer une activité commerciale et non à usage de bureaux ou d’habitation ;
Juger que le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5]) pris en la personne de son syndic, la Société IMMO DE FRANCE OUEST, a toujours eu une parfaite connaissance de la nature commerciale des baux, actes de cession et de l’activité exercée au sein du lot n°1 appartenant à la SCI CAP 22 situé au rez-de-chaussée de l’immeuble situé à [Adresse 5] dénommé « [4] », et désigné au sein du règlement de copropriété comme étant « une cellule à usage de bureaux » et ce depuis plus de 10 ans ;
Juger en conséquence que le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5]) pris en la personne de son syndic, la Société IMMO DE France OUEST, est prescrit pour agir en rétablissement des lieux conformément à leur destination et usage de bureaux et/ou d’habitation et cessation de l’exercice d’une activité commerciale ;
Juger en conséquence que l’exercice d’une activité commerciale et de restauration est licite et possible au sein du lot n°1 appartenant à la SCI CAP 22 situé au rez-de-chaussée de l’immeuble situé à [Adresse 5] dénommé « [4] », et désigné au sein du règlement de copropriété comme étant « une cellule à usage de bureaux » du fait de cette prescription ;
Condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5]) pris en la personne de son syndic, la Société IMMO DE FRANCE OUEST, à verser à la SCI CAP 22 la somme de 5.000,00 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5]) pris en la personne de son syndic, la Société IMMO DE FRANCE OUEST, à payer à la SCI CAP 22 les entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL BRG, avocat au Barreau de NANTES ;
Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
A l’appui de ses conclusions, la SCI CAP 22 soutient que le lot n°1 dont il est propriétaire et désigné comme « une cellule à usage de bureaux » dans le règlement de copropriété, a été affecté à des activités commerciales, depuis l’achèvement de l’immeuble, soit plus de dix ans. Il fait valoir que le syndicat des copropriétaires ne s’est jamais opposé à ces activités et ne peut plus agir pour faire respecter le règlement de copropriété et s’opposer au changement de destination du lot.
Elle conteste vouloir, par la présente procédure, contester le refus de voter la résolution de l’assemblée générale du 17 février 2022 destinée à faire changer le règlement de copropriété en vue de la vente du lot n°1.

Par dernières conclusions du, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] », situé [Adresse 5], au visa de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, de :
Débouter la SCI CAP 22 de l’ensemble de ses demandes fins et prétentions ;
Condamner la SCI CAP 22 à verser au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la SCI CAP 22 aux entiers dépens de l’instance.
A l’appui de ses conclusions, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5] fait valoir que la SCI 22 CAP n’a pas contesté la délibération prise lors de l’assemblée générale du 17 février 2022 ayant refusé de reconnaître l’affectation commerciale du lot, dans le délai de deux mois prévu à l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et soutient que le refus ainsi exprimé par l’assemblée générale est devenue définitif.

L’ordonnance de clôture de l’instruction a eu lieu le 15 février 2024 et l’audience des plaidoiries est intervenue le 02 avril 2024.

L’affaire a été mise en délibéré au 06 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription acquisitive de la destination commerciale du lot de copropriété
Selon l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis « les dispositions de l'article 2224 du code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont applicables aux actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat.
Les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée, sans ses annexes. Cette notification est réalisée par le syndic dans le délai d'un mois à compter de la tenue de l'assemblée générale.
Sauf urgence, l'exécution par le syndic des travaux décidés par l'assemblée générale en application des articles 25 et 26 de la présente loi est suspendue jusqu'à l'expiration du délai de deux mois mentionné au deuxième alinéa du présent article.
S'il est fait droit à une action contestant une décision d'assemblée générale portant modification de la répartition des charges, le tribunal judiciaire procède à la nouvelle répartition. Il en est de même en ce qui concerne les répartitions votées en application de l'article 30. »
Avant la modification de l'article 42 par la loi no 2018-1021 du 23 novembre 2018, les actions personnelles nées de l'application de la loi entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivaient par un délai de dix ans. A compter de l'entrée en vigueur de l'art. 42, dans sa version issue de la même loi de 2018, le texte précise que les dispositions de l'art. 2224 code civil sont désormais applicable, ce qui a ramené le délai pour agir à cinq ans.

Le tribunal rappelle, à titre liminaire, qu’il ne peut statuer que sur des prétentions au sens de l’article 4 du code civil, à savoir des demandes susceptibles d'emporter des conséquences juridiques.

Il apparait à la lecture du dispositif des conclusions du demandeur, au-delà de la formulation utilisée qui, quoique confuse, reste libre, que la SCI 22 CAP demande qu’en dépit de la désignation, dans le règlement de copropriété, du lot n°1 comme étant à usage de bureaux, ce lot soit reconnu comme pouvant être à destination commerciale du fait qu’un tel usage n’a pas été contesté, depuis l’achèvement de l’immeuble en 1999.

En l’espèce, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5] n’a pas agi en rétablissement des lieux conformément à leur destination, mais l’assemblée générale du 17 février 2022 a refusé de voter que le lot n°1 puisse être affecté à un usage de commerce.

La SCI 22 CAP n’a pas contesté cette décision dans le délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal de cette assemblée, conformément à l’alinéa 2 de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Elle ne peut plus remettre en cause cette résolution sur la base du caractère abusif du refus par l’assemblée d’entériner une situation de fait de plus de 20 ans, car cette résolution est devenue définitive.

Toutefois, la SCI 22 CAP ne conteste pas réellement cette résolution, mais entend faire valoir que la destination commerciale du lot n°1 dont elle est copropriétaire, est acquise, du fait d’un tel usage non contesté pendant plus de dix ans, ce qui revient à se prévaloir d’une prescription acquisitive d’un tel usage.
En effet, elle ne peut valablement opposer une fin de non-recevoir fondée sur la prescription extinctive de dix ans dès lors que le syndicat des copropriétaires n’est pas à l’initiative d’une action en rétablissement de l’usage de ce lot, à destination de bureaux. Elle ne peut opposer au syndicat des copropriétaires la prescription extinctive de toute action en rétablissement d’affectation du lot du fait d’un usage de plus de 20 ans, alors que le syndicat des copropriétaires ne sollicite pas une telle remise en l’état.

Elle ne peut davantage se prévaloir d’une prescription acquisitive de dix ans pour l’affectation commerciale d’un lot de copropriété ; une telle prescription acquisitive, fondée sur un usage continu depuis au moins dix ans, n’étant reconnue par aucune disposition que ce soit dans la loi du 10 juillet 1965 ou dans le code civil ;

Il convient dès lors de rejeter la demande de la SCI 22 CAP.

Sur les autres demandes
En application de l'article 696 du code procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
La SCI CAP 22 partie perdante au procès, sera condamnée, aux dépens de l'instance.
En vertu de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
L’équité commande de condamner la SCI CAP 22 à verser la somme de 1000 euros au syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'exécution provisoire est de droit en vertu de l'article 514 du code de procédure civile dans sa version applicable au litige.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, après débats en audience publique

REJETTE les demandes de la SCI CAP 22 visant à faire reconnaitre que le lot n°1 est à destination commerciale du fait qu’un tel usage n’a pas été contesté par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5], depuis plus de dix ans;

CONDAMNE la SCI CAP 22, aux dépens de l'instance ;
CONDAMNE la SCI CAP 22 à verser la somme de 100 euros au syndicat des copropriétaires de l’immeuble « [4] » sis [Adresse 5], au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l'exécution provisoire du jugement est de droit.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Sandrine GASNIER Stéphanie LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/05414
Date de la décision : 06/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-06;22.05414 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award