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30/05/2024 | FRANCE | N°21/04278

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, 8eme chambre, 30 mai 2024, 21/04278


MM

M-C P


LE 30 MAI 2024

Minute n°24/202

N° RG 21/04278 - N° Portalis DBYS-W-B7F-LHKI




[L] [W]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/020114 du 03/02/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NANTES)

C/

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES

NATIO 21-81




copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à
Me S. RODRIGUES DEVESAS

copie certifiée conforme
délivrée à
PR




TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
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HUITIEME CHAMBRE


Jugement du TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE



Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Flor...

MM

M-C P

LE 30 MAI 2024

Minute n°24/202

N° RG 21/04278 - N° Portalis DBYS-W-B7F-LHKI

[L] [W]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/020114 du 03/02/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NANTES)

C/

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES

NATIO 21-81

copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à
Me S. RODRIGUES DEVESAS

copie certifiée conforme
délivrée à
PR

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
----------------------------------------------

HUITIEME CHAMBRE

Jugement du TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Florence CROIZE, Vice-présidente,
Assesseur :Géraldine BERHAULT, Première Vice-Présidente,
Assesseur :Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,

GREFFIER : Mélanie MARTIN

Débats à l’audience publique du 22 MARS 2024 devant Florence CROIZE, vice-présidente, siégeant en juge rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

Prononcé du jugement fixé au 30 MAI 2024, date indiquée à l’issue des débats.

Jugement prononcé par mise à disposition au greffe.

---------------

ENTRE :

Madame [L] [W], domiciliée : chez Service [Adresse 1]
Rep/assistant : Me Stéphanie RODRIGUES-DEVESAS, avocat au barreau de NANTES, avocat plaidant

DEMANDERESSE.

D’UNE PART

ET :

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES
représenté par Céline MATHIEU-VARENNES, procureur adjoint

DEFENDEUR.

D’AUTRE PART

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [L] [W], né le 19 septembre 2002 à [Localité 2] (Cote d’Ivoire), a souscrit le 10 septembre 2020 auprès de la directrice des services de greffe judiciaires du tribunal d’instance de Nantes une déclaration acquisitive de nationalité française sur le fondement de l’article 21-12 du code civil.

Elle s’est vue notifier le 8 juin 2021 une décision de refus d’enregistrement de sa déclaration, celle-ci étant jugée irrecevable, au motif qu’elle ne présentait qu’un extrait d’acte de naissance daté de 2018 ce dont il résultait qu’elle ne présentait pas un état civil fiable au sens de l’article 47 du code civil.

Par acte d’huissier du 1er octobre 2021, Madame [L] [W] a fait assigner Monsieur le Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nantes devant la présente juridiction, en contestation de cette décision.

En l’état de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 juillet 2022, Madame [L] [W] demande au tribunal, sur le fondement de l’article 22-12 1° du code civil, de :
- annuler la décision de refus d’enregistrement de la déclaration de nationalité qu’il a souscrite ;
En conséquence,
- dire qu’elle est de nationalité française ;
- ordonner la mention prévue par l’article 28 du code civil ;
- laisser les dépens à la charge du Trésor public.

Elle expose justifier de trois années de prise en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance.

Elle fait en outre valoir que le tribunal judiciaire de Nantes a rendu un jugement déclaratif de naissance la concernant le 9 décembre 2021. Elle en conclut qu’elle bénéficie aujourd’hui d’un état civil opposable en France, que cette décision, même si elle est intervenue postérieurement à la déclaration, est recevable dans le cadre de la présente procédure, en ce qu’elle n’est pas créatrice de droit mais vient seulement constater un fait antérieur. 

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 16 janvier 2022, le procureur de la République de Nantes prenant acte du jugement supplétif intervenu s’en remet à l’appréciation du tribunal.  

Au-delà de ce qui a été repris pour les besoins de la discussion et faisant application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux termes de leurs dernières écritures.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 20 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le récépissé prévu par l’article 1040 du code de procédure civile

Aux termes des dispositions de l’article 1040 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s’élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l’assignation, ou le cas échéant une copie des conclusions soulevant la contestation, sont déposées au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

L’assignation est caduque, les conclusions soulevant une question sur la nationalité irrecevable s’il n’est pas justifié des diligences qui précèdent.

 Le ministère de la justice a reçu le 3 mars 2022 copie de l’assignation selon récépissé du 17 mars 2022.

La procédure est dès lors régulière au regard de l’article 1040 du code de procédure civile.
  
Sur la demande relative à la reconnaissance de la nationalité française

Aux termes de l’article 21-12 du code civil, « L'enfant qui a fait l'objet d'une adoption simple par une personne de nationalité française peut, jusqu'à sa majorité, déclarer, dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants, qu'il réclame la qualité de Français, pourvu qu'à l'époque de sa déclaration il réside en France. Toutefois, l'obligation de résidence est supprimée lorsque l'enfant a été adopté par une personne de nationalité française n'ayant pas sa résidence habituelle en France. 

Peut, dans les mêmes conditions, réclamer la nationalité française :
1° L'enfant qui, depuis au moins trois années, est recueilli sur décision de justice et élevé par une personne de nationalité française ou est confié au service de l'aide sociale à l'enfance ;
2° L'enfant recueilli en France et élevé dans des conditions lui ayant permis de recevoir, pendant cinq années au moins, une formation française, soit par un organisme public, soit par un organisme privé présentant les caractères déterminés par un décret en Conseil d’État ».

A cet effet, l’article 16 du décret n°93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française prévoit que le déclarant, pour souscrire la déclaration prévue à l’article 21-12 du code civil, doit fournir notamment son acte de naissance.

Cet acte de naissance doit être conforme aux exigences de l’article 47 du code civil.

Il résulte de cet article que tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

En application de l’article 30 du code civil, la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause, soit, en l’occurrence, à Madame [W].

En l’espèce, pour justifier de son état civil, la requérante produit dans le cadre de la présente instance :
- une copie du jugement déclaratif de naissance prononcé par le tribunal judiciaire de Nantes le 9 décembre 2021, accompagnée de l’acte d’acquiescement,
- une copie d’acte de naissance dressé en exécution du jugement déclaratif de naissance, aux termes duquel elle est née le 19 septembre 2002 à [Localité 2] (Cote d’Ivoire)

Alors que le ministère public n’invoque pas une quelconque fraude, ces éléments établissent que l’intéressée justifie d’un état civil certain et fiable, sans qu’il puisse lui être reproché une production tardive. En effet, si les conditions imposées par l’article 21-12 du code civil doivent être réunies au jour de la déclaration, le fait que la réunion d’une condition soit prouvée postérieurement à la déclaration ne peut faire obstacle à ce qu’il soit considéré qu’au jour de la déclaration, la condition était réunie. Ainsi, ce jugement déclaratif, qui a pour objet de suppléer à l’absence d'actes et de documents probants délivrés dans le pays d'origine, et l’acte de naissance dressé sur sa base prouvent que l’intéressée disposait d’un état civil probant au jour de sa déclaration acquisitive de nationalité française.

En outre, il n’est pas discuté et il ressort en tout état de cause de la décision de refus d’enregistrement que Madame [W] a transmis sa demande d’acquisition de la nationalité française accompagnée des pièces justificatives le 10 septembre 2020, soit avant sa majorité, puisqu’il résulte des développements qui précèdent qu’il est établi qu’elle est née le 19 septembre 2002.

Force est ainsi de constater qu’elle a effectivement déclaré, alors qu’elle était encore mineure, qu'elle réclamait la qualité de Français, ainsi que l’exige l’article 21-12 du code civil.

S’agissant des conditions de recueil de l’intéressée dans les trois années qui ont précédé sa majorité, elles sont par ailleurs démontrées et au demeurant non contestées par le procureur de la République de Nantes.

Il s’ensuit que Madame [W] répond aux conditions posées par l’article 21-12, alinéa 3 1° du code civil et qu’elle est de nationalité française. Il convient dès lors d’ordonner l’enregistrement de la déclaration acquisitive de nationalité française qu’elle a souscrite le 10 septembre 2020, ainsi que la mention prévue à l’article 28 du code civil.

Sur les autres demandes

Le ministère public succombant, le Trésor public supportera la charge des dépens.

Aux termes de l’article 1045 du code de procédure civile dans sa version applicable, le jugement qui statue sur la nationalité n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que le récépissé prévu par l’article 1043 du code de procédure civile a été délivré ;

DIT que Madame [L] [W], né le 19 septembre 2002 à [Localité 2] (Cote d’Ivoire), remplit les conditions posées par l’article 21-12, alinéa 3 1° du code civil et qu’elle est donc de nationalité française;

ORDONNE l’enregistrement de la déclaration acquisitive de nationalité française que Madame [L] [W], née le 19 septembre 2002 à [Localité 2] (Cote d’Ivoire) a souscrite le 10 septembre 2020 :

ORDONNE la mention prévue par l’article 28 du code civil.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT

Mélanie MARTINFlorence CROIZE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : 8eme chambre
Numéro d'arrêt : 21/04278
Date de la décision : 30/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-30;21.04278 ?
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