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30/05/2024 | FRANCE | N°20/03634

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, 1ère chambre, 30 mai 2024, 20/03634


C.L

M-C P


LE 30 MAI 2024

Minute n°

N° RG 20/03634 - N° Portalis DBYS-W-B7E-KYWN




[J] [G]
[C] [N]


C/

Société Civile CRC

[K] [L] [U]

[V] [Y] épouse [U] - Décédée le 18/01/2022








Le 30.05.2024

copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à
Maître Bertrand LARONZE

copie certifiée conforme
délivrée à

Maître Joachim D’AUDIFFRET

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
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PREMIERE CHAMBRE


Jugement du TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE



Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,
Assesseur :Florence CROIZE, Vice-p...

C.L

M-C P

LE 30 MAI 2024

Minute n°

N° RG 20/03634 - N° Portalis DBYS-W-B7E-KYWN

[J] [G]
[C] [N]

C/

Société Civile CRC

[K] [L] [U]

[V] [Y] épouse [U] - Décédée le 18/01/2022

Le 30.05.2024

copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à
Maître Bertrand LARONZE

copie certifiée conforme
délivrée à

Maître Joachim D’AUDIFFRET

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
----------------------------------------------

PREMIERE CHAMBRE

Jugement du TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,
Assesseur :Florence CROIZE, Vice-présidente,
Assesseur :Constance DESMORAT, Juge commis,

Greffier : Caroline LAUNAY

Débats à l’audience publique du 19 MARS 2024 devant Marie-Caroline PASQUIER, vice-présidente, siégeant en juge rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

Prononcé du jugement fixé au 30 MAI 2024, date indiquée à l’issue des débats.

Jugement Réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe.

---------------

ENTRE :

Monsieur [J] [G]
né le 07 Juin 1980 à [Localité 4] (VAL-DE-MARNE), demeurant [Adresse 2]
Rep/assistant : Maître Joachim D’AUDIFFRET de la SCP ACTA JURIS SCP D’AVOCATS, avocats au barreau de NANTES, avocats plaidant

Madame [C] [N]
née le 24 Novembre 1980 à NANTES (LOIRE ATLANTIQUE), demeurant [Adresse 2]
Rep/assistant : Maître Joachim D’AUDIFFRET de la SCP ACTA JURIS SCP D’AVOCATS, avocats au barreau de NANTES, avocats plaidant

DEMANDEURS.

D’UNE PART

ET :

Société Civile CRC représentée par son mandataire ad hoc, Maître [D] [P], de la SELARL AJ ASSOCIES, sise [Adresse 3], désigné par ordonnance du Président du TGI de NANTES en date du 03/12/2018, dont le siège social est sis [Adresse 2]
Non comparante - Non Représentée

Monsieur [K] [L] [U]
né le 07 Décembre 1943 à [Localité 5] (LOIRE ATLANTIQUE), demeurant [Adresse 1]
Rep/assistant : Maître Bertrand LARONZE de la SELARL L.R.B. AVOCATS CONSEILS, avocats au barreau de NANTES

Madame [V] [Y] épouse [U] - Décédée le 18/01/2022
née le 12 Août 1942 à NANTES (LOIRE ATLANTIQUE), demeurant [Adresse 1]

DEFENDEURS.

D’AUTRE PART

Exposé du litige
Par acte en date du 15 mars 2017, la société civile CRC a vendu à Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G] un immeuble d’habitation sis [Adresse 2].
La dissolution et la radiation de la société civile CRC du registre du commerce et des sociétés a été publiée au BODACC le 16 février 2018, et suivant ordonnance du président du tribunal judiciaire de Nantes du 3 décembre 2018, la SELARL AJ ASSOCIES-[D] [P] était désigné en qualité de mandataire ad hoc de la société CRC, à l’effet de la représenter pour tous actes et pour toutes les actions dirigées contre elle.
 A la suite de cette vente, Madame [N] et Monsieur [G] se plaignant de désordres affectant les réseaux d’assainissement de l’immeuble et une absence de raccordement de ce bien au réseau téléphonique, ont sollicité en référé la désignation d’un expert au contradictoire de la société civile CRC prise en la personne de son mandataire ad hoc, Maître [P], ainsi que de Monsieur et Madame [U].
Par ordonnance du président du tribunal de NANTES en date du 17 janvier 2019, Monsieur [A] était désigné en qualité d’expert judiciaire. Il a procédé à ses opérations et a déposé son rapport d’expertise le 7 avril 2020.
Sur la base de ce rapport, Madame [N] et Monsieur [G] ont, suivant exploits des 7 et 22 juillet 2020, assigné la société civile CRC prise en la personne de son mandataire ad hoc, ainsi que Monsieur et Madame [U], aux fins d’obtenir leur condamnation à les indemniser des conséquences des désordres affectant l’immeuble acquis.
Monsieur [G] et Madame [N] ont revendu leur bien immobilier le 15 décembre 2021 en se réservant expressément dans l’acte de vente le bénéfice de la procédure en cours, non transmise à l’acquéreur.
Le 18 janvier 2022, Madame [U] est décédée et, par courrier officiel en date du 18 juillet 2022, le conseil de Monsieur [U] a indiqué que ce dernier était le seul héritier de son épouse, à raison d’une donation au dernier vivant.
Dans leurs dernières conclusions communiquées par voie électronique le 15 septembre 2022, Monsieur [G] et Madame [N] demandent au tribunal, au visa des articles 1604, 1857 et subsidiairement de l’article 1137 ancien du code civil, de :
- Condamner la société civile CRC à payer Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G], la somme de 43 799,44 € TTC au titre des travaux nécessaires pour remédier aux désordres avec indexation sur l’indice FFB de la construction à compter de la date du dépôt du rapport d’expert jusqu’à la décision à intervenir.
- Condamner la société civile CRC à payer Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G], la somme de 29.166,47 € en réparation de l’ensemble de leurs préjudices subis.
- Constater la dissolution de la société CRC et sa radiation du RCS, et son absence de patrimoine lui permettant de faire face à ses dettes.
En conséquence,
- Condamner Monsieur [K] [U] à payer à Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G], la somme de 43.799,44 € TTC au titre des travaux nécessaires pour remédier aux désordres avec indexation sur l’indice FFB de la construction à compter de la date du dépôt du rapport d’expert jusqu’à la décision à intervenir.
- Condamner Monsieur [K] [U] à payer à Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G], la somme de 29.166,47 € en réparation de l’ensemble de leurs préjudices subis.  
- Dire et juger n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
- Condamner la société civile CRC et Monsieur [K] [U] à payer à Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G], la somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile
- Condamner la société civile CRC et Monsieur [K] [U] aux entiers dépens, en ce, y compris les frais d’expertise ressortant à un montant de 13.030,27 € TTC, outre les dépens de la procédure de référé expertise.  
Au soutien de leurs demandes ils indiquent en substance que les travaux de construction de l’immeuble ont été effectués par la société CRC dont les seuls associés étaient les époux [U]. Ce bâtiment, à vocation artisanale à l’origine, a été transformé en plusieurs logements par la société CRC qui a créé les limites parcellaires. La société CRC a vendu ces logements à de nouveaux propriétaires, après avoir créé sur celui vendu aux demandeurs les réseaux eaux usées et eaux pluviales (ci-après EU et EP), qu’elle a raccordé sur des ouvrages en place. Ils indiquent que l’expert a constaté des désordres sur ces réseaux EU et EP qui ne respectent pas les règles de l’art, que l’un d’eux était sans exutoire connu, et a retenu que les EU s’évacuaient difficilement notamment en raison de pentes insuffisantes. L’expert en impute la responsabilité à la société CRC. Ils déplorent en outre l’absence d’information sur l’existence de servitudes de passage des réseaux, ainsi que l’absence de raccordement de leur logement au réseau téléphonique. Les demandeurs relèvent que l’expert a chiffré les travaux réparatoires à 36 601 euros TTC, qu’à la suite des opérations d’expertise, ils ont fait procéder à l’intégralité des travaux financés par un emprunt auprès de leur banque – de même que les frais d’expertise – pour un coût hors frais d’expertise d’un montant total de 43 799,44 euros. Les demandeurs indiquent agir sur le fondement du défaut de conformité rappelant que l’immeuble leur a été vendu comme étant raccordé au réseau d’assainissement, ainsi qu’au réseau téléphonique, et en réponse aux défendeurs qui soutiennent que leur action relève de la seule garantie des vices cachés, ils affirment que dès lors que la réglementation impose une séparation des EU et des EP conformément aux dispositions des articles L1331-1 et suivants du Code de la Santé Publique, avec un raccordement conforme, les désordres constatés par l’expert constituent une non-conformité.
Subsidiairement ils agissent en garantie des vices cachés considérant que la clause d’exclusion de garantie ne peut s’appliquer en raison de la mauvaise foi de la venderesse, et invoquent également un dol ayant vicié son consentement. S’agissant des préjudices, au-delà de ce qui a été repris pour les besoins de la discussion et faisant application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des demandeurs, à leurs dernières conclusions susvisées.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 24 août 2022, monsieur [U], agissant en son nom et en qualité d’unique héritier de son épouse décédée le 18 janvier 2022, demande au tribunal de :
- Débouter les consorts [N]-[G] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
Subsidiairement,
- Dire et juger que l’indemnisation des consorts [N]-[G], au titre des travaux réparatoires ne saurait excéder la somme de 24.150,00 Euros TTC,
- Dire et juger que les préjudices autres des consorts [N]-[G] ne sauraient excéder la somme de 1.634,00 Euros TTC,
- Dire et Juger que les consorts [N]-[G] conserveront à leur charge les frais d’expertise qu’ils ne justifient pas avoir réglé sur leurs deniers personnels,
En tout état de cause,
- Condamner in solidum les consorts [N]-[G] à payer à Monsieur [U] une somme de 3 500,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
- Condamner in solidum les consorts [N]-[G] aux entiers dépens,
- Dire et juger qu’il n’y a pas lieu d’assortir le jugement à intervenir de l’exécution provisoire.  

A titre liminaire il relève que les demandeurs font preuve de déloyauté en se gardant de préciser qu’ils ont revendu leur logement en 2021 avec une plus-value de 119 000 €. Au soutien de sa demande principale il affirme pour l’essentiel que les consorts [N]-[G] sont mal fondés à agir sur un défaut de délivrance conforme et que l'action en garantie des vices cachés est la seule qui puisse être intentée par l'acheteur contre le vendeur lorsque la chose comporte un défaut qui affecte son usage. S’agissant du raccordement au réseau téléphonique il soutient que le rapport d’expertise ne démontre pas l’absence de raccordement au réseau France TELECOM, l’expert ayant relevé en pages 38 et 41 de son rapport qu’il ne lui a pas été possible de constater l’absence de signal et que si le raccordement téléphonique existe, soit il se fait obligatoirement par une autre parcelle soit il n’existe pas, précisant que l’expert n’a fait aucune investigation concrète sur ce point. Par ailleurs alors que les consorts [N]-[G] affirment que l’absence d’information sur l’existence de servitudes de passage des réseaux constituerait également une non-conformité dans la délivrance du bien vendu, il soutient que l’existence de servitude ne remet en aucun cas en cause la conformité du bien vendu qui peut être utilisé conformément aux prévisions, à savoir comme un immeuble d’habitation. Quant à l’action en garantie des vices cachés elle ne peut pas prospérer en raison de la clause exonératoire contenue à l’acte. Il réfute enfin l’existence d’un dol estimant n’avoir rien caché à l’acheteur, et soulignant que l’expert admet que les précédents occupants ont pu ne pas percevoir les conséquences des désordres. Il rappelle que le dol suppose des manœuvres ou un silence gardé, ainsi qu’une volonté de tromper, la société CRC, alors dirigée par le fils du défendeur, ayant fait réaliser ces travaux par d’autres sociétés sans connaître la problématique d’écoulement des eaux. Subsidiairement, sur le préjudice il en demande la réduction et sur ce point et sur l’ensemble de la discussion, au-delà de ce qui vient d’être repris et faisant application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de monsieur [U] à ses dernières conclusions susvisées.
La société CRC, dissoute et représentée par son mandataire ad hoc Maître [P] n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 janvier 2024.
 
Motifs de la décision
A titre liminaire il doit être constaté que la société CRC a fait l’objet d’une dissolution publiée au BODACC le 16 février 2018.
Aux termes de l’article 1859 du code civil, les actions contre les associés d’une société civile peuvent être engagées dans un délai de 5 ans compter de la publication de la dissolution de la société, et l’impossibilité d’exécuter contre la société civile autorise les créanciers à poursuivre directement les associés.
Il n’est pas discuté par monsieur [U] que la société CRC, désormais radiée du registre du commerce et des sociétés, n’a plus de patrimoine lui permettant de faire face à ses dettes de sorte que monsieur [U], en sa qualité d’associé unique de la société civile du fait du décès de son épouse, a qualité à défendre.

Sur le fondement de l’action des consorts [G]-[N]
Il est constant que le contrat de vente donne naissance à diverses obligations à la charge du vendeur, qui doit en premier lieu délivrer la chose, et doit également notamment garantie contre les vices cachés.
L’obligation de délivrance est définie à l’article 1604 du code civil comme étant le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur. La délivrance conforme suppose que la chose livrée est identique à celle convenue en nature, quantité et qualité.
Aux termes de l’article 1641 du code civil, il y a vice caché lorsque la chose est celle convenue mais atteinte d'un défaut caché lors de la vente qui affecte son usage normal, qui rend la chose impropre à l’usage auquel on la destine ou qui diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou en aurait donné un prix moindre s’il en avait eu connaissance.
Ainsi, et de par sa nature même, le défaut de conformité est distinct du défaut caché, qui est un défaut d’usage, il y a délivrance non conforme lorsque qu’existe une différence entre la chose convenue et la chose livrée, et une chose peut être affectée d'un défaut de conformité sans être aucunement affectée dans son usage. A l’inverse lorsque le défaut est relatif à la qualité de la chose qui en affecte son usage, le vendeur sera recherché au titre de la garantie des vices cachés si le défaut n’était pas apparent au moment de la vente.
S’il est constant qu’en cas de défaut de raccordement au réseau public d’assainissement, ne satisfait pas à son obligation de délivrance conforme le vendeur qui vend un immeuble comme étant relié au réseau public d’assainissement, et s’engage dès lors à délivrer un bien dont les écoulements sont raccordés, à l’inverse dans l’hypothèse où l’immeuble est raccordé au réseau d’assainissement mais que ce réseau est défectueux, le vendeur doit être recherché au titre de sa garantie des vices cachés.
En l’espèce il n’est pas discuté que la société CRC, venderesse, est à l’origine du démembrement de l’immeuble initial qui avait une vocation artisanale, et que ce démembrement a permis la création de plusieurs logements dont le bien vendu. Il est également constant que la société CRC a alors créé les réseaux EU et EP pour ce bien, dont l’expert a considéré qu’ils n’étaient pas conformes aux règles de l’art.
L’expert a en effet relevé qu’une partie du réseau d’eaux usées se mélangeait aux autres canalisations de logements voisins et, qu’une partie de ces dernières s’évacuait directement chez l’un des voisins par trop-plein dans son jardin. L’expert a en outre constaté que les évacuations EU sont composées de canalisations en matériaux divers (PVC lisse, annelé, béton…) de diamètres différents et se mélangent avec les évacuations d’eaux pluviales, que les ouvrages ont une pente insuffisante et sont dégradés, et que l’une des branches EU n’a pas d’exutoire connu. En conséquence, l’expert a conclu que l’état des réseaux EU et EP ne sont pas conformes ni à la réglementation en vigueur (par exemple mélange des EU avec les EP), ni aux règles de l’art (par exemple nature successive différente des conduits pour les effluents EU), que ces réseaux présentent des anomalies mettant en cause leur fonctionnement, du fait de leur engorgement et en ce qu’une partie du réseau EU se déverse sur le fond voisin et non dans le collecteur des eaux usées de la Mairie.
Or, l’acte de vente du 15 mars 2017 mentionne que l’immeuble est raccordé au réseau d’assainissement, que ce dernier était conforme et que le vendeur n’avait pas rencontré de difficulté particulière avec l’installation.
Sur ce point l’expert a pu constater que ces désordres, trouvant leur cause dans une mauvaise réalisation des travaux d’assainissement datant de 2012, ont pu ne se révéler qu’au fil du temps, du fait de l’engorgement progressif des canalisations, et les opérations d’expertise n’ont pas démontré que la venderesse avait subi ces dysfonctionnements antérieurement à la vente et en avait connaissance. Les demandeurs ont d’ailleurs déploré la survenance de ces désordres en mai 2017, après un débordement des WC alors que le lave-linge était en fonctionnement, ce qui a induit une odeur nauséabonde permanente et les a conduits à faire curer leurs canalisations à l’aide de caméras. Cette opération a permis la découverte des désordres sur les réseaux et les passages dans les parcelles riveraines. Ces désordres, décrits par l’expert, sont de nature à affecter l’usage du réseau d’assainissement en ce que celui-ci n’est pas performant, crée des engorgements et génère des odeurs.
Il résulte de tout ce qui précède que les acquéreurs du bien ne peuvent se plaindre d’une délivrance non conforme au titre du réseau d’assainissement, en ce que celui-ci existe (le raccordement à l’installation d’assainissement a fait l’objet d’un contrôle par le service compétent le 13 janvier 2017, tandis que l’expert a constaté que le réseau était raccordé au réseau public, seule une des branches EU étant sans exutoire connu). Il reste que les désordres affectant ce réseau d’assainissement conçu en dépit de la règlementation, et des règles de l’art et découverts quelque temps après la vente relèvent de la garantie des vices cachés.
A cet égard la clause d’exonération de garantie mentionnée à l’acte est de nature à exonérer le vendeur à condition qu'il soit de bonne foi, et à l’inverse la clause doit être déclarée de nul effet en cas de mauvaise foi du vendeur, consistant dans la connaissance effective du vice au moment de la vente et dans l'inexécution de l'obligation d'information de l'acheteur.
En l’espèce, si l’expert a pu conclure que la responsabilité de la non-conformité du réseau d’assainissement aux règles de l’art était imputable à la société CRC à l’origine de la division de l’ancien local artisanal, il apparaît cependant que ces de non-conformités aux règles de l’art et à la réglementation ne peuvent en tant que telles être imputables à la société CRC intervenue en tant que maître de l’ouvrage. Quant à la connaissance que la société CRC aurait eu des désordres causés par ces non-conformités, il faut encore constater qu’elle n’est pas démontrée, l’expert ayant souligné en page 44 de son rapport que ces désordres « ne voient leurs conséquences apparaître que plusieurs années après leur mise en œuvre, quand les conduites s’encrassent et ne permettent plus les écoulements des effluents. Les premiers utilisateurs ont pu ne pas percevoir les conséquences de ces désordres ».
Il s’ensuit que la clause d’exonération de garantie mentionnée à l’acte est valable et doit conduire au rejet des demandes formées par les consorts [G]-[N] au titre de la garantie des vices cachés.
Pour les mêmes raisons, aucun dol ne saurait être retenu à l’encontre de la société venderesse, et les consorts [G]-[N] verront également leur demande rejetée sur ce fondement.

S’agissant du raccordement de l’immeuble au réseau téléphonique, l’expert indique que malgré la présence d’un boîtier de raccordement, l’immeuble vendu n’était pas raccordé au réseau téléphonique, imputant cette absence du raccordement à une erreur de conception de la société CRC lors de la création des lots. Cependant, cette affirmation d’absence de raccordement est en contradiction avec les constatations faites au cours de l’expertise, puisque l’expert indique en page 38 de son rapport qu’il ne lui a pas été possible de constater l’absence de signal, faute pour les demandeurs de produire le constat que l’opérateur BOUYGUES TELECOM aurait fait à ce titre, précisant en page 41 que si le raccordement téléphonique existe, soit il se fait obligatoirement par une autre parcelle soit il n’existe pas. Dès lors il ne peut être tenu compte des conclusions de l’expert, qui n’a pas fait plus investigation au sujet du raccordement téléphonique. Par ailleurs il doit être relevé qu’aucune mention particulière ne figure à l’acte au sujet du réseau téléphonique, et que les demandeurs n’apportent pas d’élément complémentaires établissant l’absence de conformité du bien vendu à ce titre. Ils seront en conséquence déboutés de leur demande à ce titre.

S’agissant des servitudes de passage des canalisations et des eaux pluviales, les demandeurs considèrent que l’absence d’information sur l’existence de servitudes de passage des réseaux constituent une non-conformité dans la délivrance du bien vendu. Cependant s’il n’est pas discuté que la cause de ces servitudes est la division du bâtiment initial en plusieurs logements, force est de constater que les demandeurs n’en tirent aucune conséquence, ces servitudes se confondant manifestement avec le mélange des réseaux constatés par l’expert, constitutifs de vices cachés. Il doit également être relevé que l’existence de ces servitudes ne remet pas en cause la conformité du bien vendu à sa destination d’immeuble d’habitation.
Les consorts [G]-[N] seront en conséquence également déboutés de cette demande.

Il découle de l’ensemble de ces éléments que les consorts [G]-[N] seront déboutés de l’ensemble de leurs demandes. 
 
Sur les mesures de fin de jugement
 Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile permettent au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
En l’espèce, les consorts [G]-[N] qui succombent à la présente instance seront condamnés aux dépens et tenue de verser à monsieur [U] la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles. Les consorts [G]-[N] seront déboutés de leur propre demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’article 514 du Code de procédure civile prévoit que « les décisions de première instance sont de droit exécutoire à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement ».
Ces textes sont applicables à toutes les instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020, ce qui est le cas en l’espèce. 
L’exécution provisoire est donc de droit.
                                                                                                                                                            

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition, réputé contradictoire et en premier ressort,
 
DEBOUTE Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G] de l’ensemble de leurs demandes au titre de la délivrance non conforme ;

DIT que les désordres affectant les réseaux d’assainissement relèvent de la garantie des vices cachés ;

DIT que la société CRC est contractuellement exonérée de cette garantie ;

DEBOUTE Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G] de l’ensemble de leurs demandes au titre de la garantie des vices cachés ;

CONDAMNE Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G] à régler à Monsieur [K] [U] la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [C] [N] et Monsieur [J] [G] aux entiers dépens ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Caroline LAUNAYMarie-Caroline PASQUIER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/03634
Date de la décision : 30/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-30;20.03634 ?
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