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16/05/2024 | FRANCE | N°24/00266

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, Référé président, 16 mai 2024, 24/00266


N° RG 24/00266 - N° Portalis DBYS-W-B7I-MZVP

Minute N°2024/




ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

du 16 Mai 2024




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S.C.I. [Adresse 2]

C/

S.A. EDF
S.A.S. HPC ENVIROTEC


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copie exécutoire délivrée le 16/05/2024 à :

Me Margot DENIS - 8
Me Lionel HEBERT- Rennes

copie certifiée conforme délivrée le 16/05/2024 à :

Me Margot DENIS - 8
Me Lionel HEBERT- Rennes
la SELARL RINEAU & ASSOCIES - 263


la SCP SALANS & ASSOCIES - ME VERDOT FRANCOIS - PARIS
dossier






MINUTES DU GREFFE

DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES

(Loire-Atlantique)


________________________________...

N° RG 24/00266 - N° Portalis DBYS-W-B7I-MZVP

Minute N°2024/

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

du 16 Mai 2024

-----------------------------------------

S.C.I. [Adresse 2]

C/

S.A. EDF
S.A.S. HPC ENVIROTEC

---------------------------------------

copie exécutoire délivrée le 16/05/2024 à :

Me Margot DENIS - 8
Me Lionel HEBERT- Rennes

copie certifiée conforme délivrée le 16/05/2024 à :

Me Margot DENIS - 8
Me Lionel HEBERT- Rennes
la SELARL RINEAU & ASSOCIES - 263
la SCP SALANS & ASSOCIES - ME VERDOT FRANCOIS - PARIS
dossier

MINUTES DU GREFFE

DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES

(Loire-Atlantique)

_________________________________________

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
_________________________________________

Président : Pierre GRAMAIZE

Greffier :Florence RAMEAU

DÉBATS à l'audience publique du 11 Avril 2024

PRONONCÉ fixé au 16 Mai 2024

Ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe

ENTRE :

S.C.I. [Adresse 2] (RCS Paris N°438925463), dont le siège social est sis [Adresse 5]
Rep/assistant : Maître Bernard RINEAU de la SELARL RINEAU & ASSOCIES, avocats au barreau de NANTES
Rep/assistant : Maître François VERDOT de la SCP SALANS & ASSOCIES - ME VERDOT FRANCOIS, avocats au barreau de PARIS

DEMANDERESSE

D'UNE PART

ET :

S.A. EDF, dont le siège social est sis [Adresse 4]
Rep/assistant : Me Margot DENIS, avocat au barreau de NANTES

S.A.S. HPC ENVIROTEC, dont le siège social est sis [Adresse 1]
Rep/assistant : Me Lionel HEBERT, avocat au barreau de RENNES

DÉFENDERESSES

D'AUTRE PART

N° RG 24/00266 - N° Portalis DBYS-W-B7I-MZVP du 16 Mai 2024

PRESENTATION DU LITIGE

Suivant acte dressé le 30 octobre 2001 par Me [L] [P], notaire associé à [Localité 7], avec la participation de Me [J] [N], notaire à [Localité 7], l'E.P.I.C. ELECTRICITE DE FRANCE SERVICE NATIONAL a vendu à la S.C.I. DU [Adresse 2] un ensemble immobilier de 5 bâtiments à usage de bureaux et de locaux commerciaux et des emplacements de stationnement situés [Adresse 3] à [Localité 6].

Se plaignant de l'état de pollution du site après sa libération progressive à l'issue des baux en cours au moment de la vente et soutenant que le rapport de diagnostic environnemental produit lors de la vente en avait minoré l'appréciation, la S.C.I. DU [Adresse 2] a fait assigner en référé la S.A. ELECTRICITE DE FRANCE (EDF) et la S.A.S. HPC ENVIROTEC par actes de commissaires de justice des 23 février et 1er mars 2024 afin de solliciter l'organisation d'une expertise.

La S.C.I. DU [Adresse 2] fait notamment valoir que :
- lors de la vente, un rapport de la société HPC ENVIROTEC lui a été produit en concertation ou non avec sa mandante, EDF, lequel occultait des informations essentielles et déterminantes sur l'état de pollution du site,
- plusieurs rapports Ramboll et un rapport d'expertise judiciaire de Mme [X] établissent que la société HPC ENVIROTEC, mandatée par GDF, qui était le même établissement public qu'EDF à l'époque, ne serait pas intervenue dans les règles de l'art et aurait rédigé un rapport truffé d'inexactitudes sur la forme et le fond,
- EDF a fait passer pour diagnostic environnemental un rapport, qui, selon son auteur, ne pouvait répondre à cette définition,
- elle a été privée de la possibilité de donner un consentement libre et éclairé,
- il n'appartient pas au juge des référés de se substituer au juge du fond en tranchant des problématiques de prescription,
- l'action fondée sur le dol n'est en tous cas pas prescrite, compte tenu de la date du rapport Ramboll2 susceptible de fixer le point de départ du délai non acquis,
- le changement d'usage est indifférent, dès lors que les travaux doivent être réalisés indépendamment de celui-ci et que la mauvaise foi des défenderesses lui cause un préjudice compris entre 6 et 12 millions d'euros selon les rapports Ramboll,
- le chef de mission supplémentaire réclamé subsidiairement par EDF quant à l'usage du site est hors sujet, dès lors qu'il ne s'agit pas de vérifier la compatibilité du site avec l'usage tertiaire mais de rechercher si au moment de la vente des informations essentielles lui ont été dissimulées.

La S.A. EDF conclut à titre principal au rejet de la demande avec condamnation de la demanderesse au paiement d'une somme de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et formule à titre subsidiaire toutes protestations et réserves en réclamant la modification de la mission proposée.

Elle objecte notamment que :
- la demande ne repose pas sur un motif légitime au sens de l'article 145 du code de procédure civile en ce que l'action de la S.C.I. est manifestement vouée à l'échec, dès lors que :
- toute action contractuelle sur la base de l'acte de vente serait prescrite en application du délai butoir de 20 ans de l'article 2232 du code civil, moyen qui n'est pas de fond et relève de la compétence du juge des référés,
- la connaissance de la pollution du site est en tous cas avérée depuis un rapport Ramboll de 2018,
- toute action en responsabilité délictuelle fondée sur l'inexécution de l'obligation de remise en état d'un site classé au titre des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) serait irrecevable pour défaut de qualité à agir, étant souligné que seul le dernier exploitant du site est tenu d'une obligation de remise en état et que ce dernier exploitant était la Cie Européenne du Gaz, aux droits de laquelle se trouve ENGIE,
- toute action ayant pour objectif de lui faire supporter le coût de mesures de gestion du sol est infondée car elles incombent à la S.C.I. en vertu des articles L 556-1, L 556-2, L 125-6 du code de l'environnement, étant donné que le bien a été vendu avec un usage réservé au tertiaire et commercial conforme à son classement et que les impacts identifiés par les rapports Ramboll concernent un autre usage,
- la mesure est inutile puisque l'ensemble des études réalisées convergent pour confirmer que la situation environnementale du site est compatible avec l'usage actuel,
- à titre subsidiaire, la mission de l'expert doit être précisée et expurgée de l'avis sur la « sincérité » du rapport technique.

La S.A.S. HPC ENVIROTEC conclut au rejet de la demande d'expertise à son égard avec condamnation de la demanderesse à lui payer 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, en soutenant que :
- l'action formée contre elle sera prescrite par application de l'article 2224 du code civil, dès lors que la demanderesse se prévaut d'un rapport établi au mois de juillet 2018 comportant en annexe 1 des manquements qui lui sont reprochés dans son étude réalisée en 2001,
- la mesure ne présente aucun intérêt, dès lors qu'aucune faute ne peut lui être reprochée, étant donné qu'elle n'a reçu qu'une mission de compilation et de synthèse de rapports établis par différents organismes dans les années 1991/1992 de la part de GAZ DE FRANCE et non pour faire un diagnostic de l'état environnemental du site dans le cadre d'une obligation d'information du vendeur.

MOTIFS DE LA DECISION

Il résulte des pièces produites par la S.C.I. DU 10 BIS et 11 à 13 ALLEE DES TANNEURS et des explications données que les causes et conséquences de l'état de pollution des sols de l'ensemble immobilier acquis par elle auprès d'EDF sont en litige.

Elle se plaint d'avoir été victime d'une dissimulation de l'état réel du sol résultant de la production d'un rapport incomplet de la S.A.S. HPC ENVIROTEC.

L’avis d’un technicien du bâtiment permettrait d’aider à résoudre le litige et d’éclairer le tribunal s’il était saisi d’une demande.

Cependant, pour apprécier le caractère légitime du motif de nature à justifier l’organisation d’une expertise pour établir la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution de ce litige dans le cadre des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, il est nécessaire de vérifier si l'action au fond n'est pas vouée à l'échec.

Si le juge des référés a une compétence limitée aux évidences et qu'il n'a pas à trancher une difficulté complexe sur l'application du régime de la prescription, en l'espèce, le moyen soulevé en défense est imparable.

En effet, sans même entrer dans l'étude de l'application du nouvel article 2232 du code civil aux contrats antérieurs, il y a lieu de relever que l'action fondée sur le dol, seul invoqué par la demanderesse, se prescrit par cinq ans à compter de la découverte de la tromperie alléguée.

Or, dès le rapport d'investigations environnementales du 25 juillet 2018 établi par la S.A.S. RAMBOLL FRANCE à la demande de COVIVIO, groupe auquel appartient la S.C.I. demanderesse, étaient relevées la présence d'une contamination en hydrocarbures lourds (de type huile) dans la nappe au droit de l'ancienne station GPL (bâtiment G) dont l'origine n'est pas déterminée et la présence au centre du site d'une source de contamination dans les sols des eaux souterraines et des gaz du sol en lien avec les anciennes activités de l'usine à gaz avec la présence de composés marqueurs de ces activités : HAP, BTEX, HCT et cyanures (à proximité du bâtiment F).

Le rapport d'investigations complémentaires du 18 octobre 2019 n'est venu qu'apporter des précisions sur la localisation et le nombre de produits toxiques concernés ainsi que le coût des mesures de dépollution à envisager pour leur retrait.

Par application de l'article 2224 du code civil, l'action fondée sur le dol née de la prétendue découverte des vices affectant le sol résultant des conclusions du rapport du 25 juillet 2018 aurait dû être engagée dans les 5 ans, soit jusqu'au 25 juillet 2023, de sorte qu'en assignant la venderesse en référé expertise seulement le 23 février 2024, la demanderesse a laissé écoulé le délai de prescription sans l'interrompre et se trouve privée de son droit d'agir au fond, ce qui la prive par conséquent de tout motif légitime pour demander une mesure d'instruction avant tout procès.

De même, l'action en responsabilité délictuelle envisageable contre le tiers au contrat que constitue la société HPC ENVIROTEC se prescrit également par cinq ans dans le cadre de l'article 2224 du code civil à compter du jour où la demanderesse a eu connaissance du caractère supposé insuffisant du rapport qui lui avait été produit lors de la vente, c'est à dire cette même date du 25 juillet 2018, c'est à dire jusqu'au 25 juillet 2023, date largement dépassée lors de l'assignation en référé du 1er mars 2024, ce qui lui fait perdre tout motif légitime à demander une expertise.

Il convient en conséquence de débouter la demanderesse de sa demande.

Il est équitable de fixer à 6 000 € l'indemnité qui sera due par la demanderesse à la S.A. EDF et à 3 000 € celle qui sera due à la S.A.S. HPC ENVIROTEC en application de l'article 700 du code de procédure civile.

DECISION

Par ces motifs, Nous, juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Déboutons la S.C.I. DU [Adresse 2] de sa demande,

Condamnons la S.C.I. DU [Adresse 2] à payer à la S.A. EDF une somme de 6 000,00 € et à la S.A.S. HPC ENVIROTEC une somme de 3 000,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamnons la S.C.I. DU [Adresse 2] aux dépens.

Le greffier, Le président,

Florence RAMEAU Pierre GRAMAIZE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : Référé président
Numéro d'arrêt : 24/00266
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;24.00266 ?
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