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16/05/2024 | FRANCE | N°21/04454

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, 4ème chambre, 16 mai 2024, 21/04454


SG




LE 16 MAI 2024

Minute n°


N° RG 21/04454 - N° Portalis DBYS-W-B7F-LINQ





[H] [I]

C/

Syndic. de copro. SDC [Adresse 5] REPRÉSENTÉ PAR LA SELARL d’Administrateurs judiciaires AJASSOCIES
S.C.I. JADE





Demande en nullité d’une assemblée générale ou d’une délibération de cette assemblée





1 copie exécutoire et certifiée conforme à :
Me Marie DESSEIN - 330
Me Emmanuel FOLLOPE - 7 B
Me Jean-marc LE MASSON - 256




délivrées le
TRIBU

NAL JUDICIAIRE
DE NANTES
---------------------------------------------------


QUATRIEME CHAMBRE


JUGEMENT
du SEIZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE



Composition du Tribunal lors du délibéré :

Prési...

SG

LE 16 MAI 2024

Minute n°

N° RG 21/04454 - N° Portalis DBYS-W-B7F-LINQ

[H] [I]

C/

Syndic. de copro. SDC [Adresse 5] REPRÉSENTÉ PAR LA SELARL d’Administrateurs judiciaires AJASSOCIES
S.C.I. JADE

Demande en nullité d’une assemblée générale ou d’une délibération de cette assemblée

1 copie exécutoire et certifiée conforme à :
Me Marie DESSEIN - 330
Me Emmanuel FOLLOPE - 7 B
Me Jean-marc LE MASSON - 256

délivrées le
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
---------------------------------------------------

QUATRIEME CHAMBRE

JUGEMENT
du SEIZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors du délibéré :

Président :Stéphanie LAPORTE, Juge,
Assesseur :Nathalie CLAVIER, Vice Présidente,
Assesseur :Laëtitia FENART, Vice-Présidente,

GREFFIER : Sandrine GASNIER

Débats à l’audience publique du 12 MARS 2024 devant Stéphanie LAPORTE, siégeant en Juge Rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

Prononcé du jugement fixé au 16 MAI 2024.

Jugement Contradictoire rédigé par Stéphanie LAPORTE, prononcé par mise à disposition au greffe.

---------------

ENTRE :

Madame [H] [I], demeurant [Adresse 1]
Rep/assistant : Me Marie DESSEIN, avocat au barreau de NANTES

DEMANDERESSE.

D’UNE PART

ET :

Syndic. de copro. SDC [Adresse 5] REPRÉSENTÉ PAR LA SELARL d’Administrateurs judiciaires AJASSOCIES, dont le siège social est sis [Adresse 2] prise en la personne de Maître [G] [Z], nommé en qualité d’administrateur provisoire par ordonnance en date du 8 août 2022
Rep/assistant : Me Emmanuel FOLLOPE, avocat au barreau de NANTES

S.C.I. JADE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
Rep/assistant : Me Jean-marc LE MASSON, avocat au barreau de NANTES

DEFENDERESSES.

D’AUTRE PART

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

EXPOSE DU LITIGE
Madame [H] [I] a acquis un appartement sis [Adresse 3], au second étage d’un immeuble soumis au régime de la copropriété, par acte authentique de vente en date du 2 juin 2017.
Il s’agit d’une petite copropriété de trois copropriétaires, savoir la SCI JADE, Monsieur [E] [A] et Madame [H] [I].
Par exploits en date du 08 octobre 2021, Madame [H] [I] a fait assigner, devant le tribunal judiciaire de Nantes, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3], et la SCI JADE aux fins d’annulation des résolutions n°4, 5, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de l’assemblée générale de l’immeuble sis [Adresse 3], du 27 juillet 2021 et de condamnation du syndicat des copropriétaires et du syndic, pour les manquements et négligences commis.
Le 20 mai 2022, le Président du tribunal judiciaire de Nantes a rendu une ordonnance sur requête désignant la SELARL AJ ASSOCIES comme administrateur ad hoc de la copropriété.
Par dernières conclusions du 14 février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Madame [H] [I] a sollicité du tribunal, aux visas des articles 9, 18 et 42 de la loi du 10 juillet 1965, 11 et suivants du décret du 17 mars 1967 et des articles 1240 et suivants et 1231-1 du code civil, de :
Recevoir Madame [I] en ses demandes et les déclarer bien fondées ;

En conséquence,
A titre principal
Annuler l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3], du 27 juillet 2021 ;
Subsidiairement, annuler les résolutions 4, 5, 6, 7, 8 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3], du 27 juillet 2021,
En tout état de cause
Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3] et le syndic pour les fautes, manquements et négligences commis dans la gestion de la SCI JADE et de Monsieur [F] [C] ès-qualités de syndic de fait, à verser à Madame [I] la somme de 5.000 € en réparation des préjudices subis,
Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SCI JADE dont le gérant Monsieur [C] à verser à Madame [I] la somme de 5000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Subsidiairement
Condamner la SCI JADE pour les fautes, manquements et négligences commis dans la gestion de la SCI JADE et de Monsieur [F] [C] es qualité de syndic de fait, à verser à Madame [I] la somme de 5.000 € en réparation des préjudices subis,
En tout état de cause
Condamner les mêmes aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître Marie DESSEIN, Avocat aux offres de droit,
Dispenser la demanderesse de toute participation aux condamnations précitées et aux frais afférents à la présente procédure, par application de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.
A l’appui de ses conclusions, Madame [H] [I] sollicite l’annulation de l’assemblée générale du 27 juillet 2021, dès lors que cette assemblée a été convoquée le 2 juillet 2021 par le syndic bénévole, la SCI JADE, après l’expiration de son mandat d’un an, le 29 juin 2021. Elle fait valoir que les conditions de l’article 41-11 de la loi du 10 juillet 1965 relatif aux petites copropriétés ne sauraient réunies en l’espèce.
Elle fait également valoir la nullité de l’élection du président de séance, dès lors que les votants ne sont pas identifiés dans le procès-verbal de l’assemblée, et par voie de conséquence, la nullité de l’assemblée générale.
Elle souligne encore l’absence de désignation des scrutateurs lors de cette assemblée, ainsi que l’absence des majorités de vote pour l’ensemble des résolutions adoptées.
Elle indique que les projets de résolutions n’ont pas été annexés aux convocations en méconnaissance de l’article 11 du décret du 17 mars 1967. Elle sollicite à ce titre l’annulation de l’assemblée, ou subsidiairement celle des résolutions concernées.
Elle fait valoir la nullité de la résolution d’approbation des comptes de l’année 2019 et la résolution de l’approbation des budgets prévisionnels 2020 et 2021, dès lors que la convocation ne comprenait pas de projet de budget prévisionnel conforme aux modèles établis par décret du 14 mars 2005, l’état financier du syndicat des copropriétaires, son compte de gestion générale, une présentation des comptes conforme aux modèles établis par décret du 14 mars 2005.
Elle conteste encore la légalité de la résolution n°8 sur la dispense de compte bancaire séparé.
La demanderesse fait également valoir la responsabilité du syndicat des copropriétaires et du syndic, dès lors qu’aucune assemblée générale n’a été convoquée entre le 7 octobre 2015 et le 4 janvier 2020 et aucun syndic n’a été désigné après l’expiration du mandat confié à Monsieur [C] en 2015, imposant le recours à des administrateurs ad hoc.
Elle souligne que les travaux réalisés par le restaurant de Monsieur [E] [A] dont la SCI JADE est propriétaire, ont débuté sans que l’assemblée générale ne les ait valablement autorisés et elle indique que sa propre demande de convocation d’une assemblée générale n’a pas été suivie d’effet.
Elle considère également que le syndic bénévole n’a pas respecté les obligations en matière de compte bancaire séparé.
S’agissant du syndicat des copropriétaires, elle invoque sa responsabilité pour les travaux irréguliers accomplis et l’absence de mesures conservatoires et d’administration des parties communes. Elle considère que le syndicat et le syndic sont responsables in solidum des manquements invoqués.

Par dernières conclusions du 14 février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3], a sollicité du tribunal de :
Débouter Madame [I] de ses demandes tendant à voir annuler en sa globalité l’assemblée générale du 27 juillet 2021 ;
Statuer ce que de droit quant aux demandes tendant à l’annulation des résolutions relatives à l’approbation des comptes 2019 et des budgets prévisionnels 2020 et 2021 et tendant à l’annulation de la résolution relative au compte bancaire séparé ;
Débouter Madame [I] de sa demande indemnitaire, en ce qu’elle est dirigée contre le syndicat des copropriétaires ;
Subsidiairement,
Condamner la SCI JADE à garantir le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 3] de toute condamnation susceptible d’être prononcée à son encontre au profit de Madame [I] ;
Statuer ce que de droit quant aux autres demandes ;
Condamner tout contestant à verser au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 3] représenté par la SELARL d’Administrateurs judiciaires AJASSOCIÉS une somme de 1.500,00 € au titre des frais irrépétibles.
Statuer ce que de droit quant aux dépens.
Sur l’irrégularité de la convocation à l’assemblée générale par la SCI JADE, du fait de l’expiration de son mandat, le syndicat des copropriétaires fait valoir l’application de l’article 41-11 de la loi du 10 juillet 1965, pour justifier de la régularité d’une convocation par un copropriétaire.
Sur l’élection du président de séance, il fait valoir que les copropriétaires présents et votant à défaut d’être identifiés, étaient identifiables, dès lors que la copropriété est composée de trois copropriétaires et que la demanderesse était absente.

Sur l’absence de désignation des deux scrutateurs prévus dans le règlement, le syndicat souligne que cette stipulation ne pouvait être respecté eu égard au nombre de copropriétaires présents et à l’absence de candidatures.
Sur l’absence de mention des majorités, le syndicat indique que ces majorités sont déterminables et que cela n’est pas une cause de nullité de l’assemblée, de même que l’absence de projet de résolutions en annexe de la convocation.
Le syndicat s’en rapporte à la justice sur les résolutions relatives à l’approbation des comptes et des budget prévisionnels, ainsi qu’à celle relative au compte bancaire séparé.
Quant à sa responsabilité, le syndicat des copropriétaires fait valoir que la demanderesse n’établit pas l’existence de faute qui lui soit imputable.

Par dernières conclusions du 05 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SCI JADE, a sollicité du tribunal au visa des articles 15, 41-11, 41-12 et 42 de la loi du 10 juillet 1965 et de l’article 11 I, 7° du décret du 17 mars 1967 et notamment son article 11 I, 7°, de :
Débouter Madame [I] de l’intégralité de ses demandes ;
Condamner Madame [I] à procéder au règlement de ses charges de copropriété à hauteur de sa quote-part et notamment celles correspondant aux honoraires des différents administrateurs provisoires dont elle a elle-même sollicité la désignation auprès du Président du Tribunal judiciaire de NANTES ;
Condamner Madame [I] à verser à la SCI JADE la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Madame [I] aux entiers dépens de l’instance.
S’agissant de la validité de l’assemblée générale du 27 juillet 2021, la SCI JADE se réfère aux articles 41-11 et 41-12 de la loi du 10 juillet 1965, consacrés aux petites copropriétés composées de cinq lots au plus, pour indiquer qu’une assemblée générale peut être valablement désignée par l’un des copropriétaires, afin de désigner un nouveau syndic et prendre des mesures nécessaires à la conservation de l’immeuble et que la SCI JADE était dès lors parfaitement légitime à convoquer l’assemblée du 27 juillet 2021.
S’agissant de l’élection du président de séance, la SCI JADE fait valoir que les deux copropriétaires présents et votant étant identifiables à partir de leurs tantièmes, la copropriétaire défaillante l’était également par déduction, et l’absence d’indication de son identité au moment de l’élection du président de séance ne peut être une cause de nullité de l’assemblée générale.
Concernant la désignation de deux scrutateurs, la SCI JADE soutient que les deux copropriétaires présents étant déjà président de séance, pour l’un, et secrétaire, pour l’autre, cela rendait impossible la désignation de scrutateurs et ne permet pas de justifier l’annulation de l’assemblée générale pour ce seul motif.
Sur l’absence de mention des majorités de vote pour l’intégralité des résolutions votées, la SCI JADE souligne que les indications portées sur le procès-verbal de l’assemblée permettent de savoir qui a voté pour les parties communes spéciales qui ne concernaient que l’un des copropriétaires présents et précise que l’absence de mentions de majorité de vote au procès-verbal n’est pas une cause de nullité.
Concernant l’absence de projet de résolutions annexé à la convocation à l’assemblée générale, la SCI JADE indique qu’il ne s’agit pas d’une cause de nullité de l’assemblée générale, mais de la résolution et que l’assemblée peut toujours amender les résolutions inscrites à l’ordre du jour au moment du vote.
Elle souligne que les résolutions contestées n’ont pas été dénaturées par rapport aux projets adressés avec la convocation.
A titre subsidiaire, sur la validité de la résolution relative à l’approbation des comptes de l’année 2019 et de la résolution relative à l’approbation des budgets prévisionnels 2020 et 2021, la SCI JADE fait valoir que les documents financiers annexés à la convocation de l’assemblée permettaient de connaître l’état financier du syndicat des copropriétaires et son compte de gestion général et de comparer les comptes de l’exercice précédent avec celui à voter.
Sur la résolution n°8 relative au compte séparé, la SCI JADE soutient avoir valablement convoqué l’assemblée générale en sa qualité de copropriétaire sur le fondement de l’article 41-11 alinéa 2 précité.
Concernant la responsabilité du syndic, la SCI JADE précise qu’elle ne saurait être engagée du fait de l’absence de reproduction de l’article 42 alinéa 2 dans le procès-verbal, dès lors que cette absence rend la notification dudit procès-verbal irrégulière et ne fait pas courir le délai de deux mois.
Quant à la défaillance de la SCI JADE dans son mandat, cette dernière souligne que la demanderesse fait état de l’assemblée générale du 04 janvier 2020 qui n’est pas l’objet de la présente procédure et que les désordres que la demanderesse impute aux travaux autorisés pour le restaurant ne sont pas démontrés.
La SCI JADE indique que la demanderesse a elle-même procédé à la pose d’un velux avant d’obtenir une autorisation de l’assemblée générale.
Sur l’absence de compte séparé, la concluante rappelle qu’elle n’a d’effet que sur le mandat du syndic.

L’ordonnance de clôture de l’instruction a eu lieu le 11 janvier 2024 et l’audience des plaidoiries est intervenue le 12 mars 2024.

L’affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- Sur la nullité de l’assemblée générale du 27 juillet 2021
Madame [H] [I] fait valoir la nullité de l’assemblée générale qui s’est tenue le 27 juillet 2021, en son absence. Elle invoque plusieurs arguments à l’appui de cette demande : la convocation par la SCI JADE, en qualité de syndic bénévole, à l’expiration du mandat, la nullité de l’élection du président de séance, l’absence de désignation de scrutateurs, l’absence de mention des majorités de vote à chaque résolution, l’absence de projet de résolutions annexé à la convocation.
La convocation de l’assemblée générale par la SCI JADE
L’article 17 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis prévoit que « Les décisions du syndicat sont prises en assemblée générale des copropriétaires ; leur exécution est confiée à un syndic placé éventuellement sous le contrôle d'un conseil syndical.
Dans les cas où, avant la réunion de la première assemblée générale suivant la mise en copropriété, un syndic provisoire a été désigné par le règlement de copropriété ou par tout autre accord des parties, ce syndic ne peut être maintenu que par décision de l'assemblée générale, après mise en concurrence préalable de plusieurs contrats de syndics effectuée par le conseil syndical, s'il en existe un, ou les copropriétaires.
A défaut de nomination du syndic par l'assemblée générale des copropriétaires convoquée à cet effet, le syndic est désigné par le président du tribunal judiciaire saisi à la requête d'un ou plusieurs copropriétaires, du maire de la commune ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'habitat du lieu de situation de l'immeuble.
Dans tous les autres cas où le syndicat est dépourvu de syndic, l'assemblée générale des copropriétaires peut être convoquée par tout copropriétaire, aux fins de nommer un syndic. A défaut d'une telle convocation, le président du tribunal judiciaire, statuant par ordonnance sur requête à la demande de tout intéressé, désigne un administrateur provisoire de la copropriété qui est notamment chargé de convoquer l'assemblée des copropriétaires en vue de la désignation d'un syndic. »
Selon l’article 17-1 de la loi, « Dans le cas où l'administration de la copropriété est confiée à un syndicat coopératif, la constitution d'un conseil syndical est obligatoire et le syndic est élu par les membres de ce conseil et choisi parmi ceux-ci. Il exerce de plein droit les fonctions de président du conseil syndical. En outre, le conseil syndical peut élire, dans les mêmes conditions, un vice-président qui supplée le syndic en cas d'empêchement de celui-ci.
Le président et le vice-président sont l'un et l'autre révocables dans les mêmes conditions. L'assemblée générale désigne une ou plusieurs personnes physiques ou morales qui peuvent être des copropriétaires ou des personnes extérieures qualifiées pour assurer le contrôle des comptes du syndicat.
L'adoption ou l'abandon de la forme coopérative du syndicat est décidé à la majorité de l'article 25 et le cas échéant de l'article 25-1. »
L’ordonnance du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis, a pris en compte la situation particulière des petites copropriétés et introduit dans la loi du 10 juillet 1965 un chapitre IV ter intitulé « Dispositions particulières à certaines copropriétés » comportant deux sections dont la première est relative aux « Dispositions particulières aux petites copropriétés ». Les articles 41-8 à 41-12 de la loi du 10 juillet 1965 concernent ainsi les petites copropriétés et fixent des règles de fonctionnement dérogatoires.
L’article 41-8 définit les petites copropriétés en indiquant que, « Les dispositions de la présente section s'appliquent lorsque le syndicat des copropriétaires comporte au plus cinq lots à usage de logements, de bureaux ou de commerces, ou lorsque le budget prévisionnel moyen du syndicat des copropriétaires sur une période de trois exercices consécutifs est inférieur à 15 000 €. »
L’article 41-11 de la loi prévoit que « Par dérogation aux dispositions de l'article 17-1, dans le cas où le syndicat a adopté la forme coopérative et n'a pas institué de conseil syndical, l'assemblée générale, à la majorité des voix de tous les copropriétaires, désigne le syndic parmi ses membres. L'assemblée générale peut également désigner un copropriétaire pour suppléer le syndic en cas d'empêchement de celui-ci. Le syndic et son suppléant sont l'un et l'autre révocables dans les mêmes conditions. L'assemblée générale désigne une ou plusieurs personnes physiques ou morales, qui peuvent être des copropriétaires ou des personnes extérieures qualifiées, pour assurer le contrôle des comptes du syndicat.
En cas d'empêchement du syndic ou de défaillance de celui-ci mettant en péril la conservation de l'immeuble, la santé ou la sécurité des occupants, chaque copropriétaire peut prendre l'initiative de convoquer une assemblée générale extraordinaire afin qu'elle désigne un nouveau syndic ou qu'elle prenne les décisions nécessaires à la conservation de l'immeuble, de la santé ou de la sécurité de ses occupants. »

L’article 41-12 de la loi énonce que « Par dérogation aux dispositions de l'article 17, les décisions, à l'exclusion de celles relatives au vote du budget prévisionnel et à l'approbation des comptes, peuvent être prises à l'unanimité des voix des copropriétaires à l'occasion d'une consultation écrite, sans qu'il y ait lieu de convoquer une assemblée générale. Les copropriétaires peuvent également être consultés au cours d'une réunion.
La consultation est organisée par le syndic, à son initiative ou à la demande d'un copropriétaire.
Lorsqu'un copropriétaire a été consulté par écrit, la décision est formalisée au terme du délai fixé par le syndic pour répondre à la consultation. »
A la lecture de ces dispositions, il apparait que l’article 41-11 renvoie à l’article 17-1 et fixe ainsi des conditions dérogatoires à ce texte, consacré aux copropriétés ayant opté pour la forme coopérative. Cette forme coopérative est prévue à l’article 14, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 et en cas d’option pour cette forme, l’article 17-1 impose la constitution d’un conseil syndical et l’élection du syndic parmi les membres de ce conseil syndical.
L’article 41-11 vient déroger à ces règles pour les petites copropriété. Il prévoit la désignation du syndic parmi les copropriétaires, par l’assemblée générale, dans l’hypothèse où le syndicat de forme coopérative n’a pas désigné de conseil syndical. Il reprend l’ancien article 17-1-1 qui assouplissait les règles des syndicats coopératifs pour les copropriétés de moins de dix lots et dotées d’un budget inférieur à 15.000 euros. L’ordonnance du 30 octobre 2019 a abrogé cet article 17-1-1 et a repris ses dispositions dérogatoires, dans l’article 41-11, pour les « petites copropriétés » définies à l’article 41-8. Ces dispositions dérogatoires concernent uniquement les syndicats ayant opté pour une forme coopérative.
Ainsi, l’article 41-11, qui reprend à l’identique le dernier alinéa de l’ancien article 17-1-1, qui vise les cas d’empêchement du syndic ou de défaillance de celui-ci, mettant en péril la conservation de l’immeuble, la santé ou la sécurité des occupants et permet à chaque copropriétaire, dans ce cas, de prendre l’initiative de convoquer une assemblée générale « extraordinaire » afin de désigner un nouveau syndic ou prendre les décisions nécessaires à la conservation de l’immeuble, de la santé ou de la sécurité de ses occupants, ne concerne que le syndicat coopératif.
C’est l’article 41-12 qui prévoit des règles dérogatoires à l’article 17, pour les copropriétés n’ayant pas opté pour la forme coopérative. Selon cette disposition, certaines décisions peuvent être prises, hors assemblée générale, par consultation écrite des copropriétaires au cours d’une réunion, dès lors que les copropriétaires sont unanimement d’accords. Cet article ne déroge pas aux règles de convocation aux assemblées.
En l’espèce, il n’est pas établi que le syndicat a pris une forme coopérative et aucune des dispositions dérogatoires prévues à l’article 41-11 de la loi ne peut être utilement invoquée pour justifier la convocation de l’assemblée générale par la SCI JADE, en sa seule qualité de copropriétaire.
Les copropriétaires ont été convoqués à l’assemblée générale du 27 juillet 2021, par une convocation adressée par la SCI JADE, par lettre recommandée avec accusé de réception, datée du 02 juillet 2021, en sa qualité de syndic bénévole.
Or, il apparaît à la lecture des documents produits que la SCI JADE a été désignée comme syndic bénévole lors de l’assemblée générale du 29 juin 2020, réunie à l’initiative de la SELARL AJ ASSOCIES, prise en la personne de Maître [D] [B], désigné en qualité d’administrateur provisoire par l’ordonnance du Président du tribunal judiciaire de Nantes, le 26 février 2020. Le mandat lui a été donné pour une année à compter de ladite assemblée générale. Il était donc expiré au 29 juin 2021 et la convocation adressée le 02 juillet 2021 a été faite pas un syndic bénévole, qui n’avait plus de mandat.
L’inobservation des formalités légales qui affectent la convocation, la formation et la tenue de l’assemblée générale a pour conséquence d’entacher, en définitive, la réunion elle-même et donc tout ce qui a pu y être fait ou décidé. Toute irrégularité dans la convocation est de nature à entrainer la nullité de l’assemblée, même en l’absence de grief et il en est ainsi lorsque la convocation émane d’un syndic dont le mandat est expiré à la date de la convocation. Cette irrégularité a pour conséquence d’entraîner la nullité de l’assemblée générale du 27 juillet 2021, elle-même, et, par conséquent, de toutes les décisions qu’elle a pu prendre.
Il n’y a pas lieu d’apprécier les autres irrégularités soulevées par la demanderesse.
II- Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires et du syndic
Madame [H] [I] sollicite la condamnation in solidum du syndicat des copropriétaires, du syndic bénévole, la SCI JADE et de Monsieur [F] [C], en qualité de syndic de fait, à la somme de 5000 euros en réparation des préjudices subis du fait de leurs manquements et négligences.
Il convient de relever, en premier lieu, que Monsieur [F] [C] n’ayant pas été assigné, aucune demande ne saurait être reçue à son endroit.
Concernant, la responsabilité de la SCI JADE, que l’on suppose envisagée, en sa qualité de syndic bénévole, Madame [H] [I] vise l’article 32 du règlement de copropriété sur la prise de décisions en assemblée générale et l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 consacré aux obligations du syndic.
La responsabilité du syndic bénévole suppose de démontrer une faute en lien avec son mandat.
Madame [H] [I] fait valoir plusieurs manquements imputés, tantôt à la SCI JADE, tantôt à Monsieur [F] [C].
Elle évoque l’absence de mention de l’article 42 de la loi dans la notification du procès-verbal de l’assemblée du 27 juillet 2021 et les défaillances de la SCI JADE dans l’exécution du mandat confié le 29 juin 2020.
Le fait d’avoir convoqué l’assemblée générale à l’expiration du mandat qui lui avait été confié par l’assemblée générale du 29 juin 2020, constitue effectivement une faute du syndic bénévole dans l’accomplissement de son mandat, dès lors que l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 lui confie l’administration de l’immeuble. Toutefois, la demanderesse ne formule pas clairement de demande d’indemnisation en lien avec cette faute.
Madame [H] [I] fait également valoir la responsabilité de la SCI JADE pour les travaux réalisés dans le restaurant de Monsieur [E] [A], dont la SCI JADE est propriétaire, sans préciser en quoi la SCI JADE, en sa qualité de syndic bénévole, a commis une faute. Les écritures de la demanderesse ne permettent pas au tribunal de savoir si la responsabilité de la SCI JADE est invoquée, à ce sujet, en sa qualité de copropriétaire ou en sa qualité de syndic bénévole. Elle ne justifie pas, en outre, de ses allégations quant aux travaux réalisés sans autorisation et aux désordres liés à ces travaux.
Elle soutient encore que la SCI JADE, en sa qualité de syndic bénévole ou de syndic de fait, n’a pas convoqué d’assemblée générale pour approuver les travaux qu’elle entendait effectuer pour son propre lot et qui ont finalement été autorisés par une assemblée dont l’annulation est sollicitée. Elle ne justifie pas de la nature de la faute ainsi imputée à la SCI JADE et d’un préjudice en lien avec cette faute.
Elle invoque, en dernier lieu, l’absence d’ouverture d’un compte séparé par le syndic. Selon l’article 18 II, il appartient, en effet, au syndic d’ouvrir un compte au nom du syndicat, dans les trois mois à compter de sa désignation et ce, qu’elle que soit la taille de la copropriété depuis l’ordonnance du 30 octobre 2019.
Ce défaut de compte séparé, qui n’est pas contesté, entraîne la nullité de plein droit du mandat du syndic, mais la demanderesse ne précise pas à quelles fins, elle entend se prévaloir de ce manquement.
Il apparait à la lecture des pièces produites, que la copropriété a eu pour syndic bénévole, Monsieur [F] [C], entre 2011 et 2015. L’assemblée du 7 octobre 2015 avait renouvelé le mandat de ce dernier pour un an, mais aucune assemblée n’a été convoquée après cette date. Il a fallu attendre le 12 décembre 2019, pour que la SCI JADE, convoque une assemblée, en qualité de « syndic provisoire ». Cette assemblée qui s’est réunie le 04 janvier 2020, fait l’objet d’une action devant la présente juridiction, à l’initiative de Madame [H] [I], qui a parallèlement, saisi sur requête, le Président du tribunal judiciaire, aux fins de désignation d’un administrateur ad hoc. L’ordonnance du 26 février 2020 y a fait droit et l’administrateur a convoqué l’assemblée générale du 29 juin 2020, qui a désigné la SCI JADE comme syndic bénévole, pendant un an.
Ainsi, les manquements que la demanderesse entend imputer à la SCI JADE ne peuvent être en lien avec son mandat de syndic bénévole qu’à compter du 29 juin 2020. Les faits commis antérieurement, relèvent d’une responsabilité délictuelle de droit commun, fondée sur l’article 1240 du code civil.
Il est évident, à la lecture des pièces produites, que la gestion de cette copropriété s’est largement démarquée des règles imposées par la loi du 10 juillet 1965 et que les relations entre les copropriétaires justifient une administration ad hoc. Toutefois, Madame [H] [I] ne formule pas clairement de demande d’indemnisation en lien avec les fautes qu’elle entend imputer à la SCI JADE en sa qualité de syndic bénévole, voire en dehors de ce mandat, et il n’appartient pas au tribunal d’alléguer à la place des parties, les moyens et les faits nécessaires au succès de leurs prétentions.
S’agissant de la responsabilité du syndicat des copropriétaires, Madame [H] [I] se fonde sur l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, relatif aux droits des copropriétaires sur les parties privatives et les parties communes, ainsi que sur l’article 1240 du code civil, sur la responsabilité civile délictuelle. Elle soutient que le syndicat est responsable d’avoir laissé les copropriétaires entreprendre des travaux irréguliers et de n’avoir pas pris de mesures conservatoires suite à de tels travaux. Toutefois, là encore, elle ne justifie pas avoir subi des dommages en lien avec ces manquements.
Elle sollicite une condamnation in solidum du syndicat des copropriétaires et de la SCI JADE, en sa qualité de syndic, à lui verser la somme de 5000 euros en réparation de préjudices subis, qui suppose de démontrer que, tant la SCI JADE, que le syndicat des copropriétaires, ont, par leur fautes respectives, généré des préjudices subis par Madame [H] [I].
Cette dernière ne précise pas clairement de quelle faute partagée, il s’agit, et ne justifie pas du préjudice dont elle demande l’indemnisation.
Dès lors, la demande de condamnation in solidum du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3] et de la SCI JADE à verser la somme de 5000 euros en réparation de préjudices subis par Madame [H] [I] est rejetée.
III- Sur la demande de condamnation de Madame [I] à régler les charges de copropriété
La SCI JADE a formulé dans son dispositif, une demande de condamnation de Madame [H] [I] au règlement de ses charges de copropriété, notamment celles correspondant aux honoraires des différents administrateurs provisoires, mais n’a développé aucun argument à ce titre dans la discussion.

Ainsi que le prévoit l’article 768 du code de procédure civile, « le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion ».

En l’absence de moyens développés au soutien de cette demande, celle-ci doit être rejetée.

Sur les autres demandes
En application de l'article 696 du code procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3] et la SCI JADE, parties perdantes au procès, seront condamnés, aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Marie DESSEIN.
Madame [H] [I] sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure par application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.
L’équité commande de débouter les parties de leur demande de paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'exécution provisoire est de droit en vertu de l'article 514 du code de procédure civile dans sa version applicable au litige.
PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, après débats en audience publique

ANNULE l’assemblée générale du 27 juillet 2021 de l’immeuble sis [Adresse 3].
REJETTE la demande de condamnation in solidum du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3] et de la SCI JADE, à verser la somme de 5000 euros, en réparation de préjudices subis par Madame [H] [I] ;
REJETTE la demande de la SCI JADE de condamner Madame [H] [I] à procéder aux règlements de ses charges de copropriété et notamment, celles correspondant aux honoraires des différents administrateurs provisoires ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3] et la SCI JADE, aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Marie DESSEIN.
REJETTE les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l'exécution provisoire du jugement est de droit.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Sandrine GASNIER Stéphanie LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/04454
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;21.04454 ?
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